samedi 13 novembre 2021

De choses et d’autres - Symboles urbains

Étonnant comme d’un pays à l’autre certains symboles urbains sont interprétés de façon diamétralement opposée. En Italie, dans la ville de Conegliano, une voiture est garée à la même place depuis 47 ans. Une vieille Lancia datant de 1963, que l’on peut admirer sur Google Maps. Grise et très rouillée, elle est devenue une attraction touristique à visiter.

Pourtant, une épave qui traîne au même endroit dans une rue durant plus d’une année, dans d’autres pays, c’est vite interprété comme le signe que la ville se paupérise, voire se transforme en zone de non-droit. A Paris, la même voiture aurait été érigée en symbole de la décrépitude de la capitale par les armées de petites mains qui alimentent au quotidien les photos siglées #SaccageParis.


Un mouvement encore plus fort, comme c’est étonnant, depuis que la maire, Anne Hidalgo, est candidate à l’élection présidentielle.

Dernier en date à s’offusquer : Stéphane Bern. Il a annoncé vouloir quitter son appartement parisien pour aller vivre en province à Thiron-Gardais dans le département de l’Eure-et-Loir. Je ne vous cache pas mon étonnement : j’ai toujours cru que le M. Royauté de la télé française vivait au château de Versailles.

Et pour revenir aux symboles urbains, après la voiture qui ne bouge plus, va-t-on avoir le même phénomène avec le radar rouillé de l’avenue Foch ? Un radar tombé sous les assauts des Gilets jaunes (ou autre mécontent, ça ne manque pas en France), qui a scié le mat et y a mis le feu. Selon des riverains, cela fait depuis deux ans et demi qu’il est abandonné sur le trottoir.

Cela ne vaut pas les 47 ans de la voiture italienne, mais renseigne quand même un peu sur l’état de notre société.

Chronique parue en dernière page de l’Indépendant le lundi 15 novembre 2021

vendredi 12 novembre 2021

Thriller - Compte à rebours pour sauver un enfant dans « Trompe-l’œil »

En général, les héros de romans policiers ou de thrillers, sont soit policier, soit journaliste. Anne Mette Hancock n’a pas choisi et a préféré raconter les aventures mouvementées d’un policier et d’une journaliste danois. D’un côté Héloïse Kaldan, reporter pugnace qui aime les enquêtes au long cours sur des sujets de société. 

Actuellement, elle est sur le problème du retour des soldats danois en stress post-traumatique après leur service d’active en Irak ou en Afghanistan. Face à elle, Erik Schafer, le prototype du flic increvable et prêt à tout pour boucler les coupables. Ce roman, qui mérite tout à fait son titre de « Trompe-l’œil », débute par la disparition de Lukas, un enfant qui n’est jamais arrivé en classe ce matin-là. Il y a été conduit par son père, médecin. Ce dernier est prévenu alors qu’il ausculte Héloïse. Enceinte, celle-ci souhaite avorter. Comme elle comprend une partie de la conversation, elle se précipite à l’école et retrouve son ami Schafer. 

Rapidement, une course contre la montre s’engage. S’il a été enlevé, l’enfant doit être retrouvé sans traîner. Mais, l’enquête sera plus lente que prévu et passera par plusieurs pistes, plus ou moins bonnes, comme ce M. Pomme, handicapé mental qui aime donner des pommes aux écoliers, des réfugiés politiques qui pourraient être radicalisés, des soldats durement éprouvés par les atrocités de la guerre, sans oublier les secrets de la famille de Lukas. 

Le roman, sans le moindre temps mort, accorde aussi de l’importance aux vies des deux héros récurrents tout en offrant une fin véritablement étonnante. 

« Trompe-l’œil » d’Anne Mette Hancock, Albin Michel, 21,90 €

De choses et d’autres - Noël dans l’obscurité

Cette crise sanitaire commence à devenir pénible. Certes elle ne nous empêche plus de sortir et de faire des courses comme on veut, mais les longs mois d’inactivité un peu partout dans le monde provoquent des pénuries dans divers secteurs. Qu’il n’y ait plus de cartouches pour les chasseurs, passe encore (ce n’est pas le cas, que les animaux et promeneurs continuent à se planquer…), mais que Noël et les fêtes de fin d’année perdent de leur éclat, c’est un peu fort.

