mercredi 14 janvier 2015

DE CHOSES ET D'AUTRES - Et si on rigolait un peu ?

En ce mercredi, jour de sortie de Charlie Hebdo et du Canard Enchaîné, il est temps de sécher nos larmes et de se fendre la poire. Les humoristes des radios, obligés de solliciter nos zygomatiques au quotidien, n'ont pas attendu une semaine pleine pour ressortir quelques vannes savoureuses. De même, sur Twitter et les sites parodiques, l'horreur des attentats n'a pas freiné l'inventivité de certains. Une dérision, un esprit, typiquement français. Du Charlie, pur et dur. Dimanche, pour une fois que François Hollande sortait nu tête dans la rue, il n'a pas plu. Un pigeon lui a cependant rappelé qu'il n'y a pas que de l'eau qui tombe du ciel. 
Un célèbre journaliste télévisé pose cette question surréaliste à propos des frères Kouachi : « Est-ce que ces hommes sont dangereux ? » En laissant douze cadavres derrière eux, on est enclin à le penser, même sans être un grand spécialiste du terrorisme. 
Mais comme toujours, Nicolas Sarkozy remporte la palme des moqueries. Lors de la marche des 50 chefs d'Etat, il a clairement joué des coudes pour s'inviter au premier rang. Le temps d'une photo. Ce n'était plus « où est Charlie ? » mais « Cherchez l'intrus »... Heureusement pour lui, les Français aiment la dérision. Au lieu de le discréditer à jamais pour cette pathétique crise d'égo, ils se sont contenté de se moquer de lui. « Nico tape l'incruste » est devenu le dernier jeu à la mode sur le net. Sa bobine a été rajoutée dans des photos historiques comme la chute du Mur de Berlin, la conférence de Yalta ou les obsèques de Kennedy. En temps normal, Charlie aurait même pu en faire sa Une. 

Chronique parue le mercredi 14 janvier en dernière page de l'Indépendant. 

Cinéma - Les débuts d'une longue guerre dans "Loin des hommes"

L'Algérie du milieu des années 50 est sur le point de basculer dans une guerre qui ne veut pas dire son nom. « Loin des hommes » raconte comment la violence a gagné au milieu du désert.

Une école perdue dans une vallée de l'Atlas. Un bâtiment isolé, où l'instituteur est le seul lien avec cette France colonisatrice. Chaque matin quelques dizaines de gamins marchent sur de longues distances pour apprendre à lire et écrire. En 1954, ce havre de paix et de savoir est un peu à part. Il n'y a que des « indigènes » sur les bancs. A Alger, commence à se poser la question de maintenir cette structure. Radu (Viggo Mortensen), l'instituteur, vit tel un moine cette existence solitaire. Pour lui, seuls ses « enfants » comptent. Il reste persuadé qu'éduquer est la seule réponse à tous les problèmes actuels et futurs. Un point de vue peu partagé, tant par les colons que les premiers rebelles.

Le décor planté, David Oelhoffen, le scénariste et réalisateur de ce film, peut montrer la tension qui monte, inexorablement. Alors que les enfants égrennent le nom des fleuves français (la Garonne, la Loire, la Seine), le moindre bruit de sabots se transforme en danger. Les nouvelles ne sont pas bonnes. Les attentats se multiplient, les représailles de l'armée française aussi. Un matin, le gendarme arrive à l'école. Il tire un jeune paysan entravé, Mohammed (Reda Kateb). Il a tué son cousin. Une histoire de vol de grain. Le gendarme s'en désintéresse. Il doit vite retourner dans la vallée patrouiller. La menace se précise. Sa mission n'est que de remettre Mohammed à Radu mour qu'il le conduise à la grande ville où il sera jugé et très certainement condamné à mort. Radu refuse. Et se justifie : « Je suis instituteur ! » Le gendarme s'en moque, laisse le jeune arabe sur place et donne à Radu un révolver...

