jeudi 26 juillet 2012

Polar - Hécatombe en Afrique du Sud

Une ancienne top-model, un mercenaire, des dealers, un flic hargneux, un psychopathe, des escrocs : peu de personnages s'en sortent dans ce polar de Roger Smith

L'Afrique du Sud a beaucoup combattu une image de marque trop négative. Après l'apartheid, la violence a plombé la réputation de cet immense pays. « Blondie et la mort » roman policier de Roger Smith ne vous sera certainement pas conseillé par l'office de tourisme local. En fait vivre dans les environs du Cap c'est avoir toutes les chances de mourir violemment. De tous les personnages croisés dans le récit, très peu d'entre eux ont la chance d'être toujours en vie une fois passé la dernière page.

La chance de Joe Palmer a tourné. Ce riche entrepreneur, louant les services de ses mercenaires un peu partout dans le monde, a de graves difficultés de trésorerie. Il entend se refaire une santé en vendant des armes à un chef rebelle congolais. Il touche une grosse avance en liquide dans un attaché-case. En rentrant chez lui en compagnie de sa femme Blondie, une ancienne top-model, deux petits dealers les attaquent. Ils ne savent rien pour l'argent, c'est la voiture qui les intéresse. Cela se passe mal, Joe est blessé, les voyous prennent la fuite avec la voiture. Le roman bascule dans le hors norme quand Blondie se saisit de l'arme abandonnée par les assaillants et colle une balle dans la tête de son mari.

Ultra violence
C'est ça l'Afrique du Sud décrite par Roger Smith : une violence latente, permanente qui peut exploser à tout moment sans véritable raison. Billy Afrika le sait bien. Métis, il a été grièvement brûlé en étant jeune. Des enfants, comme lui, l'ont battu, jeté dans un trou et aspergé d'essence avant d'y mettre le feu. Il a survécu, mais en garde sur tout le corps un cuisant souvenir.

Billy est mercenaire. Il est furieux. Sa solde n'est pas arrivée. Il va directement demander des comptes à son employeur, Joe. Dans l'immense villa, il ne trouve que Roxy dans le rôle de la veuve éplorée. Elle a fait croire aux policiers que ce sont les dealers qui ont tiré sur son mari. Billy et Roxy, les deux personnages principaux du roman vont faire cause commune. Leur objectif : récupérer la valise. Ainsi Roxy pourra retourner aux USA et Billy toucher son salaire. Mais pour cela ils vont devoir retrouver les dealers de tik, la drogue locale composée à partir de « produits de débouchage de canalisations, de liquide de radiateur et de potion pour le rhume de cerveau. Produits bruts qui ne nécessitent aucune ordonnance. » C'est déjà compliqué, mais ils vont en plus s'attirer les foudre de Piper, un psychopathe de la pire espèce.

D'une violence extrême, ce polar ne vous donnera certainement pas envie d'aller visiter les ghettos du Cap. Selon la description de Roger Smith ce n'est pas une destination touristique, juste l'antichambre de l'enfer...

« Blondie et la mort » de Roger Smith, Calmann-Lévy, 20,50 € (Egalement disponible au format poche au Livre de Poche)

mercredi 25 juillet 2012

BD - Vitesse et guerre dans le troisième tome de "Grand Prix" de Marvano


Troisième et dernière partie de « Grand Prix », fresque de Marvano sur le sport automobile avant la seconde guerre mondiale. Après les exploits des autos et des pilotes, la politique prend le dessus. Hitler impose avec force son idéologie nazie. Les tensions avec les Britanniques sont de plus en plus fortes. Rudy, pilote de Mercedes et citoyen anglais est de plus en plus sur la sellette. Il profite pourtant de ses nombreux déplacements en Europe pour jouer à l'espion et participe même à un réseau destiné à sauver des milliers de Juifs persécutés. 
La BD, de sportive, devient politique, avec une dénonciation claire et nette de la politique de l'autruche menée par Chamberlain. Marvano tisse son intrigue autour des événements historiques, de l'ouverture des premiers camps de concentration à l'annexion des Sudètes. Le dernier grand prix aura lieu à Belgrade. Ensuite, les seuls moteurs vrombissant seront ceux des chars et des avions de la wehrmacht en train d'envahir l'Europe...

