lundi 30 juin 2008

BD - Adler, un électron libre, comme René Sterne


René Sterne, comme son héros Adler, a toujours privilégié sa liberté au succès ou au conformisme. Après quelques années dans les habits étriqués de professeur, il a changé de voie. A l'image de sa compagne, Chantal de Spiegeleer, il est devenu auteur de BD. Son héros, Adler, est un aviateur allemand qui a préféré déserté quand Hitler s'est révélé sous son vrai jour. Un déserteur aventurier et vagabond. Sterne, mort il y a deux ans à 54 ans, lui a consacré dix albums. Dans une édition intégrale de très belle facture, voici les cinq premières aventures d'Adler. Un dessin épuré, des scénarios très humains, l'occasion de redécouvrir ce grand auteur qui aurait du reprendre le dessin de Blake et Mortimer à la suite de Ted Benoît.

« Adler » (intégrale, tome 1), Le Lombard, 47 euros 

dimanche 29 juin 2008

BD - Triste futur décrit dans "SOS Bonheur"


Pour les 20 ans de la collection Aire Libre de chez Dupuis, la maison d'édition belge ressort quelques uns de ses fleurons. Après Cosey et avant Gibrat, voici l'intégrale de SOS Bonheur, récit d'anticipation de Van Hamme mis en images par Griffo qui signait sa première BD réaliste. Le scénariste, longtemps cadre dans une multinationale, a profité de son expérience pour imaginer une société déshumanisée ou l'Etat providence offre à tous son lot de bonheur. Bonheur officiel, bonheur programmé. En quelques courts chapitres puis un long récit, les auteurs expliquent que ce beau rêve peut se transformer en cauchemar absolu. A l'ère du tout numérique, ce récit vieux de 20 ans, est toujours d'actualité. 

« SOS Bonheur » (intégrale), Dupuis, 32,50 euros

samedi 28 juin 2008

BD - Amour captif


Un homme, une femme. Ils sont voisins. Tous les deux divorcés, avec enfants à charge. Le matin, le père conduit sa voisine à l'école. Il se trouve que c'est l'institutrice de sa fille. Elle lui plaît. Il n'ose pas lui dire. Jusqu'au jour où ils arrivent en retard. Dans la classe, un homme cagoulé, ceinturé d'explosifs, a pris en otage cette classe de maternelle d'une banlieue chic. L'homme et la femme, otages eux aussi, vont passer 48 heures ensemble. 48 heures de peur et de passion. 

Cette nouvelle de Jean-Philippe Djian (qui reparaît en même temps chez Folio), est adaptée par Jean-Philippe Peyraud. D'un faits divers encore dans les mémoires, ils font une superbe histoire d'amour.

« Mise en bouche », Futuropolis, 19 euros 

vendredi 27 juin 2008

BD - Pico Bogue se raconte dans "La vie et moi"


Méfiez-vous des petits rouquins, ils sont souvent très insolents. C'est le cas de Pico Bogue, petit garçon imaginé par Dominique Roques et Alexis Dormal. Les deux auteurs, qui sont mère et fils, cela ne s'invente pas, ont un peu réinventé l'univers du Petit Nicoles, l'impertinence en plus. Pica est donc l'aîné de la famille. Avant l'arrivée de sa petite sœur Ana Ana, il était « fils unique. » et d'expliquer à un copain de classe « Tu sais ce que ça veut dire, fils unique ? Que mes parents m'adoraient comme un dieu ! » 

Pourtant il l'aime quand même cette petite sœur, parfois un naïve, toujours gentille comme quand elle lui offre des abricots secs, par exemple. Pico Bogue, pose des questions, mais a souvent réponse à tout. Quelle que soit la situation où, à priori, sa mère ou son père ont raison, il veut avoir le dernier mot. Et c'est tout le charme de cette série de gags car Pico, malgré sa petite taille et ses mots d'enfants, tient des raisonnements que de grand philosophes ne renieraient pas. 

Un décalage étonnant au début, séduisant ensuite, hilarant parfois. Un nouveau héros qui bénéficie d'un dessin très fluide : Alexis Dormal, après avoir étudié la réalisation au cinéma et à la télévision en Belgique, est passé par l'école Emile Cohl de Lyon.

« Pico Bogue », (tome 1), Dargaud, 10,40 € 

mercredi 25 juin 2008

BD - Loups sibériens

Aux âges de pierre, en pleine Sibérie, Touna nait la nuit où son père est tué par une meute de loups affamés. Touna petite fille maudite, abandonnée par sa mère en pleine forêt et recueillie par une louve encore couverte du sang du père de la fillette. De nos jours, Mara est une jeune chercheuse membre d'une expédition à la recherche d'enfants-loups découverts dans des tribus isolées en pleine Sibérie. 

