mardi 14 décembre 2021

Livre de témoignages - Écoutez ces femmes


Longtemps, les femmes n’ont pas eu le droit à la parole dans nos sociétés. Depuis quelques siècles elles sont plusieurs à avoir osé dire tout haut ce qu’elles pensaient. Anna Russel, journaliste américaine, a sélectionné plusieurs discours de ces femmes « dont les discours résonnent » encore de nos jours. 

Il y a beaucoup de féministes en provenance des USA mais aussi quelques personnalités françaises comme Marie Curie ou Gisèle Halimi mais surtout Simone Veil dont le discours sur la loi sur l’avortement à l’assemblée nationale en 1974 est en partie repris.

« À voix haute ! », Hugo Images, 21,95 €

lundi 13 décembre 2021

BD - Le dilemme d’une mère


Desberg a écrit des centaines de scénario, mais jamais il n’a osé, à ce point, se livrer dans Aimer pour deux, roman graphique dessiné par Emilio van der Zuiten. Monique à 20 ans quand elle arrive à Paris occupé par les Allemands. Elle va découvrir les joies de la vie. 


Et tomber enceinte de Nicole, une petite fille qui hypothèque tous ses espoirs. Monique, c’est la mère de Desberg, Nicole, sa demi-sœur. Sur cette histoire familiale, le scénariste raconte Paris durant l’Occupation, l’ambiance des cabarets et la peur des uniformes nazis.   

« Aimer pour deux », Bamboo Grand Angle, 16,90 €

Beau livre - La géographie de Jane Austen


Romancière anglaise devenue culte au fil des siècles, Jane Austen personnifie une certaine Angleterre, immuable et sereine. Dans cet ouvrage richement illustré, les auteurs ont décidé de revisiter tous les lieux où se déroulent les intrigues de ses romans. 

Cette déambulation débute évidemment par Londres et ses environs comme le manoir de Dortney Court où a été tourné, en 2008, Raison et sentiments. On apprendra aussi au fil des pages tous les détails du rituel du tea time ainsi que les canons de la mode de l’époque géorgienne.

« Dans les pas de Jane », Les Presses de la Cité, 21 €

dimanche 12 décembre 2021

BD - Dernière cavalcade pour Cauvin et ses Tuniques Bleues


Ce 64e tome des aventures des Tuniques Bleus se termine, un peu, comme une aventure de Lucky Luke. Car c’est le dernier scénario de Cauvin (mort cette année) et peut-être le dernier de Lambil, remplacé avant l’heure par Munuera


Blutch est très en colère : les gradés ont donné à une autre compagnie son cheval, Arabesque. Il va donc partir à sa recherche en compagnie de son ennemi juré, Chesterfield qui, pour le coup, deviendra son meilleur ami. 

« Les Tuniques Bleues » (tome 64), Dupuis, 10,95 €

Beau livre - Clint, le géant


À 91 ans, il vient de sortir un nouveau film. Il le réalise mais interprète aussi le rôle principal. Clint Eastwood est devenu le dernier des géants d’Hollywood. Une carrière exceptionnelle retracée avec minutie et admiration par Guillaume Evin dans ce livre fourmillant d’illustrations, souvent devenues cultes. 

En couverture il a le poncho et le cigarillo qui l’a immortalisé dans les films de Sergio Leone, mais ensuite il a continué à jouer du flingue en devenant l’inspecteur Harry. Après une courte biographie assez fouillée cependant, tous ses films sont détaillés, du premier à Cry Macho, toujours à l’affiche.

« Clint Eastwood, le dernier des géants », Hugo Image, 24,95 € 

samedi 11 décembre 2021

BD - Adorables cambrioleurs


Pascal Rabaté revient avec bonheur à la bande dessinée dans ce roman graphique d’une incroyable beauté. En 1962, trois jeunes fils de notables, d’une ville côtière en Bretagne, croisent le chemin d’une jeune femme lumineuse. Odette, jolie, aguichante. Et surtout cambrioleuse professionnelle qui cherche des bras pour l’aider dans ses larcins. Elle va faire chanter le trio. 


Cette BD très politique sur les différences de classes sociales et l’envie de tout renverser, va dériver vers la belle histoire d’amour avant de presque finir tragiquement. Presque, car les cons et les bourgeois ne l’emportent jamais dans la France Rabaté. 

