mercredi 5 novembre 2014

DE CHOSES ET D'AUTRES : Inaccessibles étoiles

interstellar, fusée, espace, spaceshiptwo, virgin galactic
Aujourd'hui sort "Interstellar" le film de Christopher Nolan. Près de trois heures d'évasion totale sur la conquête spatiale comme on n'a jamais osé la mettre en images. Sur une trame classique (et on ne peut plus d'actualité), les États font le constat que les réserves de la Terre s'épuisent. Encore une génération et clap de fin pour l'Humanité. Il y a urgence à trouver un autre monde pour la survie des Humains. Le héros, interprété par Matthew McConaughey, pilote un vaisseau spatial pionnier vers ces inaccessibles étoiles.
Film le plus attendu de cette fin d'année, "Interstellar" permettra aux rêveurs impénitents de mon genre de se consoler face à la triste réalité de la conquête spatiale actuelle. Car dans les faits, nous ne sommes même plus capables de faire des sauts de puce hors de l'atmosphère. La dernière fusée de ravitaillement de la station spatiale a explosé juste après le décollage, transformant le pas de tir en fournaise ardente.
Pire, le vaisseau élaboré dans le plus grand secret par Virgin Galactic, SpaceShipTwo, s'est écrasé au cours de son troisième vol d'essai. Un pilote est mort dans le crash, le second est grièvement blessé.
D'un côté un film grandiose enrichi d'effets spéciaux et des technologies innovantes, de l'autre des échecs, preuves de l'extrême difficulté de quitter le plancher des vaches. On pourrait déprimer, se dire que finalement les dés sont jetés, il est trop tard... C'est sans compter avec l'opiniâtreté de Richard Branson, PDG de Virgin. Même si quelques minutes en apesanteur, qui plus est réservées aux plus riches, ne sauveront pas notre planète...
En bonus internet, la bande annonce d'Interstellar


et la vidéo de l'explosion de la fusée américaine...

BD : l'histoire d'un gros mangeur racontée par Cha et Eldiablo


un homme de goût, cha, eldiablo, ankama
Cha et Eldiablo aiment faire dans le culinaire. Après le très noir « Pizza Roadtrip » (en cours d'adaptation au cinéma), ils proposent, toujours chez Ankama, « Un homme de goût ». Au Guatemala de nos jours, un riche industriel, grand, fort et musclé, quitte son bureau et rejoint sa luxueuse villa. Son homme à tout faire confirme la venue dans moins d'une heure d'une jeune femme brune. Il se détend un peu et quand la sonnerie retentit, commence à se lécher les babines. Mais la brune attendue est finalement blonde, très maigre et vieille. Le face à face entre Jamie Colgate, policière américaine retraitée et Nekros débute. Elle le neutralise et l'enferme dans la cave. Elle va lui rafraichir la mémoire. Leur premier contact date des années 80. Jamie, nouvellement affectée à Las Suertes, suspecte le directeur du casino local d'avoir fait disparaître quelques joueurs trop chanceux. Une rencontre cuisante pour Jamie qui y perdra un sein et sa place. Elle n'abandonne cependant pas et retrouve la trace de Nekros aux USA, à Cuba, en France et en dernier au Guatemala. Problème, l'homme semble traverser les époques. A Cuba c'était dans les années 50 lors de la révolution et en France vers 1847. Cet album de 65 pages permet à Cha de dessiner quatre époques avec autant de styles différents. Une invention graphique qui ne fait que relever le niveau de cette série très réussie.
« Un homme de goût » (tome1), Ankama, 13,90 €



