lundi 6 février 2017

BD : "Le projet Bleiberg" ou le surhomme à travers les âges

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A la base, « Le projet Bleiberg » est un thriller en trois parties écrit par David Khara. Adapté par Serge Le Tendre, il devient une BD dans l’air du temps avec complot nazi et guerre des services secrets. Le personnage principal a tout pour être haï. Jeremy Corbin est un trader américain. Jeune, millionnaire, il tue un bébé avec sa décapotable. Il évite les poursuites mais déprime. La mort de son père va bouleverser sa vie. Ce militaire US était au centre d’un secret datant des années 40, quand les Nazis tentaient de créer un surhomme pour purifier la race aryenne. Jeremy, après de multiples tentatives d’assassinat, reçoit la protection d’une belle espionne américaine et d’un géant du Mossad. Album palpitant et remuant, dessiné par un Frédéric Peynet au sommet de son art.
➤ « Le projet Bleiberg » (tome 1), Dargaud, 13,99 € 

De choses et d'autres : Marcel le tempétueux

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Quelle drôle d’idée de donner des pré- noms aux tempêtes. J’ai connu ça pour les cyclones quand je vivais outre-mer. J’ai passé une nuit assez éprouvante quand Hugo a frappé les Antilles en septembre 1989. Par chance il a en partie épargné la Martinique où je travaillais à l’époque pour se déchaîner sur la Guadeloupe. Peu de chose à côté de Firinga, autre cyclone passé juste au-dessus de la Réunion en janvier de la même année. Deux ouragans dans la même année, sensations fortes garanties.
Hugo et Firinga resteront à jamais gravés dans ma mémoire. Il en sera certainement de même pour Marcel qui a traversé le sud-ouest de la France hier soir. Mais pas pour la même raison. Car Marcel le tempétueux est aussi le nom d’un de nos trois chats. Or Marcel n’a rien d’un foudre de guerre capable de gros dégâts.
Ce gentil et pacifique bâtard noir et blanc, recueilli il y a plus de cinq ans, a officiellement été nommé « Petit Marcel » après être passé entre les mains des vétérinaires de l’association de « L’école des chats » de mon village. De petit il est vite devenu gros. Il a doublé de volume, dédaignant les croquettes light pour se goinfrer de granulés plus goûteux. Notre cher gros Marcel, si peureux. Pour le passage de son homonyme météorologique, il est resté prudemment lové sur le canapé, ne se levant que pour vider la gamelle ou gratter dans la litière. Franchement, Marcel est inoffensif à un point tel que donner son nom à une tempête est au mieux incongru, au pire ridicule. 

dimanche 5 février 2017

BD : Compostelle, son chemin et ses ampoules

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A 50 ans, Jason, dessinateur norvégien installé à Montpellier, décide de faire le chemin de Compostelle. Pourquoi ? Les autres marcheurs lui posent souvent la question. Il la transforme en gag récurrent quand il répond : « C’était ça ou acheter une Porsche ». S’il veut faire ces 300 km de Bayonne à l’Océan, c’est aussi pour améliorer sa relation avec les autres. Mais il n’y parvient pas toujours, passant souvent ses soirées seul dans des gîtes pourtant remplis de pèlerins. Ce récit, en noir et blanc de 190 pages, donne parfois envie de faire son sac et de partir dans la foulée à la recherche d’une spiritualité qui nous fait défaut dans notre vie quotidienne si stressante. Sauf si on est allergique aux ampoules aux pieds, aux punaises de lit et aux tortillas au petit-déjeuner...
➤ « Un Norvégien vers Compostelle », Delcourt Shampooing, 15,50 €


