mercredi 10 avril 2024

Un thriller - L’été d’avant de Lisa Gardner


Depuis une dizaine d’années, Frankie sillonne les États-Unis pour résoudre les énigmes de personnes disparues. Et tenter de les retrouver. Dans une sorte de tentative de résilience, pour se pardonner à elle-même la mort de Paul, son sauveur, son amour.

Problème, dans les 14 « cas » de disparu.es qu’elle a réussis à résoudre, il était trop tard. Mais cette jeune Angelique, 16 ans, membre de la communauté haïtienne, elle se promet bien de la sauver avant qu’on ne découvre son corps sans vie. Jeune femme blanche plongée dans les quartiers noirs de Boston, imaginez l’accueil. Elle finit par s’intégrer, même auprès de la police locale, dont le séduisant Lotham est chargé de l’enquête.

Suspense, récit bien ficelé, bien écrit, amitiés improbables, un zeste de sexe… d’amour ? Tout Lisa Gardner, en somme.

F. H.

« L’été d’avant », Albin Michel, 448 pages, 22,90 €

mardi 9 avril 2024

Cinéma - Le couple selon Bernard Campan


 Interprète principal du film "Et plus si affinités", Bernard Campan (Photo Michel Clementz, L'Indépendant) se confie lors de son passage au Méga Castillet de Perpignan, sur sa vision du couple.

« Ces deux jeunes réalisateurs sont très précis sur le texte, mais il y a beaucoup de liberté dans leur direction d’acteur, de liberté aussi, a expliqué Bernard Campan lors de sa venue au Méga Castillet de Perpignan pour l’avant-première du film. Cela peut paraître paradoxal mais les deux vont ensemble. Et à côté de ça, il y a des parties d’improvisées car du moment que l’on sait parfaitement la partition, on peut aller ailleurs. »

Lors des lectures avant le tournage, l’ancien membre des Inconnus a mis son grain de sel : « Je suis très en demande de ça, et eux aussi. Ils proposent un travail très avancé mais veulent aller plus loin. On modifie tous ensemble de manière à arriver à une quintessence, le plus pur possible. La perfection, c’est quand il n’y a plus rien à enlever. Un romancier, dans sa dernière lecture, ne rajoute pas, il enlève le petit trop. »

Bernard Campan qui a délaissé depuis quelques années la comédie pour des films plus sérieux et profonds. Il replonge dans le bain des rires avec ce chassé-croisé de couple. « Si j’ai accepté ce film c’est d’abord pour la comédie pure, en tout cas d’être saisi par la drôlerie. Mais avec le recul je me rends compte que le film a un véritable fond et ça me renvoie effectivement à mon couple. Avec ma femme on est ensemble depuis 36 ans, on s’aime mais je peux aussi reconnaître qu’on se perd. À travers des petites habitudes, des façons de fonctionner, d’évitements, ajoutés les uns aux autres, on perd un petit peu ce qu’est l’autre et soi-même. La communication peut devenir difficile, alors que la complicité peut être forte. A certains niveaux, il y a des zones d’ombre et je peux me reconnaître. Le film m’a aidé à continuer à ouvrir les yeux sur les difficultés du couple. » 


lundi 8 avril 2024

Cinéma - Les voisins entreprenants de « Et plus si affinités »

Un dîner, deux couples : combien de combinaisons ? Ce remake d’une comédie catalane offre des rôles en or aux quatre comédiens dont Isabelle Carré et Bernard Campan.

On ne choisit pas sa famille. Encore moins ses voisins. Xavier (Bernard Campan) et Sophie (Isabelle Carré) vivent depuis des années dans un bel appartement. 25 ans de vie commune, une fille adulte qui vit à Londres et plus grand-chose à partager.

Un vide sentimental et amoureux particulièrement mis en évidence depuis l’arrivée de Julia (Julia Faure) et Alban (Pablo Pauly) dans l’appartement du dessus. Jeunes et amoureux. Et très démonstratifs la nuit lors de leurs ébats. Quand Xavier apprend que Sophie les a invités à dîner, il décide de mettre ce sujet sur le tapis. On peut s’aimer, mais pas la peine d’en faire profiter tout l’immeuble.

Un peu coincé puis grinçant, le repas va prendre une étonnante direction quand Julia, psychologue canine, se lance dans l’analyse des relations sentimentales de ses deux « vieux » voisins. Remake d’un film catalan (Sentimental de Cesc Gay), lui-même inspiré d’une pièce de théâtre, ce «Et plus si affinités» a été mis à la sauce française par Olivier Ducray et Wilfried Meance.

