La création audiovisuelle japonaise est très diverse. Il n’y a pas que des dessins animés, certaines séries sont réalisées en prise directe. Même si elles sont directement issues de ces univers entre fantastique et science-fiction. La franchise de Kamen Rider voulait célébrer ses 50 ans par une version adulte et ambitieuse. Kamen Rider Black Sud est visible partout dans le monde avec sa diffusion sur Amazon Prime Vidéo.
L’occasion de découvrir le phénomène des Kaïjins. Ce sont des humains, génétiquement modifiés et capables de se transformer en monstres hybrides, souvent à base d’insectes. Si une partie de la population rejette les Kaïjins, considérés comme des sous-hommes, d’autres veulent développer leurs droits. C’est le fil conducteur des dix épisodes, l’héroïne Aio incarnant une sorte de Greta Thunberg allant plaider sa cause à l’ONU.
Pendant ce temps, deux frères s’affrontent, Black Sun et Shadow Moon, pour déterminer si cette coexistence pacifique avec les Humains est possible. On apprécie les combats, un peu moins les costumes en mousse. Par contre le message sur la tolérance et le rejet du racisme peut être transposé à toute sorte de discrimination actuelle.
Compliqué d’être consommateur en ce moment. L’inflation rogne le budget telle une Méditerranée excédée ronge les plages du littoral. Manque de chance, c’est le moment où l’on est tenté de toutes parts. Le Black Friday et ses promos, sans doute trop belles pour être vraies. Mais surtout les fêtes et son cortège de cadeaux devenus incontournables sous peine de critiques de votre entourage.
Double peine pour ma pomme puisque les anniversaires de ma femme et de mon fils tombent la même semaine que Noël. On ne parle plus d’accroc dans le budget de décembre mais du gouffre de Cabrespine puissance 10. Et il faut désormais y ajouter les petits-enfants, encore en âge de croire au Père Noël.
Pour limiter la descente aux enfers du compte bancaire, mais aussi par principe (pourquoi toujours du neuf ?), rien de tel que les bourses aux jouets organisées dans nos départements. Hier dimanche, mon épouse, qui a mémorisé la lettre de nos petits-fils (chevaliers, bateau de Vikings, dragon, camion du Samu, talkies-walkies…) a fait son petit marché dans les travées de la salle municipale qui accueillait une trentaine de stands.
Mission accomplie pour l’assistante de Papa Noël puisque pour moins de 25 euros elle a ramené quantité de chevaliers en armures, un dragon vert et violet, des chevaux de toutes les couleurs et quelques livres. Ces derniers, de vénérables éditions originales datant des années 50, serviront essentiellement à alimenter les histoires du soir. Le Petit wagon rouge, Napoléon le drôle de canard ou les aventures des chats Pouf et Noiraud, illustrés par le génial Pierre Probst, assureront aux petits de jolis rêves vintages.
Billet paru en dernière page de l’Indépendant le lundi 28 novembre 2022
Librement inspiré de la pièce de théâtre Larmes amères de Petra Von Kant de Fassbinder, ce film sur le cinéma et les affres de la création est un manifeste d’amour à ce milieu par un François Ozon très inspiré. Il offre de plus un rôle fantastique à Denis Ménochet qui interprète le personnage principal, Peter Von Kant (Diaphana Vidéo).
Peter Von Kant est un réalisateur allemand, sorte de double de Fassbinder. Dans ces années 60, il multiplie les projets sans véritablement se décider à se lancer dans un tournage. Dans son grand appartement, il reçoit sa mère (Hanna Schygulla) ou son actrice fétiche (Isabelle Adjani). Mais c’est surtout un jeune apprenti comédien, Amir (Khalil Gharbia) qui va lui causer bien des tourments. Peter Von Kant est amoureux. Peter Von Kant veut mourir si Amir l’abandonne.
Peter Von Kant va renaître car la vie est faite de hauts et de bas, l’inspiration prenant souvent la suite du désespoir. Un film parfois déroutant par sa grandiloquence, mais il ne faut pas oublier que c’est à la base une pièce de théâtre, que l’espace est réduit et que le corps de Peter (Denis Ménochet) Von Kant prend beaucoup de place dans cet appartement où l’amour semble tourner en rond infiniment.