samedi 4 février 2017

BD : L’art grandeur nature dans "Le Retour" de Bruno Duhamel

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Librement inspiré de la vie et l’œuvre de Cesar Manrique sur l’île de Lanzarote aux Canaries, « Le retour » de Bruno Duhamel est sa première BD en solo. Il a déjà illustré des scénarios de Brrémaud ou Kris et vole désormais de ses propres ailes dans ce roman graphique épuré. Dans les années 60, Cristobal, un artiste espagnol, après être devenu célèbre aux USA, revient sur sa terre natale, petite île volcanique perdue dans l’océan. Il décide de modeler le paysage de son enfance, transformant la nature en œuvre d’art. Réflexion sur la création, la solitude et le progrès, cette histoire qui finit mal aborde aussi la problématique du tourisme de masse. Car Cristobal milite pour un développement écologique et minimaliste, sans béton ni épuisement des réserves en eau. Un visionnaire pour l’époque qui rapidement déclenche l’hostilité des « décideurs », bien décidés à faire fructifier leur caillou en offrant ce que veulent les touristes : confort, soleil et piscine.
➤ « Le retour », Bamboo Grand Angle, 18,90 €.


De choses et d'autres : Python d’oreille

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On ne se félicitera jamais assez des effets bénéfiques des réseaux sociaux sur notre moral quotidien. Le moral plombé par le PenelopeGate, l’attaque au Louvre ou tout simplement la météo, on ne peut que relativiser ces « broutilles » face à certaines informations.
Comme la mésaventure arrivée à cette adolescente américaine. Pas banale l’ado. Une gothique avec tempes rasées et gros trou dans l’oreille destiné à y encastrer ces anneaux de plusieurs centimètres de diamètres. Comme beaucoup de ses congénères, elle décide de prendre des selfies avec son animal de compagnie favori, Bart de son petit nom. Elle aurait pu avoir un rat. Mais Bart est un python, encore bébé heureusement. Le serpent, sans doute pour protester contre l’usage abusif de son image, décide de visiter le lobe si accueillant de sa propriétaire. Et y reste bloqué…
Panique de la jeune fille qui publie un SOS sur Instagram, nouvelles mœurs nouvelles pratiques. Résultat, elle et Bart deviennent les vedettes de la toile durant 24 heures. Il faudra l’intervention des secours et de beaucoup de lubrifiant pour la tirer de ce mauvais pas. Et parvenir à nous faire sourire malgré tout. 

vendredi 3 février 2017

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Dany Boon a un immense talent. Il sait faire rire avec peu de choses. Mais il a aussi la mauvaise habitude de se répéter dans ses rôles et surtout de se prendre pour un jeune premier ou un acteur au fort potentiel dramatique. « Radin ! », film signé Fred Cavayé, avait tout pour devenir une comédie culte. Il suffisait d’en faire des tonnes dans le portrait de ce radin congénital. Mais comme le héros doit s’amender, la seconde partie de l’histoire tente de nous tirer des larmes de ce personnage pathétique. Dommage.
➤ « Radin ! », TF1 Vidéo, 12,99 € le DVD, 16,99 € le blu-ray


De choses et d'autres : Pour une poignée de milliards

facebook,capital,milliards,bénéfices10,2 milliards de dollars de bénéfices en 2016. Les rares voyants qui ont pré- dit l’effondrement de Facebook en sont pour leurs frais (et peuvent changer de métier). Le géant des réseaux sociaux, loin de perdre des parts de marché face aux Twitter, Snapchat et autres gadgets destinés aux plus jeunes, a vu son chiffre d’affaires progresser de 57 % en un an. Bientôt 2 milliards d’utilisateurs « likeront » à tour de bras.
Un rouleau compresseur impossible à arrêter, devenu phénomène de société mondial aussi important que la télévision ou les smartphones à une époque. A la diffé- rence que Facebook ne partage pas le gâteau. L’essentiel des revenus de la publicité présente sur vos pages file directement dans les poches de Marck Zuckerberg et de ses quelques associés. Ne cherchez plus les maîtres du monde, ce sont eux. Cela ne durera pas. Forcément. Ainsi va la vie, une succession de grands bouleversements. Un auteur de science-fiction pourrait en tirer un bon roman.
Dans quelques siècles, après un big bang, des chercheurs extraterrestres découvrent un serveur miraculeusement préservé. Ils extraient les données et reconstituent la vie au début du XXIe siècle. Ils ne voient que chats mignons, chutes de skate, accidents de voitures, photos de vacances et assiettes de nourriture. Travail ? Presque rien. École. Très peu ! Comme si les « faits alternatifs » chers à l’administration Trump constituent déjà la réalité de nos vies virtuelles, seules traces de notre passage sur terre.

