jeudi 21 mars 2024

Cinéma - Retrouvailles “Hors-saison”

Film délicat, mélancolique et sensuel, « Hors-saison » de Stéphane Brizé explore les amours passées, les retrouvailles et les impasses sentimentales. 


Certains couples formés le temps d’un film sont plus crédibles que d’autres. Dans Hors-Saison, Stéphane Brizé associe Guillaume Canet et Alba Rohrwacher. Et dès le premier regard, c’est l’évidence. Mathieu (Guillaume Canet) et Alice (Alba Rohrwacher) sont faits l’un pour l’autre, s’aiment comme personne ne peut aimer. Et pourtant, ce ne sont que des retrouvailles. 15 ans après une première histoire d’amour sans doute trop vite écourtée.

Le début du film est un peu plombant. Mathieu est un acteur de cinéma très connu approchant de la cinquantaine. Il arrive seul (sa femme, présentatrice du 20 heures est restée à Paris), pour une semaine de thalasso et de remise en forme dans un établissement de luxe au bord de l’océan. Entre deux selfies, il broie du noir lors de soins qu’il effectue l’esprit ailleurs. Mathieu doute. Il venait de s’engager sur une pièce de théâtre, la première de sa carrière. De moins en moins sûr de son choix, apeuré par un possible échec, il a tout abandonné, dont ses collègues et le metteur en scène.

Deux comédiens au diapason

Stéphane Brizé, en filmant un Guillaume Canet sombre et grimaçant, comme vide de tout sentiment, raconte avec justesse ce doute, cette désillusion. Et comme le séjour se déroule hors-saison, le temps, venteux et pluvieux, ne fait que renforcer cette impression d’écrasement, presque de désespoir. Jusqu’au jour où il reçoit un message d’Alice. Il y a plus d e15 ans, il vivait avec cette pianiste. Le succès l’a éloigné d’elle. Elle vit dans cette ville balayée par les embruns, mariée, mère d’une grande adolescente et donnant des cours de piano. Accepterait-il de la revoir ? Comme si un autre film débutait, c’est un couple qui se retrouve devant la caméra sensible du réalisateur. Ils tâtonnent pour leurs retrouvailles. N’osent pas trop parler du passé, de leurs bons ou mauvais moments. Comme deux bons copains. Mais tout dans leur gestuelle, leurs regards, leurs hésitations, démontre que les sentiments sont toujours présents. 15 ans plus tard, ces retrouvailles sont intenses. Même s’ils se séparent, après un simple thé, en bons amis.

Mathieu retourne déprimer sous les couches de boue et d’algues, à lire des scénarios convenus ; Alice prépare l’anniversaire de sa fille et participe aux réunions municipales organisées par son mari à domicile. Et puis ils se revoient. Presque sans le vouloir. Car chacun de son côté n’en peut plus de ressasser le passé, de regretter la fin abrupte de leur première histoire, de croire qu’il y a peut-être une seconde chance.

Film d’une grande douceur, Hors-saison est porté par les deux comédiens. Guillaume Canet déploie son talent pour retranscrire toutes les émotions de cet homme brisé qui ne tient debout que grâce à sa carapace forgée au fil des ans. Alba Rohrwacher, comédienne italienne d’une lumineuse beauté, excelle pour nous faire comprendre que le passé, tout aussi douloureux qu’il soit, n’est que le résultat de nos choix du moment.

Film de Stéphane Brizé avec Guillaume Canet, Alba Rohrwacher

 

mercredi 20 mars 2024

Cinéma - Une jeune fille trop belle pour de simples paysans

Film d’animation polonais de DK Welchman et Hugh Welchman avec Kamila Urzedowska, Robert Gulaczyk, Miroslaw Baka. 

Pour leur premier long-métrage, DK et Hugh Welchman avaient frappé un grand coup. Premier film d’animation entièrement peint à la main, cette histoire autour de la vie de Van Gogh avait été nommé aux Oscars et remporté le prix Coup de cœur à Voix d’étoile 2017.

Ils récidivent avec « La jeune fille et les paysans », vaste fresque historique polonaise tirée du roman de Wladyslaw Reymont, prix Nobel de littérature en 1924. Ils ont conservé la même technique. Un premier tournage avec de véritables acteurs, puis ces images sont peintes selon les styles de différents artistes polonais (les meilleurs du mouvement Jeune Pologne) et déclinées des centaines et des milliers de fois pour transformer le tout en une animation fluide.

Le résultat est surprenant, beau et très concluant. On est littéralement plongé dans ces tableaux colorés qui composent le film au fil des saisons. Tout en profitant de cette histoire universelle d’une femme convoitée par les hommes de son entourage.