Inflation, guerre en Ukraine, pénurie de denrées alimentaires, coupures d’électricité, réchauffement climatique : les sujets sérieux ne manquent pas pour occuper les parlementaires français. D’autant qu’on est en plein examen du budget 2023. Mais certains élus ont d’autres priorités.
Le bureau de l’Assemblée vient de voter la modification du règlement sur la tenue des députés. À partir de mardi, la veste sera désormais obligatoire pour les hommes et la cravate recommandée. On croit avoir élu des hommes et des femmes responsables, qui vont débattre de l’avenir de notre société, de notre pays et, finalement, ils se contentent de parler chiffons… Tout ça, car certains jeunes élus de gauche, issus souvent de la société civile, loin des moules de l’élite habituelle, ne portent pas la cravate ni la veste. Et en plus, ils arrivent en baskets, la chemise hors du pantalon…
Leur crime, pour le bureau de l’Assemblée ? Ressembler à leurs électeurs. L’avantage de ce règlement, qui semble directement issu d’un autre siècle, c’est que l’incident raciste provoqué par le député d’extrême-droite, lors des questions au gouvernement, n’aurait pas pu avoir lieu. Pas parce que Grégoire de Fournas serait interdit d’hémicycle, il portait, lors de son injure raciste, veste et cravate réglementaires, mais à cause de la tenue de Carlos Martens Bilongo, la victime.
Le député de la Nupes avait bien une veste, mais pas de cravate. Donc, pas question qu’il entre et s’exprime dans le « périmètre sacré » selon les termes du bureau.
Alors, objectivement, que veut-on pour représenter la France : des élus racistes, mais qui présentent bien, ou des élus proches du peuple, habillés avec simplicité et dans l’air du temps ?
Billet paru en dernière page de l’Indépendant le vendredi 11 novembre 2022
Non, tout le monde n’est pas gentil dans le monde du cinéma. Si en façade cela ressemble à une grande famille unie, dès que les caméras sont coupées, les micros déconnectés, c’est la méchanceté qui revient au galop. Le meilleur exemple de cet état d’esprit on le trouve dans un film, justement, réalisé par deux trublions argentins, Mariano Cohn et Gaston Duprat.
Dans Compétition officielle (Wild Side Vidéo), une grande réalisatrice (ou du moins une intellectuelle qui sait débloquer d’énormes budgets pour ses projets underground), Lola Cuevas (Pénélope Cruz) décide d’associer sur grand écran deux grands comédiens du moment. Félix Rivero (Antonio Banderas) est populaire. Excessivement populaire, en Espagne comme aux USA. Il devra donner la réplique à Ivan Torres (Oscar Martinez), comédien de théâtre légendaire et radical.
Cette satire grinçante, parfaitement interprétée par deux acteurs tout à fait conscients qu’ils sont en train de se caricaturer, permet de rire sur les superstitions des uns, les prétentions des autres, tout en découvrant effaré la force de manipulation de la réalisatrice. Après des répétitions compliquées, le film va-t-il véritablement se faire ?
La comédie noire vire au polar pour le plus grand plaisir des spectateurs. Une démarche expliquée par l’équipe du film dans l’entretien offert en bonus.
Il m’arrive, certains jours, d’écouter la matinale de France Culture, présentée par Guillaume Erner. Lundi, quel ne fut pas mon étonnement d’y entendre la voix de… Pascal Praud, l’animateur bateleur très à droite de l’Heure des pros, tous les matins sur CNews.
Une petite virgule régulièrement diffusée entre journaux, chroniques ou invités venus parler d’immigration et travail. Pascal Praud qui affirme sec et net : « Personne n’écoute France Culture ».