Ce récit fantastique se déroulant à deux époques différentes nous donne l'occasion de découvrir un dessinateur italien virtuose. Encore un, pourrait-on se dire tant l'émergence de talents a été importante, notamment chez les Humanoïdes Associés. Mario Milano a fait son apprentissage aux éditions Bonelli. Il a aujourd'hui un trait réaliste entre ceux de Milo Manara et de Griffo. 

L'histoire, mêlant science-fiction et fantastique, est issue de l'imagination de Patrick Galliano qui s'est déjà illustré avec Lothario Grimm et L' appel des dieux. Une série innovante et prometteuse.

« Touna Mara », Les Humanoïdes Associés, 12,90 € 

mardi 24 juin 2008

BD - Duel en 60 pages


Richard Guérineau, dessinateur réaliste au trait nerveux et aux cadrages très cinématographiques, a connu le succès avec le Chant des Stryges scénarisé par Corbeyran. Il a voulu, le temps d'un album, s'échapper de cette ambiance contemporaine et fantastique pour signer un album de 60 pages dans un genre qu'il affectionne depuis sa jeunesse : le western. Il s'est associé à Henri Meunier pour raconter cette histoire de duel dans une petite ville de l'Ouest américain. 

Le shérif Jude Stanton est respecté. Le calme est revenu à Westwood City. Mais parfois un pistollero arrive en ville et refuse de se plier à l'exigence du shérif de déposer ses armes dans son bureau. Cela se règle alors au colt. Un matin, un jeune homme débarque en ville, deux cadavres sur son second cheval. Deux hors-la-loi, recherchés « mort ou vif ». Il s'installe à l'hôtel, sans rendre ses armes. 

Le shérif va lui réclamer ses colts et découvre qu'il a le même nom qu'un tueur abattu quelques mois plus tôt. Qui est ce fantôme énigmatique, si sûr de lui ? Ce duel sera-t-il celui de trop ? 

Un bijou graphique que l'on peut également apprécier dans une édition luxe en noir et blanc.

« Après la nuit », Delcourt, 13,95 € (20 € en noir et blanc) 

lundi 23 juin 2008

BD - Fantastique urbain dans "La légende du Changeling"


Pierre Dubois ne vit pas dans notre monde. Ce grand spécialiste des elfes, lutins et autres petits peuples de la forêt a définitivement tiré un trait sur la modernité et notre monde dédié à la technologie. Son combat contre l'oubli des légendes anciennes lui donne l'occasion de signer de plus en plus de scénarios de bande dessinée, support sans limite pour représenter ces êtres et mondes imaginaires. 

Cette fois, il s'est associé à Xavier Fourquemin dessinateur français à l'imagination débordante. « Le Mal-venu », premier tome de la Légende du Changeling débute dans cette campagne anglaise de la fin du 19e siècle. La misère est de plus en plus présente et la famille Jobson est obligée de quitter ce pays de bocages pour les bas-fonds de Londres. Un monde totalement nouveau pour le jeune Scrubby Jobson. 

Cet enfant, qui a beaucoup appris auprès d'un ermite, le chasseur sauvage ou homme vert. Mais que valent les enseignements d'un sorcier dans cette ville en proie au crime, en pleine révolution économique et sociale ?

« La légende du Changeling » (tome 1), Le Lombard, 13 € 



dimanche 22 juin 2008

BD - Guy Lefranc va-t-il sauver Londres en péril ?


Guy Lefranc, héros contemporain de Jacques Martin, après une longue éclipse, est de plus en plus présent grâce à une politique de reprise agressive. Francis Carin et Patrick Weber imaginent les aventures du reporter en parallèle à Taymans et Drèze qui eux se placent résolument dans une veine nostalgique. Ce 19e tome intitulé « Londres en péril » s'insère chronologiquement entre « Le Maître de l'atome » et « L'ouragan de feu ». 

Dans cette ambiance de fin de seconde guerre mondiale, des attentats frappent plusieurs quartiers de Londres. Il ne semble pas y avoir d'explication logique pour Scotland Yard. C'est Lefranc qui découvre le lien entre ces explosions. Les dates correspondent à des défaites importantes de l'armée nazie. Et sur le plan de Londres, si l'on rejoint les différents lieux frappés, ont obtient une croix gammée dont le centre est le quartier populaire de Pimlico. 

Lefranc va se rendre outre-Manche et se battre contre des nazis qui veulent venger leur führer. Une histoire qui manque un peu de densité, un dessin fidèle au maître, mais sans casser des briques : on reste sur sa faim. Mais l'ensemble est distrayant et prenant.

« Lefranc » (tome 19), Casterman, 9,50 € 

vendredi 20 juin 2008

Polar historique - Terreur à l'abbaye

Plusieurs meurtres inexplicables sèment le trouble dans l'abbaye des Clairets. La mère abbesse Plaisance de Champlois mène l'enquête.


