jeudi 13 janvier 2022

De choses et d’autres - Garanti 100 % lieux communs

 


Écrire tous les jours un journal de plus de 30 pages est un exercice compliqué. Difficile d’être original à tous les coups. Les lieux communs parfois compliqués à éviter et à surveiller comme le lait sur le feu. Moi-même dans cette chronique quotidienne qui essaie de jeter un pavé dans la mare, je fais un peu figure d’hôpital que se fout de la charité.

 

Personne pour me faire une haie d’honneur quand mine de rien, j’évite le gouffre sans fond et parvient à remettre l’église au centre du village. Au contraire, j’ai plus droit à un torrent d’injures quand je fustige le fossé des générations provoquant une faille dans le système. Certes quelques noms d’oiseaux ce n’est pas la mer à boire, pas de quoi avoir du vague à l’âme et chercher à se cacher dans un trou perdu. Il faut que je me fasse une raison, je ne serai jamais un phare dans la nuit, mes petites chroniques ne mettent pas le feu au lac, elles sont surtout source d’ennuis.

Mes idées font office de moulin à paroles et sont comme une montagne qui accouche d’une souris. J’ai beau me dire que les petits ruisseaux forment les grandes rivières, à l’arrivée mes écrits ne sont qu’un long fleuve tranquille. Pour terminer, j’avoue que je préfère rester dans ma zone de confort, ne pas quitter mon pré carré : il est si dur d’aller voir si l’herbe est plus verte ailleurs.

(Merci à M. la Mine et sa carte des lieux communs).

Chronique parue en dernière page de l’Indépendant le vendredi 14 janvier 2022

mercredi 12 janvier 2022

Série télé - Suivrez-vous la Corde jusqu’au bout ?


Une corde au milieu de la forêt. Une simple corde, cheminant entre les arbres, à même le sol. Il en faut parfois peu pour insuffler suspense, peur et fantastique dans une série. La corde, œuvre de Dominique Rocher et Éric Forestier en trois épisodes, déjà disponible sur Arte.fr et diffusée le 27 janvier à partir de 20 h 55, raconte cette étrange découverte qui a le don d’intriguer des scientifiques isolés dans une station de télescopes européens basée en Norvège.

C’est le chef de la base qui tombe le premier sur cette corde. Au bord du chemin, loin de tout. Car cette base vit en autarcie. Pour ne pas perturber les signaux reçus par les immenses antennes paraboliques, pas de téléphone portable ni de radio. Juste des bois à des dizaines de kilomètres à la ronde. Ils vivent en vase clos. Alors que vient faire cette corde ? D’autant qu’elle génère une seconde interrogation, encore plus intrigante : jusqu’où va-t-elle ? Serge (Jean-Marc Barr), chargé de la surveillance du domaine, la suit sur plusieurs kilomètres, sans en trouver la fin. Un dimanche, un petit groupe décide de partir en promenade pour savoir ce qu’il y a au bout. C’est le début d’un long calvaire doublé d’un cauchemar. Tel un film d’horreur, les accidents et morts violentes vont d’enchaîner. 

À la base, Agnès (Suzanne Clément) la femme du chef de base, aveugle, reste dans les labos à écouter les étoiles. Mais quand elle constate que ses collègues et son mari ne rentrent pas, elle commence à s’inquiéter. Les trois épisodes racontent en parallèle la quête du petit groupe le long de la corde et l’attente angoissante de ceux qui sont restés à la base. Deux réalités presque parallèles où on a l’impression que le temps n’a plus la même emprise. 

Avec des moyens limités, La corde parvient à passionner le spectateur, notamment sur les réactions de plus en plus irrationnelles des membres du groupe. Et on se surprend à se demander : « Et moi, jusqu’où je serais allé pour savoir ce qu’il y a au bout de cette satanée corde ? »  

De choses et d’autres - Un bus et des cyclistes

 


Les sportifs me feront toujours un peu de la peine. Pas les compétiteurs, les champions qui font ça pour de l’argent, beaucoup d’argent, mais les sportifs d’opérette avec maillots fluorescents, persuadés qu’en marchant 3 minutes sur un tapis roulant ou en ahanant 20 secondes sur un rameur, ils vont se forger un corps de rêve malgré les menus complets du midi, les apéros quotidiens et les chips du soir dans le canapé en regardant la dernière série Netflix.

 

Ils ne perdent pas un gramme de graisse, juste de l’argent car un abonnement à la salle, ce n’est pas donné. Mais il y a pire que ces spécimens. Aux États-Unis, une salle propose des séances en extérieur.

