vendredi 9 novembre 2007

BD - Andréas lave plus blanc


Certains auteurs de BD sont en perpétuelle recherche. Andréas, dans cet exercice périlleux n'est pas le dernier. Changement de format, cadrages invraisemblables, mise en page éclatée : il a dès ses débuts dans les pages du très conventionnel hebdo Tintin, tenté des expériences novatrices et dérangeantes. 

Dans sa série Capricorne, il vient de franchir un cran supplémentaire avec un 12e titre entièrement muet et se passant dans la neige. Ce qui explique cette couverture totalement immaculée. J'imagine la tête des membres des équipes marketing du Lombard quand ils ont découvert le concept... Une couverture bizarre pour une histoire qui ne l'est pas moins. 

Capricorne erre dans ces étendues froides et blanches. Rencontre une sorte de tribus vivant dans des tentes multicolores. Participe à un combat, découvre des explosifs, sauve la tribu... Sans texte, cette BD oblige le lecteur à plonger dans le dessin, découvrant des détails, astuces et prouesses graphiques qu'en temps normal il n'aurait pas remarqué. Personnellement j'adore. Mais Andréas a toujours été un de mes auteurs préférés. Certainement car il a été le premier à me démontrer que la BD pouvait être un art complet, tant au niveau du graphisme que de la narration.

"Capricorne", tome 12, d'Andréas, Le Lombard, 9,80 € 

jeudi 8 novembre 2007

BD - Toutes les peurs en noir et blanc sous le pinceau de Pedrosa


L'idée de ce long récit (272 pages en noir et blanc) est venue à Cyril Pedrosa lorsque des amis ont perdu leur petit garçon. "J'avoue avoir beaucoup songé à la réaction que chacun peut avoir, face la perte des siens" explique-t-il. Une réflexion qui a débouché sur ce roman graphique promis à un beau succès tant la trame se révèle universelle. Le petit Joachim vit heureux avec ses parents dans une petite maison à la campagne. Mais un soir, il remarque trois ombres sur la colline. Trois ombres effrayantes, menaçantes. Elles se rapprochent, semblent en vouloir à l'enfant. A tour de rôle, père et mère tenteront tout pour sauver leur gamin. Une course poursuite effrénée, mais que peut-on contre des ombres ?

Trois ombres, Delcourt, 17,50 euros 

mercredi 7 novembre 2007

BD - Les beautés trop longtemps cachées de Will


Will, qualifié avec justesse "d'auteur-patrimoine" (avec Franquin, Roba, Peyo...) de la maison Spirou, est à l'honneur depuis quelques mois. Réédition en intégrale des aventures de Tif & Tondu, reprise des aventures d'Isabelle en deux gros volumes au Lombard, il ne manquait que la partie "adulte" de ce dessinateur belge majeur disparu en 2000 pour boucler la boucle. Un oubli réparé avec ce gros volume de 200 pages, reprenant les trois récits écrits par Desberg. 

Ce n'est qu'à 62 ans, après des décennies de BD enfantine, que Will a osé dessiner des femmes nues dans "L'appel de l'Enfer". Le succès est immédiat. Douces, voluptueuses, lascives, les femmes de Will sont à nouveau à l'honneur. Un régal.

"Trilogie avec dames, Dupuis, 30 euros 

mardi 6 novembre 2007

BD - Hermann et ses sauvages

Il est sans pitié et sans illusion le héros de cette histoire complète de Hermann. Dario Ferrer est un amoureux de la nature, de l'Afrique. Dans une réserve, il protège les animaux des braconniers. Avec son fusil. 

Un homme taciturne, communiquant difficilement avec l'extérieur. Quand une jeune journaliste vient faire un reportage, il casse un peu la glace. Il lui montre les aspects cachés (et menacés) de ce continent. Mais en poursuivant des braconniers, ils sont le témoin d'un massacre perpétré par l'armée. Ils deviennent à leur tour gibier. Et il n'y aura pas de bon samaritain pour les protéger. 

Puissant, lumineux, sans concession, une BD de Hermann dans la lignée de Missié Vandisandi.

"Afrika", Le Lombard, 13,50 euros 

lundi 5 novembre 2007

Polar - Manhattan, du passé au présent

Rune, jeune fille rêveuse passionnée de cinéma et de contes, va devoir affronter la dure réalité de Manhattan : meurtre, vol, gangsters et policiers.

New York est une grande et belle ville. Totalement différente de nos horizons. En lisant ce roman policier de Jeffery Deaver, vous vous trouverez littéralement transporté dans cette cité de légende. Sur les pas de Rune, l'héroïne, vous passerez des quartiers huppés aux bas-fonds de cette mégapole ne cessant jamais de vivre à 100 à l'heure. Un dépaysement assuré avec en prime une excellente intrigue et des personnages marquants.