Jagna est une jolie blonde. La plus belle du village. Une beauté à marier. Les prétendants ne manquent pas. Mais la mère de Jagna a une préférence : Boryna. Il pourrait être le père de Jagna, mais c’est un veuf et surtout c’est le paysan le plus riche de la région. Alors que Jagna tombe amoureuse de son fils, Antek, le père le déshérite et se marie avec Jagna qui se plie aux traditions de son pays.

Un film étonnamment moderne tant Jagna est indépendante, fougueuse, libre. Mais elle est en avance sur son temps et fait des envieux. Et des envieuses. Le drame couve, la jeune fille est trop belle pour ces paysans.

 

mardi 19 mars 2024

En vidéo, “Melchior l’apothicaire”

 


Petit rappel pour les incultes : les pays baltes sont au nombre de trois. Parmi eux, l’Estonie. Capitale Tallinn. Particularité : riche passé et industrie audiovisuelle en plein essor.

Pour preuve la sortie en vidéo chez Condor du premier long métrage des enquêtes de Melchior l’apothicaire. Un polar médiéval de Elmo Nüganen inspiré des romans d’Indrek Hargla (six tomes chez Babel Noir). Le jeune apothicaire est aussi un fin limier. Il est recruté pour découvrir qui a tué un chevalier templier.

Les amateurs de reconstitutions historiques apprécieront ces décors criant de vérité. Melchior, en précurseur de Sherlock Holmes, est secondé par un mystérieux jeune marin pour découvrir les raisons de ce meurtre sur fond de quête de pouvoir et de protection de la religion catholique.
 

lundi 18 mars 2024

BD - Quand la violence déborde des cases

 Beaucoup de noir, un peu de rouge sang : Quelque chose de froid et Brigantus sont deux albums de BD particulièrement violents. Le premier se déroule aux USA durant les années 30, chez les gangsters, le second raconte le périple sanglant de légionnaires romains à la conquête de l’Écosse. 

Froid comme un cadavre

Parmi les nombreuses sorties signées de Philippe Pelaez, Quelque chose de froid sort de l’ordinaire. Il est vrai que le scénariste le plus recherché du moment aborde un genre qu’il connaît particulièrement et aime par-dessus tout : le polar hommage aux films noirs américains.

Et pour illustrer cette histoire de vengeance implacable, il s’est adjugé le concours d’Hugues Labiano, dessinateur toulousain très à l’aise pour rendre ces ambiances sombres et inquiétantes.

En 1936, Ethan Hedgeway revient à Cleveland après un long séjour en prison. Ancien comptable, suspecté d’avoir trahi son patron, Frank Milano, parrain de la pègre de cette ville du nord des USA, Ethan sait qu’il est en sursis. Récemment, les sbires de Milano ont enlevé sa femme puis l’ont libérée… en morceaux. Bien décidé à se venger, Ethan trouve refuge dans un petit hôtel et parvient à déjouer plusieurs tentatives d’assassinats. Il tente de comprendre qui est le plus dangereux entre la police corrompue, la mafia omniprésente et Victoria, ravissante unijambiste qui lui fait du charme.

L’intrigue est sombre, les événements dramatiques. Mais cela ne suffisait pas à Philippe Pelaez qui y a rajouté une angoissante série de crimes dans les bidonvilles de Cleveland. Un fou qui après avoir assassiné ses victimes, les démembre et les décapite. Un album magistral, premier d’une trilogie autour du noir. Les deux auteurs seront aux Rencontres autour de la BD de Gruissan le week-end du 13 et 14 avril. L’occasion de se faire dédicacer le tirage de luxe en noir et blanc proposé en plus de l’édition classique, en couleurs.

Légionnaire ou bête à massacrer

Hermann n’en a pas terminé de nous surprendre. Le dessinateur de Bernard Prince ou Jeremiah, rajoute un univers à sa palette graphique : le péplum. Il a déjà fait du western (Comanche, Duke), des récits historiques (les Tours de Bois-Maury), mais avec Brigantus il plonge ses pinceaux dans l’empire roman.

Sur un scénario de son fils, Yves H., il raconte les déboires de Brigantus, légionnaire romain. Avec ses camarades qui le détestent, Brigantus participe à la conquête de l’île de Bretagne. Ils s’enfoncent de plus en plus au Nord, vers ce qui deviendra l’Écosse.

Mais la résistance des autochtones est de plus en plus farouche. En quelques planches d’une extraordinaire violence, Hermann dessine un Brigantus, féroce colosse sans pitié, tuant des dizaines d’assaillants dans des torrents de sang. Il sera presque le seul survivant. Et une fois à l’abri, dans une caserne romaine, il sera accusé de trahison. Brigantus, héros et banni. La trame ressemble à un western. Mais les décors, landes désolées recouvertes de brouillard, marécages fétides, modifient la donne.

