mercredi 13 août 2008

BD - Le hold-up du désespoir

Initiative originale des éditions Bamboo pour le troisième et dernier volet de la série « Welcome to Hope ». En plus de l'album, vous aurez le roman écrit en parallèle par le scénariste Damien Marie. Roman noir, avec quelques scène non reprises dans la version graphique. Le lecteur revient donc une nouvelle fois dans cette petite ville américaine aux mœurs particulières et peu recommandables. Quelques loosers vont tenter de remporter la mise malgré les atouts des notables bien installés. 

Une histoire allant crescendo et qui atteindra son summum lors d'un hold-up de la petite banque de la localité. Cody, bon petit gars, a en marre d'être le dindon de la farce. Et il besoin de beaucoup de dollars pour prendre la fuite avec sa petite amie, Norma. Il braque donc le banquier et tue le gardien. Il prend en otage les clients alors que le shérif assiège le bâtiment. 

Cela semble mort pour Cody quand il reçoit l'aide inespérée de Scott, un joueur de poker qui pour une fois voit la chance tourner. Une intrigue ciselée avec précision permet à ce troisième tome de clore avec brio une série dessinée par Vanders.

« Welcome to Hope » (tome 3), Bamboo, 12,90 € 

mardi 12 août 2008

BD - Beowulf : aux sources de l'heroic fantasy


Livre mythique et très connu en Grande-Bretagne, la saga de Beowulf est beaucoup plus confidentielle en France. Ce long poème en prose, écrit vers l'an Mil, raconte la lutte entre un guerrier, Beowulf et un démon, Grendel, puis une ogresse (la mère de Grendel) et finalement un dragon. La collection Ex-Libris, sous la conduite éditoriale de Morvan, a décidé d'en présenter une adaptation. Michel Dufranne s'est chargé du scénario alors que l'illustration en a été confiée à Javier Navarro Barreno. 

La première partie présente le combat entre Beowulf et Grendel. Le monstre vient chaque nuit tuer des soldats de Hrothgar, seigneur des Danois. Un carnage, une fatalité. C'est finalement un des meilleurs guerriers du royaume, Beowulf, qui accepte d'affronter Grendel. L'album est découpé en trois séquences bien distinctes. Une première montre les massacres, la seconde, un peu longue et statique, la rencontre entre le seigneur et Beowulf. La dernière, la plus virtuose, décrit sur une quinzaine de pages l'affrontement final. 

Le dessinateur a su retranscrire cette ambiance de lutte bestiale sans merci. Une véritable prouesse graphique à déguster dans le détail.

« Beowulf » (tome1), Delcourt, 12,90 € 

lundi 11 août 2008

BD - La bonne "SF de papa" à redécouvrir avec Luc Orient en intégrale


Au début des années 70, Michel Greg, en devenant rédacteur en chef du journal Tintin, a voulu offrir à ses lecteurs un maximum de diversité dans les histoires à suivre. Il a donc lancé de nombreuses séries, devenant un des scénaristes les plus prolifiques. Western (Comanche), aventure (Bernard Prince), espionnage (Bruno Brazil), il manquant une BD de science-fiction. Il a donc écrit Luc Orient pour Eddy Paape. 18 titres après, étalés sur une vingtaines d'années, la série s'est épuisée. 

Les éditions du Lombard ont décidé de la ressusciter sous forme d'intégrales. Dans ce troisième recueil, le lecteur pourra découvrir des histoires mémorables. « Le sixième continent » met aux prises le héros à une société calquée sur le fonctionnement d'une fourmilière. Cauchemar assuré. Mais vous pourrez surtout franchir « La porte de cristal », première partie de la saga finale. Luc Orient est entraîné dans une course contre la montre dans le temps pour tenter de sauver une civilisation. 

Du space opéra assez classique mais très efficace, novateur pour les jeunes lecteurs de l'époque. Eddy Paape dessine consciencieusement ces récits mouvementés, excellant dans la création des monstres intergalactiques.

« Luc Orient » (intégrale 3), Le Lombard, 17 € 

dimanche 10 août 2008

SF - Arlequin protecteur


Entre fantastique et thriller, cette série des Mondes parallèles de John Twelve Hawks est aussi la dénonciation de notre société informatisée.

