dimanche 10 juillet 2022

Cinéma - Un “Menteur” pris à son piège


Olivier Baroux, réalisateur de Menteur, a sans doute beaucoup menti dans son existence. C’est presque un exercice imposé dans le milieu du cinéma. Il faut embellir, donner du relief, saupoudrer d’anecdotes pas forcément exactes à 100 % pour réussir à se faire remarquer. Il avait donc beaucoup à dire sur ce péché capital, sans doute le plus pardonné par la société (avec l’adultère, mais pour d’autres raisons).

Adaptée d’un film québécois, cette comédie trépidante tourne autour de Jérôme (Tarek Boudali), cadre dans un chantier naval de la Côte d’Azur, menteur invétéré depuis l’âge de 9 ans. Ce beau gosse qui aurait tout pour réussir sans en rajouter, ne peut s’empêcher de travestir la réalité. En priorité pour excuser ses retards au boulot : dégât des eaux, pneu crevé… ses excuses s’accumulent au grand désespoir de sa famille, notamment de son frère Thibault (Artus).

Une mythomanie maladive qui est connue de tous, jamais acceptée par le principal intéressé. Quand, par une complexe opération religieuse qui débute par une vue aérienne splendide de l’abbaye de Saint-Martin du Canigou, site religieux des Pyrénées-Orientales, tous les mensonges d’Antoine deviennent réalité. Il se retrouve donc sélectionné pour aller dans l’espace, son appartement est submergé par une suite d’eau, il n’a plus de meubles (tous donnés à Emmaüs par charité) ou, plus grave, la femme de son frère est amoureuse de lui et le voisin est un serial-killer. Se greffe sur ce florilège de gags la négociation d’un contrat de maintenance de yacht de luxe avec des Russes peu accommodants et la rencontre avec Chloé (Pauline Clément), charmante interprète dont il tombe amoureux.

Tarek Boudali, pour la première fois sans sa bande, maîtrise parfaitement son sujet, aidé par deux jeunes comiques français en devenir : Artus, future star au potentiel sans cesse grandissant et Bertrand Usclat, créateur de la série courte Brute, parfait dans un petit rôle d’assistant dépassé par sa tache.

 "Menteur", un film français d’Olivier Baroux avec Tarek Boudali, Artus, Pauline Clément.

samedi 9 juillet 2022

Streaming - Riez avec les extra-terrestres norvégiens de "Blasted : les aliens ou nous !"

On ne répétera jamais assez que le gros avantage de certaines plateformes de streaming réside dans la diversité du choix. On peut enfin trouver autre chose que les grosses productions américaines ou les séries nationales peu novatrices. 

Dernier exemple en date avec le film Blasted : les aliens ou nous ! , production norvégienne aussi marrante que déjantée, débarquée presque incognito sur Netflix. 

Une petite ville de ce peu riant pays nordique est réputée pour ses… soucoupes volantes.

Une simple légende urbaine qui permet à certains d’organiser des enterrements de vie de garçon atypiques. Justement, Sebastian (Axel Boyum, photo ci-contre) est invité par ses meilleurs amis, dans ce lieu, pour fêter son futur mariage. Manque de chance (et joie pour les spectateurs), les aliens en hibernation se réveillent et une véritable invasion débute.

L’occasion pour Sebastian de retrouver ses réflexes de joueur de laser game. Si le début est un peu poussif, la suite est explosive, avec combats acharnés, explosions de matière verdâtre et humour sans limite. Des flics locaux aux potes du héros en passant par les scientifiques possédés par les aliens, tous sont des caricatures outrancières réussies qui forcent le respect. 

vendredi 8 juillet 2022

Série télé d’été - La gaffe de Dieu de "God’s Favorite Idiot"

L’été est parfait pour rattraper des séries télé négligées en début d’année ou découvrir les nouveautés des plateformes. Si vous avez envie de rire sur Netflix, osez regarder les huit épisodes de 30 minutes de God’s Favorite Idiot, créé par Ben Falcone, avec ce dernier dans le rôle principal accompagné de la totalement déjantée Melissa McCarthy.

Clark Thompson (Ben Falcone) est touché par la grâce divine. Exactement, ce célibataire timide, secrètement amoureux d’Amily (Melissa McCarthy), est désigné par Dieu pour sauver l’Humanité attaquée par les démons. Ce qui n’est pas sa meilleure idée... Clark ne s’en rend pas immédiatement compte, mais un soir, au boulot, il se met à luire telle une enluminure phosphorescente.

