jeudi 7 décembre 2006

BD - Le roi Arthur et sa bande en BD

L'adaptation de séries télé en bande dessinée a rarement été à la hauteur de l'originale. On se souvient de Caméra Café, acceptable, on oubliera les annonces d'Elie, peu convaincantes. Pour Kaamelott, c'est carrément le créateur et acteur principal, Alexandre Astier, qui a pris en charge le scénario. Et plutôt que de récrire des épisodes déjà vus, il a fourni à Steven Dupré un scénario original entrant dans le cadre très précis d'un 48 pages. Le résultat est en demi-teinte. 

Rien à redire sur l'esprit des personnages. D'Arthur à Bohort en passant par l'inégalable Perceval, on retrouve tout le ressort comique d'acteurs regardés chaque soir par 4 millions de téléspectateurs sur M6. En introduisant une armée de morts-vivants et quelques créatures fantastiques gigantesques, Alexandre Astier utilise parfaitement la possibilité de faire du très grand spectacle à moindre coût. Reste que les véritables passionnés de la série TV resteront sur leur faim.

 Les amateurs de BD devraient eux apprécier cette histoire bourrée de gags et de bons mots, à l'intrigue soignée et au dessin efficace. (Casterman, 11,95 €. Une édition de luxe de 64 pages comprenant croquis et entretiens avec les auteurs est en vente au prix de 19,95 €)

mercredi 6 décembre 2006

Polar - Parcours nocturnes

Il peut s'en passer des choses durant une nuit. Vol, fugue, coup de foudre, mort : tranches de vies nocturnes par Jean Achache.


Daniel Wis est flic. A la brigade de protection des mineurs. C'est le mot protection qui a attiré ce policier au parcours différent de ses collègues. Par exemple, pour l'incognito, c'est rapé : « Je suis un flic qui se voit. Un flic dont on se dit qu'il a une tête de flic. Un flic dont les gamins se méfient. Tant mieux, au moins comme ça, il n'y a pas d'ambiguïté. Je ne suis pas leur pote ». Au petit matin, après une nuit éprouvante, il décide de mettre sur papier l'enchaînement d'événements qui s'est achevé par la mort d'un homme. Avant la scène finale, il présente les différents protagonistes. Quelques heures auparavant ils ne se connaissaient pas. Il y a Ben, le livreur de pizza, Claire la chanteuse pop anglaise, Virginie, l'adolescente fugueuse, Kevin, son petit copain, déjà accro à l'héroïne malgré ses 12 ans, Bruno, le cambrioleur et d'autres qui joueront un petit rôle.

De l'amour à la haine

Toute une humanité, plus ou moins heureuse. La violence est en filigrane, mais les sentiments ont aussi leur mot à dire. Jean Achache raconte comment Ben, jeune black vivotant en livrant des pizzas, tombe raide dingue amoureux d'une étudiante, fille d'un diplomate, danseuse de flamenco émérite. Ils se croisent, tentent de s'apprivoiser et finalement acceptent l'évidence : l'amour frappe toujours au hasard. De l'amour il n'y en plus beaucoup dans la famille de Kevin. Pour lui, « la nuit commence par une énorme claque dans la gueule assénées par le gros Raymond son beau-père, sous le regard indifférent de sa mère, Josiane. Il a 12 ans, c'est jeune pour se faire démonter la tête par un type qu'il a toutes les raisons de détester et à qui il rend une bonne cinquantaine de kilos ». Kevin se vengera, notamment en brûlant le 4x4 du violent.

Pour Claire, la violence est loin derrière elle. Cette star de la pop anglaise revient à paris pour enregistrer son nouveau clip. Elle revient car elle a passé quelques années dans la capitale française. Avant qu'elle ne soit connue et adulée de ses fans. Elle en a gardé quelques noirs souvenirs. Ce qui explique son errance nocturne en compagnie de Pascal, le stagiaire chargé par la production d'exaucer tous ses caprices.

Presque une famille idéale

Le bonheur, on le trouve dans la description d'une famille française idéale. Du moins en apparence. Virginie, 12 ans, fuguera dans la nuit. « C'est leur dernier repas en famille et ils ne le savent pas. On voudrait pouvoir leur dire. Profitez, faites pas la gueule. Vous vous aimez profondément mais vous interprétez au pied de la lettre la partition déjà écrite et des milliers de fois rabâchée de la famille qui traverse les phases « normales » de son évolution. Demain vous vous direz que si vous aviez su, vous auriez fait autrement. » La nuit, les lieux les plus courus sont parfois étranges : les égouts, le périphérique ou des studios de télévision, anciens entrepôts transformés en petit Hollywood. C'est là que le drame va se nouer, sans éclairage ni caméra.