Pas de soleil éclatant, juste du froid et de l’humidité rendant la survie encore plus compliquée. Un premier tome efficace, avec un Hermann qui a un peu modifié son trait en perdant un peu de précision, mais conserve toujours cette force et puissance rarement atteintes par d’autres dessinateurs.

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« Quelque chose de froid », Glénat, 64 pages, 15,50 € (Édition noir et blanc, 29,50 €)

« Brigantus » (tome 1), Le Lombard, 56 pages, 15,95 €

dimanche 17 mars 2024

En DVD et blu-ray - “Iris” redécouvre le désir


Moins comique que Antoinette dans les Cévennes, mais tout aussi profond dans son message, Iris et les hommes s’appuie de nouveau sur le duo gagnant formé par Caroline Vignal (scénariste et réalisatrice) et Laure Calamy (comédienne). 

Après les grands espaces de la Lozère champêtre, c’est un film résolument urbain qui devrait provoquer quelques remous dans certains couples un peu trop installé dans ses habitudes. Ces habitudes, si pratiques et confortables dans le quotidien, mais qui inéluctablement érode, voire annihile totalement, le désir qui a permis, quand ils étaient jeunes et pleins de sève, à Iris (Laure Calamy) et Stéphane (Vincent Elbaz) de devenir mari et femme et parents de deux filles. 

Mais aujourd’hui Iris est triste. Cela fait des années que c’est le calme plat dans la chambre à coucher. Elle aime toujours Stéphane. C’est réciproque. Mais la flamme du désir s’est éteinte. La solution, Iris va la découvrir au hasard d’une rencontre avec la mère d’un élève qui est dans la même classe que sa fille : « Inscrivez-vous sur un site de rencontre. Vous vous sentirez de nouveau désirée ! » Ce qu’Iris fait immédiatement, avec un réel succès. 

Le film, de populaire, aurait pu virer au graveleux. Écueil évité car ce n’est que du point de vue de l’épouse qui cherche à retrouver confiance en elle, son corps, que l’histoire est racontée. Iris expérimente, hésite, échoue, jouit, se remet à sourire. Ce qu’elle résume dans un étonnant point de vue à sa fille adolescente de 16 ans « Il ne faut pas toujours dire non. Dire oui, c’est accepter de vivre. » Et c’est ce message, dire oui à la vie, accepter ses envies et oser, qui risque de faire des remous dans les couples courageux qui auront vu ce film ensemble.

Film français de Caroline Vignal avec Laure Calamy, Vincent Elbaz, Suzanne de Baecque, Laurent Poitrenaux

 

samedi 16 mars 2024

Essai - Lydie Salvayre vénère le dimanche

 Ce texte parfois hilarant, longue réflexion sur la nostalgie des dimanches immobiles qui dérive sur l’inutilité du travail et le droit à la paresse, permet à Lydie Salvayre de mettre les rieurs de son côté. 

Que faites-vous les dimanches ? Êtes-vous de ceux qui attendent impatiemment le lundi et la reprise de la semaine active ou bien, comme Lydie Salvayre, vous aimez vous « réveiller sans l’horrible sonnerie du matin qui fait chuter vos rêves et les ampute à vif. » L’immense majorité aime les dimanches, un jour à part, où il n’y a pas de règle, d’obligation. Et puis le dimanche, normalement, on ne travaille pas. « Nous aimons vaquer dans la maison, en chaussons éventrés et pyjama informe. Et ce total insouci du paraître nous est, à lui seul, une délectation » explique la romancière. Elle se souvient de ces dimanches où, encore jeune, elle restait plongée dans les classiques de la littérature française. Un jour où « nous aimons lanterner, buller ». Bref paresser. Or, selon Lydie Salvayre, « la paresse est ni plus ni moins qu’une philosophie. »

Poursuivant sa réflexion, elle en arrive à se dire que le problème c’est avant tout le travail. Et le petit essai sur la quiétude dominicale se transforme en féroce attaque contre la charge travail qui nous bouffe la vie. « C’est le travail exagéré qui nous use et nous déglingue, au point que nous nous demandons chaque soir si nous pourrons, le lendemain, reprendre le collier, et si nous aurons assez de jus pour poursuivre. » Et de constater, personne ne peut la contredire : « C’est le travail qui prématurément nous fane. C’est le travail qui nous épuise, qui nous brise, qui nous vide… »

Pourtant il existe une solution. Lydie Salvayre se fait la zélatrice du « travail-patience » en opposition au « travail-corvée ». Selon des experts, « quinze heures par semaine de ce travail-patience seraient tout à fait suffisantes ». Beaucoup mieux que les 35 heures !