mardi 4 novembre 2014

DE CHOSES ET D'AUTRES : Trop vieille pour surfer

facebook, jeunisme
Pas de jeunisme sur les réseaux sociaux. Les vieux aussi ont le droit de surfer. C'est ce que croyait Anna Stoehr en s'inscrivant le mois dernier sur Facebook. Cette Américaine, née en 1900, n'a pas pu valider son profil. La ligne "date de naissance" demeure désespérément en erreur. Elle aura dû se rajeunir de 15 ans pour enfin débloquer la machine. Il semble que cette limite de 99 ans soit le chiffre butoir maximum autorisé.
On savait que le journal Tintin s'adressait aux "jeunes de 7 à 77 ans", on apprend donc que Facebook est interdit aux centenaires. Il n'y a là rien d'idéologique dans cette barrière infranchissable. L'explication est sans doute à trouver dans les codes et autres algorithmes nécessaires au bon fonctionnement de l'ensemble. En moins de 20 ans, internet a totalement révolutionné notre vie, nos rapports au monde et avec nos amis.
Cette histoire de limite d'âge est révélatrice du fossé qui s'est creusé entre les générations. Ce qui est une évidence pour les gens nés après 1970 (utiliser quotidiennement le net pour communiquer, s'informer, acheter, se divertir), l'est beaucoup moins pour les autres. Il existe une zone tampon entre les années 40 et 70 où certains ont pris le train en marche alors que d'autres sont restés complètement en rade lors du passage au numérique. Les plus âgés, ceux qui aujourd'hui ont plus de 80 ans, ont définitivement abandonné l'idée de comprendre, à quelques rares exceptions près comme Anna Stoehr.
Par contre, en 2070, tous les centenaires seront sur le Net. Enfin, si le net existe toujours...

Lascars et Workingirls : des séries télé courtes et bonnes

Pas tout à fait des sitcoms, ces formats courts brillent par leur impertinence. Développés par Canal +, on y retrouve tout l’esprit caustique et inventif de la chaîne criptée.

lascars, workingGirls, studiocanal, dvd, blanche Gardin, Monsiur PoulpeUne entreprise sans âme dans un building en verre. Dans ces opens space des femmes travaillent. Du moins font acte de présence, notamment quand la patrone est là. La vision de l’entreprise donnée dans la série “Workingirls” est des plus étonnante. La DRH, totalement nymphomane, se désintéresse de ses employés, surtout s’ils sont du sexe féminin, la responsable communication ne manque jamais d’idées pour animer les équipes. Quant aux filles de l’accueil, gare, ce sont de vraies racailles.
La troisième et dernière saison est toujours aussi décapante. On retient de ces 12 épisodes de 13 minutes l’arrivée d’une vigile musclée et “burnée “interprétée par Anne Marivin et la superbe évolution pour Hélène : elle a un fiancé ! Pierrick employé au service courrier. Le couple, joué par Blanche Gardin et Monsieur Poulpe, mériterait presque une série à lui tout seul...
lascars, workingGirls, studiocanal, dvd, blanche Gardin, Monsiur PoulpeElDiablo, scénariste multitâches, après l’animation et la BD transporte son univers banlieusard des Lascars dans une série au casting impeccable. Les quatre potes vivent la “good life” dans leur banlieue. Du moins, ça, c’était la saison 1. La saison 2 débute par une scène où les Lascars se morfondent en prison. Mais qu’ont-ils fait pour finir au trou ? Ce sera le fil rouge de la série de 12 épisodes de 15 minutes chacun. Criblés de dettes, ils n’ont d’autre solution pour rembourser de travailler dans le “grec “de Mamadou, la star du quartier. Entre frites et kebab, ils vont multiplier les impairs et se mettre dans des situations pathétiques. Le tout dans un débit de paroles qui risque de désorienter toute personne qui n’a jamais entendu répéter dix fois en une minute « J’menbalécouyes ». C’est trash mais vrai. Et surtout hilarant.
"Workingirls”, Studiocanal, 14,99 euros
"Les Lascars”, Studiocanal, 14,99 euros

DE CHOSES ET D'AUTRES : Le temps qui passe

Une semaine. Je me suis octroyé sept jours pleins de vacances tel un enseignant épuisé après six semaines de cours. Rien de prémédité. Une opportunité à saisir. Constatant la persistance d'un temps estival, je me suis dit que finalement, faire le plein de vitamines D en octobre est encore mieux qu'en juillet (où de toute manière bronzer restait une gageure...). Autant profiter de ce fichu réchauffement climatique pour se promener bras nus, par 30 degrés, dans des vignes rougeoyantes et des forêts transpercées de lumière aux rais obliques dans lesquelles ne pas marcher sur des cèpes relève de l'exploit.
Mais jeudi dernier, à l'entrée de mon village, la dure réalité du calendrier a repris le dessus. Encore tout transpirant de la longue balade en plein air, je ralentis en voyant une camionnette, garée au milieu de la rue, tous gyrophares allumés. Une nacelle transporte un homme en hauteur. Des travaux sur le réseau électrique ? L'installation de la fibre promise lors des élections ? La vérification du bon fonctionnement des lampadaires ? Rien de tout cela. En ce 27 octobre, ces ouvriers sont tout simplement en train de monter et brancher les illuminations de Noël. Des myriades d'ampoules et des guirlandes de petites leds (diodes électroluminescentes) qui transforment joliment, chaque fin d'année, la rue principale en mini Champs-Elysées.
Voilà comment ma modeste semaine de vacances s'est transformée en gouffre spatio-temporel qui m'a directement transporté de la fin de l'été au début de l'hiver. Les trois mois d'automne, ma saison préférée ? Je reviendrai tenter ma chance l'année prochaine.