Dans ce monde de geeks sceptiques, cette luisance est très suspecte. On apprécie dans cette série les bons mots, les personnages secondaires, tous plus décalés les uns que les autres et la belle complicité entre les deux comédiens principaux.

Petite cerise sur le gâteau, pour le public français, quelques blagues sur notre prétention vue des USA : Emily a modifié son prénom en Amily pour ressembler à l’héroïne de ce célèbre film français… qu’elle n’a pas vu, évidemment. Quant à la blague sur la bougie « génitale », impossible de la raconter dans ce journal qui se doit de conserver une certaine décence. 

jeudi 7 juillet 2022

Beau Livre - Bon sens et nature

« Juillet sans orage, famine au village ». Certains dictons ont le mérite de ramener un peu de bon sens dans les bulletins météo. Car si on passe si facilement en « alerte », il ne faut pas oublier que les orages en été, c’est classique et que, souvent, la nature en a besoin pour s’abreuver.

Des dictons de ce genre, il y en a des centaines dans le très bel ouvrage de Daniel Brugès. L’auteur, en plus de les collecter, propose une multitude de jolies aquarelles, dans un style très champêtre. Les dictons sont classés, selon plusieurs thématiques, pour éviter le calendrier trop laborieux. Toujours dans le chapitre météo, n’oubliez pas que « Jamais en juillet sécheresse, n’a causé la moindre détresse » et que « Soleil pour Sainte-Charlotte (17 juillet), promet décembre qui grelotte ». On savoure, aussi, ces proverbes autour des légumes ou fruits du jardin du genre « Signe de beau temps quand s’ouvre l’artichaut ». Et si vous aimez les fruits rouges, faites-vous une raison et n’oubliez pas que « Arrivée la Sainte-Virginie (8 juillet), ramasser les fraises, c’est bien fini ».
On retrouve aussi quelques perles un peu dépassées. Ce bon sens de la campagne n’est pas forcément très moderne. Ainsi, cet étonnant « Qui a fille, vigne ou jardin, doit se garder de son voisin » et ce très suggestif « La femme et le melon, par le derrière on les connaît ».

« Dictons et proverbes du jardin » de Daniel Brugès, De Borée, 24,90 €

mercredi 6 juillet 2022

BD - Monstres scolaires


Les Beka, scénaristes de la région (Caroline Roque est originaire de Perpignan), ont imaginé un monde où tout se fait à l’envers. Le jour de la rentrée des classes, pas un élève n’est à l’heure. Pour la plus grande joie des profs qui sont ainsi dispensés de cours. Cette école bizarre est celle des petits monstres.

Littéralement, des monstres qui doivent apprendre à être méchants et à faire peur. Dessinée par Bob dans un style rondouillard et inspiré de l’animation, cette série qui s’adresse aux plus jeunes met en vedette Boloss, le seul enfant monstre qui aimerait être instruit, qui n’est pas dissipé et aime les belles choses.

Le premier album regroupe quatre histoires complètes, pour un total d’une centaine de pages. On y croise quelques horreurs vraiment effrayantes, mais surtout, on comprend que, finalement, la gentillesse et l’harmonie sont plus épanouissantes que ce besoin impérieux des monstres de mettre le bazar et de ne jamais obéir.

«L’école des petits monstres» (tome 1), Dupuis, 9,90 €

mardi 5 juillet 2022

Thriller - Dédale démentiel

Pour bien occuper votre temps libre de cet été, faisons confiance à un spécialiste du suspense. Franck Thilliez est devenu un des auteurs français actuels le plus lu de ces dernières années. Dans Labyrinthes, il délaisse son héros flic Sharko (bientôt adapté en série télé), pour revenir dans le dédale constitué de deux autres de ses thrillers : Le manuscrit inachevé et Il était deux fois.

Au début, rien ne permet de relier ce roman aux autres. On suit les aventures de plusieurs jeunes femmes. Une adolescente enlevée et torturée ; une journaliste qui enquête sur des disparus et une psychiatre recluse dans un village de montagne en pleine tempête de neige. S’y ajoutent une mystérieuse romancière et une policière dépressive.

Avec un machiavélisme et une virtuosité indéniables, Franck Thilliez va perdre le lecteur dans ces récits parallèles. Finalement, on retrouve son chemin dans ce labyrinthe truffé de faux-semblants et on comprend, dans les dernières pages, le fin mot de cette histoire extraordinaire.