Ainsi on pourra enfin affronter sereinement le lundi « jour odieux, jour honni, jour maudit entre tous. » Même si les arguments avancés semblent très sérieux, c’est sans oublier un humour de bon aloi avec lequel Lydie Salvayre tente de convaincre ses lecteurs. Elle se met en scène, reconnaît qu’elle va souvent trop loin, qu’elle pousse le bouchon. Mais elle ne fait que suivre la voie des grands anciens, ceux qui avant elle ont combattu ce travail forcément aliénant.

Elle cite Blanqui, le révolutionnaire audois, surnommé « l’Enfermé » car il a passé plus de temps en prison (à ne rien faire…) qu’en liberté. Blanqui qui était ami avec Paul Lafargue, « gendre turbulent de Karl Marx » rédacteur en 1880 d’un « petit traité séditieux qui va défrayer la chronique et quelque peu agacer son illustre beau-père : Le Droit à la paresse. » Car selon lui, le « droit au travail n’est autre qu’un droit à la misère. »

Arrivé à ce niveau de revendication, que même l’extrême gauche actuelle n’ose plus avancer (pourtant il a existé un ministère du Temps Libre dans les années 80 après l’élection de François Mitterrand), comment la bonne fée du dimanche (Lydie Salvayre), va-t-elle se tirer de ce mauvais pas ? Tout simplement en convoquant le plus petit-bourgeois des auteurs français, Marcel Proust en personne. Et dans une nouvelle démonstration éclatante, elle explique que celui qui a écrit A la recherche du temps perdu (16 ans pour accoucher), a tout simplement prouvé que « la paresse est une forme de travail ». Lydie Salvayre connaît cependant bien son public et laisse le dernier mot à… Rabelais.

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« Depuis toujours nous aimons les dimanches » de Lydie Salvayre, Seuil, 108 pages, 16,50 €

vendredi 15 mars 2024

En vidéo, “Une année difficile”

Même après Une année difficile, il faut rire de nos tracas, se moquer de nos travers et profiter de cette pépite d’humour noir de Toledano et Nakache éditée en vidéo par Gaumont. Un gouffre sépare Poussin (Pio Marmaï) et Cactus (Noémie Merlant). 

Entre le surendetté chronique et la militante pour le climat, une étincelle électrise leurs deux regards quand ils se croisent à l’ouverture des portes d’un magasin pour le Black Friday. Pourtant, le premier guigne un écran plat à prix bradé alors que la seconde veut bloquer les portes du temple de la surconsommation. La suite de la comédie est à l’image de notre société : pas toujours évidente, imprévisible et pleine de contrariétés. 

Pour faire passer la pilule, faisons confiance à Lexo (Jonathan Cohen), copain de Poussin et expert en gaffes. Une comédie enlevée dans l’air du temps. 

Polar - Mystères et secrets basques dans le nouveau roman de Cécile Cabanac, « À pleurer tout nous condamne »

 Vingt ans après la disparition inexpliquée de sa tante Diane, Alice revient au village, au cœur du Pays basque, pour tenter de dénouer les fils enserrant ce mystère familial. 


 Pour son cinquième roman policier, Cécile Cabanac situe l’action dans une région qu’elle apprécie : le Pays basque. Après la région parisienne, l’Auvergne et le Périgord, c’est dans le Pays basque intérieur, exactement à Saint-Just-Ibarre, un petit village, que cette nouvelle « reine du polar français » déploie son intrigue.

Le personnage principal est attachée parlementaire à Paris. Alice, 25 ans, est au bout du rouleau. Ce matin-là, dans le métro, elle se surprend à vouloir se jeter sous les roues de la rame. Un burn-out carabiné qui la pousse à tout plaquer et partir se réfugier dans la maison familiale de Saint-Just-Ibarre, très éloignée du marigot politique dans lequel elle perd ses repères. L’ancienne maison de sa tante, Diane.

Elle l’a peu connue. Il y a 20 ans, Diane a disparu sans explications. Installée comme médecin de village depuis quelques années, elle vivait seule dans la grande bâtisse. Les gendarmes ont retrouvé des traces de sang dans la cuisine, mais pas de cadavre. Malgré les recherches dans les forêts environnantes et les interrogatoires, Diane n’est jamais réapparue. Une histoire qu’Alice connaît très mal. Sa mère, Annabelle, sœur de Diane, très touchée par cette disparition, refuse d’en parler. Comme pour redonner un but à sa vie, Alice va rouvrir le dossier et questionner les survivants. Mais la jeune fille remue un passé que tout le monde au village semble vouloir oublier.