Ils ont rajouté un tout petit peu de grivoiserie, mais ont surtout travaillé le couple formé par Isabelle Carré et Bernard Campan. Deux comédiens qui se connaissent, s’apprécient et jouent idéalement le couple en mal de communication, d’écoute, de partage. L’usure du temps, la routine : on peut tous un peu se reconnaître dans leurs mauvaises habitudes. La facilité aurait été de glisser vers le scabreux, l’explicite (et beaucoup ne se seraient pas privés de toutes les possibilités formées par deux couples), mais les réalisateurs ont préféré donner un ton plus intimiste et parfois romantique (et un petit peu désenchanté) pour une fin aussi ouverte que nos vies quand on décide de les prendre en main.

Film français d’Olivier Ducray et Wilfried Meance avec Isabelle Carré, Bernard Campan, Julia Faure et Pablo Pauly

 

dimanche 7 avril 2024

Cinéma - « Sidonie au Japon », film zen et fantomatique


 

Sidonie (Isabelle Huppert) est la reine de l’évitement. Romancière célèbre mais qui n’a plus rien publié depuis des années, elle est invitée par son éditeur japonais pour y présenter son premier roman traduit en japonais.
Un séjour d’une semaine qui l’angoisse. Alors elle arrive avec une bonne heure de retard à l’aéroport, persuadée d’avoir fait le nécessaire pour rater son vol. Mais il est retardé et Sidonie s’envole finalement pour le Pays du soleil levant, l’inconnu.

Elle va passer une semaine en compagnie de Kenzo (Tsuyoshi Ihara), son éditeur, rigide, sévère, peu causant. Sidonie est plongée dans un monde dont elle n’a pas les clés alors que lui est en plein divorce, dépressif et mutique.
Le film d’Élise Girard prend une tournure plus étrange quand Sidonie croise le fantôme de son mari, mort dans un accident de la route quelques années auparavant.

Un fantôme bienveillant, qui va lui permettre d’oublier sa tristesse, retrouver goût à la vie (grâce aussi aux superbes paysages du Japon au printemps) et même de reprendre la plume.

Une histoire zen, optimiste, poétique et romantique. Mais avant tout fantastique dans tous les sens du terme.

 Film d’Élise Girard avec Isabelle Huppert, Tsuyoshi Ihara, August Diehl

samedi 6 avril 2024

BD - Magie désertique dans le second tome de Nécromants

 


Olivier Gay a commencé sa carrière comme romancier. De polar puis de fantasy, tout en accumulant les travaux de commande. Un formidable créateur d’univers qui frappe une nouvelle fois en lançant la série Nécromants dans la collection Drakoo de chez Bamboo.

Toujours dessinée par Tina Valentino, Italienne surdouée, la série se déroule dans une sorte de pays des mille et une nuits avec un peu plus de magie et de fantastique. Le héros, Acher, est un nécromant. Pas le meilleur du royaume. Mais il reçoit le renfort d’un trio de fantômes puissant. Dans la seconde partie de cette aventure inaugurale, il va affronter un terrible sorcier revenant. C’est superbement dessiné et bourré d’humour. De la fantasy classique mais diablement efficace.t

« Nécromants » (tome 2), Bamboo Drakoo, 48 pages, 14,90 €

vendredi 5 avril 2024

BD - Aude Picault emmène le Donjon en croisière

 

La fantasy est souvent une histoire de mecs. Pour preuve il faut attendre plus de 50 albums de l’univers du Donjon (imaginé par Sfar et Trondheim) pour qu’une dessinatrice s’empare des personnages. C’est Aude Picault qui a l’honneur de signer le 18e tome de Donjon Monsters.

Intitulé Noces de fleurs, il débute de façon très bucolique. Des années après l’histoire originelle, Herbert et Isis, devenus vieux, partent célébrer leurs noces de fleurs dans une petite croisière. Sur un voilier piloté par Andrée, aussi vieille qu’eux, ils vont d’île en île. Mais rapidement des mercenaires les attaquent. Herbert et Isis sont persuadés être les cibles.

Mais finalement ils découvriront qu’Andrée aussi a de nombreux ennemis. Une histoire complète qui revient sur de nombreux passages de l’histoire du Donjon, avec un peu d’humour (Herbert qui n’arrive pas à faire croire à Andrée qu’il a été Grand Khan…) et le retour de héros mythiques comme Marvin. Le tout  dessiné par Aude Picault dans un style dépouillé, très ligne claire simplifiée.

« Donjon Monsters » (18), Delcourt, 48 pages, 11,95 €

jeudi 4 avril 2024

BD - Gobelin américain de West Fantasy chez Oxymore

 


S’il est un scénariste qui manie à la perfection les codes de la fantasy, c’est bien Jean-Luc Istin. Il a imaginé quantité de séries, notamment Elfes, Nains et autres Orcs pour les éditions Soleil. Une imagination foisonnante qu’il a de nouveau sollicitée pour imaginer avec le dessinateur Bertrand Benoit West Fantasy. Ils fusionnent deux univers : la fantasy et le western.