Mortelle tradition
« Loin des hommes » est une histoire de rencontre. La rencontre d'un occidental avec un quasi illétré. Un homme qui a foi en l'Humanité et un autre qui tente de respecter la tradition. En tuant son cousin, il sait qu'il doit payer de son sang son acte. S'il fuit, la vengeance se déplacera sur ses jeunes frères. Il a donc décidé de se livrer à la justice française. S'il est exécuté par la justice française, c'en sera terminé. S'il est tué par la famille du cousin, ses jeunes drères devront à leur tour le venger. Une spirale sans fin où la mort semble la seule solution. Radu va tenter de trouver une autre solution, un scé »nazrio qui épargnerait des vies. En fuite, dans les montagnes de l'Atlas si inhospitalières, Radu et Mohammed vont aller de danger en danger. La famille du paysan, puis les rebelles et aussi l'armée française. Le salut viendra, comme souvent dans l'Histoire de l'humanité, des femmes. Un message évident que ne renierait pas les libre-penseurs de Charlie Hebdo morts la semaine dernière. Un slogan qui devrait toujours être présent à l'esprit des combattants : « Faites l'amour, pas la guerre ».

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L'école peut-elle sauver le monde ?

Adapté d'une nouvelle d'Albert Camus, « Loin des hommes » met en scène un instituteur. Au début du film et à la fin, on le voit apprendre aux enfants, de petits bergers encore insouciants, à lire et écrire. Une arme redoutable. Comprendre, s'exprimer, raisonner, réfléchir...


Ce combat est beau. Mais on sait qu'il n'est pas suffisant. La suite des événements en Algérie ont prouvé que la connaissance est souvent balayée par un simple tir de fusil ou une rafale de kalachnikov. Ce travail d'éducation, partout, est toujours aussi important. Le personnage interprété par Viggo Mortensen est de ces héros discrets que l'on n'écoute pas assez au bon moment. Le réalisateur en a fait un écorché vif. Seul, il fait partie de ces fils de colons qui ont toujours vécu sur ces terres qu'ils ont fait fructifier. Mais il a aussi connu la face sombre des hommes. Quelques années auparavant, il était à la tête d'une brigade lancé dans la Libération de la France occupée par les nazis. Ses hommes étaient essentiellement des Arabes. Mais comme lui fait remarquer un ancien soldat, devenu rebelle pour libérer son propre pays, il est désormais du mauvais côté. Un paradoxe pour cet homme qui a choisi une troisième voie : l'éducation pour sauver le monde.








mardi 13 janvier 2015

DE CHOSES ET D'AUTRES - Black Blanc Beur

Plus de 1,5 million de personnes dans les rues de Paris dimanche. La dernière mobilisation remonte à 1998 à l'occasion de la victoire à la coupe du monde de foot. Le peuple célébrait une équipe Black Blanc Beur qui portait les couleurs Bleu Blanc Rouge. Cette symbolique revient aussi dans l'hommage de dimanche.
Parmi les 17 morts de la série d'attentats, trois policiers. Eux aussi étaient Black Blanc Beur. Eux aussi portaient sur leurs uniformes les couleurs Bleu Blanc Rouge. Clarissa Jean-Philippe, abattue à Montrouge par Coulibaly, était originaire de la Martinique. Une Black. Franck Brinsolaro, policier chargé de protéger Charb, tué lors de l'attaque de Charlie Hebdo, était originaire de Normandie. Un Blanc. Ahmed Merabet, gardien de la paix, froidement achevé d'une balle dans la tête alors qu'il était à terre, blessé, est de Livry-Gargan. Musulman, sa famille est originaire d'Algérie. Un Beur.
On a trop longtemps prétendu que seul le sport permettait l'intégration dans la nation, développer un sentiment de fierté nationale par delà toutes les croyances ou couleurs de peau. On s'aperçoit que dans les structures de la république, la police est également un formidable outil d'intégration. Clarissa, Franck et Ahmed ne protégeaient pas leurs communautés, ils étaient au service de tout un pays et de tous les citoyens. 
Si l'émotion est si forte, partout, de Paris au plus petit village de France, c'est pour la liberté de la presse, mais aussi pour rendre hommage à ces trois serviteurs de la république. Ces trois Black Blanc Beur, protecteurs (au prix de leur vie) du Bleu Blanc Rouge.

