vendredi 5 juillet 2013

BD - Meurtres et glamour à Hollywood dans "Miss Octobre" de Desberg et Queireix


Stephen Desberg
, scénariste prolifique (IRS, Scorpion, Empire USA), est né à Bruxelles, mais d'un père américain. Pas étonnant donc si une majorité de ses créations se déroulent outre-Atlantique. « Miss Octobre » est un polar ayant pour cadre la Californie du début des années 60. Un tueur en série s'inspire de la revue Playboy. Chaque mois, il assassine une jeune femme et réalise des photos d'elle, dénudée... et morte. Sur cette intrigue se greffent trois personnages : Viktor, sourde et voleuse, Clegg, flic à l'ancienne, chargé de l'enquête sur le tueur, Ariel, jeune policier ambitieux, sur la piste de Viktor. Le tout est dessiné par Queireix au dessin réaliste, classique, efficace et précis. Le second tome confirme le premier opus. On en sait un peu plus sur la mystérieuse Viktor, Clegg se révèle finalement plein de failles et Ariel définitivement trop arriviste. Le tueur, de son côté, poursuit son chemin sanglant. Mais sa dernière victime est jetée aux ordures : pas assez belle pour être élue playmate du mois...
« Miss Octobre » (tome 2), Le Lombard, 12 €

jeudi 4 juillet 2013

Thriller - Justice et vengeance dans "Le sourire des pendus" de Jérôme Camut et Nathalie Hug

« W3 », la nouvelle série de Jérôme Camut et Nathalie Hug plonge les lecteur dans un monde perverti. Mais les criminels sont toujours punis. Un jour...

L'été, à l'approche des grandes vacances, on se demande souvent quel livre va nous accompagner durant ces journées chaudes et lascives. Une histoire prenante si possible. Et copieuse, pour qu'elle dure. « Le sourire des pendus » de Jérôme Camut et Nathalie Hug semble un bon choix. Il savent raconter des histoires, leurs précédentes créations le prouvent. Avec plus de 750 pages, on est persuadé que cela va nous occuper un bon mois. Si la première affirmation est correcte, la seconde se révèle rapidement fausse. Les personnages et l'intrigue sont tellement addictifs que le pavé est avalé en quelques jours. Chaque chapitre est tellement captivant qu'on n'a qu'une seule envie : lire la suite. C'est le thriller français de l'année.
La mise en bouche de ce roman est percutante. En juillet 2002, des hommes cagoulés pénètrent dans une riche demeure. Ils tuent la femme et enlèvent les enfants avant de se charger du propriétaire des lieux, un célèbre avocat, Eric Moreau. Le tueur s'appelle Ilya Kalinine. « D'un coup sec il éventra l'avocat puis l'expédia par-dessus le garde-fou. Le corps rebondit contre la façade avant de se balancer lentement, juste devant les fenêtres de l'étage inférieur. Les viscères libérés s'échappaient de la plaie béante. » Dix ans plus tard, Lara Mendès, jeune journaliste à la télévision, cherche par tous les moyens a découvrir le fin mot de ce meurtre sauvage.

Enlevée en enfermée
Petite provinciale, ambitieuse et déterminée, Lara va se jeter dans la gueule du loup. Elle pose trop de questions et est elle aussi enlevée. Elle passe plus de la moitié du livre enfermée, seule, dans un bunker. A Paris, son producteur, Arnault de Battz, s'inquiète. De même que Valentin Mendès, le jeune frère de Lara. Alors que Lara se débat dans les ténèbres, affamée, devenant presque folle en imaginant sa lente mort, oubliée de tous, Valentin et Arnault forment un étrange attelage. Le premier, la cinquantaine bien entretenue est le prototype de l'homosexuel parisien adepte de tous les plaisirs. Raffiné, riche et généreux, il se prend d'amitié pour le jeune Valentin, rugbyman pas dégrossi, naïf mais prêt à tout pour retrouver sa sœur. Ils vont refaire une partie de l'enquête de Lara et démontrer qu'elle a été enlevée alors que son fiancé du moment, Bruno Dessay, célèbre journaliste d'investigation, croit plutôt à une fugue, une mise au vert volontaire.
Pour donner encore plus de force à ce roman déjà prenant, Jérôme Camut et Nathalie Hug lancent une enquête parallèle. Elle n'a rien à voir avec la première. Du moins dans les 300 premières pages. Sookie Castel est gendarme en Bretagne. D'origine Haïtienne, cette jolie « black » se désespère des enquêtes de routine. Par hasard, en ramenant un chien perdu à ses propriétaires, elle tombe sur une scène de crime qui pourrait booster sa carrière. « Trois pendus faisaient face à l'entrée, chacun une chaise renversée à ses pieds. Leurs visages noirâtres étaient gonflés, des vers s'accumulaient dans leurs bouche et leurs yeux, et un nuage de mouches bourdonnait tout autour. » Sookie déchante vite. On lui retire l'affaire. Mais elle s'incruste et se lance sur la piste des tueurs. Car elle ne croit pas à la thèse officielle du suicide en famille.
Parfaitement découpé, ce roman, déjà sombre dans ses premières pages, devient de plus en plus noir. Les auteurs, en observateurs attentifs des dérives de notre société, mettent en lumière les agissements de véritables monstres. « Partout, le destin d'innocents est broyé sans pitié. » est-il expliqué. W3 sera là pour leur donner la parole. Rendre justice. Et les venger.
 