lundi 3 novembre 2014

BD : Chat en liberté


Michel, leslie plée, sauvage, delcourt
Les deux-tiers des Français ont, ont eu ou auront un chat. Leslie Plée, jeune auteur de BD, a un réel don d'observation. Surtout elle parvient à se mettre dans la peau de son animal de compagnie, lui prêtant interrogations, colères et étonnements. Revoici donc pour une seconde salve d'aventures Michel Plée, devenu célèbre après le succès de sa méthode pour « devenir vieux et gros ». Toujours aussi couard et enrobé, le matou doit radicalement changer d'environnement. Sa maîtresse a la bizarre idée, après quelques années en appartement, de déménager à la campagne. La nature ! Voilà quelques chose de nouveau (et de très déstabilisant) pour Michel, parfait chat d'intérieur. En 80 pages, on le suit dans sa découverte de cette « surface verte » sur laquelle il est obligé de poser des « patounes ». « Étant sensible des coussinets » il porte des bottes... Quantité d'animaux vivent dehors, des marrants comme les vers de terre aux plus horribles comme les hérissons, ça pique, ou les chats non castrés, bagarreurs invétérés. On retrouve l'humour pince sans rire du premier album, mais avec une petite dose d'émotion en plus. Michel va devoir aller contre sa nature et se faire des amis. Il s'éloigne un peu de sa maîtresse et doit même défendre son « territoire »... Sacrée aventure !

« Michel, un chat sauvage », Delcourt, 14,95 €

dimanche 2 novembre 2014

BD : Frères d'armes


commandant Achab, Piatzsezk, Douay, casterman
Être flic implique souvent de ne pas pouvoir entrer dans certains moules. Une vie consacrée à la chasse aux malfaisants n'est pas sans conséquence pour son équilibre psychique. Il est loin le temps du commissaire Maigret, placide et pépère une fois revenu sans la douceur de son foyer. Le personnage principal de la série écrite par Piatzsezk et dessinée par Douay est l'antithèse absolue de ce modèle. Edgar Cohen, surnommé le Commandant Achab, a perdu une jambe. Il a quitté les hautes sphères de la PJ pour moisir aux archives entre son chat et sa réserve de cannabis, essentiel pour faire passer la douleur. Il a retrouvé de la vigueur quand un jeune policier l'a rejoint dans son antre. Karim mène une vie saine et équilibrée. Il est cependant taraudé par les circonstances de la mort de son père, policier lui aussi très investi dans son travail. Il est mort dans l'exercice de ses fonctions. Une balle perdue tirée par un collègue qui depuis a bien des difficultés pour remonter la pente : Achab. La cohabitation entre les deux est compliquée dans les premiers temps. Mais à force de patience, Achab va refaire surface et démêler l'écheveau qui a causé sa perte. Et si toute cette histoire n'était que l'arbre qui cachait la forêt d'une plus vaste magouille ? Ce cinquième tome va voir la conclusion de l'enquête avec la révélation du jeu très trouble du propre frère d'Achab, William, un ambitieux arrivé au sommet de la hiérarchie. Mais à quel prix...
« Commandant Achab » (tome 5), Casterman, 14,50 €



samedi 1 novembre 2014

Cinéma : l'amour filial à son paroxysme dans "Vie sauvage" de Cédric Kahn

Librement inspiré de l'histoire de Xavier Fortin et de ses deux fils, en cavale durant onze ans, “Vie sauvage” de Cédric Kahn, tourné en grande partie dans l'Aude entre la Montagne noire et Carcassonne, a la force et la beauté de la nature reine.


Entier. Le caractère de Paco (Mathieu Kassovitz) est entier. Ce père a tout fait pour satisfaire la mère de ses enfants. Rencontrée dans un campement “d’Indiens” comme il y en existe encore quelques-uns dans les Pyrénées, il se marie avec elle sous un arbre, selon un rite très naturaliste. Il adopte son bébé, Thomas, et reprend sa vie de nomade, d’idéaliste en marge de la société. Deux enfants naîtront sur les routes (dans les Cévennes et en Normandie). Deux garçons, Tsali et Okyesa, pour compléter la petite tribu.