Chronique parue le mardi 13 janvier en dernière page de l'Indépendant.  

lundi 12 janvier 2015

DE CHOSES ET D'AUTRES - Un long chemin

De mercredi à hier dimanche, la France a basculé. Tous les Français ont été touchés par les événements. Chacun y a trouvé un message.
Émotion. Des millions ont partagé leur émotion dans les rues. Les yeux rougis, les mains tremblantes, ils ont eu besoin de se retrouver, d'avoir une épaule amie pour surmonter l'épreuve, se rassurer. Constater de visu que cette immense peine est normale, partagée par ses proches et des millions d'inconnus venus de tous horizons.
Dérision. Les rassemblements ont scandé « Je suis Charlie », rendu hommage aux dessinateurs. Quel incroyable paradoxe que ces hurluberlus fauchés par des fanatiques, hostiles à toute pensée unique, dénonçant depuis toujours tout mouvement de foule, se retrouvent bombardés symboles de la Liberté. Ça doit bien les faire marrer d'être soutenus par ceux qui, il y a pas si longtemps, leur intentaient des procès et manoeuvraient pour les museler...
Manipulation. Les partisans de la théorie du complot sont de retour. Le jour même de l'attentat, certains voient derrière les tueurs masqués des « mercenaires » en mission pour la gloriole de
Hollande
Sarkozy
Israël
la franc-maçonnerie (cochez la case correspondant à votre paranoïa).

UNION. Plus naïvement, j'ose espérer qu'au final, ce qui primera après cette mobilisation sans précédent dans l'histoire du pays, sera l'union. L'envie de se comprendre, de vivre ensemble. Un premier pas a été fait hier. Le chemin est encore long. Ne nous arrêtons pas. 

Chronique parue le lundi 12 janvier en dernière page de l'Indépendant. 

dimanche 11 janvier 2015

Polar - Un privé trop fleur bleue

Dick Henry, dit «l’Expéditif», est un privé redouté. Efficace et intransigeant, il n'a qu'une faiblesse, sa petite amie, Lynette, une vamp aux jambes fabuleusement belles.

Les amateurs de romans policiers américains vont adorer. « L'expéditif », premier livre de p.g. sturges (il paraît qu'il tient à ce que son nom soit écrit sans majuscules...) a des airs de Raymond Chandler ou de Dashiell Hammett. La faute au héros, Dick Henry, le fameux « expéditif ». Un détective privé, ancien flic comme il se doit, reconverti dans les affaires toujours à la limite de la légalité. Votre locataire ne paie plus ses loyers ? Dick saura trouver les arguments « frappants » pour qu'il retrouve le droit chemin. Les travaux dans votre maison se révèlent bâclés ? L'artisan acceptera de tout refaire après une visite de « courtoisie » mémorable. 
Dick Henry accepte tout. Même les filatures peu glorieuses d'épouses suspectées d'être infidèles. Un comble quand on sait que le mari est producteur de films pornographiques. Mais Dick Henry a besoin de beaucoup d'argent pour combler l'amour de sa vie, Lynette. Une hôtesse de l'air qui n'est à Los Angeles que par intermittence. Cela donne l'occasion à des scènes très « hot » sous la plume de p. g. sturgess particulièrement inspiré : « Nous avions établi de vrais rapports d'adultes. C'était du rapide, c'était plaisant. On baisait, on parlait, on cuisinait, on riait, on baisait. On voyait peu la lumière du jour mais beaucoup d'étoiles. » Lynette est l'unique faiblesse de Dick Henry. Et cela le sera encore plus quand il découvrira l'identité de l'épouse volage, une certaine Judy Benjamin. Mais comment l'Expéditif va-t-il pouvoir se sortir de ce pétrin ?
Ce roman noir est un véritable bijou de littérature américaine. Les personnages sont sombres à souhait, les scènes entre cocasses et violentes, les situations explosives. De plus, vous avez une ribambelle d'histoires parallèles à l'intrigue principale, de la fausse fiancée philippine qui tente d'escroquer un veuf en fin de vie au parcours sanglant d'Arturo, un gamin de Manille, amoureux de l'Amérique. Aussi passionnant que foisonnant.