« Le sourire des pendus » de Jérôme Camut et Nathalie Hug, éditions Télémaque, 21 euros

mercredi 3 juillet 2013

BD - Janolle raconte la révolte du peuple esclave


Fini la science-fiction, cap sur l'héroic-fantasy pour Alain Janolle. Le dessinateur de HOPE ou de Babel se lance également dans le grand bain du scénario. Il assure seul l'écriture des deux premiers tomes de ce « Trois peuples » spectaculaire et classique. Dans ce monde imaginaire, les humains partagent le pays avec les Lémurs et les Reptiles. Les seconds sont de redoutables combattants, sanguinaires, prêts à tout pour conquérir de nouvelles terres. Les premiers sont des êtres calmes et sensibles, ils vivent dans les arbres. Des proies toutes trouvées pour les Humains toujours à la recherche d'esclaves.
 Alain Janolle raconte comment les Lémurs vont reconquérir leur liberté, osant jouer leur carte personnelle alors que la guerre entre Humains et Reptiles fait rage. Avec un dessin simplifié pais tout aussi expressif et puissant, Alain Janolle plonge le lecteur dans un monde imaginaire qui semble n'être que le début d'une immense saga.

« Trois peuples » (tomes 1 et 2), Glénat, 13,90 € chaque volume


mardi 2 juillet 2013

BD - Les bêtes sanguinaires de Dufaux et Tillier


Béatrice Tillier
devrait faire de la peinture. Dessinatrice de BD semble un cadre un peu trop restreint pour son immense talent. Assurant également la couleur du troisième tome de sa série « Le bois des vierges », elle offre un objet graphique d'exception. Il ne faut cependant pas oublier l'histoire. 
Ecrite par Jean Dufaux, elle permet à la dessinatrice de mélanger humains et bêtes. Aube, la belle et romantique Aube, mariée de force à un loup, a tué son mari la nuit de noces. Depuis, elle est en fuite et la guerre fait rage entre humains et bêtes à poils. Réfugiée dans le magique Bois des Vierges, elle y sème encore la désolation quand son amant, mi homme mi loup, y met le feu. 
Ce dernier chapitre intitulé « Epousailles » est aussi la rédemption de la jeune femme. Elle va permettre à son amant de choisir entre l'homme et la bête et un mariage va installer durablement la paix dans ce monde féerique. Une réussite absolue à montrer dans toutes les écoles de dessin.

« Le bois des vierges » (tome3), Delcourt, 14,30 €

lundi 1 juillet 2013

BD - Pacco est resté un papa gamin

Maé est souvent en retard à l'école. Maé, 7 ans, est surtout en retard à l'école quand c'est la semaine de son père. Pacco, papa divorcé et gamin, poursuit ses confidences sous forme de BD douce amère. Comment ne pas tout passer à une fillette espiègle et surtout assez intelligente pour comprendre que une semaine sur deux, c'est fête ? C'est le dilemme de ce grand adolescent, père par hasard. Geek, surfeur, fêtard, amoureux : l'auteur tente de se montrer sous tous ses angles. 
Il y parvient notamment quand il fait intervenir sa copine du moment, la fameuse Margaux, elle aussi auteur de BD. C'est là que la lecture croisée des deux bouquins devient passionnante. Pacco raconte sa vie avec Margaux Motin et Maé dans « Une semaine sur deux ». 
Margaux Motin donne son point de vue dans « La tectonique des plaques » (Delcourt). Le même trait précis et classe, le regard décalé, les scènes comiques parfois outrancières... Tout trentenaire se reconnaitra dans ces histoires d'amour. Et puis malgré l'humour omniprésent, Pacco parvient à injecter une bonne dose de sentiment. Malgré toutes ses bêtises, il l'aime sa petite Maé. Et rien que pour ce message le livre vaut d'être lu.