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Mais la vie d’errance use. Nora (Céline Sallette), la mère, n’en peut plus de marcher dans la boue et d’avoir froid dans les caravanes embourbées au bout d’un chemin de terre.
La scène d’ouverture du film est d’une tension extrême. Paco prend la voiture pour aller faire quelques courses. Dès qu’il a passé le virage, Nora sort des placards des sacs déjà prêts. Et c’est la fuite. A travers bois, le long des routes, dans un train... Les garçons, qui comprennent ce qui se passe, sont rétifs. Ils tentent de s’échapper. Finalement Nora et ses trois petits embarquent dans un TER et arrivent à destination : la villa cossue de ses parents.

Montagne Noire et sauvage
Paco retrouve rapidement leur trace. Des retrouvailles violentes. La police intervient et un juge confie officiellement la garde des enfants à la mère. Pourquoi ? Demande furibard Paco. Car c’est comme cela. Dans l’attente d’une décision définitive, les enfants sont toujours à la garde de la mère. Un an après, Paco qui vit toujours dans son campement, a fait profil bas. Il récupère ses deux fils pour les vacances scolaires. Mais au lieu de les ramener deux semaines plus tard, il entame une cavale à travers garrigue, bois et vallées. Ils tiendront 11 années dans la clandestinité.
Cédric Kahn, en montant son projet tourné en grande partie dans la Montagne Noire, à Bram et à Carcassonne dans l’Aude, a dû faire des choix pour raconter cette épopée en 1 h 45. Après la séquence d’ouverture, il montre le trio seul dans les bois, se cachant parfois dans des grottes, découvrant cette nature généreuse et parfois sauvage. Un retour aux sources naturaliste, une éducation de la terre nourricière très idéaliste. Une période rose qui dérape dans la dernière partie du film. Les deux garçons sont de grands adolescents. Leur situation s’est stabilisée mais ils sont de plus en plus démangés par cette vie urbaine, pas forcément mieux que la vie sauvage, mais si différente.
Un long-métrage tourné presque comme un documentaire, avec un casting étonnant de vérité. Mention spéciale aux quatre jeunes qui interprètent les enfants de Paco. La seule faiblesse du film (à moins que cela ne soit son plus grand mérite) c’est de ne pas ouvertement choisir son camp. Comme si toute expérience est bonne au final, même si elle implique une très grande souffrance : séparation pour la mère et prison pour le père...


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Trois fois Céline Sallette


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« Vie sauvage » est un film d’hommes. Un père et ses deux fils, liés par une volonté de survivre ensembles malgré les décisions de justice. La place de la mère, relativement ingrate dans cette épopée, est tenue par Céline Sallette. L’actrice révélée dans la série télé « Les revenants » puis le film de François Dupeyron « Mon âme par toi guérie » enchaîne les tournages. A l’affiche du film de Cédric Kahn, elle interprète également l’éducatrice obstinée de « Géronimo », le film de Tony Gatlif. Et en décembre, elle sera la femme du juge marseillais joué par Jean Dujardin dans « La French ». Trois fois à l’affiche en trois mois et presque trois rôles différents dans « Vie sauvage ». Quand elle est jeune, marginale aux longues dreadlocks, sous le charme de Paco le vagabond ; à maturité, mère protectrice qui veut un avenir meilleur pour ses enfants ; puis en mère quasi mystique, priant Dieu pour retrouver le fruit de ses entrailles, déterminée mais plus compréhensive, capable de pardonner. Une formidable performance d’actrice qui prouve l’incroyable potentiel de cette comédienne passée par le théâtre d’Ariane Mnouchkine.

Livre : Stéphane Mandelbaum, le peintre voyou

Dessinateur virtuose aux noirs desseins, Stéphane Mandelbaum est mort assassiné en 1986. Gilles Sebhan revient sur ce parcours sombre et sanglant.

