vendredi 27 mai 2022

BD - Yoko Tsuno, toujours


Immense carrière que celle de Roger Leloup. A près de 90 ans il signe le 30e tome des aventures de Yoko Tsuno après avoir débuté dans les années 50 avec Jacques Martin (Alix) et Hergé. Si le trait est moins précis, les visages un peu modifiés, l’esprit de la série reste le même. 

La jeune japonaise reçoit un cadeau de ses amis Vinéens, les extraterrestres à peau bleue. Un vaisseau spatial avec lequel elle rejoint les anneaux de Saturne. Là, elle fera une découverte qui remettra en cause le passé des Vinéens. En plus d’explications techniques très précises et de vaisseaux d’une exceptionnelle beauté, on retrouve au sein de cette histoire le thème de la famille, toujours aussi cher à Roger Leloup. 

« Yoko Tsuno » (tome 30), Dupuis, 10,95 €

jeudi 26 mai 2022

BD - Guy Lefranc et les avions futuristes


Ce 33e titre des aventures du journaliste Guy Lefranc est directement inspiré du synopsis d’un scénario de Jacques Martin, le créateur de la série. C’est Seiter qui a finalisé le script et Régric s’est chargé de la mise en images. 

En 1940, alors que les divisions blindées allemandes déferlent sur la France, deux avions détruisent les chars nazis. 16 ans plus tard, Lefranc est chargé par son rédacteur en chef d’enquêter sur cet exploit militaire oublié et de retrouver un des avions qui s’est abîmé dans un étang dans l’Est de la France. Mais l’armée française va tout faire pour que Le scandale Arès (titre de l’album), ne soit pas révélé dans la presse. 

Une aventure qui allie Histoire et futurisme. 

« Lefranc » (tome 33), Casterman, 11,95 €

BD - Bulles d’espoir dans le désert de Liu Cixin


Nouvelle adaptation en BD d’un texte de Liu Cixin, écrivain chinois qui bénéficie d’une collection à son nom. Valérie Mangin (scénario) et Steven Dupré (dessin), proposent Pour que respire le désert, un texte autour du réchauffement climatique. Dans un futur proche, la Chine s’étouffe. L’eau devient rare. 

Des utopistes tentent de créer une nouvelle ville au Nord-Ouest, mais la sécheresse fait capoter le projet. 

Pensant que son père tente de trouver des solutions pour sauver la ville nouvelle, sa fille, Yuanyuan préfère jouer à faire des bulles de savon. Jusqu’à devenir une scientifique réputée et utiliser ces bulles pour sauver le climat. 

Un récit inventif et optimiste. 

« Pour que respire le désert », Delcourt, 17,95 €

mercredi 25 mai 2022

DVD - "355", union musclée d’espionnes

Les films d’action et d’espionnage sont souvent d’énormes clichés de testostérone et de machisme. Et mettent en vedettes des hommes qui consomment les femmes comme d’autres des cacahuètes à l’apéro. 355, film de Simon Kinberg qui vient de sortir en DVD et blu-ray chez M6 Vidéo, prend le contre-pied total de cette réalité. Son film s’appuie sur un casting exclusivement féminin. Des espionnes essentiellement, venues des quatre coins de la planète et interprétées par des stars comme Jessicca Chastain, Diane Kruger, Penélope Cruz, Lupita  Nyong’o et la Chinoise Bingbing Fan. 

Le scénario, assez monotone, explique comment ces femmes, d’abord adversaires, vont s’unir pour récupérer une arme technologique redoutable. Le film va encore plus loin dans la sororité puisqu’on s’aperçoit au fil des rebondissements que les hommes sont généralement vénaux et très prompts à la trahison. 

L’action se déroule en partie à Paris. L’équipe américaine a trouvé des décors originaux qui donnent une autre image de la capitale. Vous pourrez aussi assister à de belles bastons au Maroc et en Chine.

Roman - L’adieu à sa mère

Nous sommes de plus en plus à devoir affronter le vieillissement de nos parents. Leur perte d’autonomie nous transformant en garde-malades. Caroline Lamarche raconte dans ce récit la fin de vie de sa mère. 

Une femme qui ne peut quasiment plus bouger, devenue aveugle mais qui vit toujours seule dans sa grande maison. Entre souvenirs des jours heureux (quand la mère s’occupait de ses ruches) et description minutieuse de cette longue agonie, la romancière belge explique le pourquoi de cette confession : « Comme je marche, j’écris. J’écris pour tenir le choc du vieillissement accéléré de ma mère. J’écris pour être, avec elle, plus douce. »

« La fin des abeilles » de Caroline Lamarche, Gallimard, 18 €

mardi 24 mai 2022

Série télé - "Baraki" et "Clan" : plus belge la vie


La Belgique, avec l’Angleterre, a toujours eu un humour très particulier. Une certaine noirceur teintée d’un désespoir latent, comme pour mieux dédramatiser une situation sociale calamiteuse, une météo peu clémente et un environnement dépressogène. Deux exemples sont en ce moment à l’affiche sur des plateformes de streaming : Baraki, série récente en français sur Netflix et Clan, datant de 2012, en flamand, et proposée par Arte.tv. 