Les personnages sont criant de vérité, l'enchaînement des faits totalement maîtrisé par un écrivain signant son premier roman, mais ayant une belle expérience de la narration puisqu'il est à la base réalisateur de cinéma.

« Juste une nuit », Jean Achache, Editions du Masque, 16 €

mardi 5 décembre 2006

BD - André Franquin est un génie !

Alors que les aventures de Spirou et Fantasio, sous la plume de Morvan et Munuera, connaissent un très intéressant renouveau et que des histoires indépendantes et hors collection sont confiées à de jeunes dessinateurs (Fabrice Tarrin est le prochain), les éditions Dupuis n'oublient pas que la série doit énormément à André Franquin. Les deux premiers tomes de l'intégrale des aventures du groom rouge dessinées par le créateur de Gaston et du Marsupilami viennent de sortir.

Des œuvres de jeunesse datant des années 45 à 52. Si les premiers récits sont effectivement un peu maladroits, on retrouve rapidement le grand Franquin, celui qui impose sont trait tout en mouvement et dynamisme. 

Dans le tome deux on retrouve les aventures qui ont véritablement propulsé les deux héros sur le devant de la scène, du "Il y a un sorcier à Champignac" au mythique "Les voleurs du marsupilami". Ce dernier personnage, qui restera la propriété d'André Franquin, est vite devenu indispensable au succès de la série. Le tome trois de cette intégrale en 8 volumes paraîtra en mars 2008. (Dupuis, 16 euros)

lundi 4 décembre 2006

BD - Le désespoir du singe face au coup de foudre


Lendemain de fête. Fête trop arrosée. Josef a des difficultés pour émerger. Chez son amie Edith, une peintre aux mœurs très libres, il se souvient péniblement de ses éclats. Tirant un trait sur ses ambitions artistiques, il a décidé de reprendre l’entreprise de son père. Une fabrique d’éponges. Et puis de se marier avec sa fiancée. Bien qu’il ne l’aime pas véritablement. 

Un homme déçu et résigné. Mais ses choix pourraient être remis en cause car une guerre civile menace d’éclater. Le pouvoir a décidé de promouvoir l’agriculture intensive. Au détriment de la pêche. Conséquence, le niveau de la mer intérieure baisse et des dizaines de familles de pêcheurs se retrouvent sans revenus. 

L’entreprise de Josef risque de faire faillite. C’est dans ce contexte que Josef rencontre Vespérine, le modèle d’Edith. Le coup de foudre est réciproque. Ils passent leur première nuit d’amour alors que émeutes et répression mettent la ville à feu et à sang. 

Une BD entre romantisme et histoire, écrite par Jean-Philippe Peyraud et dessinée par le très talentueux Alfred, déjà remarqué avec sa série Abraxas. (Delcourt, 12,90 €)

dimanche 3 décembre 2006

BD - Argent trouble


Machination dans la haute finance, cupidité, escroquerie : les thèmes abordés dans cette BD en deux parties publiées simultanément ne sont pas des plus reluisants. et loin de la vie quotidienne de millions d'Européens. Il existe pourtant quelques centaines d'individus en Europe qui ne parlent qu'en millions d'euros.

 Ils sont souvent concentrés autour du Luxembourg, principauté membre de la CEE aux pratiques financière souvent suspectes. Tout commence par la rencontre de deux anciens amis du lycée. Franco va aider financièrement Jacques à rénover un hôtel en Croatie. En contrepartie le futur hôtelier devra ramener des Balkans des mallettes d'argent sale. Une grosse magouille sur 10 millions d'euros qui va se gripper avec la mort de Franco. Le bel édifice va s'écrouler entraînant dans sa chute quelques lampistes et têtes pensantes. 

Le scénario de Philippe Richelle parvient à rendre passionnant ce trafic financier. Pierre Wachs, sans fioritures, illustre efficacement ce récit qui connaîtra une suite, en janvier... avec Dominique Hé au dessin. (Glénat, 9,40 €)

samedi 2 décembre 2006

BD - Un ciel radieux de Taniguchi

A la base c'est un simple fait divers dans la nuit japonaise. Un homme de 42 ans, Kubota, fatigué de travailler 12 heures par jour, s'endort au volant. Il percute la moto de Takuya, 17 ans, inconscient roulant trop vite sur son engin. Les deux hommes se retrouvent à l'hôpital, dans le coma. Quand Takuya se réveille, Kubota meurt. 

Jiro Taniguchi, l'auteur de cette BD de 300 pages, fait basculer le récit dans le fantastique quand l'esprit de l'homme de 42 ans constate qu'il a migré dans le corps de l'adolescent. Comment vivre dans un nouveau corps ? Que dire à sa véritable famille qui ne le reconnaît pas et à l'autre qui est persuadée que le fils est de retour ? Une schizophrénie qui deviendra encore plus forte quand l'esprit de Takuya tente de reprendre possession de son corps. 