« Grand Prix » (tome 3), Dargaud, 13,99 €

mardi 24 juillet 2012

BD - Firewall : lutte contre un virus informatique très agressif


Dans un monde où la technologie est chaque jour plus performante, le terrorisme pourrait évoluer lui aussi vers une dématérialisation du risque. C'est la base du scénario de Firewall, nouvelle série écrite par Xavier Bétaucourt et dessinée par Jean-Jacques Dzialowski. La Louve est une organisation mafieuse très active sur les nouvelles technologies. S'offrant les services des meilleurs pirates informatiques, ces terroristes du 3e type mettent au point un virus numérique capable de s'attaquer directement au cerveau en passant par les relais de téléphonie mobile. Pour tenter de les arrêter, l'agence Firewall forme un duo improbable composé d'une informaticienne de 25 ans et d'un militaire en fin ce carrière spécialisé dans les missions secrètes en milieu ennemi. Tout les oppose et les premiers pas seront tendus, leur seul point commun étant d'être aussi têtu l'un que l'autre. Dessin réaliste bien mis en page (Dzialowski a été formé à l'école des comics), suspense haletant et personnages attachants : Firewall a tout de la bonne BD d'été. Et le tome 2 est annoncé pour fin août.

« Firewall » (tome 1), Bamboo, 13,90 €

lundi 23 juillet 2012

BD - Vive la colo de Aré, Muller et Ghorbani !


Glissez cette BD dans la valise de vos enfants s'ils partent en colonie de vacances. Il y trouveront certainement l'occasion de relativiser leur malheur. Du moins au début. Les colonies de vacances c'est toujours pénible les premiers jours et trop court à la fin. Aré et Muller, les scénaristes, ont puisé dans leurs souvenirs pour fournir un gag par page à Ghorbani, le dessinateur. Ils ont entre 8 et 12 ans, pas encore adolescents, plus tout à fait bébé, ils vont passer quinze jours dans un centre aéré de la côte basque. Cet enchaînement de gags est construit chronologiquement. Découverte des enfants, voyage en train, installation, premières sorties... le lecteur est plongé au corur de la vie de cette colonie de vacances. Le ressort comique est essentiellement fourni par les animateurs : un directeur très autoritaire, un adjoint obséquieux et des moniteurs particulièrement cool, bien décidés de profiter aux aussi des vagues de l'Atlantique et des veillées autour d'un feu. C'est très sympa, distrayant, efficace et bien vu. De la belle ouvrage.

« Trop bien la colo ! » (tome 1), Vents d'ouest, 10,45 €

dimanche 22 juillet 2012

Jeunesse violente dans ce thriller de Jussi Adler Olsen

Carl Morck, policier danois, rouvre une affaire de double meurtre. Un faux coupable se serait dénoncé pour couvrir les agissements violents de plusieurs fils de bonne famille.

Quand on est riche et de bonne famille, se distraire est parfois compliqué. Internes dans une institution privée, six amis vont découvrir que la violence est un excellent fournisseur d'adrénaline. Tabasser des faibles, tuer des animaux, pour eux, c'est un loisir comme un autre... Bénéficiant d'une quasi impunité grâce aux millions et aux relations de leurs parents, ils vont aller crescendo dans leur dérive jusqu'à tuer plusieurs personnes. C'est le double meurtre d'un frère et d'une sœur qui a failli les faire tomber. Mais l'un d'entre eux se dénonce et depuis quelques années croupit en prison et paye pour toute la bande.

Affaire classée ? Pas pour Carl Morck dont c'est justement le fond de commerce. Ce flic danois d'élite est à la tête du plus petit service du pays. Il doit se contenter d'un assistant, Assad, un Syrien, touche exotique dans un thriller très noir.

Le premier roman policier de Jussi Adler Olsen, « Miséricorde » paru en 2011, présentait ce duo peu banal. On les retrouve dans leur bureau au sous-sol, plongé dans cette affaire apparu par enchantement sur leur bureau.

Morck est le prototype du flic bourru et qui n'en fait qu'à sa tête. Il aime travailler en solitaire. Il ne voit pas d'un très bon œil l'arrivée d'une secrétaire dans son service. D'autant que Rose est assez atypique : « Une coiffure ébouriffée ultra-courte et noire, des yeux de jais et des vêtements plus sombres que sombres. La créature que Morck avait devant lui était effarante. » Mais comme elle n'a pas sa langue dans sa poche et qu'elle est particulièrement débrouillarde, elle va autant séduire qu'exaspérer son chef.

La folie de Kimmie
Malgré les ordres de sa hiérarchie lui ordonnant de ne pas enquêter sur ce double meurtre, Morck va creuser et retrouver les jeunes étudiants suspectés à l'époque. Ils sont tous devenus des notables, riches et très influents. Un styliste, le patron de plusieurs cliniques, un trader... Morck s'attaque à forte partie. Manque Kimmie, la seule fille de la bande. Elle a disparu depuis dix ans. Elle vivrait dans la rue. Kimmie personnage principal, pivot du roman dont l'auteur décrit longuement la lente descente aux enfers. Kimmie, la seule s'étant repentie, la plus humaine malgré sa folie irrémédiable.

