vendredi 31 août 2018

BD - Renaissance périlleuse



L’univers de Stephan Wul continue d’inspirer Olivier Vatine. Après plusieurs titres dans la collection dédiée de chez Ankama, il poursuit l’exploration des mondes imaginés par cet auteur de SF français des années 50 avec l’adaptation de « La mort vivante », roman paru en 1958 dans la célèbre collection Anticipation de Fleuve Noir. 

Fidèle au texte d’origine, Vatine s’est occupé du story-board, Varanda signant les dessins. Deux dessinateurs talentueux pour un album qui se déguste en couleur ou en noir et blanc dans une luxueuse édition. Dans un avenir post-apocalyptique, un jeune chercheur est contacté par une femme retirée dans un château au sommet des Pyrénées pour cloner sa fille, morte à 10 ans. Un remake de Frankenstein, notamment pour le résultat, la fillette se transformant en monstre engloutissant toute vie autour d’elle. Une histoire et un album visionnaire, ambitieux et beau. La première réalisation de Comix Buro (société imaginée par Vatine et qui devient une véritable maison d’édition) pour Glénat est une pure merveille.

« La morte vivante », Comix Buro & Glénat, 15,50 € (29,50 € la version luxe en noir et blanc)

dimanche 26 août 2018

BD - Un poussin dans la bataille divine



Quand les Dieux décident de s’affronter pour savoir qui va succéder à Udras, roi des dieux rouges, cela annonce des batailles sanglantes et violente. Du moins si on choisit bien son champion.

Pour Drouz, le sabre hurleur, pas de souci. De même Drübl, le monstre marin, a les muscles pour casser ses adversaires. Moins judicieux le choix d’Arek, un bellâtre qui séduit les femmes à tour de bras.


Mais pourquoi la déesse des animaux a-t-elle choisi de son côté Poussin-bleu ? Comme son nom l’indique, c’est un poussin bleu, éclos depuis moins d’une semaine et tout sauf téméraire. Mais c’est tout le le génie de Monsieur le Chien (un fou-furieux complètement dérangé et excellent dessinateur) qui a inventé cet univers.

Découpée sous forme de gags, l’histoire mélange situations cocasses, absurdes ou de grand-guignol. Arek, par exemple, a hérité du don de « salive acide ». A quoi ça sert ? Pas grand chose à part dissoudre les têtes de ses conquêtes féminines. Et si au final Poussin-bleu se révélait un véritable champion ? De la fausse héroic-fantasy et du vrai délire.

 ➤ « Poussin-Bleu » (tome 1), Fluide Glacial, 14,90 €

samedi 25 août 2018

Série télé - « Lost », la bible des années 2000


Pour clore cette énumération estivale de séries télé nouvelles ou cultes, impossible de ne pas faire un clin d’œil à la mère de toutes les créations, la bible : « Lost ». Phénomène mondial lors de la diffusion des deux premières saisons, Lost a pris une direction plus exigeante et compliquée dans sa narration qui a fait fondre ses audiences comme neige d’Alaska au soleil d’Hawaï. Mais un gros noyau de fidèles a continué à se passionner pour ces naufragés du temps. Derrière Lost on trouve deux créateurs qui depuis ont fait un sacré chemin. J. J. Abrams d’abord. Il a déjà connu le succès avec Alias, mais en imaginant ce monde fantastique, il marque les esprits. Du public mais aussi des professionnels. Il va quitter le petit écran pour relancer Star Trek puis la Guerre de Etoiles. On n’a pas fini d’entendre parler de lui. L’autre showrunner, Damon Lindelof, a réussi l’exploit de faire encore mieux en série télé avec « The Leftovers ». Parmi les acteurs, Mathew Fox est celui qui s’en tire le plus mal. Le héros plein de doute n’a pas su concrétiser son succès mondial sur grand écran. À l’opposé de sa « chérie », Evangeline Lilly, devenue la Guêpe pour Marvel et cumulant les millions d’entrées partout dans le monde.

➤ « Lost », ABC Vidéo

vendredi 24 août 2018

Rentrée littéraire - Casablanca, ville de passage


Ichrak, la belle de Casa, est retrouvée morte au petit matin dans la rue du quartier populaire de Cuba. Sese, jeune Congolais bloqué au Maroc dans sa fuite vers l’Occident, est le premier à prévenir le commissaire Moktar Daoudi. Elle est découverte exsangue, « une balafre lui barrait la poitrine et avait découpé son vêtement, une gandoura noire, brodée de fils d’or. » Une plongée immédiatement dans le nœud du drame. Car toute l’enquête qui suivra sera centrée sur la recherche du coupable. Le ré- cit signé In Koli Jean Bofane, auteur d’origine congolaise et vivant à Bruxelles, est surtout prétexte à raconter la vie quotidienne de ce petit peuple marocain. Entre passé et futur, des générations tentent de trouver un équilibre, toujours avec le Chergui, ce redoutable vent du désert pour déstabiliser, énerver. Une sorte de tramontane, mais chaude et étouffante.

