mercredi 14 juillet 2010

BD - Châtiment hollywoodien pour Guy Lefranc


L'avantage d'avoir plusieurs équipes de créateurs sur un seule et même série, en plus de multiplier les nouveautés, c'est d'explorer des mondes parfois à l'opposé les uns des autres. Ainsi, la 20e aventure de Guy Lefranc se déroulait dans le Nord de la France, alors que les mineurs de fond revendiquaient de meilleures conditions de travail. Un album noir et social. 

Quelques mois plus tard, on retrouve Lefranc, cette fois sous la plume de Taymans et Delperdange, pour une aventure très « bling bling » dans le Hollywood de la grande époque. 

Le journaliste, se prétendant pourtant en vacances, va enquêter sur une nouvelle église annonçant qu'un déluge va purifier Hollywood, la cité corrompue et pervertie. Cette intrigue, sur fond de démence sectaire, permet aux auteurs de faire un large tour d'horizon des habitants de cette ville à part, de la rousse nymphomane au producteur mégalomane en passant par l'acteur raté paranoïaque et le parrain de la mafia réalisateur de « snuff movie ». 

Parfois un peu bavarde, cette aventure est cependant une digne continuation de la série créée par Jacques Martin.

« Lefranc » (tome 21), Casterman, 10 € 

mardi 13 juillet 2010

BD - « Seuls » au cœur du Maelström


Ce cinquième tome du premier cycle de « Seuls » apporte son lot de révélations finales. Vous saurez enfin pourquoi ce groupe d'enfants se retrouve seul dans une ville où tous les adultes ont disparu. Une explication qui risque en décevoir certains, mais qui donne surtout l'opportunité au scénariste de poursuivre la série. 

On connait même le titre du prochain album : « La quatrième dimension et demie ». Pour ce final, les enfants vont braver les interdits de la ville déserte. Ils vont franchir les cairns rouges battis par les singes et s'approcher au cœur du Maelström. Dans la zone des anciens abattoirs, inondés, ils vont enfin faire la rencontre avec celui qui va leur ouvrir les yeux. 

Beaucoup de tension dans cet album, en s'approchant de la vérité, les enfants se mettent doublement en danger. Vehlmann distille ses coups de théâtre avec parcimonie donnant l'occasion à Gazzotti, le dessinateur, de multiplier les cases fortes poussant le lecteur à vite tourner la page pour connaître la suite.

« Seuls » (tome 5), Dupuis, 9,95 € 

lundi 12 juillet 2010

Roman - Flavia de Luce, drôle de détective

Flavia de Luce, intrépide fillette anglaise, joue aux détectives amateurs dans ce roman policier signé Alan Bradley.


Fillette âgée de 11 ans, Flavia de Luce a un caractère bien trempé. Un peu à l'image d'une Fifi Brindacier que rien n'impressionne, elle n'a pas sa langue dans sa poche et sa formidable intelligence lui permet de se sortir de bien des situations délicates. Pourtant, ce que Flavia va vivre en ce début d'été 1950 est beaucoup plus traumatisant que ses bêtises habituelles. En pleine nuit, elle surprend son père, le très sérieux colonel de Luce, en train de se disputer dans son bureau avec un inconnu, un géant roux. 

Quelques heures plus tard, au petit matin, alors qu'elle se rend au jardin cueillir des herbes pour ses potions, Flavia tombe sur l'inconnu agonisant, visiblement empoisonné. Dans un premier temps, Flavia prend cela comme une aubaine, une expérience grandeur nature totalement inespérée. L'héroïne imaginée par Alan Bradley, un auteur canadien, est très éloignée de la petite fille modèle. En fait, la chimie la passionne. 

Elle l'explique, dans le premières pages du roman, au lecteur incrédule : « Mon travail se fit de plus en plus élaboré à mesure que les mystères de la chimie organique m'étaient révélés, et je me réjouissais de mon nouveau savoir sur ces substances que l'on pouvait si facilement extraire de la nature. Le poison, telle était ma passion absolue. » L'homme vient de mourir sous ses yeux, cela captive Flavia : « J'observai la scène avec fascination, savourant chaque détail : la dernière palpitation des doigts, le changement de couleur presque imperceptible de la peau qui prit une teinte métallique, comme si la mort le recouvrait de son voile... Et, enfin, l'immobilité absolue. »

Timbres rares

Forcément, la découverte de ce cadavre dans le jardin provoque une belle animation dans le village. La police interroge les habitants et rapidement soupçonne le père de Flavia. Le mort serait une de ses anciennes connaissances. C'est quand il est arrêté et conduit en prison que Flavia décide d'intervenir et de démêler cet écheveau compliqué où des timbres rares, la mort d'un professeur des décennies auparavant et la compétition entre jeunes prestidigitateurs jouent des rôles importants. 