«Labyrinthes» de Franck Thilliez, Fleuve Noir, 384 pages, 21,90 €

lundi 4 juillet 2022

BD - La Kahina, Reine magique

La riche collection des Reines de sang permet au lecteur curieux de découvrir une autre facette de l’Histoire du monde. En racontant l’épopée de la Kahina, la reine berbère, Treins et Paunovic lèvent le voile sur l’invasion de l’Afrique du Nord par les armées arabes venues porter la parole de Mahomet. Dans les Aurès, la résistance est menée en partie par les Berbères. Quand le roi est tué au combat, c’est sa fille, la Kahina, qui prend la tête des troupes.

Une femme libre, qui lit l’avenir dans le feu et sait parfaitement se battre. Un album graphiquement très brillant, où les batailles avec des multitudes de cavaliers sont de véritables défis relevés sans difficulté par Paunovic, un dessinateur surdoué.

« La Kahina » (tome 1), Delcourt, 14,95 €

dimanche 3 juillet 2022

BD - Alcibiade, jeune magicien va à l'école

Depuis l’avènement d’Harry Potter, les écoles de, magiciens et autres sorciers sont des endroits qui font rêver les plus jeunes. Alcibiade est un de ces élèves qui va en cours pour manier formules magiques et autres incantations pour défendre son monde. Imaginées par Allan Barte et dessiné par Marc Lataste, les aventures d’Alcibiade sont surtout humoristiques.

Pas de grand méchant dans ces histoires courtes prépubliées dans Tchô, le magazine.

Le petit lutin aux oreilles pointues doit surtout tenter de conserver son aura sur sa bande d’amis depuis l’arrivée d’un autre magicien en devenir, Sigismond, un peu trop prétentieux aux yeux du jovial Alcibiade.

« Alcibiade » (tome 1), Glénat, 14,50 €

samedi 2 juillet 2022

BD - Héliotrope, voleuse de magie


Drôle d’histoire que celle d’Héliotrope. Cette petite fille, qui vit chez sa grand-mère, est en réalité la fille d’un célèbre couple de cambrioleurs d’objets magiques. Au collège, elle tombe amoureuse d’une copine et pour la séduire décide de voler… une couleur. Mais ce bleu Héliotrope va lui colorer la peau. 

Voilà la fillette affublée du prénom d’Héliotrope et surtout un gibier de choix pour de méchants sorciers qui aimeraient la dépecer.

Une histoire fantastique assez étonnante, signée Joann Sfar et dessinée par Benjamin Chaud. On retrouve au détour de voyages aux Pays-Bas ou en Italie la vampire Aspirine, autre personnage bizarroïde imaginé par Sfar.

« Héliotrope » (tome 1), Dupuis, 13,95 €


vendredi 1 juillet 2022

Roman. Javier Cercas règle son compte à l’« Indépendance » catalane

Écrivain reconnu en Espagne, Javier Cercas n’a pas dû se faire beaucoup d’amis en Catalogne lors de la parution du second tome de sa série Terra Alta retraçant les aventures du policier barcelonais Melchor Marin. Le titre Indépendance est trompeur. Car c’est en filigrane une dénonciation implacable du processus lancé par les indépendantistes qui est raconté dans ce roman brillant et passionnant. La classe politique est passée à la moulinette.

Les clés pour comprendre l’évolution de la province qui veut devenir un pays sont en réalité données au milieu du roman « La Catalogne a toujours été entre les mains d’une poignée de familles. Ce sont elles qui décidaient de tout avant le franquisme, qui ont décidé de tout pendant le franquisme, qui ont décidé de tout après le franquisme, et qui décideront de tout quand toi et moi on sera mort et enterrés… »

Melchor accepte de revenir à Barcelone pour aider des collègues qui travaillent sur une tentative de chantage à la sextape sur la maire de Barcelone. Il va croiser le chemin de trois de ces fils de famille qui ont tous les pouvoirs. Riches, ambitieux, sans morale, capables de tout pour conserver leurs prérogatives : ce sont des êtres malfaisants au plus haut point. Melchor va tenter de les faire tomber, mais comment ce fils de prostitué peut-il avoir le moindre pouvoir face à ces notables de pères en fils ?

La fin vous surprendra, car Javier Cercas n’a peur de rien et sait que souvent, ce sont les pires méthodes qui permettent les meilleurs résultats.

« Indépendance » de Javier Cercas, Actes Sud, 23 €