Car plusieurs journaux ont relayé l’information détaillant les difficultés d’approvisionnement de certaines villes en décorations de Noël. Mais que serait le mois de décembre s’il n’y avait pas ces guirlandes lumineuses, de plus en plus sophistiquées, pour insuffler un peu d’optimisme durant cette période froide, où les journées sont courtes et où on est obligé de recevoir la famille, belle-mère comprise.

Dans mon village, j’ai été rassuré en début de semaine. Les employés municipaux ont déjà accroché les guirlandes dans la rue principale et aux lampadaires des lotissements. Guirlandes qui ne sont pas encore allumées mais remontent quand même un peu le moral.

Par contre, sans doute pour faire comme la ville de Narbonne qui avait emmailloté des platanes cet été, des guirlandes ont été placées sur les troncs des quelques arbres et palmiers plantés sur la place devant la mairie. Pauvres arbres, toujours obligés de supporter la folie des hommes. Quand ce n’est pas une balançoire, une cabane ou un hamac, ce sont ces déguisements de lumière.

Dommage, car ceux qui aiment regarder la nature, savent qu’il y a souvent beaucoup à apprendre à détailler l’écorce d’un arbre.

Chronique parue en dernière page de l’Indépendant le samedi 13 novembre 2021

jeudi 11 novembre 2021

Streaming - Coffres à ouvrir dans « Army of the Twieves »


Si le film à très gros budget de Zack Snyder Army of the dead était sympathique mais un peu trop classique, l’idée de faire un préquel avec, comme personnage principal, le perceur de coffre allemand Ludwig Dieter donne, au final, une comédie d’action réussie et beaucoup plus tout public. Il n’y a pas de zombies dans Army of the Twieves, juste des idéalistes qui veulent ouvrir les coffres les plus sophistiqués de la planète. 

Ludwid (Matthias Schweighöfer, également réalisateur) est recruté par Gwendoline (Nathalie Emmanuel). Mais, le véritable attrait du film (disponible sur Netflix) pour le public français est la présence de Jonathan Cohen dans le rôle du flic qui se lance aux trousses des malfaiteurs. Il alterne colère, action et gags prouvant que son registre d’acteur est trop souvent utilisé a minima dans les productions nationales.

 


Cinéma - “A good man”, la maternité à l’épreuve du genre


L’histoire d’un homme qui porte un enfant a déjà été exploitée au cinéma. Notamment la comédie de Jacques Demy sortie en 1973 avec Marcello Mastroianni en vedette. Mais le film de Marie-Castille Mention-Schaar, A good man, est lui tiré d’une histoire véridique. Une nouvelle illustration de ces questionnements sur le genre qui ne cessent de prendre de l’importance dans la société. Le début du film montre un couple comme un autre. Benjamin est infirmier sur l’île de Groix. 

Il intervient chez ses patients, développant une forte empathie. Sa compagne, Aude (Soko) donne des cours de danse aux écoliers. Ils cherchent à avoir un enfant. Mais les PMA se terminent toutes en fausse couche. Alors Benjamin prend la décision de porter l’enfant à la place d’Aude. Car ce jeune homme barbu était, il y a quelques années, une femme prénommée Sarah.

 En pleine transition de genre, Benjamin (Noémie Merlant) décide de devenir mère, par amour. Cela donne ces images très étonnantes d’un homme au ventre rond et un accouchement sans précédent. 

On est bluffé par l’humanité de ce long-métrage. Car, comme dans tous les couples où procréer est compliqué, des tensions naissent entre Aude et Benjamin. Reste la performance de Noémie Merlant, plus homme que bon nombre de ses collègues masculins.

Film de Marie-Castille Mention-Schaar avec Noémie Merlant, Soko, Vincent Dedienne


De choses et d’autres - Des jeunes à soutien variable

On ne sait pas qui sera président le la République en avril prochain, mais si c’est Arnaud Montebourg, on pourra dire qu’il sera revenu de loin. Sa fameuse Remontada érigée en tête de proue d’un programme encore assez confus aura finalement été la bonne idée. Enfin, ça, c’est ce qu’on pourra dire s’il l’emporte. Dans les faits, en ce mois de novembre 2021, à six mois de l’échéance électorale, la Remontada ressemble plutôt à la Bérézina.