Toute l'intrigue de ce roman policier historique d'Andrea H. Japp se déroule en 1308 dans les murs de l'abbaye des Clairets placée sous la responsabilité de la jeune mère abbesse Plaisance de Champlois. Sauf le premier chapitre. Nous sommes en 1209 au cours du sac de Béziers . Les croisés, pour lutter contre l'hérésie cathare, vont massacrer une grande partie de la population. A leur tête Arnaud Amalric. Un homme très puissant et très déterminé. Il participe à la curée tout en ne quittant pas une croix rapidement maculée de sang. « Arnaud Amalric plaqua la croix contre lui, comme s'il redoutait qu'on la lui arrachât. Il s'émut fugacement se la pression du long Christ d'argent contre son torse. Ils ne firent qu'un durant un court instant. » Cette croix est au centre de l'intrigue de ce roman, suite de Monestarium paru en 2007. Le lecteur y retrouve de nombreux personnage, mais il n'est pas obligé de lire ce précédent titre pour apprécier ce petit monde à part.

Un meurtre peu avant vigiles

Andrea H. Japp prend beaucoup de soin à décrire les différents protagonistes de cette histoire qui pourrait apparaître complexe avec ses nombreux termes passés d'usage (une notes en bas de page sont légion). Mais on se surprend à adopter le rythme de vie des moniales rythmées par les prières à différents heures, des laudes (avant l'aube, entre 5 et 6 heures) aux complies (dernier office du soir vers 18-20 heures en passant par sexte (vers midi). C'est d'ailleurs très tôt le matin, peu avant vigiles (vers 3 heures) que Thibaude Santenet découvre Blanche de Cernaux, jeune novice, morte, la tête fracassée par un fer à repasser. Le corps est pendu par un pied à un chandelier et une croix est tracées sur son front. Emoi dans

l'abbaye. Plaisance se rend sur place ainsi que quelques soeurs ayant des postes importants.

Les deux apothicaires

On retrouve autour de la scène du crime Hermione de Gonvray, l'ancienne apothicaire qui va prochainement quitter l'abbaye, Plaisance ayant découvert son secret. Elle est accompagnée de Mary de Baskerville, sa remplaçante, mystérieuse et perspicace, arrivée depuis moins d'une journée en compagnie d'Arnoldus de Villanova. Ce dernier plus connu sous le nom d'Arnaud de Villeneuve dit le « Catalan » est médecin. Il fut un temps menacé par l'Inquisition, mais il a conquis son rachat en guérissant le pape Boniface VIII.

Qui a tué Blanche ? Pour quelle raison ? La mise en scène signifie-t-elle qu'on se trouve en présence d'un rite satanique ? Ces questions vont tourmenter les héroïnes de cette enquête policière peu banale. D'autant que d'autres meurtres seront commis dans l'édifice. L'ambiance va se détériorer, Plaisance ayant accepté quelques semaines plus tôt d'accueillir un groupe de "monstres" errant sur les routes. Il est composé d'un enfant loup, de deux nains et de Claire, une fillette ne supportant pas la lumière du jour. Le suspense est à son comble quand Arnaud Amalric refait son apparition, à la recherche de cette fameuse crois de perdition...

L'intrigue imaginée par Andrea H. Japp puise ses racines dans les croyances les plus profondes. Dans ce monde de femmes et de pureté, la mort va frapper, les plaies seront difficiles à cicatriser.

« La croix de perdition », Andrea H. Japp, Calmann-Lévy, 20,90 €

jeudi 19 juin 2008

BD - Trop rare énergie


Nävis, dernière petite humaine, naufragée sur une planète hostile, passe ses journées entre l'amusement avec son fauve adoré Houyo et l'éducation dispensée par son robot Nsob. Un robot qui a depuis quelques temps une baisse de régime. Une perte d'énergie qui n'est pas du goût de la bouillonnante petite fille. Elle branche l'engin sur le générateur principal et la machine... explose. 

Seule solution pour Nävis : rejoindre l'épave et y dénicher des pièces de rechange. Mais c'est très dangereux car le mal absolu règne dans les couloirs délabrés : un robot détraqué qui tue toute forme de vie pour lui soutirer la moindre parcelle d'énergie. Le trio va recevoir l'aide d'autres robots restés loyaux aux humains. Histoire très actuelle écrite par Morvan, l'énergie étant de plus en plus rare et chère, nos portefeuilles peuvent en attester depuis quelques mois. Il y greffe une intrigue jouant beaucoup sur la force de l'amitié. 

Munuera, au dessin, s'en donne à cœur joie dans les décors forestiers et tropicaux et les machines aux formes alambiquées. Une série à l'univers de plus en plus riche, pour les plus jeunes, mais idéale pour se « préparer » à découvrir des BD plus adultes comme Sillage, où on retrouve la même héroïne, mais plus vieille de 15 ans.

« Nävis » (tome 4), Delcourt, 12,90 €