On suit les pérégrinations de Flavia, intrépide et imprudente, souvent inconsciente des risques qu'elle prend. Mais il est vrai qu'on se méfie moins d'une fillette en bicyclette que d'un policier en uniforme. Flavia, adorable enfant discrète, devient une peste aux humeurs massacrantes quand elle n'obtient pas ce qu'elle désire. Si Daffy, une de ses sœurs, refuse de lui répondre, son sang ne fait qu'un tour : « Je fulminai : au fond de moi, une marmite bouillonnante remplie d'une potion occulte pouvait rapidement déborder et transformer Flavia-L'Invisible en Flavia-La Terreur. »

Cette première aventure-enquête de Flavia, déjà traduite dans une trentaine de pays, est publiée par deux éditeurs en même temps : chez Lattès pour les adultes ou parents, chez « Msk », la collection jeunesse des Editions du Masque, pour les adolescents.

« Les étranges talents de Flavia de Luce », Alan Bradley, Lattès, 17 € 

dimanche 11 juillet 2010

BD - Clémence, cuisinière en chef des « Rillettes au sucre »


Cette série est toujours aussi délicieuse. « Rillettes au sucre » raconte, simplement, le quotidien d'une famille urbaine qui n'a rien d'exceptionnel. Sauf le père, homme au foyer s'occupant avec un plaisir non dissimulé des repas, du ménage et de toutes les autres tâches ménagères.

Après avoir présenté l'ensemble des personnages dans les deux premiers tomes, Clémence déroule son intrigue dans ce troisième opus. On suit donc les hésitations des enfants, de Sally la libertine indépendante, regrettant de plus en plus de ne pouvoir garder un amant plus de trois jours, de Hans, amoureux de Sonia, une copine vivant un véritable enfer avec sa mère dépressive et alcoolique. Sans oublier Albertine, la plus sage, la plus romantique, désespérément amoureuse de son professeur de musique. A côté de cette belle jeunesse, on suit avec une tendresse toute particulière les anciens. L'arrière grand-mère, un peu sénile, dépendante mais pas encombrante. Le grand-père de son côté décide enfin de sortir de son isolement. Il rencontre une artiste chinoise et reprend des couleurs.

Cette bande dessinée, un peu comme un manga, joue sur les sentiments et le côté feuilletonnesque de la collection. C'est simple, touchant, passionnant. Entre les personnages émouvants, les scènes de tendresse et les coups de théâtre vaudevillesque, Clémence ne laisse pas le temps au lecteur de s'ennuyer. Une belle réussite qui, espérons-le, donnera des idées à certains de ses collègues auteurs.

« Rillettes au sucre » (tome 3), Delcourt collection Shampoing, 8,95 € 

samedi 10 juillet 2010

BD - Enfance et guerre dans la collection terroir de Vents d'Ouest


Petits Bonheurs, nouvelle série de la collection Terroirs de Vents d'Ouest, a des airs de « Sursis » de Gibrat. Mais cette fois, l'histoire imaginée et dessinée par H. Tonton ne se déroule pas en Aveyron mais dans le Lot-et-Garonne. Reste que l'ambiance est la même : campagnarde et résistante en cette année 1944. Dans la petite localité de Penne-d'Agenais, la vie s'écoule presque comme si de rien n'était. 

Les quelques soldats allemands ne mettent pas encore beaucoup de pression sur les civils, la milice magouille et la Résistance s'organise. Chacun doit choisir son camp. Du moins les adultes. Car cette drôle de guerre, le lecteur la vit par l'intermédiaire de Rémi et Mathilde, deux gamins d'une dizaine d'années. Ils courent dans les champs, chapardent des cerises, tentent de débusquer des lapins. Par hasard, il tomberont sur une cache de la Résistance. Des kilos d'explosifs et des armes. Cela va changer leur vie et la relative tranquillité de la région. Bucolique au début, dramatique au final, cette série est prévue en deux tomes.

« Petits bonheurs » (tome 1), Vents d'Ouest, 13,50 € 

vendredi 9 juillet 2010

BD - « Le prétexte » pour partir, mourir...


Pas spécialement sympathique le héros de cette histoire complète. Marc, trentenaire, bossant dans l'informatique, gagne très bien sa vie. Il a fait des choix qu'il assume. Notamment d'être entier et cassant. Cela ne l'empêche pas d'être depuis deux ans en couple avec Karine. Ils envisagent même de se marier. Mais Karine, un soir de déprime, avoue l'avoir trompé. Avec un homme atteint du sida. Sans s'être protégée. 

Cette révélation va totalement transformer Marc. La rage d'abord. Il jette Karine, l'humilie. Puis, conscient qu'il risque lui aussi d'être infecté, il ne veut pas savoir et choisit la fuite. Il retire tout l'argent du compte commun et entreprend un tour du monde. Il commence par New York. Un touriste un peu paumé, qui va trouver une béquille en la personne de Maddie, jeune traductrice. 