Un Baraki, en Belgique, est un peu le Gabatch des Catalans ou l’Ariégeois des Toulousains. On est pas loin de l’insulte. Les Barakis, espèce typique de la Belgique, sont une partie de la population la plus pauvre, la moins instruite, la plus rustre. La série en 20 épisodes de Julien Vargas et Peter Ninane raconte le quotidien de la famille Berthet, de purs Barakis. Il y a la mère, ses trois fils, la fille et la grand-mère. Le ressort comique est essentiellement porté par un des fils, Didier (Pierre Nisse), qui accumule gaffes et bévues. Chômeur professionnel, il vit un peu aux crochets de sa petite amie Cynthia (Laura Sepul), coiffeuse, seule à avoir un emploi… 

Didier trempe dans nombre de magouilles, malgré une inefficacité totale quand il s’agit de voler ou d’arnaquer les bourgeois. Le grand frère, Yvan (Julien Vargas), est le roi des mythomanes. Il passe son temps à inventer des histoires à dormir debout. Yvan le plus sympa de la bande, souvent victime de sa famille, qui va devenir papa après sa rencontre avec Nathalie, la fille de la grande bourgeoise qui l’emploie, au black, pour entretenir son jardin. Se greffe sur ce duo une sœur lesbienne experte en boxe, un petit dernier fan de musique électronique, sa copine gothique, des fans de tuning et une grand-mère accro au téléshopping. 

On y parle de coupe mulet, de fricadelles, d’écrans plats tombés du camion ou de descente des services sociaux. Mais si on rit des excès des Barakis, on apprécie surtout leur humanité. Ils vivent simplement, sans se soucier du regard des autres. Une philosophie comme une autre. 

Sur Arte c’est le pan flamand de l’humour belge qui est mis en lumière avec Clan de Malin-Sarah Gozin. Encore une histoire de famille entre les cinq sœurs Goethals. Devenues adultes, elles continuent à se voir régulièrement. Sauf celle qui est mariée à un odieux homme. Solution trouvée par les quatre autres : éliminer l’importun. Là aussi, c’est de l’humour belge très noir qui est proposé aux spectateurs français qui manquent un peu de cette denrée dans la production télévisuelle nationale. 

 


Roman. Olivia Ruiz raconte Carmen dans « Écoute la pluie tomber »

Escota quand plóu en occitan, Écoute la pluie tomber en français, tel est le titre du second roman d’Olivia Ruiz. L’Audoise, après le succès fulgurant de son premier livre témoignage, la commode aux tiroirs de couleur, prolonge l’histoire romancée des femmes de sa famille. On retrouve Rita, le café de Marseillette mais surtout Carmen, personnage central de cette histoire qui va de Narbonne aux environs de Madrid, parle de danse, de tauromachie, de traversée de l’Atlantique en paquebot et de mort prématurée. Carmen, une de sœurs Ruiz, est la plus libre. Elle se rend utile en nettoyant l’hôtel-restaurant de Marseillette, et profite de la vie en se donnant aux garçons de la région. Une féministe indépendante avant la lettre. Pas forcément heureuse de son sort, mais trop humaine pour rejeter cette vie familiale. 

« Ce café c’est aussi le mien. C’est là que j’ai commencé à dévorer la vie avec mon appétit d’ogresse. […] J’essaie de m’en extraire, mais il est irrésistible, ce café, avec sa galerie de gueules cassées. Ce sont des figures. Des atypiques. Des authentiques. Chargés de leur terre, d’une histoire. Et riches des enseignements qu’elles leur ont laissés. » 

Il y a donc toute une partie sur cette Aude si attachante dans le roman. Mais la vie de Carmen bascule quand un matador madrilène fait étape à l’hôtel. Elle partira avec lui, vivre quelques mois dans son hacienda où il forme des jeunes, élève des toros… et trafique avec la mafia. Elle finira en prison. Pas facile les geôles pour femmes sous Franco. C’est la partie dure du roman, même si Carmen en ressort radicalement changée : 

« J’ai beaucoup lu. Moi qui suis peu causante et qui ne m’intéressais à rien ni personne, ça m’a permis de rester en vie. De ne pas céder aux idées noires qui m’envahissaient. » 

Ensuite, à son retour à Marseillette, Carmen va retrouver le petit Escouto. Un gitan, quasiment muet qui ne sait dire que « Escota quand plóu » d’où son surnom, qui a longtemps travaillé sur un paquebot. Malgré la différence d’âge, c’est une belle histoire d’amour qui se noue avec Carmen. Une note d’espoir dans un roman plein de bruit, de fureur et de passion.