« Sous les galets la plage », Rue de Sèvres, 25 €

Beau livre - Soyez Carrément Méchant !


Ils nous manquent ces humoristes qui n’avaient pas de limites. Les Desproges, Jean Yanne et autres comiques qui signaient de fausses pubs dans Hara Kiri. Après le succès de Incorrect, l’an dernier, Le Cherche-Midi remet le couvert avec ce Carrément Méchant ! prouvant combien, dans le temps, on savait se moquer sans craindre offenser. Car ces humoristes partaient du principe que la dérision était la meilleure façon de reconnaître l’existence de certaines minorités. Le politiquement correct ne disait encore pas son nom, le wokisme une invention de pisse-froid en mal d’intégration dans la grande société si triste des bien-pensants. Cette irrévérence on la retrouve au détour de ces pages qui pour certaines ne pourraient plus paraître de nos jours. 

Après une préface de Richard Malka, plongez dans cette période bénie comprise entre 1960 et 1990, quand se moquer du petit Jésus n’était pas considéré comme un blasphème, quand les hommes politiques étaient passés à la moulinette par des humoristes d’une rare méchanceté, quand pauvres comme riches en prenaient plein les dents sans que des citoyens indignés ne lancent une pétition par l’intermédiaire de Facebook. Si cet esprit existait encore, les premières victimes auraient été ce candidat d’extrême droite qui révisionne l’histoire de France à tour de bras, ces prétendus « journalistes » se contentant de donner leur avis dans des émissions de débats ou ces féministes qui, en faisant pire que les machos dans leurs outrances, discréditent l’immense majorité des femmes.

Mais le livre va un peu plus loin que le simple humour destructeur. Il analyse aussi comment tout ce qui est méchant est finalement si sympathique pour le commun des mortels. Pourquoi le Joker, propulsé au rang de personnage principal, fait autant d’entrées que Batman. Pourquoi justement le candidat révisionniste, avec ses outrances et ses mensonges perpétuels reste aussi populaire auprès d’une population qu’il méprise ouvertement ? C’est la magie (ou la sorcellerie), des méchants.

« Carrément méchant ! », Le Cherche Midi, 35 €

vendredi 10 décembre 2021

Roman - Cali dans son miroir déformant

Etonnant roman que ce Voilà les anges signé Cali. Si ses deux premiers étaient, « 100 % moi, puis seulement 90 % », celui-ci rebat les cartes. Le héros se nomme toujours Bruno, est un peu chanteur, mais « c’est totalement romancé, avec pas mal de choses remaniées ». Bref, on se trouve face à « avatar de Cali », un peu le reflet déformé du chanteur connu. « Dans la première partie du roman, j’ai voulu rendre Bruno totalement détestable, il se déteste lui-même et veut aller au plus bas », explique le chanteur, entre deux séances d’enregistrement, à Saint-Estève. Une réussite éclatante quand il raconte comment, chanteur délaissé pour un plus jeune et surtout plus vendeur, Bruno massacre le patron de sa maison de disques. Il finira en prison, preuve que l’on se trouve dans un roman car, comme le souligne malicieux l’auteur, « je n’ai pas encore fait de prison ».  Il faut absolument recontextualiser ces passages qui, pris au premier degré, pourraient passer pour un testament artistique : « Jétais devenu ce que je redoutais le plus : aigri. Un vieux chanteur aigri. […] Fatigué, méchant, j’étais passé de l’autre côté, du côté obscur de la vie. Celui d’où l’on ne revient que rarement. » La suite du roman met des couleurs sur cette œuvre au noir. 

La maman du Petit Prince

Car Bruno, après la prison, rencontre quelques anges. Une splendide galerie de personnages, de Roberta, la propriétaire octogénaire d’un manège, veuve amoureuse d’un jeune Kevin, à Paula, la femme battue et suicidaire qui redécouvre l’amour dans les bras de Bruno, lui aussi de plus en plus suicidaire. Sans oublier Prince, un gamin qui ne va jamais à l’école. Prince, perdu dans ce Paris qui l’étouffe. Il reste en bas de son immeuble pour surveiller sa maman qui reçoit beaucoup de visites d’hommes dans la journée. Le héros va beaucoup apprécier ce gamin, lui raconter sa fugue à 16 ans, comment il appellerait ses enfants, s’il en avait, ce qu’ils feraient. Et découvrir, finalement, qui est la maman du petit Prince, petit garçon hybride entre le personnage de Saint-Exupéry et le musicien américain. 