Même dans les coins les plus reculés de la France profonde, il existe des caméras de surveillance ou des webcams qui pourraient, en direct, filmer, espionner, ce qui se passe. Dans les grandes villes, de nos jours, il est quasiment impossible de ne pas être filmé à plusieurs reprises durant une journée. John Twelve Hawks, dans ce monde qu'il décrit dans ses romans et qui ressemble tellement au nôtre, part du principe que ces caméras espions sont toutes reliées entre elles au service d'une société secrète, la Tabula, qui a la prétention de régenter le monde dans l'ombre. La Tabula est composée de Frères. Elle n'a qu'un ennemi : la confrérie des Voyageurs. Des humains aux pouvoirs surnaturels, pouvant passer d'un monde à un autre. Voyageurs protégés par les Arlequins, guerriers entièrement dévoués à la cause des premiers.
Dans le premier tome (qui est offert avec le second volume, une édition limitée au premier tirage), il ne restait plus que deux Voyageurs, des frères, Gabriel et Michael Corrigan. Ils sont sous la protection de Maya, une jeune Arlequin. Si Gabriel restera fidèle à sa cause, Michael choisira le camp adverse et rejoindra la puissante Tabula.
« L'Arlequin » débute par une expédition des Frères dans une communauté isolée au coeur de l'Arizona. Tous, ayant choisi de vivre avec un minimum de technologie, seront exterminés. Un massacre transformé en suicide collectif. Gabriel n'est pas dupe. D'autant qu'il y a eu une rescapée, une petite fille. Réfugié à New York, le dernier Voyageur ne restera pas longtemps dans sa cachette. Les armes de la Tabula sont multiples et très efficaces. Il devra fuir et encore fuir, avec Maya qui le protège et lutte pour ne pas tomber amoureuse de ce bau jeune homme sensible. Une course haletante qui emmène le lecteur de Londres à Berlin en passant par Rome et l'Afrique.
Les thématiques abordées par John Twelve Hawks font parfois penser aux romans de Stephen King. Et qui sait ? En effet, personne ne sait qui se cache derrière ce pseudonyme. Pas de photos ni de biographie, l'éditeur ne sait même pas s'il s'agit d'un homme ou d'une femme. Un culte du secret qui confine à la paranoïa. Mais en découvrant la société décrite par l'auteur, on se doute que la discrétion est une des dernières armes de l'homme pour rester libre.
« L'arlequin » (Les mondes parallèles, tome 2), John Twelve Hawks, Lattès, 22 €

BD - Yoko Tsuno, la Japonaise sous le ciel de Chine


Rien de tel, pour redécouvrir une série, que les intégrales qui semblent être de plus en plus à la mode. Une occasion également pour les maisons d'édition historique de mettre en valeur leur fond . Chez Dupuis, une collection a même été créée. Il est vrai que les série mythiques ne manquent pas entre les Spirou, Natacha, Gil Jourdan et autres Tif et Tondu. Pour Yoko Tsuno, la démarche est un peu différente. 

Les albums ne sont pas publiés par ordre chronologique mais par thème et surtout la série n'est pas achevée. Le 5e recueil, intitulé "Sous le ciel de Chine", reprend trois aventures de l'aventurière japonaise se déroulant en Chine. "Le dragon de Hong Kong" est né de la demande d'une maison d'édition chinoise. Leloup a fait plusieurs voyages et son histoire de lézards géants terrorisant la baie, a d'abord été publiée dans une revue asiatique. Ce n'est qu'après qu'elle a intégré la collection classique. 

Une première sans lendemain mais qui a quand même donné l'envie au dessinateur de replonger son héroïne dans l'ambiance de la Chine médiévale. "La jonque céleste" et "La pagode des brumes" sont les deux autres albums repris dans ce gros recueil agrémenté d'un dossier inédit et d'un port-folio présentant des études graphiques de Leloup, publiées à leur format original.

"Yoko Tsuno, intégrale" (tome 5), Dupuis, 17 € 

samedi 9 août 2008

BD - Trio bondissant


Man est le dessinateur espagnol qui monte. Ses récits, ancrés dans la réalité de cette Espagne moderne et innovatrice des années 2000, font mouche. Après Mia, album sur l'anorexie, il continue son exploration du mal-être adolescent avec les aventures d'un trio de "parkoureurs". 

Edu, Raul et Luna, sautent, courent, franchissent les obstacles de leur décor urbain, au ras du sol ou du haut des toits des blocs et maisons de cette grande ville moderne. Edu, métis, passionné de dessin, très intelligent, est le plus calme et serein. Raul, cadet protégé par un frère physique et exigeant, est un boulimique de l'action. Il tombe amoureux tous les soirs, aime la bagarre et les défis. Luna, jolie blonde aux tatouages extrêmes, change de petit ami comme de tenue. Généralement elle a le coup de foudre pour des crétins finis qui font toujours bien rire ses deux camarades. 