 Rune est une jeune fille qui va de petits boulots en jobs précaires. Actuellement elle est employée dans un vidéo club. Pétillante, n'ayant pas sa langue dans la poche, elle porte « à son bras gauche, vingt-sept bracelets d'argent, tous différents les uns des autres. » Elle a horreur de recevoir des ordres mais semble dans une période de stabilisation sociale. Elle redoute que son patron ne la vire. « Ses lèvres se gonflaient ou s'affinaient selon son humeur. Un véritable baromètre. Elle avait un visage rond et aimait bien son nez. Ses amis disaient parfois qu'elle ressemblait aux actrices de maintenant. Mais elle ne s'intéressait pas vraiment aux actrices de maintenant, et essayait encore moins de leur ressembler. »

Criblé de balles

Sa vie va basculer quand elle devra aller récupérer une cassette chez un client. M. Kelly est un vieux monsieur avec qui elle a sympathisé. En deux mois il a emprunté une vingtaine de fois le même film. Elle sonne à sa porte pour le récupérer. Choc, elle découvre le locataire mort, criblé de balles dans son fauteuil, face à une télévision qui elle aussi a été détruite. Rune, qui aime à se réfugier dans le monde merveilleux des contes de fée, est choquée. D'autant qu'elle a vu le tueur s'échapper et que ce dernier a tenté de la renverser avec sa voiture. 

Sur place elle sera interrogée par un inspecteur de police peu enthousiaste. « Un petit moustachu en costume. Des cheveux noirs coupés de frais mais dont les épis imposaient l'abus de gel. Selon Rune, ses yeux, très rapprochés, lui donnaient l'air ahuri ». Pourquoi avoir tué Robert Kelly. Rune ne peut s'empêcher de spéculer et découvre avec perspicacité que ce meurtre, visiblement un contrat réalisé par des professionnels, est lié avec le film qu'elle devait récupérer.

Richard, le romantique

L'intrigue est lentement distillée par l'auteur, Jeffery Deaver, qui n'en oublie pas de nous faire partager la vie de Rune. La jeune fille tombe sous le charme de Richard, un jeune romancier romantique. Elle le conduit chez elle. Elle squatte un immeuble en pleine rénovation. La première pièce est sinistre, dépourvue de meubles et de fenêtres. « Le trio s'arrêta net en atteignant l'étage suivant. Ils se tenaient dans une tourelle de verre, un vaste belvédère au sommet de l'immeuble, comme une couronne. Dix étages plus bas s'étalait la ville. »

Rune est sur le point de tomber amoureuse, mais dans ce New York où les apparences sont essentielles, elles sont souvent trompeuses. Richard est-il véritablement ce qu'il prétend ? Quel était le secret de Robert Kelly ? Rune va-t-elle mettre la main sur un butin oublié de tous ? Vous ne regretterez pas de vous plonger dans ce polar, noir par son intrigue, lumineux par son héroïne.

« Les trottoirs de Manhattan », Jeffery Deaver, Calmann-Lévy, 17 €

dimanche 4 novembre 2007

BD - Le Geronimo des temps modernes

Ce sont trois ados d'aujourd'hui. Avec l'envie de s'éclater durant les vacances, de braver les interdits, de faire la fête mais sans être insensible au monde qui les entoure. Ben, Malo et Virgile. Un jour, alors qu'ils baguenaudent dans la campagne, ils tombent sur un « Indien ». En fait une sorte de « baba-cool » sur le retour vivant dans une vieille baraque dans la vallée. 

C'est en voulant le rencontrer une seconde fois qu'ils tombent sur Geronimo. Ce jeune garçon, de leur âge, vit complètement isolé avec son oncle Francis, le fameux indien. Il se trouve totalement perdu quand Francis est renversé par une voiture et hospitalisé. Le trio se propose de lui venir en aide, lui faisant découvrir les joies de la civilisation, des sodas à la conduite d'un scooter en passant par les filles... 

Prévu en trois tomes, l'histoire de Geronimo est le retour de Davodeau et Joub, un duo ayant déjà fait ses preuves mais dans la BD pour enfants. Ils abordent un thème plus adulte, décrivant cette belle amitié, la naissance de Geronimo au monde moderne, laissant au lecteur le soin d'imaginer toutes les complications provoquées par l'adjonction du quatrième membre à ce trio soudé.

("Géronimo", Dupuis, 9,80 €) 

samedi 3 novembre 2007

BD - La belle Adèle (et ses monstres) est de retour

Difficile de se débarrasser d'Adèle Blanc-Sec. La jeune Parisienne au caractère de cochon fait un retour remarqué. Un 9e album intitulé « Le labyrinthe infernal », toujours imaginé et dessiné par un Jacques Tardi n'ayant rien perdu de son amour de Paris. Pour l'occasion, les éditions Casterman ont réédité les autres tires de la série avec de nouvelles couvertures. Avis aux collectionneurs... 