« Une semaine sur deux », Fluide Glacial, 14 €


mercredi 26 juin 2013

BD - Vélo éternel selon Garréra et Julié


Jean-Luc Garréra et Alain Julié sont installés depuis des années dans l'Aude, à Coursan exactement. C'est là que sont imaginés les gags des Vélomaniacs, une série vedette de chez Bamboo. Le 9e recueil rend hommage aux 100 ans du tour de France et du vélo sportif. Cela donne une histoire complète sur l'histoire du vélo, entre délires préhistoriques et affirmations approximatives. Ensuite les cyclistes vont reconnaître les routes de Corse, île où sera donné le départ du prochain Tour. Quelques gags « traditionnels » savoureux. Et puis les Vélomaniacs accueillent pour la première fois des cyclistes féminines. Julié a pris visiblement beaucoup de plaisir à dessiner leurs courbes sportives.

« Les Vélomaniacs » (tome 9), Bamboo, 10,60 euros


mardi 25 juin 2013

BD - Secrets d'enfance dans "Cavale" de Giroud, Germaine et Magda

Tout le monde ne fait pas de crise d'adolescence. Une mère aimante, une vie équilibrée (avec une passion, genre l'équitation), de bons résultats au lycée et la vie s'écoule calmement et sereinement pour Nadia, bientôt 18 ans. La jeune et jolie brune est pourtant tourmentée. Ses nuits sont peuplées de cauchemars abominables. 
C'est la séquence d'ouverture de cet album écrit par Giroud et Germaine et dessiné par Magda. Nadia regarde horrifiée un cheval crucifié sur un té d'architecte en compagnie de sa mère qui ne cesse de courir. Cela se termine par la mort du père, abattu par un voisin alors qu'il flotte dans les airs... Pour trouver des explications, Nadia demande conseil à sa meilleure amie, passionnée de psychologie. 
Mais tout s'éclairera quand la tante de Nadia oublie de retenir sa langue. Un secret de famille très prenant, notamment par le dessin clair et précis de Magda.

« Cavale » (tome 1), Dupuis, 14,50 euros


lundi 24 juin 2013

BD - Le futur déjanté de François Descraques et Gosh

A la base c'est une simple web série, faites avec un minimum de moyens et quelques potes. L'histoire d'un agent venu du futur pour empêcher certaines catastrophes. Du genre de ne pas jeter sa canette dans une poubelle... Et puis François Descraques, le concepteur-scénariste-réalisateur du « Visiteur du futur » a étoffé l'histoire, fait d'autres épisodes, une saison complète, une seconde et la troisième est finalement diffusée sur France Télévisions... Il aime aussi la bande dessinée et à force d'insistance a trouvé un graphiste assez déjanté, Gosh, pour signer un one-shot de son univers. L'album est édité chez Ankama et est encore plus délirant que la série.

Un max de vannes, des zombies à la pelle, du trash et du paradoxe temporel : la BD rêvée pour les geeks du passé, d'aujourd'hui ou du futur.

« Le visiteur du futur », Ankama, 12,90 euros

vendredi 21 juin 2013

Roman - Fantastique Japon moderne

Le Japon, écartelé entre modernisme et tradition, a toujours fasciné les auteurs occidentaux. Nouvelle preuve avec « Le chemin des Dieux » de Jean-Philippe Depotte.

Depuis le moment où il a décidé de devenir écrivain, Jean-Philippe Depotte ne cesse de publier. Un gros roman par an. Après trois récits entre fantastique et récit historique, il se lance dans un roman contemporain. Le personnage principal est le Japon, ce pays qu'il connait (et aime) bien pour y a voir vécu quatre ans. A travers ces 460 pages qui font parfois penser à du Brussolo, il fait partager sa fascination pour un peuple à la pointe de la modernité mais qui jamais n'a oublié ses traditions, les fondamentaux de son histoire réelle et imaginaire.