L'humanité, c'est un concept inconnu aux trois rescapés. Ils se retrouvent régulièrement pour des chasses spéciales dans le domaine de l'un d'entre eux. Ils massacrent des faisans et surtout ont à chaque sortie un gibier exceptionnel qui sort de l'ordinaire. « Tous retinrent leur souffle avec le tireur tandis qu'il épaulait son arme et appuyait sur la gâchette. Il tira un peu bas, ce qui rompit le cou de la bête et la décapita. Il pensait que l'animal tomberait raide mort, mais il continua à courir sans sa tête pendant quelques secondes avant que son cadavre ne trébuche sur le sol inégal. Un spectacle désopilant. » Une ultime partie de chasse compose le final du roman dans laquelle chasseurs et gibiers s'affrontent dans un déchaînement de violence.

« Profanation » fait partie de ces thrillers qui vous tiennent en haleine du début à la fin. Entre scènes d'action et parties plus psychologiques, il est d'une rare richesse. Morck, Assad et Rose reviendront dans une nouvelle enquête. Car pour couronner le tout, Jussi Adler Olsen maîtrise parfaitement le côté feuilleton de son œuvre.

« Profanation » de Jussi Adler Olsen (traduction de Caroline Berg), Albin Michel, 22,90 € (disponible au format poche au Livre de Poche)

samedi 21 juillet 2012

BD - Bretons à pédales


Avant le début de la saison, le coach des cyclistes des Vélomaniacs décide d'un stage de remise en forme. Direction la Bretagne, le pays du vélo par excellence. Des mouettes, des averses, des menhirs et des Bigoudines aussi... Jean-Luc Garréra, le scénariste, a exploité au maximum ce déplacement en terre celte, multipliant les gags sur l'opposition entre des cyclistes habitués au soleil et un milieu humide, voire carrément aquatique. 
Il est beaucoup question de marée dans ces planches toujours dessinées par Alain Julié. Et quelle soit montante ou descendante, elle surprend toujours les Vélomaniacs et les met dans des situations périlleuses. Un album thématique et régionaliste pour donner un coup de fouet à une série qui est pourtant loin de tourner en rond.
« Les Vélomaniacs » (tome 8), Bamboo, 10,60 €

vendredi 20 juillet 2012

BD - Les Jeux olympiques à la sauce Simpson


Si vous vous posez des questions sur l'origine des jeux olympiques, vous n'apprendrez pas grand chose dans cet album hors série des Simpson, mais la version Bart et Homer ne manque pas d'intérêt. Bart est aculé. Il risque de passer ses vacances en classe de soutien s'il n'obtient pas une très bonne note à son dernier devoir : « Raconte l'histoire des Jeux Olympiques de façon créative ». Trop fainéant pour se documenter, il décide de se tourner vers son père, le roi de la débrouille. 
Le devoir va prendre la forme d'une vidéo, tournée avec l'aide de la famille. Ils y répondront à des questions incongrues comme « Pourquoi les premiers athlètes concouraient tous nus ? » ou « Le bowling a-t-il été une épreuve olympique ? » Les réponses, totalement délirantes, sont dans le ton de l'univers créé par Matt Groening. Bonus, vous trouverez au centre de l'album une double page de Sergio Aragonès présentant la ville de Londres cet été en plein Jeux Olympiques.

« Les Simpson en route vers l'or », Jungle, 10,45 €

jeudi 19 juillet 2012

BD - Cauvin et Bercovici : sportifs, mais pas trop...



Quand Cauvin et Bercovici, les créateurs des Femmes en blanc, décident de s'attaquer aux sports de compétition, on est sûr que le grand gagnant sera le rire. Scénariste prolixe ayant exploré quasiment tous les univers, Raoul Cauvin se tourne vers le sport vers le tard. Fringant septuagénaire, il passe au crible de son humour acerbe quelques disciplines sportives parmi les plus en vue. 
A tout seigneur tout honneur, il débute par le football. Il analyse notamment les blessures causées par ce sport, de l'entorse à la pubalgie (« qui contraint la victime à imiter la démarche de John Wayne ») en passant par le célèbre coup de boule, peu commun mais toujours spectaculaire... Parmi les sports à éviter, la boxe et le rugby en prennent plein les dents. 
Des histoires courtes, sur un comique de répétition, mis en images par Bercovici, l'homme aux 100 albums en 35 ans de carrière... Il se serait dopé lui, que cela n'étonnerait personne !

« Sports de compétition », Dupuis, 10,60 €

mercredi 18 juillet 2012

Roman - Jacques Anquetil, idole mal aimée

Paul Fournel signe un portrait subjectif et passionné de Jacques Anquetil, un géant du cyclisme mondial.