Adèle fait de terribles cauchemars. Sur les toits de la capitale, elle est poursuivie par un minotaure. Adèle qui, dans les premières pages, échappe dans la vraie vie à plusieurs tentatives d'assassinats. Elle retrouve sur les bords de la Seine Flageolet, indic paniqué car son policier préféré se serait transformé en vache carnivore... 

Mais Adèle n'est pas seule à faire son retour dans cet album. Quasiment tous les personnages imaginés par Tardi se donnent rendez-vous dans ces 46 pages. Brindavoine, Honoré Fiasco, la Chevillard, le dentiste Dantelet... Bref c'est dense et brumeux. 

Sans oublier le nouveau méchant, le fameux docteur Chou, qui avec un élixir de sa composition semble avoir contaminé la moitié de la ville. Une renaissance qui réjouira les inconditionnels.

("Adèle Blanc-Sec", Casterman, 10,50 €) 

vendredi 2 novembre 2007

BD - Pietrolino ou l'art malgré la guerre


Artiste de rue n'a jamais été un métier de tout repos. Surtout en temps de guerre, notamment durant la seconde guerre mondiale, quand la France était sous le joug de l'oppresseur allemand. 

Cette nouvelle BD écrite par Jodorowsky (qui n'a rien à voir avec ses précédentes productions), raconte la difficile vie de Pietrolino, clown et marionnettiste. Il s'invite dans les bars pour présenter son petit spectacle de mime en compagnie de son second, Simio, et de la belle Colombella. Le clou du spectacle est un petit combat, par mains interposées, recouvertes de gants aux couleurs adéquates, entre la France et l'occupant nazi. Simio doit faire le guet. Mais ce soir-là, c'est la belle Colombella qui a dénoncé Pietrolino. 

L'officier nazi se montre sans pitié pour l'artiste. Il lui broie les mains à coup de bottes. Le début du récit est violent, comme l'époque. Ensuite l'artiste est emprisonné, mais il survivra. Remontera sur scène. 

Pour dessiner cette histoire alternant moments de forte tension et ambiance plus poétique, Boiscommun a trouvé le parfait équilibre. Une oeuvre intense, dédiée au mime Marcel Marceau, disparu quelques semaines avant sa sortie en librairie.

("Pietrolino", Les Humanoïdes Associés, 12,90 €) 

jeudi 1 novembre 2007

BD - Tanâtos, personnification du Mal absolu

Dans le style feuilleton du début du siècle, avec méchant absolu et machination machiavélique, Didier Convard et Jean-Yves Delitte semblent avoir pris beaucoup de plaisir à réaliser le premier tome de Tanâtos. 

Ceux qui ont lu les gros fascicules de Fantomas et autres romans populaires se délecteront de cette BD reprenant toutes les ficelles de ces chef-d’œuvres méconnus de la littérature française. Convard, au scénario, a imaginé un personnage d'une extrême noirceur. Tanâtos peut prendre les apparences de n'importe qui grâce à des masques de sa conception. En 1913, il enlève un député socialiste, ami de Jaurès, et prend sa place. Il va contacter le camp nationaliste et faire croire que Jaurès prépare un attentat contre les intérêts français. 

Dans la foulée Tanâtos bombarde les usines d'un riche fabricant d'armes. Le lecteur devine que tout se met en place pour provoquer une guerre entre la France et l'Allemagne. Tanâtos explique à un de ses lieutenants qu'une « guerre cela peut rapporter des milliards, si je parviens à la faire durer un peu... » 

Delitte, au dessin, se délecte à reproduire les engins de l'époque et d'en inventer certains au passage.

("Tanâtos", Glénat, 12,50 €) 

mercredi 31 octobre 2007

BD - Rouleau convoité


Après Quram, Makyo poursuit dans la même veine avec l'adaptation d'un nouveau roman d'Eliette Abécassis. Avec « Le trésor du Temple », il donne sa première chance à Laurent Seigneuret, jeune dessinateur réaliste déjà très aguerri car il a longtemps travaillé dans l'ombre de Bruno Rocco. 

David, jeune Israélien brillant, ancien soldat, chercheur, universitaire, décide de tout quitter , même l'amour d'Helen, pour rejoindre la secte des Esséniens vivant depuis des siècles dans des grottes situées à Quram. Il est obligé de sortir de son isolement de scribe quand un archéologue est découvert assassiné sur un autel à proximité des grottes. Il a été sacrifié selon un rite typique des Esséniens. 

David va retrouver Helen et lancer son enquête, avec la protection discrète et efficace du Shin Beth. L'archéologue aurait découvert un rouleau de cuivre donnant la clé pour retrouver le trésor du Temple. Un rouleau de cuivre au centre de tous les enjeux. Certains n'hésitent pas à tuer pour tenter de le posséder. 

Une BD passionnante, tant par son côté historico-religieux que par l'intrigue policière.

("Le trésor du Temple", Glénat, 12,50 €)