jeudi 18 août 2022

Thriller - Best-seller de Floride

Second roman de Mark Miller, Sur la route de Key West est le prototype parfait du best-seller estival qui devrait vous passionner quelques jours à la plage ou la nuit dans la chaleur étouffante de la caravane ou du mobil-home. Écriture simple et efficace, personnages typés et attachants : l’intrigue vient renforcer cette arme fatale de lecture de masse. Tom Baldwin est écrivain. Il s’est retiré dans une villa paradisiaque des Key West en Floride après un drame personnel, un accident la veille de Noël.

Il sort du coma et apprend que son fils est mort dans la collision.
Auteur de plusieurs best-sellers, il change de vie, mais n’arrive pas à oublier son petit garçon. Trois ans plus tard, il reçoit un message anonyme lui affirmant que son enfant est vivant. Assailli d’un doute doublé d’un fol espoir, Tom se lance dans une enquête où le rôle de son riche et peu honnête ex-beau-père s’avère peu reluisant.
Si l’on passe outre quelques clichés (« Cerné par le clapotis des vagues léchant les pilotis, je plissai les yeux, ébloui par le disque de feu qui embrasait l’horizon »), ce roman est un excellent moyen d’oublier les soucis du quotidien le temps de ses vacances.

« Sur la route de Key West » de Mark Miller, XO Éditions, 19,90 €

mercredi 17 août 2022

BD - Mortelle écluse

 

Une nouveauté au rayon BD en ce 10 août ! Étonnant et pourtant certains éditeurs osent sortir des sentiers battus. Saluons dont Bamboo de proposer ce roman graphique se déroulant dans le Lot au cœur de l’été, bien avant la rentrée littéraire.

Philippe Pelaez raconte comment le petit village de Douelle, le long du Lot, a connu des jours sombres quand plusieurs femmes sont découvertes violentées et noyées dans l’écluse du village. Or, l’éclusier, Octave, est un simple d’esprit, bossu et au visage difforme. Une sorte de Quasimodo que tout le monde a tendance à accuser.

Pourtant Octave est doux comme un agneau, innocent comme un poussin. Par contre Alban, le jeune caïd local, n’hésite pas à menacer les jeunes filles du cru pour obtenir des faveurs sexuelles. Tout le monde le sait. Personne ne réagit. Alban est trop dangereux. Et les policiers envoyés de Cahors ne vont pas permettre de faire cesser les crimes.
Un polar rural sombre et crépusculaire, se déroulant dans les années 60, mis en images par Gilles Aris, Toulousain connaissant parfaitement la région.

« L’écluse », Bamboo Grand Angle, 15,90 €

mardi 16 août 2022

Roman - Substitut paternel

Anne Goscinny ne semble s’être lancée dans l’écriture que pour tirer un trait sur le drame de la mort de son père, René Goscinny, le créateur d’Astérix et Obélix. Elle n’était qu’une fillette quand il a succombé en plein test d’effort chez un cardiologue. Depuis, la petite Anne est devenue une femme, mais a conservé des séquelles de cette absence.

En signant Romance, elle semble avoir enfin fait le tour de ce traumatisme. Un roman puissant, prenant, envoûtant et parfois angoissant. Jeanne, la narratrice, après des années à veiller sur son fils unique, décide de déménager, de couper les ponts avec ce jeune adulte. Elle emménage dans un appartement logé à l’étage d’une grande maison.
Elle est accueillie par Romance, la petite fille du propriétaire. Un médecin. Et Jeanne comprend que ce toubib c’est le chirurgien qui l’a soignée enfant et dont elle est tombée amoureuse, juste car il était devenu un père de substitution.
On explore dans ce roman à la limite du fantastique, les méandres de l’esprit humain, les impasses et aveuglements. Jeanne va se réveiller et Anne Goscinny passer à autre chose.

« Romance » d’Anne Goscinny, Grasset, 17,50 €

lundi 15 août 2022

BD - Mexico à l’envers

Cette BD de Barbucci (dessin) et Arleston (scénario) va mettre un peu de piquant dans votre été. Du relevé dans votre bouche, l’action se passe au Mexique et la cuisine y est très épicée, du très ébouriffant pour vos yeux, la belle héroïne, Fourmille, se dénudant de plus en plus dans les premières pages.

Avec Yuri, son compagnon d’aventure, elle va mettre le cap sur Mexico. La belle, dans le monde d’Ekho (le même que le nôtre, mais sans électricité et beaucoup de magie), a la possibilité d’accueillir les âmes des morts en errance. Cette fois elle va devoir aider Juan à trouver le chemin du Paradis.

Après l’Afrique, l’Asie, l’Europe ou l’Amérique, Arleston s’attaque donc à l’Amérique centrale. Le Mexique qui y est décrit est chatoyant, joyeux et aussi très violent. Il y est question d’un produit permettant de retrouver la mémoire. Mais aussi d’un virus qui la fait disparaître.