« L'expéditif », p.g. sturges, Calmann-Lévy, 18,90 €


samedi 10 janvier 2015

DE CHOSES ET D'AUTRES - Trouver les mots

Comment trouver les mots pour reprendre une vie normale ? Quels mots pour exorciser ce cauchemar, pour rire de nouveau, vivre tout simplement...
Deux jours après le massacre de Charlie Hebdo, la boule dans mon ventre ne cesse de grossir, de peser, de me torturer. Pourtant il est nécessaire de prendre du recul, ne pas se laisser submerger par l'émotion.
Dans cette chronique, tous les jours dans l'Indépendant, je tente à mon petit niveau de provoquer un sourire chez le lecteur. La mission semble impossible depuis mercredi midi. Je ne trouve pas les mots. Je tourne en rond, comme coincé dans un cauchemar sans fin. Alors, pour me donner du coeur à l'ouvrage, je repense à Cabu, Wolinski, Charb, Tignous et Honoré. Eux, jamais ils n'ont baissé les bras. Au contraire, dans les pires conditions presque aussi anxiogènes qu'actuellement (début de la première guerre du Golfe), ils ont relancé le titre. La preuve que l'impertinence alliée à l'intelligence l'emportera toujours sur la bêtise, la violence. Guerre. Le mot a été prononcé à plusieurs reprises après l'attaque.
Peut-on rire de la guerre ? Oui, sans hésitation. En fait mon interrogation est idiote. Tous les mots sont bons pour faire sourire. Il suffit de trouver le bon angle. La mort ? Hilarant. Les intégristes ? Bidonnants. Mahomet ? Tordant. Les nazis ? Trop marrants. Les vieux ? A se pisser dessus de rire. Les jeunes ? Fou-rire assuré. L'énorme paradoxe c'est qu'il n'y a qu'un truc qui ne me fait plus rire en ce moment : un exemplaire de Charlie Hebdo... 

Chronique parue en dernière page de l'Indépendant le samedi 10 janvier. 

vendredi 9 janvier 2015

DE CHOSES ET D'AUTRES - Morts de rire

Leur métier était de nous faire rire. Jamais je n'aurais imaginé un jour qu'ils me fassent pleurer. Si je suis journaliste depuis plus de 30 ans, si cette chronique existe tous les jours, c'est en grande partie grâce à eux, les Cabu, Wolinski, Charb, Tignous et Honoré. Adolescent boutonneux, ma découverte de Charlie Hebdo à la fin de 1970 a façonné ma personnalité. J'aime l'humour trash, les dessins qui vont trop loin, la provocation éhontée. J'aime quand les limites sont dépassées, les tabous oubliés.

Cabu excelle dans le genre. Pourtant, il a toujours eu cette apparence gentille d'éternel gamin. Comment peut-on tirer froidement sur quelqu'un qui sourit en permanence ?
Wolinski, immense dessinateur politique, est aussi un amoureux des femmes. Une passion évidente dans son oeuvre. Ses héroïnes, voluptueuses et libérées, ne cachent rien de leurs charmes. Avec lui, le voile n'est pas islamique mais toujours transparent.
De Charb je conserve un dessin, offert par un ami dessinateur qui l'a rencontré dans les années 90 à Paris. Un crobard vite fait, simple et percutant.
Encore plus près, Tignous me fait immédiatement penser à mes deux années passées à Castelnaudary, aux Croquignous, les joyeux drilles qui organisent le festival de la caricature, aux miroirs du café de l'Industrie ornés le temps d'une soirée (arrosée, forcément arrosée) de dessins éphémères.
Une fois mes dernières larmes séchées, je vais me replonger dans les BD de Cabu, Wolinski, Tignous, Charb et Honoré. Et mercredi prochain, j'irai acheter le nouveau Charlie Hebdo. 