jeudi 2 février 2017

Cinéma - Soko redonne vie et grâce à Loïe Fuller, « La danseuse »


Un corps massif, un visage rarement rieur, une démarche lourde et une propension à cacher ses formes sous des couches de tissus : Loïe Fuller n’avait rien pour faire carrière dans le spectacle, aux Folies Bergères notamment. Pourtant cette jeune franco-américaine, en débarquant de son Far-west natal à la fin du XIXe siècle, va devenir en quelques spectacles la coqueluche du tout-Paris. Son secret, animer des mètres de soie grâce à d’immenses bâtons dans des lumières fortes avec des variations de couleur.


Cette danse du serpentin qu’elle a inventé à New York, presque par hasard, va le rendre très célèbre à Paris. La presse est enthousiaste, le public conquis. Elle décroche même un engagement à l’opéra de Paris. Le film de Stéphanie Di Giusto, présenté à Cannes, a fait forte impression. Il offre un beau premier rôle à Soko, actrice française atypique. Un rôle physique qu’elle affectionne, où les entraînements ne sont pas simulés. Car le drame de Loïe Fuller est tout entier dans sa technique. Trop éprouvante, usante, fatigante, elle lui détruit le corps. Sans compter les dégâts occasionnés à ses yeux par les projecteurs électriques. Sa carrière comme sa gloire, sont très éphémères. Mais des années plus tard sa trace est toujours là car beaucoup la considèrent comme la première étoile de la danse contemporaine.
Le film sort en DVD et blu-ray alors qu’il fait un carton presque plein pour les nominations aux César. Soko pour la meilleure actrice mais également Mélanie Thierry pour le second rôle féminin, Gaspard Ulliel pour le second rôle masculin et la très jeune mais très talentueuse Lily-Rose Deep dans la catégorie révélation féminine pour son interprétation d’Isadora Duncan, autre danseuse américaine qui a littéralement volé la vedette à Loïe Fuller dans le Paris des années folles. On rajoute une sélection parmi les meilleurs premiers films et deux nominations techniques (décors et costumes) et on comprend que cette « Danseuse » a tout pour plaire au plus grand public.
 ➤ « La danseuse », Wild Side Vidéo, 19,99 €.

De choses et d'autres : Marketing fumeux

tabac, santé, touraine, cancer, cigarettesOn ne plaisante plus dans la lutte contre le tabagisme en France. Après les paquets neutres et les fortes augmentations de prix, le ministère de la Santé s’attaque au marketing. Marisol Touraine a annoncé l’interdiction pure et simple de certaines « marques qui sont attractives, qui donnent le sentiment que fumer ces cigarettes c’est chic. » Sont visées les Fine, Corset, Allure et autres Vogue. Beaucoup plus longues et étroites que les classiques elles ne sont pas moins nocives, au contraire, mais plus classes, plus élégantes au bout des doigts des femmes modernes. Les cigarettiers avaient trouvé cette astuce pour dédiaboliser un produit accusé de causer des milliers de morts chaque année. Une trouvaille marketing décriée par le gouvernement qui sort l’arme fatale de l’interdiction. De la marque seulement, pas du produit. Mesdames vous pourrez toujours griller avec élégance votre clope « slim » mais elle portera un autre nom. Les équipes sont à la recherche d’autres appellations.
Je ne suis pas un très bon publicitaire mais pourquoi ne pas proposer des termes explicites, tout en rappelant avec délicatesse le bon goût et le luxe à la française. Craquez pour la « Goudron N° 5 », un maximum de saleté dans vos poumons, mais avec la délicieuse fragrance d’un grand parfum. Ou l’« Insane-Laurent », pour l’achat de dix cartouches vous aurez droit à une petite robe noire, celle que vous porterez dans votre cercueil, une fois morte d’un cancer. 