En creux, les amateurs de complots en tout genre y liront l’histoire du Covid, inventé par les laboratoires pharmaceutiques pour écouler leurs milliards de doses de vaccins. Comme si la vie était aussi simple qu’une BD…

« Ekho, monde miroir » (tome 11), Soleil, 14,95 €


dimanche 14 août 2022

BD - Tim, fils rêveur

Tim est autiste. Il vit en permanence avec sa mère. Son père, Marc, s’est éloigné de cet enfant anormal, compliqué à gérer, qui vit dans son monde et n’a aucun repère social. Quand Marc reçoit un message de son ancienne épouse lui expliquant qu’elle n’en peut plus et qu’elle doit prendre du recul, il ne comprend pas immédiatement que désormais, c’est lui qui aurait la lourde responsabilité de s’occuper de Tim.

Un changement radical de vie pour cet homme actif qui aime sa liberté.

Écrit par Bernard Villiot, auteur de littérature jeunesse, et dessiné par Alexandra Brijatoff, ce long roman graphique explique comment on perçoit les enfants comme Tim et surtout comment eux, perçoivent notre réalité. Édifiant.

« Dans la tête de Tim », MaraBulles, 17,95 €

samedi 13 août 2022

Cinéma - Nouvelle lutte de “La très très grande classe”

Deux profs, une mutation : la lutte sera rude entre ces modèles de l’éducation à la française.

Comédie française bâtie autour du personnage de Mlle Sofia Boudaoui (Melha Bedia), la présence d’Audrey Fleurot au casting, devenue l’actrice la plus vue dans une série française (HPI sur TF1, plus de 10 millions de téléspectateurs pour chaque épisode), a propulsé cette dernière en grand sur les affiches. Pourtant elle incarne la « méchante sorcière » de l’histoire, une caricature d’une certaine bourgeoisie française, trop distinguée pour être honnête. Un rôle hautement antipathique qui ne perturbe en rien celle qui a un réel talent dans la comédie.

De toute manière elle est beaucoup moins présente que Melha Bedia, la « gentille princesse », présente dans toutes les scènes. Sofia est professeur de français dans un lycée de banlieue. Elle a une classe de seconde qui lui mène la vie dure. Timide, complexée par ses rondeurs, elle n’a qu’une envie : être mutée. Quand elle reçoit enfin sa nouvelle destination, c’est une explosion de joie : lycée français de Barcelone.

Retrouver la vocation 

Tellement contente que pour le dernier jour de cours, elle déballe tout aux élèves et dit tout le mal qu’elle pense de ces « puceaux boutonneux ». Ça soulage. Moins quand elle apprend dans la foulée que la mutation est suspendue, Une autre candidate veut un réexamen des dossiers. Pas n’importe quelle enseignante : Mme Delahaye, femme d’un diplomate qui va être muté à Barcelone, appréciée de ses élèves dans un collège privé catholique.


Ce film écrit et réalisé par Frédéric Quiring prend dans sa première demi-heure des airs de lutte des classes. D’un côté l’élite française, blanche et bien-pensante, de l’autre l’exemple de la diversité, avec ses difficultés et ses désespoirs face à une administration qui montre un peu trop ses préférences. Les deux profs vont être évaluées par un inspecteur (Arié Elmaleh). Sofia, sur les conseils d’un voisin (François Berléand), va tenter de le séduire. En vain. Par contre, quand il découvre qu’elle aide la femme de ménage guinéenne du lycée à apprendre le français, il salue cette action de philanthropie. Et Sofia de monter une association d’alphabétisation pour étoffer son dossier.

L’intrigue, tout en continuant à distiller les pièges et chausse-trapes que s’infligent les deux femmes, prend une couleur plus sociale. Avec quelques belles tirades sur l’importance d’apprendre. Et rapidement Sofia va retrouver la foi et la vocation en son métier et se découvrir indispensable à ces hommes et femmes pour qui lire et écrire le français leur offre un nouveau départ dans leur vie.

Plus qu’une comédie, La très très grande classe est un beau plaidoyer pour l’émancipation par l’éducation.

Film français de Frédéric Quiring avec Melha Bedia, Audrey Fleurot, François Berléand, Arié Elmaleh

 

vendredi 12 août 2022

Cinéma - Un “Dodo” grec ébouriffant


Après avoir vu Dodo de Pános H. Koútras, vous pourriez regretter que le réalisateur n’ait pas eu l’envie de transformer ce scénario dense en une mini-série de 5 ou 6 heures. Les 2 heures et 15 minutes semblent un peu courtes pour explorer tous les personnages de ce film choral se déroulant sur les deux jours précédant un mariage dans la grande bourgeoisie grecque.

Exactement dans la bourgeoisie en partie ruinée. Car si Sofia s’apprête à épouser Aris, c’est essentiellement pour remettre sa famille en fonds. Le père, ancien député, affairiste, a tout perdu dans la crise. La mère, ancienne comédienne, ne tourne plus depuis des années. Dans leur luxueuse propriété, sans le moindre sou vaillant, ils préparent le mariage quand un étrange volatile fait son apparition. Un dodo, gros poulet originaire de l’île Maurice, normalement disparu depuis des siècles. D’où vient ce dodo, quel sera son rôle dans le mariage ou l’implosion de la famille ?