(Chronique écrite le 8 janvier et parue le 9 janvier en dernière page de l'Indépendant) 

jeudi 8 janvier 2015

DE CHOSES ET D'AUTRES - Ebola par téléphone

La naïveté des gens ne cessera jamais de m'étonner. A l'heure de la technologie et de l'internet tout puissant, on voit resurgir des croyances dignes du moyen âge. Les plus anciens ont certainement reçu à un moment dans leur boite aux lettres une enveloppe contenant un texte expliquant que pour s'attirer bonheur, chance, argent, amour (la liste n'est jamais exhaustive) il faut simplement renvoyer cette missive à dix de ses amis. En mon for intérieur, j'appelle ça « l'effet boule de neige de la connerie ». Quand les emails se sont généralisés, la déferlante n'a fait que s'amplifier. Mais là, au moins, on sait à quoi ça sert : collecter des adresses pour ensuite les inonder de messages publicitaires...

La bêtise ne reculant devant rien, mon épouse vient de recevoir un SMS qui prouve que le phénomène est encore bien présent. Il est expliqué qu'il ne faut surtout pas accepter d'appel d'un certain numéro (écrit en gros et surligné...) car c'est « quelqu'un qui pirate ton téléphone ». Et de poursuivre : « Envoi ce message à tous tes contacts en urgence. Cela va très vite. » Vous me direz, cela peut être vrai voire utile. Sauf que le message se termine par cette phrase qui me persuade définitivement que c'est une arnaque : « C'est pas une chaîne. »
Avant, on menaçait des pires malheurs celui qui « cassait » une chaîne. Maintenant, on préfère dire que cela n'en est pas une... A l'arrivée c'est du temps et de l'argent perdu par des milliers de personnes. Excepté moi qui en ai tiré la substance pour écrire une chronique. A mes risques et périls, même si je ne suis pas superstitieux. Du moins, pas encore... 

DVD - Fenêtre ouverte sur les hackers

Le cinéma 2.0 a son prototype : « Open Windows » de Nacho Vigalondo avec Elijah Wood et Sasha Grey.

Voir sans être vu, devenir le marionnettiste de véritables vies. Le propos du film « Open Windows » du réalisateur espagnol Nacho Vigalondo est tout à fait dans l'air du temps. Les pirates du net sont de plus en plus intrusifs et imaginatifs. Ils ont cependant de la marge avant de maîtriser la technologie comme Nevada, le grand manipulateur de ce thriller virtuel. 
Jill Goddard (Sasha Grey) est une actrice de série B. Elle a de nombreux fans dont Nick (Elijah Wood), administrateur d'un site internet entièrement dédié à la gloire de la jeune bimbo. Nick a remporté un concours organisé par la production du dernier film de Jill. Il va pouvoir passer une soirée en compagnie de son idole. Il attend sagement dans sa chambre d'hôtel quand il reçoit un coup de téléphone où un mystérieux interlocuteur lui explique que Jill a annulé la soirée, sur un coup de tête. Mais Nick peut se venger s'il le veut, en prenant le contrôle du téléphone portable de la vedette. Depuis son ordinateur, Nick va suivre la soirée de Jill, suivant les instruction de la voix, jusqu'à aller au point de non retour : kidnapper l'amant de la belle. Le film, au tempo haletant, est d'une grande originalité par son aspect. Composé de plusieurs plans imbriqués les uns dans les autres, il mélange images de vidéo surveillance, webcams et autres captures d'écran de smartphone. Nick, pris au piège, va tout faire pour tenter de sauver son idole. Elijah Wood (Le Seigneur des Anneaux) porte le film du début à la fin, avec en appoint la plastique et la morgue de Sasha Grey (ancienne actrice porno en pleine reconversion) et la bouille ronde et si inquiétante de Neil Maskell, valeur montante du cinéma britannique, inoubliable truand dans « Pusher » et tueur à gages complètement frappadingue dans la série « Utopia ». En complément dans les DVD et blu-ray, une petite séquence sur les effets spéciaux (essentiellement numériques) et le making of avec une longue interview du réalisateur.

« Open Windows », Wild Side Vidéo, 15,99 euros le DVD, 19,99 euros le blu-ray.


Cinéma - L'amour sous les drapeaux avec "Queen and country" de John Boorman

John Boorman poursuit son autobiographie dans « Queen and country », film où il raconte sa période « soldat, appelé sous les drapeaux », amoureux transi d'une belle inconnue.