Stéphane Mandelbaum, sebhan, impressions nouvellesLes destins tragiques inspirent Gilles Sebhan. Cet écrivain au parcours hors normes, après s'être penché sur Jean Genet et Tony Duvert, l'écrivain maudit, signe une biographie de Stéphane Mandelbaum. Ce jeune Belge a exposé ses dessins dans quelques galeries avant de basculer dans la violence et la délinquance. A 26 ans, après avoir participé au vol d'un tableau de Modigliano, il est retrouvé assassiné, le visage brûlé à l'acide, dans un terrain vague près de Namur. Lui, qui a dessiné des atrocités absolues, finit comme un de ses portraits, défiguré, horrible.
Il ne s'agit pas à proprement parlé d'une biographie. Comme toujours avec Gilles Sebhan, il y a beaucoup d'autofiction. L'écrivain découvre Mandelbaum en trouvant sur le net la reproduction d'un dessin érotique. Le trait interpelle Sebhan. Il prend rendez-vous avec le galeriste qui vend l'œuvre et rapidement le destin de Mandelbaum va occuper de plus en plus de place dans la vie de l'écrivain. Une obsession qui trouve sa conclusion dans ce livre, entre réflexion sur l'art, les parias et la folie.
Fils d'un peintre juif émigré de Pologne, Mandelbaum a de très sérieux problèmes de comportement. Il ressemble un peu au jeune Steve, héros du film « Mommy » de Xavier Dolan. Hyperactif, parfois violent, rêveur, instable. Stéphane a cependant un bon exutoire : le dessin. Un crayon en main il ne cesse de noircir des feuilles de papier. Un don. Mais ses créations sont rarement montrables. Scènes pornographiques, personnages nazis, séances de tortures dans des camps d'extermination... On retrouve dans son art tout son esprit torturé.

Enfant génial
Mais comme avec Tony Duvert (écrivain tombé dans l'oubli après des écrits pédophiles), Gilles Sebhan a tenté d'aller au-delà des apparences. Avec de nombreux témoignages, des proches comme des amis, on comprend que Mandelbaum, juif errant, est un volcan en pleine activité, menaçant sans cesse d'exploser. « Maître du monde, c'est ce qu'il voulait être » écrit l'auteur au début du livre. Il finira petit voyou, assassiné par ses complices après un partage de butin qui tourne mal.
Aujourd'hui il ne reste que peu de dessins de Stéphane Mandelbaum. Trop sulfureux. De toute manière sa carrière artistique était déjà achevée quand il a basculé dans la délinquance. Il se faisait appeler Malek, comme pour rejeter sa judéité, et ne dessinait plus, « Comme d'autres, le silence était en train de gagner l'enfant génial. Lui qui n'avait cessé de griffonner se trouvait pris au piège du réel. » A l'image de l'histoire de Tony Duvert, Gilles Sebhan entraîne le lecteur dans son enquête, quasi policière. Il mélange témoignages et interprétations personnelles. Et Mandelbaum acquiert alors cette humanité qui a semblé lui faire défaut de son vivant. Seul regret au final, qu'il n'y ait aucune œuvre de Stéphane Mandelbaum reproduite dans l'ouvrage. On comprend le parti-pris, mais on ne peut s'empêcher, après coup, d'aller chercher sur internet ces images terribles.
Michel Litout
« Mandelbaum ou le rêve d'Auschwitz » de Gilles Sebhan, Les Impressions Nouvelles, 13 €



vendredi 31 octobre 2014

BD : amour impossible avec la belle "Héléna" de Jim et Chabane

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Simon a tout du jeune homme normal. A l'aube de la trentaine, employé dans une entreprise pour un travail peu valorisant, il traine encore avec ses amis d'enfance à la recherche du grand amour. Il rencontre Estelle, tombe amoureux. C'est réciproque. Rapidement elle est enceinte et ils décident de se marier. Un destin tout tracé raconté par Jim et dessiné par Chabane. Mais le matin du mariage, sur le parvis de la mairie, Simon aperçoit Héléna. La superbe blonde promène sa fille dans une poussette. Héléna, son amour d'enfance. Il croyait l'avoir oubliée, il n'en est rien. Quand elle lui explique en deux mots qu'elle vient de se séparer du père, Simon a une révélation. C'est elle la femme de sa vie. Alors, sur un coup de tête, quelques minutes plus tard, au lieu de dire oui à une vie de couple sans heurts, il répond « non » au maire. Mariage foutu... Quelques mois plus tard, sans nouvelles d'Héléna, Simon hérite de son père. Une grosse somme et un appartement de rêve. C'est le moment que choisit Héléna pour réapparaître. Le petit garçon timide qu'est toujours un peu Simon se fait violence et l'aborde. Ils passent un étrange contrat qui va bouleverser leurs vies. Très jolie histoire entre deux écorchés des sentiments. Vont-ils enfin se trouver ? Le lecteur croit à la romance mais les auteurs, entraînent leurs personnages dans une tout autre direction, inattendue et qui fait toute l'originalité de cette BD.

« Héléna » (tome 1), Bamboo, 16,90 €