La véritable leçon de cette histoire, c'est de ne jamais négliger de vivre pleinement le temps présent avec ses proches. Demain, il sera peut-être trop tard. Un peu mystique, pas trop moralisatrice, cette BD prouve une nouvelle fois que Taniguchi est un grand auteur. (Casterman, 15,95 €)

vendredi 1 décembre 2006

BD - Les cauchemars du futur


Jean-Luc Istin, scénariste émergent, a rencontré le succès en racontant les légendes celtiques de Merlin et autre chevalier de la Table ronde. Mais il n'en oublie pas son autre passion : la science-fiction. Il remet donc au goût du jour une vieille série, « Aleph » parue au début des années 2000. Après le tome 1 en juin, voici la réédition du tome 2. Sur Aleph, en 2258, un tueur psychopathe kidnappe des prostituées pour leur enlever, dans d'atroces souffrances, la colonne vertébrale. 

Au même moment, une femme ailée libère des milliers de zombis qui s'attaquent à la population de la ville. Les autorités sont débordées, le chaos menace. Une violente guerre s'engage entre l'Humanité et des dragons monstres sanguinaires, immortels, régnant sur le monde depuis la nuit des temps. 

Violente, apocalyptique, chargée de symboles, cette bande dessinée obtient auprès des éditions Soleil une seconde chance. Les amateurs de cauchemars gothiques y trouveront leur compte. Le dessin de Dim-D, noir et sombre, donne toute son ampleur à cette abomination. (Soleil, 12,90 €)

jeudi 30 novembre 2006

BD - Petit lapin des années 50


Dans le Paris des années 50, le commissaire Raffini va fréquenter les cabarets de music-hall. Pas uniquement pour le plaisir puisqu'il enquête sur la disparition d'une assistante de magicien. Un tour de passe-passe qui ne reste pas inaperçu. En pleine représentation, la jeune et belle Martine Portal disparaît de la boite magique dans laquelle le magicien venait de la placer. Le problème c'est qu'elle n'est jamais réapparue. Un mystère de choix pour le flic placide imaginé par Rodolphe et dessiné depuis peu par Maucler. 

Une rapide enquête du commissaire sur la personnalité de la jeune fille oriente les recherches vers sa vie privée. Elle aurait un amant secret, prompt à faire des promesses de voyage et de mariage. Un peu triste, cette intrigue, parfaitement menée par ce policier patient et tenace, manque cependant de rebondissements. 

Par contre, côté immersion dans le passé, Maucler réalise un tour de force. Décors, ambiances, vêtements : pas un détail n'est négligé. Même la reliure de l'album donne un petit air rétro à l'ensemble. (Albin Michel, 12,50 €)

mercredi 29 novembre 2006

BD - Nävis piègée

Nävis, l'héroïne de cette série imaginée par Morvan et Buchet, est, malgré elle, au cœur d'une attaque terroriste d'envergure contre le navire amiral de Sillage. Dans cet agglomérat de vaisseaux spatiaux, toutes les races de l'espace cohabitent. Nävis, dernière terrienne survivante d'une humanité détruite, est en mission. Elle est sur le point d'infiltrer une bande de terroristes. Au dernier moment, elle reçoit l'ordre de tout arrêter. Mais c'est mal connaître la jeune femme qui, en bonne humaine, désobéit et plonge dans la gueule du loup. 

Ce 9e épisode de la saga permet à Morvan de placer son personnage devant un cas de conscience qu'elle redoutait depuis longtemps. Buchet, dans la scène finale, casse sa mise en page pour donner encore plus d'effet aux destructions du convoi.

Sillage, infiltrations, Morvan et Buchet, Delcourt, 12,90 euros

mardi 28 novembre 2006

BD - Conteurs et contes d'Orient


A Bagdad, du temps du calife, les conteurs ont un grand pouvoir. Celui de faire oublier au peuple ses misères. Mais ils sont également très appréciés des nobles. Pour preuve ce concours organisé par le calife. Il donne rendez-vous à tous les conteurs de la région dans trois ans : le meilleur récit permettra à son créateur de connaître gloire et richesse. 

Cinq d'entre eux partent autour du monde pour collecter les histoires les plus extraordinaires pour en faire la synthèse. Ce gros album, découpé en chapitres indépendants de 8 à 10 pages, raconte ce périple. 

Vehlmann, le scénariste, laisse libre cours à sa poésie, Duchazeau illustre l'ensemble dans un style aux belles arabesques.

Les cinq conteurs de Bagdad, Vehlmann et Duchazeau, Dargaud, 13,50 euros