mercredi 1 février 2017

Cinéma : « Jackie », la veuve ensanglantée

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Jackie Kennedy était à côté de son mari quand une balle lui a explosé la tête. Le film de Pablo Larrain raconte ce drame du point de vue de la First Lady, interprétée par Natalie Portman.


Trois jours. Le film de Pablo Larrain présenté comme un biopic ne couvre en réalité que trois jours de la vie de Jackie Kennedy, celle qui reste la plus célèbre des First Lady. Du 22 novembre 1963, date de l’assassinat de John Fitzgerald Kennedy au 25, date de ses obsèques.
Les amateurs de grandes histoires romantiques avec sanglots et bonheur pour ponctuer les grandes dates d’une vie en auront pour leurs frais même si quelques flash-backs permettent un peu de contextualiser la vie du couple Kennedy à la Maison Blanche, notamment lors d’un concert prestigieux de Pablo Casals. Le cinéaste chilien, pour son premier film en anglais, tourné en grande partie à Paris, a pris le parti de se concentrer sur la vision de cette femme, à qui tout réussit, adulée des foules, qui voit sa vie s’écrouler en trois jours. Non seulement elle perd son mari dans des conditions abominables (elle a tenté de remettre le cerveau en miettes de son époux dans le crâne ouvert alors que la décapotable filait à vive allure vers un hôpital), mais elle devra quitter dans l’urgence cette Maison Blanche qu’elle aimait tant, se retrouvant quasiment à la rue si la famille Kennedy ne lui était pas venue en aide.
■ Confessions
Le film débute par l’arrivée d’un journaliste américain chargé de recueillir la première interview de Jackie Kennedy (Natalie Portman) une semaine après les obsèques de son mari. Une femme qui fume cigarettes sur cigarettes, qui se confie sans peine mais ponctue chacune de ses déclarations par un intransigeant « Vous ne publierez pas cela ». Elle entend conserver jusqu’au bout l’imprimatur de sa vie, comme pour mieux préserver la mémoire de son mari, éphémère président qui n’a pas eu le temps de réaliser ses projets, obligé, dans l’urgence, de gérer la crise des missiles à Cuba. Natalie Portman incarne la partie la moins connue de la vie de Jackie, l’épouse et mère, soumise et dépendante d’un homme devenu trop puissant et éloigné d’elle. Elle reste longtemps dans le tailleur rose Chanel, taché du sang de son mari, à tenter de comprendre, de réaliser ce qui s’est passé. C’est dans cette tenue souillée qu’elle assiste à la prestation de serment du vice-président Johnson dans l’avion présidentiel. Elle ne se changera qu’une fois revenue, seule, dans la Maison Blanche qu’elle a considérablement embellie durant ses deux années de présence.
Dès le lendemain, il faut qu’elle organise les obsèques avec le frère Bobby (Peter Sarsgaard) mais aussi qu’elle fasse ses cartons : la femme de Johnson est déjà dans les couloirs en train de donner des ordres pour changer la décoration et les tapisseries. Grâce à des images d’archives, l’intérieur de la bâtisse a été reconstitué, permettant à Natalie Portman de déambuler, en veuve nostalgique, dans ces pièces chargées d’histoire. Un dernier tour dans son royaume de Camelot comme elle l’explique au journaliste.
Solide au niveau reconstitution historique, le film de Pablo Larrain évite les trémolos, gommant toute émotion, comme si face à ce bouleversement mondial d’ampleur, les sentiments s’effaçaient au profit de la raison d’État.