Une sentence définitive lancée, en direct, par cet animateur controversé, décidément peu adepte de la mesure, pour fustiger une nouvelle fois le service public de l’audiovisuel français. Dans le monde des médias, si enclin au clash, on aurait pu croire que les responsables de la radio culturelle se seraient offusqués, voire auraient tenté de porter l’affaire devant les tribunaux, car c’est un mensonge éhonté, France Culture est écoutée, en moyenne, par plus de 1,6 million de Français, tous les jours, chiffre beaucoup plus élevé que celui des téléspectateurs de Pascal Praud.
Mais contrairement à la polémique stérile (fond de commerce de Pascal Praud), la culture intelligente entraîne un net développement du sens de l’humour. Voilà pourquoi,durant toute une matinale, on a entendu le pauvre Pascal Praud répéter, à l’envi, son petit mensonge, comme un gag répétitif qui n’en devenait que plus drôle au fil des heures.
La double moralité de cette histoire : Premièrement, tout n’est peut-être pas si mauvais chez Pascal Praud, puisqu’il sait que France Culture existe, même si, visiblement, il ignore que nous sommes des milliers à l’écouter tous les jours. Deuxièmement : cultivez-vous, cela fortifie votre esprit de dérision.
Billet paru en dernière page de l’Indépendant le mercredi 9 novembre 2022
Publié dans une collection pour jeunes adultes, Griffes est un roman policier digne de Conan Doyle. Il y est d’ailleurs parfois question de son héros, Sherlock Holmes, comme s’il existait réellement dans cette Grande-Bretagne de la fin du XIXe siècle. La petite ville de Morgan’s Moor est en émoi.
Trois ans après l’assassinat du juge par un commerçant manchot (il a un crochet à la place de la main, l’arme du crime), sa sœur est à son tour trucidée dans son lit. Pour résoudre ce mystère, Scotland Yard envoi un de ses limiers, le très débonnaire superintendant Tanybwlch. Flanqué de son adjoint, le jeune et très émotif Pitchum. Comment l’assassin est-il ressorti de cette pièce fermée de l’intérieur ? C’est peut-être la futée et curieuse Flannery, fille de l’aubergiste, qui va résoudre l’énigme.
Ce nouveau roman de Malika Ferdjoukh se dévore d’une traite. On suit avec délice les progrès (et erreurs) des enquêteurs tout en savourant le rapprochement amoureux entre Pitchum et Flannery. Et à la fin, on espère que ce duo se reformera pour résoudre une nouvelle énigme.
« Griffes », Malika Ferdjoukh, l’École des Loisirs, 17 €
Comment imaginer un simple poissonnier à l’origine de ce qui deviendra dans les années 50 un haut lieu des arts en général et de la céramique en particulier ? Voilà ce qu’Hélène Legrais nous conte avec sa verve habituelle dans son nouveau roman, L’Alchimiste de Sant Vicens.
De la fenêtre de sa lingerie, la pièce à couture - la seule dans laquelle son mari n’entre pas - Suzanne contemple avec envie l’effervescence qui règne chez leurs voisins. Elle songe rarement à la Sybille qu’elle était, cette jeune fille romantique qui rêvait d’amour partagé. Sa rencontre avec André Escande scelle son sort. Le professeur de mathématiques rigide et frigide « méprisait la sexualité. Une perte de temps et de contrôle. Un vertige des sens qui égarait la raison. Tout ce qu’il détestait ». André commence d’ailleurs par la déposséder de son identité. Sybille ? Un prénom extravagant. Suzanne convient mieux. Ce mari tyrannique lui concède cependant une fantaisie : le jardin parsemé de roses claires, bien taillées par ailleurs.
Ce jardin grâce auquel la vie de Suzanne prend un tour inattendu.
Un poissonnier passionné
Combien d’invitations leur a-t-il lancées, depuis son installation dans ce qui devient dans les années cinquante l’atelier de céramique de Sant Vicens à Perpignan ? Firmin Bauby, poissonnier et amateur d’art ne les compte plus. C’est donc avec un étonnement ravi qu’il aperçoit Suzanne au milieu des convives d’un mariage célébré dans sa propriété. Il est drôlement amusant et charmant, ce voisin. Aux antipodes de son bonnet de nuit de mari. Très vite, Firmin Bauby la convainc de s’essayer à la céramique. Il lui permet en somme de se redécouvrir en tant que Sybille. Il lui présente son invité permanent, Jean Lurçat, d’autres artistes aussi, Picasso, Trenet, Vadim, un tourbillon de vie, de culture et de beauté.