Cette première partie, en plus de planter le décor et de présenter les personnages, lance l'intrigue qui semble osciller entre le polar et l'histoire à l'eau de rose. 64 pages de pure adrénaline, aux cadrages audacieux, avec une influence très nette du découpage des mangas, tout en gardant la précision du trait et des décors fouillés de la BD franco-belge. Une saga prévue en cinq tomes qui devrait plaire aux grands ados.

"En sautant dans le vide" (tome 1), Dargaud, 12,50 € 

vendredi 8 août 2008

BD - La solution Lucrèce


Seb Christie, photographe de presse, en croyant enquêter sur une multinationale aux moeurs écologiques douteuses, a mis au jour une vaste machination aux implications beaucoup plus graves. Un groupe d'hommes et de femmes, évolution ultime de l'Homo-sapiens, a élaboré un complot pour éliminer l'Homme de la planète Terre. Seb, en se lançant aux trousses d'une de ces créatures, est lui même contaminé et sans le vouloir, se retrouve assimilé aux comploteurs. 

Ce bref résumé permet au lecteur de mieux comprendre cette série assez scientifique et technique écrite par Desberg et dessinée par Vallès, Lozérien d'origine. En Suisse, à Venise, Paris, dans l'Atlantique Sud ou dans un cimetière allemand, l'action ne s'arrête jamais. Il est vrai que ce quatrième tome marque un tournant. Les comploteurs accélèrent leur projet et la menace d'une catastrophe écologique est imminente. 

Il faudra l'alliance de tous les services secrets des grandes puissances pour contrer la nouvelle race aux prétentions hégémoniques. Seb, dans ce carnage final, cherche sa place. Mais il semble être définitivement aux côtés d'India Allen, cette tueuse solitaire au charme fou.

"Rafales" (tome 4), Le Lombard, 10,40 € 

jeudi 7 août 2008

SF - Glissement dans le temps


Deux humains deviennent les acteurs involontaires d'une guerre du futur, se gagnant grâce à des bonds dans le passé.


Foisonnant, très imagé, plein de bruit et de fureur, ce roman de Neal Asher entraîne le lecteur dans une folle poursuite à travers le passé. Un glissement dans les premiers temps de la Terre, pour mieux repartir et empêcher l'avènement d'un groupe d'humains supérieurement développé mais totalement dépourvu de pitié et de compassion.

Cela débute comme un récit de SF à la Blade Runner. Dans un futur assez proche, Polly, droguée et prostituée pour se payer ses doses, rentre dans son appartement après une dure journée de labeur. Elle tombe nez-à-nez avec Nandru, un ancien militaire du gouvernement centralisé. Il lui reproche d'avoir tué sa sœur, colocataire de Polly, morte d'une overdose. Il explique que sa vengeance sera terrible. Et effectivement, la vie de Polly va basculer. Il implante dans sa nuque une puce d'intelligence artificielle qu'il a dérobé à l'armée. Il la rendra, intacte au gouvernement, si on lui verse une rançon. Mais rien ne se passe comme prévu. Le jour de l'échange, un monstre sortant de nulle part apparaît, une écaille tombe sur le bras de Polly et s'y greffe immédiatement. De plus un soldat du gouvernement, Tack, tue Nandru et prend en chasse Polly.

C'est le moment que choisit Neal Asher pour faire basculer son roman de la SF classique au paradoxe temporel. L'écaille est en fait un parasite qui n'a qu'un but, reculer dans le temps. Avec son porteur. Et tout ce qui se trouve à proximité. Ainsi, alors que Tack est sur le point de tuer Polly, la jeune femme « glisse » dans le passé, entraînant l'exécuteur. Des petits bonds de quelques dizaines d'années. Elle parvient ainsi à échapper à Tack. Mais en accélérant les bonds en arrière, elle comprend rapidement que le phénomène est inéluctable et irréversible. Les deux humains se séparent. Polly se retrouve au large de l'Angleterre en pleine seconde guerre mondiale, laissant Tack désemparé quelques années plus tard. Le soldat, humanoïde cloné, programmé pour tuer et ne pas se poser de questions, est totalement désemparé. Il décide de faire la seule chose qu'il maîtrise : tuer pour survivre.