Même sans consulter les sondages, on se doute, vu le ramdam médiatique minimaliste régnant autour de l’homme à la marinière, qu’il n’est pas en train de marquer des points. Sa sortie sur les versements d’argent à l’étranger à interdire, en plus d’être assez alambiquée, n’a pas du tout plu dans son propre camp. On a découvert à cette occasion qu’il y avait un compte Twitter nommé « Les jeunes pour Montebourg ».

Des jeunes qui, dans un communiqué, annonçaient rejeter cette proposition applaudie des deux mains par l’extrême droite, et venaient par conséquent de retirer leur soutien au candidat. Les jeunes pour Montebourg ? Non, Montebourg sans les jeunes ! Enfin juste quelques heures.

Car une fois les dissidents dispersés telle une volée de moineaux partis grappiller d’autres miettes auprès de candidats plus présentables sur leur gauche, de nouveaux jeunes ont réactivé le fil Twitter. Cela a donné un communiqué tout neuf expliquant que si, en fait, il existe toujours des « jeunes pour Montebourg ».

Le plus étonnant dans cette affaire d’opportunisme politique de niche, c’est quand même de s’apercevoir que l’on ne sait pas qui sont les premiers ni les seconds « jeunes pour Montebourg ». Juste une petite image sur un réseau social et des messages venus on ne sait d’où.

J’ai comme l’impression qu’elle va être très laborieuse cette Remontada.

Chronique parue (en partie) en dernière page de l’Indépendant le vendredi 12 novembre 2021

mercredi 10 novembre 2021

Streaming - "OATS" : courts et percutants


La sortie de District 9 de Neill Blomkamp a permis au réalisateur sud-africain de s’imposer comme un maître de la SF. Débordant d’idées, il a produit cette série de courts-métrages qui sont depuis peu visibles sur Netflix

Réalisés sous le label Oats Studio, ils vont de l’histoire sombre de fin du monde aux pastiches d’émissions culinaires. On croise nombre de méchantes bestioles et d’extraterrestres envahissants aux prises avec une Sigourney Weaver toujours prompte à tuer de l’Alien. Mais c’est dans les fausses sessions de télé achat que les scénaristes se sont lâchés. De très courtes séquences, gore à souhait, trash et délirantes. 


Attentat de Trèbes : la vie héroïque d’Arnaud Beltrame reconstituée dans une bande dessinée

Un album de bande dessinée retrace avec réalisme la vie du colonel Arnaud Beltrame. De sa formation de militaire à son sacrifice à Trèbes le 23 mars 2018, découvrez un exemple de « don et d’engagement ».


Entre biographie et hagiographie, Arnaud Beltrame, le don et l’engagement, vient de paraître aux toutes nouvelles éditions Plein Vent. Cette BD signée Arnaud Delalande (scénario) et Laurent Bidot (dessin) est introduit par une préface de Marielle Beltrame, l’épouse du colonel de gendarmerie mort en mars 2018 dans la prise d’otages du SuperU de Trèbes. L’épouse explique qu’« Arnaud aimait la BD. Il avait encore dans sa table de nuit une histoire sur la Bretagne. » « Cet ouvrage vous offre donc en quelque sorte une opportunité de le rencontrer, à travers un média qui lui plaisait, et de faire un bout de chemin avec lui. »

Des réussites et des échecs  

Le récit, s’il débute par les dernières minutes dramatiques dans le supermarché audois, est surtout l’occasion de montrer un homme fier de ses origines, entièrement dévoué à son pays et qui avait l’armée chevillée au corps. Arnaud Delalande, scénariste chevronné (il a signé une quarantaine d’albums dont la série Le dernier Cathare se déroulant dans la région), s’est minutieusement documenté pour être le plus près de la réalité. 


Le jeune Arnaud, marqué par le divorce de ses parents, a rapidement voulu suivre les pas de son grand-père en rejoignant l’armée. Un long parcours au cours duquel il a connu de belles réussites et quelques échecs, notamment quand il a raté l’école de guerre. Après avoir servi à l’étranger, dans des ministères et à l’Élysée, il a obtenu un poste dans l’Aude. Idéal pour se rapprocher de sa future épouse, vétérinaire. Il sillonera les sentiers de randonnée de toute l’Occitanie, appréciant particulièrement les Pyrénées et les chemins de Compostelle.
La BD revient longuement aussi sur sa foi et ses fréquents séjours à l’abbaye de Lagrasse. Les éditions Plein Vent sont une nouvelle filiale du groupe Elidia (basé dans les Pyrénées-Orientales) spécialisé en partie sur les publications chrétiennes. Enfin, la scène finale raconte par le menu les dernières heures de ce héros qui n’a jamais douté du sens de son devoir.