Mais le véritable changement arrive avec l’installation d’un jeune couple et la naissance de Vivi. La petite pleure beaucoup, sa mère est épuisée et Suzanne, toujours compatissante, lui offre le luxe de quelques heures de sommeil dans leur chambre d’amis qui n’a jamais servi. Vivi grandit mais son comportement reste une énigme pour son entourage, y compris le corps médical. C’est qu’à l’époque, on connaît peu et mal l’autisme.
Intrigué par son manège récurrent - elle se faufile dans la roseraie au travers de la haie - c’est André le premier et contre toute attente, qui arrive à se faire accepter de la petite fille.
La rigueur historique et la passion pour l’émancipation des femmes sont les marques de fabrique de l’autrice Hélène Legrais. Dans ce dernier opus, elle dresse avec délicatesse les portraits croisés d’humains qu’à première vue tout sépare. Et qui au final se rejoignent dans ce difficile et magnifique ballet qu’est la vie.
Écrivain français le plus connu et traduit à l’international, Jules Verne est à la tête d’une œuvre pléthorique. Des dizaines de romans inoubliables, autant de nouvelles lui ont permis d’être présenté comme le père de la science-fiction. Mais cet écrivain était en réalité un touche-à-tout, grand feuilletoniste, maniant avec aisance tous les styles du roman d’aventures à la bête comédie sentimentale. De très nombreux textes ont été publiés après sa mort et certains n’ont été découverts que très tardivement.
C’est le cas de ces nouvelles reprises dans ce gros volume intitulé Récits retrouvés, bénéficiant d’une cinquantaine d’illustrations pleine page de Tardi. Ces manuscrits retrouvés sont présentés par Christian Robin, directeur de la collection « La bibliothèque Verne ».
Ne manquez pas la nouvelle San Carlos. Elle se déroule au cœur des Pyrénées et voit un contrebandier échapper à des douaniers grâce à un bateau qui se transforme en sous-marin. Déjà tout le génie de l’écrivain qui n’avait que 28 ans.
Je ne vais pas dire dans ce billet tout le bien que je pense de l’île de la Réunion, petit paradis sur terre perdu au milieu de l’Océan Indien. Malheureusement... Non, il sera plus prosaïquement question du phénomène de la réunionnite qui frapperait avec force de nombreuses sociétés.
Une étude américaine indique qu’un employé d’une grande entreprise assiste en moyenne à près de 18 réunions par semaine. Près d’un tiers de leur temps de travail. Et la grande majorité estime qu’elles ne servent à rien si ce n’est à faire chuter leur productivité.
En France aussi on aime se retrouver autour d’une table pour parler de tout et de rien. Hier personnellement, j’ai assisté à trois réunions dans la journée. Et en présentiel s’il vous plaît. Objectivement, une a été très efficace (même si elle débouche surtout sur une autre réunion à planifier pour clarifier les pistes et projets envisagés), deux autres auraient pu être pliées en 5 minutes, mais en ont duré 20 car la discussion s’est éternisée et a dévié sur des sujets annexes (pourquoi les Hollandais aiment le vélo, que faire quand on égare le corps d’un proche récemment décédé, qui a été enfant de chœur...).
L’étude américaine précise que 71 % des participants aux réunions en profitent pour mener d’autres tâches. Car trop souvent une réunion (ce n’est pas le cas au journal où tout le monde participe), c’est avant tout l’occasion pour celui qui organise de faire passer son message, de se mettre en avant et d’imposer son leadership aux équipes.
Et si on lui enlève ce petit pouvoir, c’est toute la justification de son salaire qui disparaît du jour au lendemain. Dans ce cas, le mieux serait de décider de lui supprimer l’organisation des réunions. Décision qui ne pourrait être prise... qu’en réunion.
Billet paru en dernière page de l’Indépendant le mardi 8 novembre 2022