Voyageur et sauveur

Mais au moment où il va exécuter une famille tranquille, un Voyageur apparaît : « Une silhouette grande et maigre, vêtue d'un long manteau , d'un pantalon ample et de chaussures pointues, sortit de l'ombre sur sa droite. Sa peau était blanche comme l'os, et ses cheveux pâles rassemblés en queue-de-cheval. Son visage n'exprimait que colère et mépris. » Le Voyageur, qui donne son nom au roman, entre enfin en scène. Il mène une guerre contre une congrégation d'êtres supérieurs tentant d'avilir l'humanité. Il va repartir dans le passé, avec Tack (qu'il va au passage « déprogrammer », permettant à l'humain de retrouver une conscience et un libre arbitre).

Ils vont devoir affronter dinosaures et autres grosses bêtes affamées avant de rejoindre une base permettant de remonter le temps. En parallèle, Polly tente de survivre. Accusée d'être une espionne allemande, elle parvient à sauver sa peau en glissant dans le passé. Elle se retrouve jongleuse devant le roi Henri VIII. Une expérience positive. Moins que sa rencontre avec Claudius, empereur roman en pleine conquête de l'île de la Bretagne...

Cette grande variété des scènes et des décors donne un attrait supplémentaire à ce roman qui est avant tout une réflexion sur l'éveil de la conscience d'êtres humains normaux placés dans une situation extraordinaire. Polly, perdant ses réflexes de droguée en manque, explique à Muse, son intelligence artificielle greffée : « Je ne veux pas simplement survivre. Je veux vivre. Je veux comprendre, ressentir. Je devrais considérer... ce voyage comme une chance. J'ai tant de chose à apprendre. » Même son de cloche du côté de Tack. Tueur antipathique au début, il se métamorphose en homme curieux et sensible, comme s'il rattrapait tout cet apprentissage de la vie, la vraie, dont il avait été privé. Une démarche humaine comme une immense bouffée d'espoir et d'air pur.

« Voyageurs », Neal Asher, Fleuve Noir, 22 €

BD - Musclons nos zygomatiques


Attention, jeux olympiques à l'horizon. Une veine qui devrait faire vendre quelques albums ayant judicieusement pris ce thème pour thématique centrale. "Les Zathlètes" n'est pas à proprement parlé un album olympique, mais l'athlétisme est un des sports roi des JO et la série écrite par Giga et dessinée par Bloz s'est offerte un consultant de choix en la personne de Stéphane Diagana. 

Il intervient directement dans des planches didactiques sur des thèmes bien précis comme l'alimentation, l'équipement ou les starting-blocks. Un peu comme un petit prof revenu des années 80 (un personnage dessiné par Bédu dans l'hebdo Tintin), il amène des informations sérieuses contrebalancées par des images comiques. Mais les Zathlètes c'est aussi une BD classique avec ses personnages récurrents aux talents comiques prononcés comme Bi Louis, le lanceur, Jumper, le franchisseur de haies, Alex, spécialiste du sprint et de la drague, Fanny, la ravissante sauteuse en longueur et Touchatout, le polyvalent, une véritable catastrophe malgré une bonne volonté évidente. 

Bref, de quoi fournir une belle quantité de gags à un Bloz (Les Fonctionnaires) de plus en plus à l'aise dans cet exercice.

"Les Zathlètes" (tome 1), Bamboo, 9,45 € 

mercredi 6 août 2008

BD - Dieu aztèque


Entre histoire et fantastique, avec un soupçon de western, cette nouvelle série écrite par Moënard et dessinée par Otéro entraîne le lecteur au Mexique en 1917. Alors que la guerre fait rage dans les tranchées européennes, les Allemands tentent de propager la guerre au-delà de l'Atlantique. Ils envoient une délégation secrète à la rencontre du président mexicain afin qu'il entre en guerre contre les Etats-Unis. Un émissaire qui n'arrivera jamais à Mexico. Débarqué d'un sous-marin, il est capturé par des révolutionnaires. Ce derniers tentent de le vendre aux Américains contre des armes et des dollars. Mais intervient la prêtresse Marina. Cette fière descendante du peuple aztèque reconnaît dans Hugo, un des officiers allemands, "Quetzalcoätl, notre Dieu, le sixième soleil !". 

Après une bataille rangée faisant de nombreuses victimes, le capitaine Hugo von Kreuz parvient à s'échapper et après avoir failli mourir dans le désert, est recueilli et sauvé par l'armée mexicaine. 

Un album assez violent, plein de bruit et de fureur, avec des personnages féminins imposants. Le dessin d'Otéro fait parfois penser au style dépouillé du regretté René Sterne.

"Le sixième soleil" (tome 1), Glénat, 9,40 €