Un concept révolutionnaire.

Au lieu d’installer les vélos d’appartement entre quatre murs face à des miroirs pour s’admirer en plein effort, ils ont placé les engins dans un bus. Ainsi, les sportifs pédalent tout en admirant le paysage car le bus se déplace. Voilà comment un génie du réchauffement climatique est parvenu à rendre le vélo, d’appartement en plus, émetteur de CO2 ! Là-bas, même en pédalant, on pollue. Alors qu’il serait si simple de prendre de véritables vélos et de se balader sur des pistes cyclables.

En réalité cette idée est uniquement destinée aux mous de la pédale. Car quand on est dans la nature, pour rentrer chez soi, il faut des mollets. Dans un bus, on peut arrêter de pédaler, aller au distributeur de friandises, acheter de la nourriture bien grasse et l’ingurgiter en attendant que le chauffeur nous amène à destination. Et ça se dit sportif !

Chronique parue en dernière page de l’Indépendant le jeudi 13 janvier 2022

mardi 11 janvier 2022

Cinéma - “Licorice Pizza” : ils courent après l’amour

Gary (Cooper Hofffman) navigue à vue entre jeux de l’adolescence et découverte de l’amour avec la tornade Alana (Alana Haim).  Metro-Goldwyn-Mayer
  

En 1973, Alana et Gary, adolescents américains, se rencontrent, se découvrent et se trouvent.

Rayon de soleil dans la grisaille du quotidien de cette triste nouvelle année, Licorice Pizza, de Paul Thomas Anderson, raconte une histoire d’amour aussi simple que belle. Une romance, tout sauf liquoreuse, portée par deux acteurs débutants, d’une fraîcheur et d’un réalisme époustouflants. 

Le jour de la photo de classe, dans ce lycée de Californie, chaque élève attend qu’on l’appelle pour se faire tirer le portrait. Gary (Cooper Hoffman) attend sagement, quand il remarque Alana (Alana Haim). C’est l’assistante du photographe. Elle propose peigne et miroir pour une dernière retouche. Gary l’aborde, et tout en faisant semblant de se regarder dans le miroir, la dévore des yeux et l’invite à dîner le soir même. Cette première scène donne le ton. On découvre un Gary, très sûr de lui malgré ses 15 ans et une Alana, à l’écoute et très rapidement sous le charme du bagou de l’ado, par ailleurs comédien. Gary, qui fait plus que son âge, passe une jolie soirée avec Alana qui, elle, semble plus jeune que ses 25 ans. Un film classique aurait brodé à l’infini sur cet amour naissant, alternant minauderies, tromperies et retrouvailles. 

Dans Licorice Pizza, Gary et Alana vont devenir amis puis associés, ne cherchant jamais à se conquérir, tout en restant très attentifs aux désirs de l’autre. Ils se tournent autour dans cette Amérique à l’arrêt, frappée par le choc pétrolier. Et courent beaucoup. Pour s’échapper après une bêtise, pour fuir la famille ou la réalité, parfois difficile à admettre. Et, finalement, l’un vers l’autre, quand leur situation sentimentale devient intenable. On sort de la projection les yeux humides et un peu groggy. La faute aux deux comédiens, véritables révélations de Licorice Pizza. 

Deux inconnus, mais que Paul Thomas Anderson voulait absolument faire tourner. Il connaissait le potentiel d’Alana Haim pour avoir réalisé plusieurs clips de son groupe rock Haim. Quant à Gary Hoffman, c’est le fils de Philip Seymour Hoffman, comédien disparu en 2014, avec qui le réalisateur avait tourné plusieurs de ses films.

 Licorice Pizza devrait réconcilier les derniers sceptiques avec la puissance du cinéma de qualité. 

Le film collectionne déjà 4 nominations aux Golden Globes, dont celles de meilleure comédie, de meilleur acteur et de meilleure comédienne. 

Film de Paul Thomas Anderson, avec Alana Haim, Cooper Hoffman, Sean Penn, Bradley Cooper


DVD - Attention au départ, sympathique galère ferroviaire

 

Souvenez-vous la joie des départs en vacances en train de nuit. Le film « Attention au départ ! » de Benjamin Euvrard agit un peu comme une madeleine pour ceux qui ont eu la chance de dormir dans une couchette, heureux de se réveiller en vacances loin de chez soi. 