Ce texte, envoûtant, parfois cash, souvent romantique, fait une grande place à la poésie de la vie. A l’optimisme aussi, bien que la totalité des protagonistes soient des cabossés de la société, des boiteux qui pourraient ne plus rien attendre de cette chienne d’existence. Un bonheur possible que l’on retrouve en fin de roman, comme un soulagement. Avec cet aveu du héros, totalement transformé, apaisé, comme son double et créateur : « J’écris des chansons. Je le sais maintenant, le héros ce n’est pas le chanteur, c’est la chanson. Peut-être que la postérité reconnaîtra un jour mon talent. En fait, tu sais quoi ? Je m’en balance ! J’écris des chansons pour moi, pour rien. » Il écrit des romans aussi. Pour nous. Et c’est bien.  

« Voilà les anges » de Cali, Albin Michel, 17,90 €. 

De choses et d’autres - Une nouvelle cargaison de mots-valises

Le 27 novembre dernier, à cette même place, je vous parlais du Fictionnaire de Robert Pico, petit ouvrage où il tripatouillait les mots pour les rendre complexes et amusants. François Licciardi, lecteur originaire de Ur, dans la montagne catalane, me signale, par courrier, que ce Fictionnaire n’est pas le premier à paraître. « Yves-Marie Clément et Gérard Gréverand, ont publié, aux éditions Manya, en 1993, Pianissimots, petit dictionnaire des mots-valises. Dans la préface, les deux auteurs rappellent qu’Elsa Triolet reçut, de la part d’Henri Jeanson, le surnom (pas très élégant) d’Aragonzesse après son mariage avec Louis Aragon. »

Parmi leurs trouvailles, sélectionnées par François Licciardi, « Chimpanzer : singe blindé » ou « Matelassitude : ennui conjugal ».

Cette lettre nous apprend, également, qu’un célèbre philosophe, s’est, lui aussi, amusé à détourner la langue française dans sa jeunesse. Alain Finkielkraut, sans doute plus marrant jeune qu’une fois devenu une institution de la pensée française, a publié, en 1979, au Seuil, Ralentir : mots-valises !. Preuve que « jouer au mot-valise séduit à tout âge, aussi bien le vieux Pico que le jeunot Finkielkraut » souligne François Licciardi qui a débusqué, parmi les inventions du philosophe, un très étonnant et peu ragoûtant « Gazpiller : lâcher des vents avec une prodigalité excessive. »

Et preuve que ce petit sport cérébral est contagieux, notre lecteur termine sa missive en proposant un mot de son invention, « contribution quelque peu scabreuse dans la lignée de Robert Pico » tient-il à préciser : « Préservhâtif : pour éjaculateur précoce. »

Chronique parue en dernière page de l’Indépendant le samedi 11 décembre 2021

jeudi 9 décembre 2021

Encyclopédie - Trois lettres de la nouvelle bible des acteurs et actrices

Les passionnés de cinéma se précipiteront sur ce livre coécrit par Serge Regourd et Alain Stouvenel. Les deux passionnés de cinéma ont rédigé 900 mini-biographies d’acteurs et actrices du cinéma français et de la télévision. Juste le tome 1 d’une anthologie en cours, puisqu’on ne retrouve, dans ces 250 pages, que les trois premières entrées de l’alphabet, de A à C. 

On trouve, à la première lettre, des célébrités comme Isabelle Adjani, mais le parti pris des auteurs de mettre tout le monde à égalité fait qu’une des meilleures comédiennes françaises de tous les temps n’a droit qu’à six lignes, exactement autant que Béatrice Altariba, essentiellement connue pour avoir donné la réplique à Darry Cowl dans « Le triporteur ».  

« L’A. B. C. des acteurs et actrices du cinéma français et de la télévision », Un autre Reg’Art éditions, 19,90 €