La comédie de Pános H. Koútras n’apporte pas de réponses directes mais étrille copieusement toute cette société où l’argent est roi, la magouille une religion et la trahison une sorte de prière quotidienne. De la fille qui hésite à se marier et se donne pour 50 euros à un ouvrier au père qui tente de rapatrier de l’argent sale placé dans une banque en Asie à la mère qui voudrait se racheter une conscience en aidant des réfugiés syriens, ils sont tous très détestables.

Pourtant on les comprend et on les excuse car malgré leur mauvais fond, ils ont conscience qu’il faut absolument aider ce dodo, sorte de miracle de la nature.

Le film est caustique, brillant, ébouriffant, parfaitement interprété. Au point qu’effectivement on aurait aimé passer un peu plus de temps dans cette propriété en compagnie de cette famille et de l’employée russe, de l’homme à tout faire albanais, de l’acteur oublié homosexuel ou du trans amoureux d’un redoutable escroc.

Film grec de Pános H. Koútras avec Smaragda Karydi, Akis Sakellariou, Natasa Exintaveloni

jeudi 11 août 2022

Cinéma - "One Piece – Red" ou quand la japanimation se met à chanter


Manga parmi les plus vendu dans le monde, One Piece fait régulièrement l’objet d’adaptations sur grand écran. Ce film est un peu spécial car il explore un genre peu prisé par les fans de ces histoires fantastiques de pirates : la comédie musicale. Tout débute quand des milliers de personnes se réunissent pour le premier concert de la star Uta. Ses vidéos ont des millions de vues, mais c’est la première fois qu’elle va chanter en live. Luffy et son équipage sont présents.

Le jeune pirate découvre que derrière Uta se cache son amie d’enfance, la fille du pirate Shanks. Tout se complique quand Uta, avec ses compositions, veut transformer le monde. Elle capture toutes les âmes des spectateurs et les asservit. Luffy aidé de quantité d’autres pirates, va lutter contre le démon qui a pris possession d’Uta.

Un film grand spectacle, pour les fans, avec Hoshi dans la version française pour interpréter les chansons d’Uta.

mercredi 10 août 2022

Roman - Duchess, la petite hors-la-loi

Entre thriller, polar et roman social, Duchess de Chris Whitaker est avant un grand roman américain, de ceux qui vous prennent aux tripes avec des personnages qui longtemps vont hanter votre mémoire. Il y a bien évidemment Duchess, l’adolescente qui donne son nom au livre, son frère, Robin et puis Walt, le flic qui tente d’avoir raison contre tout le monde, impuissant dans un monde qui ne tourne plus rond.

L’action se déroule à Cape Haven, une petite station balnéaire de Californie, perchée au bord du Pacifique. Premier drame : une petite fille disparaît. Son corps est retrouvé par Walt, encore enfant. Sissy est morte par la faute de Vincent King, le meilleur ami de Walt et amoureux de Star, la sœur de Sissy. Dans ce petit paradis, ce drame va durablement marquer les esprits. La suite du roman se déroule 30 ans plus tard. Vincent va sortir de prison. Walt est devenu le policier municipal de Cape Haven et Star, alcoolique, a deux enfants, Robin et Duchess. Cette dernière fait office de maman de substitution. Dure au mal, déterminée, elle s’accroche à une certitude : ses ancêtres étaient des hors-la-loi. Elle aussi sort du cadre, provoque, dynamite tout ce qui l’approche : « Duchess préférait Cape Haven en hiver, quand une certaine honnêteté décapait le vernis et laissait apparaître une petite ville ordinaire. Elle détestait les étés, longs, beaux, affreux. »

Ce roman propose le meilleur portrait d’une adolescente depuis très longtemps. À la psychologie compliquée. « Le bruit flottait jusqu’à elle et lui glissait dessus. Elle avait cette capacité à se sentir complètement seule sur une plage noire de monde ou dans une classe remplie d’élèves. » Duchess qu’on aimerait pouvoir aider, protéger. Mais c’est une boule de nerfs qui n’a plus confiance en personne. Duchess, qui tente de sauver sa mère du naufrage et de préserver son petit frère. Mais le retour de Vincent King va provoquer un nouveau drame. Le roman prend alors une dimension supplémentaire dans la douleur.

« Duchess » de Chris Whitaker, Sonatine, 23 €

mardi 9 août 2022

BD - Cow-boy ou dessinateur ?


Quand on est dessinateur de BD comme Thierry Martin, on a l’imagination débordante. Loin de se voir comme un sédentaire scotché à sa planche à dessin, il a plutôt l’impression d’être un cow-boy vivant de formidables aventures dans l’Ouest sauvage. 

Mais au lieu de capturer des méchants ou de sillonner le désert sur son mustang, il gronde ses enfants turbulents et va faire des courses pour sa femme qui elle a l’apparence d’une super-héroïne.

Ces gags et histoires courtes, parus dans Fluide Glacial, sont délicieusement absurdes et poétiques. Cela donne envie au lecteur de lui aussi réinventer son quotidien trop classique. Alors pour vous, ce sera polar ou fantasy, western ou saga historique ?

« La famille selon Jerry Alone », Fluide Glacial, 12,90 €