Mais dans cette comédie qui vient de sortir en DVD chez M6 Vidéo, la nuit en question est très agitée. Normal, au moment du départ, les six enfants sont seuls dans le train, les deux adultes chargés de les accompagner restant sur le quai. Ces deux grands idiots sont interprétés par Jérôme Commandeur (père d’un des gamins) et André Dussollier (grand-père de deux autres).

 Pendant que les jeunes font les 400 coups dans le wagon et tournent en bourrique le contrôleur (Jonathan Lambert), les adultes traversent la France en voiture, ambulance et… pédalo. 

Une excellente comédie, rythmée et truffée de gags.

De choses et d’autres - Le fondement de la recherche médicale

 


Après le retard annoncé du vaccin français de Sanofi contre le Covid, c’est une autre société tricolore qui a dû reculer le mois dernier face à la pandémie. L’Institut Pasteur menait un test pour déterminer si le médicament clofoctol avait un pouvoir d’inhibiteur de la réplication du Sars.

 

Un budget avait été voté pour un essai clinique sur la durée. Il fallait trouver entre 350 et 700 patients, âgés de plus de 50 ans, non-vaccinés et présentant au moins un symptôme du Covid-19. Mais après de longues démarches et recherches tous azimuts, l’Institut Pasteur n’avait recruté qu’une douzaine de patients volontaires. Une première raison de ce fiasco s’explique peut-être par la forme du médicament : un suppositoire. Un traitement de deux suppositoires par jour à prendre durant cinq jours. D’accord, ce n’est jamais très agréable le suppositoire, pas au niveau de la piqûre, mais plus que le comprimé à avaler.

Cependant, à bien regarder le profil des cobayes recherchés, on s’aperçoit que des Français de plus de 50 ans non-vaccinés, en décembre dernier, ce ne peut être que des personnes qui ont délibérément fait le choix de sauter la case Pfizer ou Moderna.

Alors vous pensez bien que trouver parmi les antivax des volontaires pour que la science s’immisce en eux par la voie basse, c’était peine perdue.

Persuadés sans doute, comme le prétend une des fake news qui tourne en boucle depuis des mois, que le suppositoire est plus pratique pour enrober et cacher la fameuse puce de géolocalisation que les géants d’Internet cherchent à implanter à l’ensemble de la population mondiale.

Chronique parue en dernière page de l’Indépendant le mercredi 12 janvier 2022

De choses et d’autres - Les deux mondes d‘après

 


Il y a un peu plus d’un an est apparu partout le concept de monde d’après face au monde d’avant. On était persuadé, il y a quelques mois, que l’épreuve de ce premier confinement et de cette pandémie allait nous permettre de resserrer les liens avec nos proches, d’avoir plus d’empathie, de modifier nos modes de vie. Que de ce malheur sortirait un monde d’après forcément meilleur.

 

On est en 2022 et on déchante.

Le monde d’après se limite à constater qu’il y a en fait deux pôles totalement opposés. D’un côté ceux qui font confiance à la science, persuadés que les vaccins contre le Covid nous protège du pire, de l’autre ceux qui refusent ces traitements forcément suspects car trop vite mis au point.

Dans l’absolu, dans le monde d’après des premiers, toute la population étant vaccinée, le Covid serait redevenu ce qu’il était dans l’esprit de certains au tout début : une « grippette ». Plus de classes fermées, plus de services de réanimation débordés, plus de contraintes liées à un passe vaccinal.

À l’opposé, le monde d’après des seconds serait redevenu sûr grâce à l’immunité collective naturelle. Tout le monde aurait déjà attrapé le Covid qui ne serait donc qu’un mauvais souvenir.

Le problème de notre société clivante, c’est que les deux mondes sont obligés de coexister. Conséquence, les avantages des deux possibilités s’annulent. Ne restent que les inconvénients. Dans le premier, malgré la vaccination, le virus circule toujours. Dans le second, seul le virus circule en toute liberté, les non-vaccinés ne pouvant plus voyager ou aller au restaurant.

Deux mondes d’après totalement incompatibles et parfaitement irréconciliables.

Chronique parue en dernière page de l’Indépendant le mardi 11 janvier 2022

lundi 10 janvier 2022

Les hautes herbes, mini-série sur Arte


Streaming. Arte ne cesse de rajouter du contenu inédit à son offre de streaming gratuit. La chaîne culturelle offre ses nombreuses productions comme cette mini-série signée Jérôme Bonnell. Le cinéaste, qui vient de sortir au cinéma « Chère Léa », propose dans trois épisodes de 50 minutes une plongée dans les méandres de la vie de province. 