« Arnaud Beltrame, le don et l’engagement », Plein Vent, 15,50 € 

mardi 9 novembre 2021

Streaming - Les affres (et espoirs) du confinement racontés par Dany Boon


Dany Boon, champion français du box-office, décide de se passer des salles et de sortir sa nouvelle création directement en streaming sur Netflix. Drôle de décision en cette période de crise de la fréquentation. Un peu plus compréhensible une fois qu’on a visionné ces deux heures bricolées autour de quelques clichés ayant alimenté les réseaux sociaux durant le premier confinement. Pas véritablement un film (les décors sont quasi inexistants), plus proche d’une émission télé réalisée dans un studio avec une équipe de copains qui ont parfois l’impression d’improviser. 

Bref, « 8, rue de l’Humanité » est loin du chef-d’œuvre du cinéma populaire qui a fait la renommée de Dany Boon. Il a écrit le scénario, réalisé et interprété l’histoire de ces locataires d’un immeuble parisien pris dans la nasse du confinement. Il reprend son personnage d’hypocondriaque absolu, aspergeant de gel hydroalcoolique les vigiles et caissières des supermarchés et obligeant sa femme à dormir sur le palier car elle a osé aller s’entretenir avec un de ses clients (elle est avocate) dans une prison. Il est clairement abject, niant toute humanité. 

Les autres personnages ne sont guère mieux. Le patron d’un laboratoire d’analyses cherche un virus et ose l’expérimentation sur des cobayes humains qui ne sont pas au courant, une patronne de bistrot transforme son stock d’alcool de prune en désinfectant qu’elle vend au noir. Le seul qui semble sympa reste le concierge d’origine portugaise. 

C’est pourtant lui qui sera le plus affecté par la pandémie. Et même si dans les 5 dernières minutes tout le monde se rachète et célèbre cette Humanité si précieuse, tout le reste du film a tendance à nous mettre mal à l’aise en constatant que malheureusement, oui, c’est la mentalité qui domine actuellement en France…

De choses et d’autres - Une très chère envie de coquillettes

On trouve tout sur internet. Et grâce à l’ubérisation de notre société, en zone urbaine, non seulement on trouve tout, mais on peut se le faire livrer illico presto. Voilà pourquoi un jeune youtubeur s’est retrouvé, récemment, sous le feu des critiques. Habitué à partager son quotidien avec ses milliers d’abonnés, il publie de courtes vidéos de ses journées plus ou moins occupées.

Ce soir-là, debout dans sa cuisine, la bouche pleine, il avoue qu’il a eu une envie folle de coquillettes. Vous savez ces pâtes toutes simples qu’on peut cuire vite fait bien fait, simplement accommodées d’un peu de beurre et de fromage râpé. Mais, le jeune, très actif sur les réseaux sociaux, un peu moins dans sa cuisine, choisit la solution de facilité. Et s’en vante sur le petit film révélant le prix du plat de coquillettes livrées à domicile : 20 €.

Un peu cher pour un repas qui, concocté à la maison ne dépasse pas les 50 centimes, prix de l’électricité ou du gaz compris. Car, quand on est jeune et étudiant, les repas à base de pâtes restent souvent la seule solution pour ne pas crever la dalle en fin de mois, vu qu’on n’a même plus assez d’argent pour s’acheter des tickets de Resto U.

Le pire dans cette histoire, qui a conduit le youtubeur à effacer sa vidéo, il avait été invité, peu de temps auparavant, par le président Macron, à l’Élysée, pour aborder un sujet d’actualité : la difficulté financière des étudiants.

Visiblement, les services de l’Élysée planent tellement dans leurs hautes sphères que je les soupçonne même d’ignorer comment fonctionnent les Restos du Cœur. Alors la précarité, vous pensez.

Chronique parue en dernière page de l’Indépendant le jeudi 11 novembre 2021