Ce récit, très masculin, est pourtant écrit par une femme, Isabelle Bauthian qui semble parfois prendre un réel plaisir à décrire un Marc très beauf et négatif. Sylvain Limousi, au dessin, en fait juste assez pour rendre cette histoire passionnante. On sent qu'il a particulièrement apprécié la partie se déroulant en Chine.

« Le prétexte », Dargaud, 14,50 €

mercredi 7 juillet 2010

BD - Amour virtuel sur le Love Blog de Gally et Obion


C'est l'histoire d'amour entre deux auteurs de BD. Obion rencontre Gally. Ils s'aiment le temps d'un festival. Puis retour à la maison. Lui à Brest, elle à Nice. Pour oublier la distance, ils créent un blog commun, le Love Blog, dans lequel ils vont créer des histoires pour se faire mutuellement fantasmer. Aujourd'hui, Obion et Gally vivent ensemble et les notes du Love Blog paraissent en album. 

Attention, ces récits courts, sont très chauds. Le couple a profité de ce support pour mélanger fantasme et réalité. Ils ne cachent rien de leur sexualité, réelle ou imaginaire. Cela va parfois très loin, mais ce n'est jamais vulgaire. Les scènes explicites raviront les amateurs du genre. Les autres découvriront des pratiques qui pimenteront certainement leurs galipettes estivales...

« Love Blog », Delcourt, 14,95 € 

mardi 6 juillet 2010

BD - Alunÿs voyage dans le monde de Troy


Enrichissant sans cesse le monde de Troy, Arleston multiplie les pistes et les collaboration. Si Lanfeust vous passionne, ne manquez pas « L'expédition d'Alunÿs », histoire complète mettant en vedette ce vénérable sage. En pleine expérimentation de sortilège, il dérape et perd une bonne partie de ses capacités. Pour que tout redevienne à la normale, il doit partir à la recherche du légendaire Krobatridère. 

En compagnie de deux étudiants, l'agaçant Kyslapeth et de la belle et fine psychologue Marikiri, Alunÿs prend la direction des îles de l'archipel Haggatoe. 

On retrouve dans cette saga toute la pâte d'Arleston (jeux de mots compris) qui s'est adjoint l'aide de Mélanyn au scénario et Cartier au dessin. Ce dernier, malgré un style moins réaliste que les autres dessinateurs de Troy, s'en tire parfaitement.

« L'expédition d'Alunÿs », Soleil, 13,50 € 

lundi 5 juillet 2010

BD - Naja flingue


Tueuse professionnelle, Naja est une héroïne à part dans l'univers de Morvan, le scénariste. Naja découvre au fil des épisodes (déjà le 4e d'une série prévue en 5) que Zéro, le chef de son organisation, a lancé les autres tueurs à ses trousses. Toujours dessinée par Bengal, cette série, violente et psychologique, étonne par son graphisme épuré. 

Etonnant également la charge contre les Catalans. Naja doit se rendre à Barcelone. L'occasion pour elle de leur dire ses quatre vérités : « Les Catalans, des gens qui s'enorgueillissent d'avoir refusé le franquisme mais qui ont passé toute la dictature à descendre les ramblas. Comme avant... Ils ressemblent finalement à leur patois. Trop français pour être de l'espagnol, trop espagnol pour être du français. Les Catalans n'ont jamais su vraiment qui ils étaient. C'est pour cela qu'ils préfèrent rester entre eux. » Morvan semble avoir vécu une expérience malheureuse dans la région...

« Naja » (tome 4), Dargaud, 13,50 € 

jeudi 1 juillet 2010

BD - Le voyage des retrouvailles


Au crépuscule de sa vie, un homme tente de retrouver le souvenir des jours heureux en parcourant une nouvelle fois le monde. Mais cette fois, il n'est pas jeune en compagnie de sa future femme, mais vieux et infirme et malade, accompagné de son fils avec qui il avait coupé les ponts depuis des années. Un voyage de retrouvailles qui sera bénéfique pour les deux protagonistes ainsi que pour le lecteur qui, forcément, trouvera dans ces situations des pans de sa propre vie. 

Ecrit par Olivier Jouvray, ce récit de 80 pages est dessiné par Frédérik Salsedo alors que les couleurs sont de son frère, Greg. Un projet qui a vu le jour en raison de l'envie de Jouvray d'utiliser les décors de ses nombreux voyages. On suivra ce couple bancal de la Réunion à la Finlande en passant par les USA, le Maroc et l'Asie du Sud-Est. Un étonnant road-movie familial.

« Nous ne serons jamais des héros », Le Lombard, collection Signé, 15,50 €