« Les hautes herbes » débutent par une chute. Au mois d’août, Eve (Emmanuelle Devos), tombe d’une échelle en ramassant des prunes. Mounir, ouvrier agricole, de la route, voit l’accident et vole à son secours. Deux jours plus tard, pour le remercier, Eve décide de lui donner un pot de confiture. Mais Mounir a disparu. Elle va dès lors tout faire pour découvrir ce qui est arrivé à son sauveur. 

Construite comme un thriller, avec fausses pistes et victimes innocents, cette série est également portée par les interprétations de Louise Chevillotte, Jonathan Couzinié et India Hair.

Cinéma - On lève la tête pour Don’t look up


Attendu par nombre de fans, le nouveau film d’Adam McKay s’est révélé être un parfait cadeau de Noël. Mis en ligne au niveau mondial le 24 décembre sur Netflix, la société productrice, Don’t look up bénéficie d’un casting cinq étoiles, de Leonardo DiCaprio à Cate Blanchett en passant par Jennifer Lawrence et Meryl Streep. 

Le top du cinéma américain pour une histoire moins marrante qu’il n’y paraît. Pourtant Adam McKay est connu pour ses comédies parfois un peu potaches. Mais en écrivant cette fantaisie apocalyptique, il franchit un cap. Certes on rit souvent, les situations sont cocasses et la critique de la société US féroce, mais le fond du récit a tendance à faire froid dans le dos. Certains y ont vu une façon de vilipender l’inaction des USA face au réchauffement climatique ou la pandémie. 

Tout commence par une belle découverte. La jeune doctorante Dibiasky, un peu gothique, sans doute gauchiste et écolo, identifie une comète. C’est la fête dans l’observatoire. Son professeur, le Dr Randall Mindy ouvre le champagne. Ça se gâte quand il calcule la trajectoire de cet objet spatial mesurant plus de 10 km de diamètre. Dans six mois exactement, il va s’écraser sur terre et détruire toute vie de la surface. Il faut réagir. Alors ils tentent de prévenir l’État, la présidente US, l’armée. Pas une bonne idée : avant de sauver la planète, il faut gagner les élections… 

Les scènes dans la Maison Blanche sont sans doute les plus corrosives. Reste la solution des médias. Mais là aussi, comment la fin du monde peut-elle faire le poids face à la réconciliation, en direct, entre une chanteuse pop et son mari infidèle, rappeur ? Le film constate qu’en fait, apocalypse ou pas, les Humains restent fascinés par les minuscules tracas et informations insignifiantes de leurs tristes petites vies.

 Et quand la comète est si près de la terre qu’elle en devient visible à l’œil nu, le mot d’ordre le plus suivi est « Don’t look up », soit « Ne levez pas les yeux » pour continuer de ne pas voir l’inéluctable catastrophe.  

De choses et d’autres - Un sondage en mauvaise santé


 

Si certains journaux comme Ouest France par exemple ont décidé de se passer de sondages pour cette présidentielle, d’autres vont profiter des créneaux laissés libres pour multiplier les enquêtes d’opinion. Avec parfois des questions assez déconcertantes comme celle posée pour le Journal du Dimanche paru hier : « Quel est le candidat à la présidentielle, selon vous, qui ferait mieux qu’Emmanuel Macron en matière de gestion de la pandémie s’il était au pouvoir ? ». La réponse majoritaire est bien évidemment « Aucun ».

 

Pas si étonnant tant la santé est affaire de spécialistes. Pour trouver meilleur que le banquier Macron, ce n’est pas chez l’avocate Marine Le Pen, le polémiste (quelle drôle de profession, pas très positive et peu constructive) Zemmour, encore moins l’inspectrice du travail Anne Hidalgo qu’il faut chercher des lumières. Qu’auraient-ils pu faire de mieux quand la France était en pleine pénurie de masques et face à l’absence de vaccin en 2020 ? Ils n’auraient même pas pu dénoncer cet état de fait puisqu’en tant que simples candidats, ils n’ont pas accès aux dernières études des scientifiques.

Non, face à cette question légèrement orientée, les Français sont obligés de répondre que personne n’aurait pu mieux gérer la crise sanitaire que le président actuel. Pour avoir une chance de trouver mieux il aurait fallu taper un peu plus haut, du genre De Gaulle ou Mitterrand.

Ou chercher des figures médicales d’envergure comme Pasteur. Le risque bien évidemment c’est que certains aient la tentation de ressortir le dr Douste-Blazy de la naphtaline. Ou pire, de proposer le nom du professeur Raoult à la primaire citoyenne.

Chronique parue en dernière page de l’Indépendant le lundi 10 janvier 2022