Sur une trame classique de secrets de village et familiaux, Cécile Cabanac colle la quête obstinée d’une femme forte en situation de faiblesse. Car Alice, déterminée, un peu imprudente malgré les avertissements et les menaces, va lentement mais sûrement découvrir quelques vérités cachées. On apprécie particulièrement le portrait de cette femme, sorte de miroir de Diane.

L’essentiel du roman se déroule de nos jours, mais de courts chapitres permettent au lecteur de comprendre l’état d’esprit de la communauté au moment de la disparition de Diane. L’enquête non officielle d’Alice va devenir plus tendue quand une des seules villageoises prête à l’aider est retrouvée morte chez elle et que Maiana, la fille de la mairesse, meilleure amie de Diane, disparaît elle aussi. Le dernier attrait de ce roman bien ficelé et au suspense parfaitement dosé, réside dans la description de ce Pays basque à la fois extrêmement beau mais parfois peu accueillant comme quand la météo s’affole : « La foudre venait de créer une colonne luminescente et le tonnerre rugissait. L’ambiance était magnifiquement sinistre. Une pluie drue s’abattit, aussitôt accompagnée de nouvelles flèches qui striaient la nuée noire. Les éléments se déchaînaient avec férocité et la jeune femme assistait à ce grand tremblement, les tripes nouées, pleine d’excitation et de peur. »

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« À pleurer tout nous condamne » de Cécile Cabanac, Fleuve Noir, 432 pages, 20,90 €. Le précédent roman de Cécile Cabanac, « Le chaos dans nos veines », vient de paraître en poche chez Pocket, 528 pages, 5,20 €

jeudi 14 mars 2024

Un beau livre : Les plus beaux villages de France


Collioure sera peut-être le village préféré des Français en 2024 (réponse fin juin...), mais ne fait pas partie des plus beaux villages de France. Le guide officiel de cet organisme vient de sortir.

On retrouve 176 destinations de rêve, authentiques et originales. Ils ne sont pas si nombreux que cela dans la région : il y a Lagrasse dans l’Aude et Castelnou, Eus, Evol, Prats-de-Mollo-la-Preste et Villefranche-de-Conflent dans les Pyrénées-Orientales. Un atlas du patrimoine tricolore qui ne peut que vous donner des idées pour les prochaines vacances.

« Les plus beaux villages de France », Flammarion, 200 pages, 18,90 €

Cinéma - Noir absolu “Dans la peau de Blanche Houellebecq”

Film Guillaume Nicloux avec Blanche Gardin, Michel Houellebecq, Luc Schwarz

Le jury (Michel Houellebecq et Blanche Gardin) en pleine délibération… ou descente après avoir consommé beaucoup trop de drogue.  Bac Films

Comment rentabiliser un voyage d’agrément en Guadeloupe ? Y tourner un film par exemple. Ou à l’inverse, comment transformer un tournage aux Antilles en voyage d’agrément ? Guillaume Nicloux réussi le coup du siècle en proposant Dans la peau de Blanche Houellebecq, long-métrage tourné en grande partie en Guadeloupe avec des comédiens qui n’ont pas grand-chose à prouver puisqu’ils jouent leur propre rôle. 

Un film à l’économie, mais qui décoiffe. Du début à la fin. Michel Houellebecq, avec son ami Luc Schwarz, accepte de faire partie du jury du concours de sosies de… Michel Houellebecq. Originalité, la compétition se déroule en Guadeloupe et le jury est présidé par Blanche Gardin. Après quelques scènes d’introduction, alibi pour faire passer un puissant message anticolonialiste (la Guadeloupe, comme la Corse ou les Catalans, réclame l’indépendance), c’est enfin la rencontre entre deux enfants terribles de ce XXIe siècle. Michel et Blanche, quel beau couple !

 Ils s’accordent rapidement sur l’importance, pour surmonter l’épreuve de ce concours bêtifiant, de consommer un maximum de drogue en un minimum de temps. On rit beaucoup aux saillies de Blanche Gardin et à l’air de plus en plus naturel de cocker neurasthénique d’un Houellebecq en pilotage automatique. Le meilleur de ce film très sombre reste la séance de torture infligée aux « Blancs » par le chauffeur « Noir » d’une énorme limousine. Vitres fermées, sans climatisation, les supposés descendants des esclavagistes vont suer sang et eau comme les Africains déracinés il y a quelques décennies. Le tout sans le moindre effet spécial.