La Caravelle. Jacques Anquetil, dans les années 50 et 60, a hérité de ce surnom. Ce cycliste français filiforme, spécialiste du contre la montre, allait vite, très vite. Aussi vite que cet avion, fierté de la technologie française de l'époque. Paul Fournel a une dizaine d'années quand il découvre ce coureur d'exception. Le gamin vient de trouver son idole, son modèle. Paul Fournel a doublement fait du vélo, ses jambes pédalent, son esprit et son imagination réécrivent les exploits d'Anquetil. 60 ans plus tard, il raconte dans cette biographie très subjective le parcours hors norme de ce sportif de légende, imbattable mais toujours devancé dans le cœur des Français par son malheureux rival, Poulidor.

Alors que le Tour de France après une première semaine très roulante va aborder la première épreuve de vérité (un contre la montre, ce lundi), ce livre de Paul Fournel parle d'une époque où les cyclistes étaient les seigneurs de la route. Des idoles, faisant vibrer des milliers de spectateurs. Dans les années 50, ce sport va se professionnaliser. Les équipes nationales vont être abandonnées au profit des marques. La France est à la pointe, notamment depuis l'arrivée sur le circuit de Jacques Anquetil. Ce Normand, grand, blond, dur à l'effort, aime par dessus tout l'épreuve du contre la montre. Sa légende il va la construire dans le Grand Prix des Nations et quelques étapes du Tour de France. Son secret : repousser les limites de la souffrance. Pour lui, s'entraîner c'est avoir mal. Et pour gagner, il faut encore aller plus loin dans la douleur.

« Pédalant comme un forcené »

Paul Fournel, gamin de dix ans déjà passionné de vélo, est « petit et rond ». L'opposé d'Anquetil. Il s'identifie pourtant au cycliste. « La Caravelle a traversé mon enfance cycliste dans une mystérieuse majesté. Trop jeune pour comprendre, j'étais bien assez vieux pour admirer. Je dévorais des yeux ce champion avec ses allures d'étoile sur pointes et je faisais d'inlassables tours de la maison pédalant comme un forcené avec mes jambes grassouillettes, les pieds en canard. » Ce livre hommage retrace les grandes étapes de la carrière d'Anquetil, analyse son rapport avec la compétition, les médias, le dopage. Rien n'est laissé dans l'ombre. Ce n'est pas un panégyrique, le temps a fait son office. Et Paul Fournel a quand même beaucoup mis de lui dans ce texte parfois aussi sec et brutal qu'un démarrage de finisseur.

Parmi les grands exploits, les records de l'heure. En 1956, à Milan, le Français s'attaque au plus beau des titres. « Anquetil va tourner en rond, en cage, pendant une heure, sans bouger, au bout de la souffrance. Une heure à fond dans l'absolu du vélo. Pour Jacques, rien n'est plus beau que le record de l'heure. On ne peut pas y faire deuxième. C'est tout ou rien. »

De l'éternel deuxième il en est aussi beaucoup question dans ce livre. Poulidor ne gagne pas. Mais Poulidor est adulé des foules. Anquetil gagne, mais n'est pas aimé. Paradoxe français, qui place Paul Fournel, à l'époque, dans le « mauvais camp »...

Ce livre permet aussi de remettre à sa place un coureur peut-être un peu trop intelligent. Il n'a pas caché qu'il courrait pour l'argent. C'est riche et sa famille à l'abri du besoin qu'il a quitté la compétition. Là aussi il était un précurseur salué par la plume de Paul Fournel.

« Anquetil tout seul », Paul Fournel, Seuil, 16 € (disponible au format poche chez Points)

mardi 17 juillet 2012

BD - La grande évasion d'Esteban



Esteban est la série fétiche de Matthieu Bonhomme. Ce dessinateur réaliste virtuose s'est illustré en illustrant les aventures du Marquis d'Anaon sur des scénarios de Vehlmann. Là, c'est seul qu'il anime les péripéties de cet Indien de Patagonie, embarqué sur un baleinier au début du siècle. Alors que les trois premiers titres sont réédités, le quatrième, la nouveauté, se déroule presque exclusivement à terre, dans un pénitencier à l'extrême sud de l'Amérique. L'équipage du baleinier est emprisonné. 
Esteban décide de faire évader ses compagnons. Il va réussir à se faire embaucher comme gardien dans cette zone de non droit. Il devra tromper la vigilance des soldats pour mettre au point un plan d'évasion. Les marins, habitués aux rudesses des éléments, supportent les brimades. 
Esteban a plus de difficulté à endosser l'uniforme de tortionnaire. Une superbe leçon de vie par un auteur à suivre que l'on retrouvera à la rentrée dans un tout autre exercice : un western avec Lewis Trondheim au scénario !

« Esteban » (tome 4), Dupuis, 12 €