Ce roman est aussi l’occasion de comprendre comment toute une population de réfugiés d’Afrique noire fait du Maroc la dernière étape vers cette Europe. On l’a encore vu hier avec le passage massif de dizaines d’hommes dans l’enclave espagnole de Ceuta.

Et pour la petite histoire, dernier clin d’œil à l’actualité, découvrez l’homme de confiance de Daoudi, un certain Choukri, « inspecteur bodybuildé, affublé d’une casquette et d’une lourde chaîne (...), celui qui ressemble au chanteur Booba ».

➤ « La belle de Casa », In Koli Jean Bofane, Actes Sud, 19 €

jeudi 23 août 2018

Rentrée littéraire - Combats de femmes


Quatre femmes dans une Amérique du futur proche se battent à divers niveaux avec la maternité. Quatre femmes dont on suit le quotidien avec une boule au ventre tant le récit de Leni Zumas est magistral dans la montée du drame. Il y a l’épouse, la biographe, la fille et la guérisseuse. La première a deux enfants de 6 et 3 ans. Elle vit avec Didier, son mari. Femme au foyer, elle se sent de plus en plus inutile. Et surtout ne supporte plus ses enfants. La biographe, au contraire désire ardemment un enfant. Mais célibataire elle est tributaire d’une insémination artificielle. Qui ne prend pas. Surtout les nouvelles lois américaines précisent qu’un enfant ne peut être élevé que par un papa et une maman. Sûrement pas par une femme seule, même si elle a une bonne situation professionnelle (professeur qui est en train d’écrire la biographie d’une exploratrice du Grand Nord). La fille, 16 ans, élève de la biographe, panique. Un rapport à la sauvette et la voilà enceinte. Mais dans cette Amérique du futur, l’IVG est devenu un crime. La guérisseuse peut lui arranger son affaire. Mais elle risque de passer quelques années en prison...Dans une langue moderne, où chaque situation s’imbrique au fil des pages, Leni Zumas livre un premier roman d’une incroyable force féministe.

➤ « Les heures rouges », Leni Zumas, Presses de la Cité, 21 €

mercredi 22 août 2018

Rentrée littéraire - Lac, bêtes, forêts : la sérénité


Grosse bouffée d’air pur et de nature sauvage dans ce court roman de la Canadienne Lise Tremblay.

Benoit, ancien dentiste, a pris sa retraite loin de Montréal l’urbaine. Il a acquis et retapé un chalet isolé dans le parc national du Saguenay, au bord du lac. Là loin de la civilisation, il vivote au calme avec son vieux chien Dan. L’automne arrive avec la saison de la chasse. Les esprits s’échauffent, les meilleures gâ- chettes espèrent tuer un caribou. Mais aussi des loups qui semblent s’approcher de plus en plus près des habitations de la petite ville. Benoit n’a que deux voisins. Rémi, sauvage et asocial. Il aime les bêtes. Sans doute car il leur ressemble. Mina, tout aussi sauvage. Mais si Rémi est dans la force de l’âge, Mina est en train de s’éteindre. Seule dans sa maison, elle refuse tout soin.

Benoit, lui, se penche sur son passé. Quand il ne vivait que pour le profit et les week-ends dans le grand nord qu’il rejoignait en pilotant son hydravion. Il a changé du tout au tout. Avec l’arrivée de Dan, son chien, offert par un vieil Indien. Et quand il reçoit un visiteur, le calme et l’ennui s’invitent dans la conversation : « Je pense souvent que ce qui va me faire le plus de peine lorsque je vais mourir, c’est de ne plus voir la nature » explique Benoit qui continue, sur l’ennui: « Je mets de la musique et je regarde le lac. C’est un ennui doux, ça ne rend pas anxieux. » Une langue imagée, poétique, une quiétude éternelle : ce roman donne envie de vivre calmement, loin de la fureur de la rentrée.

➤ « L’habitude des bêtes », Lise Tremblay, Delcourt, 15 €

mardi 21 août 2018

Jaoui - Bacri : la célébrité est-elle un problème de moumoute ?


Un film d’Agnès Jaoui et Jean-Pierre Bacri, dans le paysage souvent morose du cinéma français, ne peut que réjouir le spectateur amateur de rires sarcastiques et de drô- lerie originale. « Place publique » n’échappe pas à la règle. Si vous avez raté le film en salles, n’hésitez pas à faire l’acquisition du DVD ou blu-ray en vente depuis hier. Bacri et Jaoui interprètent un couple séparé. Castro est une vedette de la télévision. Star vieillissante, un peu dé- bordée par les jeunes et les nouveaux écrans. Elle est une idéaliste, toujours en lutte contre les injustices, bien à l’abri matériellement dans l’ombre de son nouveau compagnon, un dentiste triste à mourir. Ils se retrouvent lors d’une fête organisée par la productrice de Castro (Léa Drucker). Une fête où est également conviée la fille de Castro et Hélène. Cette dernière, devenue romancière, va publier une autofiction. Elle y égratigne indirectement ses parents, parlant de la moumoute du père et de l’égoïsme de la mère. Quand ils s’en rendent compte, c’est un véritable procès qui attend la jeune romancière.