Dans cette Amérique du Nord en pleine colonisation, le chasseur de prime Kendal Jones est un humain normal. Par contre il est accompagné par un Nain, Okaar Albericht et un croque-mort très particulier. Il n’enterre pas les cadavres mais les dévore : c’est un gobelin. On apprend au fil des chapitres la malédiction du Nain et l’histoire tragique de la famille du chasseur de prime.

Le gobelin sert de narrateur, notamment quand le trio doit affronter un homme en noir tout puissant, à la tête d’une armée de morts vivants. Histoire fouillée, décors somptueux, batailles dantesques : le premier tome de cette série, qui devrait en compter cinq, satisfera tout amateur des deux genres.

« West Fantasy » (tome 1), Oxymore éditions, 56 pages, 15,95 €

mercredi 3 avril 2024

BD - Enfants légendaires

 


On a beaucoup parodié les contes. Notamment dans les pages de Fluide Glacial où Gotlib a présenté une version du Petit Chaperon rouge qui aurait peu de chance d’être publiée de nos jours… Mab reprend en partie le concept dans ce recueil d’histoires courtes intitulé Et ils eurent beaucoup d’emmerdes !

Après le conte, les héros ont donc eu des enfants. Cela donne des triplés chez la Belle au bois dormant. Le petit chaperon rouge a par exemple eu un fils (avec le loup… merci Gotlib). Un fils qui lui aussi doit aller porter des victuailles à sa grand-mère qui a beaucoup d’appétit. Mab revisite ainsi l’imaginaire collectif autour du Prince Charmant, de Tarzan, Boucle d’or, Barbe Bleue, l’ogre mangeur d’enfants, le Petit Poucet ou Peter Pan.

C’est parfois très osé, toujours juste et systématiquement hilarant. Par contre ce n’est pas à mettre entre les mains des enfants. Même si les véritables contes sont souvent encore plus effroyables.


« Et ils eurent beaucoup d’emmerdes », Fluide Glacial, 56 pages, 15,90 €

mardi 2 avril 2024

BD - La sœur aide son frère dans New Hope


 

L’entraide entre frère et sœur prend parfois d’étranges tournures. Comme dans la série New Hope, imaginée par la scénariste de Carcassonne Cee Cee Mia et dessiné par l’Espagnol Jalo. Billy devait rejoindre la prestigieuse université de New Hope.

Mais une maladie l’empêche de faire sa rentrée. Alors sa sœur, Isabella, décide de prendre son identité. Elle se coupe les cheveux, se muscle, s’habille en garçon et devient Billy. Dans le premier tome, elle découvre que si elle parvient à intégrer la confrérie étudiante Epsilon, Billy pourra être soigné avec un protocole nouveau. Pour sauver son frère, Isa va prendre beaucoup de risques.

Car la confrérie a des pratiques qui s’apparentent à la mafia. Si elle est démasquée, elle risque gros. Le second et dernier tome est rondement mené. L’intrigue, digne d’un film américain pour teenagers, mélange critique sociale, action et prise de conscience sur les différences.

« New Hope » (tome 2), Dupuis, 128 pages, 15,50 €

lundi 1 avril 2024

BD - Sœurs opposées

 


Depuis leur plus tendre enfance, Camille et Lise vivent dans la même maison. Un joli pavillon avec jardin dans un quartier calme de la ville. A la mort des parents, elles ont conservé cette location. Mais ne s’entendant plus, elles ont coupé le bâtiment en deux.

Un mur en parpaings, du portail qui donne sur la rue, jusqu’au fond de la maison. Elles ne se comprennent plus car elles ont deux vies radicalement différentes. Camille, prof, aime la musique, est plutôt de gauche, a un chat et des amis entre baba-cools et altermondialistes.

Lise est analyste financière, plutôt de droite, aime les ambiances zen, le jardinage, déteste les chats et rêvait d’être footballeuse professionnelle. Ce petit monde, imaginé par Isabelle Sivan, est mis en images par Bruno Duhamel. Une BD presque expérimentale car la symétrie est omniprésente. Pour comprendre cet antagonisme permanent, tout ce que fait Camille est comparé aux actions de Lise.

Les planches sont coupées en deux. Ou alors les deux pages sont symétriques, avec un effet miroir. Une difficulté graphique dont s’est joué avec brio le dessinateur. Pour ce qui de l’intrigue, elle explore cette sororité défaillante quand le propriétaire décide de revendre la maison. Les deux locataires sont prioritaires. Encore faut-il qu’elles en aient les moyens et surtout qu’elles s’unissent. Sans oublier la première étape, la plus importante : recommencer à se parler sans se hurler dessus.

Très original, ce roman graphique est maîtrisé de bout en bout et analyse avec finesse et humanité les relations au sein d’une même famille, expliquant les différentes trajectoires et évolutions d’une relation pas toujours évidente entre deux sœurs aux goûts divergents.

« Deux sœurs », Bamboo Grand Angle, 72 pages, 16,90 €