« Écoute la pluie tomber » d’Olivia Ruiz est publié chez Lattès et coûte 19,90 €

lundi 23 mai 2022

Série télé - Stranger Things, encore plus noire et effrayante


Disponible depuis vendredi sur Netflix, la première partie de la saison 4 de la série Stranger Things a tout pour devenir le succès estival de ces vacances. Sans dévoiler les principaux ressorts de l’intrigue, sachez que Netflix, pour faire durer le plaisir (et monnayer les abonnements), propose les 9 épisodes en deux volumes. 

Vous pouvez découvrir dès à présent les 7 premiers, mais vous devrez attendre le mois de juillet pour découvrir les deux volets finaux. Première surprise, la scène d’ouverture se déroule dans le passé, quand Onze/Elfe était une enfant cobaye dans le centre secret qui tentait de développer ses capacités psychiques hors normes. On la retrouve ensuite en Californie adolescente, durant ces années 80 si nostalgiques, tentant de retrouver une vie normale. 

D’une façon générale, cette 4e saison marque la scission du groupe en plusieurs parties. Il y a le groupe resté à Hawkins dans l’Indiana, les Californiens et le pauvre Hopper, propulsé dans un goulag russe. Trois arcs en parallèle, assez équilibrés et surtout l’arrivée d’un nouveau grand méchant à Hawkins qui va permettre aux créateurs de la série, les frères Duffer, de distiller une bonne dose d’angoisse et d’images terrifiantes. Les fans ne seront certainement pas déçus.

 


BD - Bug final pour Bilal


Trois ans après la sortie du tome 2, voici enfin le 3e volet de Bug, série de SF d’Enki Bilal. Dans un futur proche (2042), tout ce qui est numérique ne fonctionne plus. La société s’écroule littéralement. 


Seul espoir : un homme, un astronaute de retour de l’espace, marqué par la couleur bleu et qui peut réparer les connexions. Cette 3e partie intrigue par des séquences dignes de la prémonition : il y est question d’un nouveau tsar et les entretiens se font autour d’une table immensément longue. 

« Bug » (tome 3), Casterman, 18 €

dimanche 22 mai 2022

Cinéma - Deux hommes, deux femmes, deux films


Deux des films français en compétition officielle ou présenté en première au festival de Cannes sont sortis cette semaine en salles. Deux œuvres ambitieuses s’appuyant sur des comédiens investis, des oppositions entre homme et femme. Si Frère et sœur d’Arnaud Desplechin explore la haine entre Marion Cotillard et Melvil Poupaud, Don Juan de Serge Bozon est une variation sur la séduction avec Virginie Efira et Tahir Rahim.

Que s’est-il passé durant l’enfance de Louis (Melvil Poupaud) et Alice (Marion Cotillard) ? Ils se détestent au point de ne plus supporter d’être ensemble dans la même pièce. Aujourd’hui adultes, la grande comédienne et le romancier provocateur restent irrémédiablement sur leurs positions. Même quand leurs parents meurent. Bloc de haine et d’incompréhension, le film d’Arnaud Desplechin nous questionne profondément sur nos rapports avec la famille. Sur nos blessures inguérissables aussi. La tension, la haine, entre frère et sœur donne une ambiance lourde à cette histoire de rupture. Un film magnifié par deux comédiens au sommet de leur art. Marion Cotillard, loin de ses ratés américains, retrouve toute la subtilité de ses débuts. Sa fragilité aussi, cachée par une rudesse de façade. Melvil Poupaud, encore plus atteint, plus déchiré par cette situation, est plus qu’à la hauteur de sa partenaire.

Virginie Efira  se démultiplie

Don Juan de Serge Bozon n’est pas en compétition. Présenté dans le cadre de Cannes Première, le film est sorti ce lundi. Un homme, une femme : le schéma est classique pour ce drame qui flirte avec la comédie musicale. Laurent (Tahir Rahim), comédien, va se marier avec Elise (Virginie Efira). Mais sur le seuil de la mairie, elle fait marche arrière. Désespéré, le comédien tente de séduire toutes les femmes qu’il croise. Car elles ressemblent à Elise. Mais ce n’est pas parce qu’il interprète Don Juan qu’il a du succès. Cette légende inversée (l’homme est rejeté par les femmes), est un peu laborieuse. Virginie Efira est merveilleuse de duplicité, Tahir Rahim moins à l’aise dans ce rôle d’homme déstructuré.

Frère et sœur, film français d’Arnaud Desplechin avec Marion Cotillard, Melvil Poupaud

Don Juan, film français de Serge Bozon avec Virginie Efira et Tahir Rahim