Le Japon actuel, le lecteur le découvre par l'intermédiaire des yeux d'Achille, un Français qui y a vécu il y a une dizaine d'années. Une parenthèse terminée sur une déception amoureuse. Il devait se marier avec Uzumé. Cela ne s'est pas fait. Il croit avoir tout oublié jusqu'à ce coup de téléphone de son ami Francis, resté lui au Pays du soleil levant. « Uzumé a été enlevée. Viens m'aider à la retrouver ! ». Achille abandonne tout et saute dans un avion pour débarquer dans une ville de Tokyo en totale mutation. Le Français reprend son nom japonais d'Ashiru-san et va au rendez-vous fixé par Francis. Mais son ami ne viendra pas. Il s'est suicidé entretemps. Pendu dans une forêt avec l'écharpe d'Uzumé. Le début d'une dérive spectaculaire pour Ashiru-san, comme envoûté par ce monde dont il maitrise la langue et les codes mais où il restera à jamais un gaïjin, un étranger dont il faut se méfier.

De Kappa à Tanuki

Rapidement le versant fantastique du roman va s'immiscer insidieusement dans le récit. Le Japon décrit par Jean-Philippe Depotte est en train de s'éteindre. En fait c'est l'électricité qui fait défaut depuis un mystérieux incident dont on ne saura rien. L'État demande à ses administrés de faire des économies et la nuit rares sont les lumières allumées. Cela donne un côté crépusculaire à la ville où Ashiru-san erre, détroussé, sans but. Le cauchemar s'estompera avec la rencontre de la jeune taxidermiste Kumiko-chan qu'il surnomme Véra en raison de sa ressemblance avec le personnage du dessin animé Scoubidou. On entre alors de plain-pied dans le Japon des croyances.

Achille ne peut s'empêcher de sourire à la superstition de son amie qui tousse trois fois devant la porte des WC avant d'y aller. « Je préviens quiconque occupe ces toilettes que je compte bien y entrer. Précaution élémentaire. Pour ne pas déranger. » Et de se justifier en expliquant que « les esprits des toilettes ne sont pas les plus dangereux . Mais les tours qu'ils vous jouent sont les plus embarrassants. » Des craintes partagées par Ken, l'ami de Véra, un geek absolu, ne jurant que par les jeux vidéo et les chanteuses pré pubères de mièvreries sucrées.

Dans ce roman on croise aussi quelques yakusas mais surtout toute une ribambelle de divinités, comme attirées à l'extérieur maintenant que les ténèbres règnent sur le pays. Si Kappa dit le "noyeur", un être vivant dans les rivières et attirant les petits enfants dans la vase fait très peur, on est par contre séduit par Tanuki, hybride entre homme, ours et blaireau, lutteur, farceur et reconnaissable entre mille par son pelage dru, « ses testicules immenses et son scrotum distendu ». A la dérive, toujours à la recherche de la mystérieuse Uzumé, Achille est le guide d'exception d'un Japon fantasmé par un écrivain étonnamment imaginatif.

« Le chemin des Dieux », Jean-Philippe Depotte, Denoël, 20,90 € 

jeudi 20 juin 2013

BD - Nazis mystiques

Il y a du Indiana Jones dans cette série. Le héros, Arno Ixks est archéologue. Il est obligé de travailler pour les SS à la recherche d'une preuve de la supériorité de la race Aryenne. Arno a déjà rencontré Hitler. Il y a très longtemps. 

Durant la première guerre mondiale, dans les tranchées. Il a sauvé le futur dictateur allemand. Aujourd'hui il regrette. Le savant est chargé de récupérer des objets et de les amener au Tibet. Un sabre de sarrasin, un astrolabe... Il est aidé (et surveillé) par Palden, une ravissante tueuse à la solde des nazis. Le second tome de l'histoire (scénario de Cothias et Ordas, dessins de Zanat) se consacre sur cette amazone des temps nouveaux. 

Elle a des dons exceptionnels. Petite fille abandonnée devant un temple au Tibet, elle a été enlevée par les nazis à l'âge de 8 ans et est formée au combat. Mais elle manie aussi l'hypnose et le fouet... 

Le dessin très réaliste et charbonneux de Zanat renforce le côté fantastique de la BD prévue en trois tomes.

« L'œil des dobermans » (tome 2), Bamboo Grand Angle, 13,90 €