Le film, en plus d’enchaîner les situations et répliques cocasses, est un brillant réquisitoire contre la société du spectacle. La télévision, mais aussi les nouveaux médias, en prennent pour leur grade. Avec Jaoui et Bacri, ça saigne et ça fait mal. Il n’y a malheureusement pas de bonus dans les coffrets, mais on se contentera de l’interprétation, sur le générique de fin, de « Osez Joséphine » de Bashung par un Bacri magistral.

➤ « Place Publique », Le Pacte, 14,99 € le DVD et 19,99 € le bluray.

BD - Seuls dans vos cauchemars


Morts, ils sont tous morts les enfants de Seuls, série fantastique de Vehlmann et Gazzotti. Ce n’était pas évident lors des dix premiers épisodes, mais maintenant le doute n’est plus permis. Quand ils se sont retrouvés seuls dans la grande ville désertée de tous ses habitants, ils s’en doutaient un peu. La rencontre avec Saul et son armée d’enfants endoctrinés a confirmé leurs doutes. Ils ne sont pas si seuls, vivent désormais dans les Limbes, peuvent souffrir et bataillent pour rester ensemble.


Dans le 11e titre, centré sur Yvan, réfugié dans une petite ville de pêcheurs en Bretagne, les cauchemars occupent encore une grande place dans le récit. Yvan vivote, économisant ses réserves de conserves et pêchant des araignées de mer dans le port. Première frayeur avec l’arrivée de Camille. La fillette, un peu bêta, a bien changé dans les Limbes. Elle fait peur. Deuxième cauchemar pour Yvan, l’arrivée la nuit du Ravaudeur et son bataillon d’enfants-zombies, les Cloueurs de nuit. Destiné aux adolescents, « Seuls » a dû en faire cauchemarder plus d’un. Ce 11e album va rendre encore plus terrifiantes leurs nuits.

➤ « Seuls » (tome 11), Dupuis, 10,95 €

lundi 20 août 2018

BD - Le cadavre ambulant de XIII Mystery


Dans la famille «Pas de veine », Alan Smith en impose. Ce personnage secondaire de la saga XIII de Van Hamme et Vance bénéficie à son tour d’un album propre dans la collection XIII Mystery. Le principe : pour chaque album (c’est le 12e), un duo différent de scénariste et de dessinateur raconte la vie avant (et parfois après) d’un personnage secondaire. Alan Smith est un jeune américain, parti combattre au Vietnam. Un jeune homme trop sensible, rapidement horrifié par les exactions de l’armée américaine dans les villages viets.


Une indignation qui ne durera pas très longtemps. Dès sa première mission, son groupe tombe dans une embuscade. Début des déboires. Laissé pour mort sur le champ de bataille, il n’est que finalement blessé. Il est récupéré par un hélicoptère abattu en vol. De nouveau indemne, il décide de mourir pour la patrie et met sa plaque d’identification autour du cou d’un cadavre calciné.

Capturé par les communistes, il est torturé, s’évade et se retrouve impliqué dans un trafic de drogue qui le mène de Hawaï au Costa Verde. Mais alors, qui est ce Alan Smith dans la saga de XIII ? Réponse dans les dernières pages. Écrit par Pecqueur, cette histoire est dessinée par Buchet, très à l’aise dans les scènes de combat.

➤ « XIII Mystery » (tome 12), Dargaud, 12 €

samedi 18 août 2018

Série télé - Fallet, rire suédois


Sur Netflix il y a tous les genres de série. De la romance au fantastique en passant par la science-fiction ou le thriller. Et puis dans le rayon humour, on trouve quelques belles pépites passées et présentes. Les Monthy Python, The Crown It (l’ancêtre de The Big Bang Theory) et des trucs plus étonnants encore comme « Fallet ».

Production suédoise avec une grosse dose d’humour anglais, ces huit épisodes de 30 minutes ont tout de la série policière, genre Bron. Mais pas que... Sophie Borg (Lisa Henni) est une policière d’élite. Du moins en est-elle persuadée. Quand elle abat le meurtrier d’Olaf Palme. Elle a visé la cuisse, mais a touché la tête... La bavure de trop. Mutée dans un trou perdu de Suède (sa ville natale), elle est chargée de l’enquête sur le meurtre d’un Anglais. Elle sera épaulée par Tom Brown (Adam Godley), lui aussi très mauvais flic.

Deux bras cassés, des flics locaux encore plus calamiteux, des notables intouchables : le scénario est prétexte à un maximum de scènes hilarantes. Notamment quand la légiste raconte comment la victime est morte. Retrouvé pendu, il a d’abord été vidé de son sang, enseveli, noyé, coupé en deux, recousu et finalement poignardé au bout de la corde...

De la grande parodie, avec un scénario en béton et des acteurs investis dans ces caricatures irrésistibles.

➤ « Fallet », disponible sur Netflix