Malgré ses 80 ans, John Boorman a encore le regard pétillant du gamin curieux de tout. Après « Hope and Glory », tourné en 1987, film dans lequel il retraçait son enfance anglaise sous les bombardements nazis en pleine seconde guerre mondiale, il a reconstitué son appel sous les drapeaux. Bill Rohan (Callum Turner) a 18 ans et une soif de vivre incommensurable. Mais en 1952, l'Angleterre n'en a pas terminé avec le service militaire. Il est appelé pour deux ans, avec la crainte d'être envoyé en Corée participer à cette guerre, dommage collatéral de l'affrontement indirect entre Chine et Etats-Unis. A la caserne, il rencontre Percy (Caleb Landry), aussi extravagant et provocateur que Bill est calme et réservé. Ce duo va en baver lors des classes, l'occasion pour le réalisateur pour dénoncer la bêtise de l'esprit militaire. Bill et Percy, au lieu de partir pour l'extrême-orient, vont être affectés à la formation des jeunes recrues. Vu leurs aptitudes guerrières, ils sont affectés à des cours de... dactylographie.


Lors de rares sorties, ils tentent de séduire de belles inconnues. Pour une fois que leur uniforme leur est véritable utile. Bill pourrait tomber amoureux de l'espiègle Sophie (Aimee-Ffion Edwards) élève infirmière aux petits seins si charmants. Mais son tempérament romantique le pousse à suivre une distinguée inconnue, Ophelia (Tamsin Egerton) au regard plein de mystères.

Militaires ridicules
Si le film de John Boorman raconte cet amour impossible, il vaut surtout par la description de la vie à la caserne. Les militaires en prennent pour leur grade. Un supérieur psycho rigide complique la vie des deux jeunes hommes, suspectés même d'être des agents infiltrés des « rouges ». Percy accumule les bravades et devient un parfait tire-au-flanc en prenant des cours auprès du meilleur d'entre eux, le soldat Digby (Brian F. O'Byrne). Il s'est inventé une hernie très pratique : obligé de la maintenir en permanence avec sa main droite, il est dispensé de salut. De plus, il ne peut ni porter de poids, ni s'accroupir. Une vie de rêve. Entre comique et nostalgie, « Queen ans Country » dresse le portrait d'une jeunesse insouciante, où le sexe n'est pas encore omniprésent, qui se morfond en caserne mais ne manque pas de projet. Pour Bill, ce sera le cinéma. John Boorman boucle la boucle en se filmant en train de réaliser ses premiers petits films, dans le jardin familial. La suite, c'est une carrière immense, jalonnée de quelques chef-d'oeuvres (voir ci-contre).

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John Boorman, 50 ans de carrière

« Delivrance », « Excalibur », « Hope ans Glory »... John Boorman n'a pas énormémént tourné durant sa longue carrière, mais il a privilégié la qualité. Alternant les styles, il s'est imposé tant dans le thriller que la grade fresque historique ou la romance nostalgique.
« Queen and Country » est la suite directe de « Hope and Glory ». Bill, encore gamin, vivaitt sous les bombes en pleine guerre mondiale. Il était témoin de l'aventure de sa mère, du coup de foudre de sa sœur pour un soldat canadien. Dans le nouveau film, la sœur est de retour d'Amérique, célibataire mais maman. La mère de Bill, une fois son mari de retour au foyer la guerre terminée, a repris sa vie comme si de rien n'était. Mais tous les matins elle continue à saluer cet homme qui passe devant chez elle et qu'elle a follement aimé durant quelques mois.
Rien à voir avec les scènes hallucinantes de « Delivrance ». Choc au moment de sa sortie, la descente aux enfers de ces quatre américains pris en chasse par des fous furieux a provoqué nombre de cauchemars et certainement provoqué la désertion de certaines vallées reculées de France et de Navarre.
Encore plus majestueux, « Excalibur » mélange histoire et fantastique. L'épopée du roi Arthur et de son épée magique permet au réalisateur de grandioses scènes, renforcées par une musique tonitruante. Plus que du grand spectacle, une expérience mystique qui ouvre bien des portes à une nouvelle perception.
Par contre, « Zardoz », avec Sean Connery, ne restera pas dans les annales de la science-fiction. Mais un seul faux-pas en 50 ans, c'est un beau bilan.