dimanche 7 juin 2009

BD - Le retour indirect de Jessica Blandy


Il est des héroïnes BD dont il est difficile de faire le deuil. Mais ce ne sont que des créatures de papier totalement dépendantes du bon vouloir de leur créateur. Dans le cas de Jessica Blandy, c'est le scénariste, Jean Dufaux, qui a souhaité mettre fin aux aventures de la belle. Au grand regret du dessinateur, Renaud. C'est ce dernier qui a fait le forcing pour retrouver l'ambiance de cette BD alliant violence, érotisme et fantastique. 

Dufaux a donc repris du service, pour trois tomes, proposant au lecteur de cheminer sur « La route Jessica ». Dans le premier opus, « Daddy », les différents personnages sont tous à la recherche de Jessica Blandy. La dernière piste passe par son psychanalyste. Mais ce dernier ne restera que peu de temps en vie. Séduit puis massacré par Agripa, cette dernière bénéficie de l'aide de son père adoré, Soldier Sun, tout aussi expéditif pour faire taire les témoins gênants. Un retour magistral, sans Jessica (sauf lors de quelques flashbacks), mais avec tous les ingrédients de la série originelle.

« La route Jessica » (tome 1), Dupuis, 13,50 €

samedi 6 juin 2009

BD - Les Schtroumpfs aussi ont droit aux congés payés


Cela sent les vacances. Alors que les beaux jours sont de retour et que les grandes vacances sont de plus en plus proches, voici une jolie parabole sur le sujet, à la sauce Schtroumpfs. Tout débute quand le Schtroumpf bricoleur est sur le point de craquer pour surmenage. Le Grand Schtroumpf lui propose de prendre quelques jours de repos. Et pour que la coupure soit forte, il lui demande d'aller faire du camping au bord d'un lac, à la montagne. 

C'est là que le petit héros, toujours inventif et habile de ses huit doigts, se construit une cabane. A son retour il décide de faire découvrir sa construction à des amis. Et rapidement, le lieu enchanteur et reposant se transforme en second village, « Schtroumpfs les bains », où il fait bon de ne rien faire. Reste à trouver des volontaires pour travailler et servir les amateurs de farniente... 

Le scénario d'Alain Jost et Thierry Culliford est illustré par Pascal Garray, fidèle au trait de Peyo.

« Les Schtroumpfs » (tome 27), Le Lombard, 9,45 € 

vendredi 5 juin 2009

Roman - Musicienne envoutante


Méfiez-vous des professeurs de piano. Pierre, écrivain pour la jeunesse, marié, un enfant, a tout pour être heureux. Quelle idée lui a pris de se remettre au piano. Il répond à une petite annonce et se rend à Paris pour son premier cours. Il attendant une « dame lourde, poudrée », il se retrouve devant une beauté répondant au prénom de Sarah : « D'abord je n'ai vu que ses yeux, luisants immenses, d'un jaune pâle incroyable, deux yeux de félins au fond des miens. Puis son sourire chaleureux qui n'allait pas avec ses yeux ». Tourneboulé par cette première leçon, il sort de la seconde dans un état second : « Soudain, une certitude éclate en moi : le coup de foudre ! Merde... Dire que je n'y avais jamais cru ! »

Ce court roman de Claudie Pernusch au style vif et direct est un bel exercice de virtuosité. L'écrivain, ayant essentiellement œuvré pour la littérature jeunesse, se permet quelques scènes croustillantes entre deux adultes consentants prêts à tout expérimenter sous couvert d'amour fou. Pierre se découvre dominateur, Sarah docile et mystérieuse. Un relation fusionnelle qui ne peut pas durer. Pierre est prisonnier de sa vie de famille trop bien réglée, Sarah trop attachée à sa liberté. Une histoire triste ? Non, une histoire de tous les jours, éphémère et forte, comme les orages qui accompagnent tous les coups de foudre.

« Le cartable à musique », Claudie Pernusch, Albin Michel, 14 € 

jeudi 4 juin 2009

Nouvelles - Les pollueurs de vie

Quarante portraits, quarante « insupportables ». Vous en avez certainement dans vos relations. A moins que vous n'en soyez un vous aussi...


Ce petit livre pourrait devenir, dans quelques dizaines d'années, un témoignage criant de vérité sur les années 2000. Un nouveau millénaire qui a vu le développement de l'individualisme, de la solitude, du culte de la réussite et surtout de l'apparence. Sven Ortoli, journaliste et écrivain, s'est associé à Michel Etchaninoff, professeur de philosophie pour dresser le portrait de cette génération en quarante personnages, caricaturaux, typiques, bien de notre temps.

Ces sont les Insupportables car leurs avis ou attitudes sont entre l'abject et le répugnant. Vous en connaissez certainement certains exemplaires. Et attention car parfois vous pourriez vous reconnaître (en partie ou en totalité) dans ces textes courts. De « La reine du monde », impériale sur les trottoirs en conduisant sa poussette à « L'amoureux du monde », bavard impénitent, sachant tout sur tout et qui fait fuir tout le monde avec ses connaissances encyclopédiques.

Je glande donc je suis

Parmi les portraits les plus réussis, retenons le paresseux d'entreprise. Avant de le suivre dans une matinée de non-travail, découvrons comment les auteurs le décrivent : « Il est universel. Publique ou privée, multinationale ou régionale, aucune entreprise n'échappe à sa présence : c'est le ninja de la flemme, le Napoléon de la cosse, l'experts n° 1 dans l'art de ne rien foutre ; au nom de la fin de toutes les illusions, excepté celles qu'il entretient à son sujet. » Chaque portrait débute par cette présentation générale. Mais ensuite les deux auteurs donnent de la chair et du liant à ces exemples tous théoriques. Et pour donner encore plus de corps à l'ensemble, les Insupportables se croisent, parfois, au gré d'une réunion de travail ou d'un dîner en ville.

Souvent c'est dans la bourgeoisie que les pires spécimens se trouvent. Il est vrai que rien ne vaut un peu d'aisance pour malmener ses congénères. Ainsi « L'esclavagiste soft » trouve normal d'employer, au noir, Lovely, une Philippine, 10 heures par jour, sept jours sur sept. Une grande bourgeoise qui n'a qu'une inquiétude : que cette nounou servile et illettrée ait trop d'influence sur ses enfants. Comment est-elle arrivée là : « Julienne, la Capverdienne d'avant, déclarée, se servait dans le frigo et tombait malade toutes les deux semaines. Un calvaire. A peine si elle ne menaçait pas de se mettre en grève. Avec Lovely, c'est plus facile : elle vient même quand elle a 40 de fièvre. »

Irréprochable et immonde

Des portraits qui prêtent souvent à rire. On les plaindrait presque. Pourtant il y a également des monstres dans cette galerie. « L'irréprochable » détonne un peu dans ce livre. Pourtant c'est là aussi bien vu et certainement plus fréquent qu'on ne le pense. Cet irréprochable, père de famille exemplaire, a son jardin secret. Chaque mercredi après-midi, alors que femme et enfants sont sortis, il s'enferme dans son grenier et se plonge dans son monde virtuel. Il surfe sur les sites internet montrant des petites filles « qui font des choses vilaines, très vilaines. Et en général il coupe le son parce qu'il n'aime pas les cris. Quelquefois, quand il a fait sa petite affaire, il se regarde dans la glace et se trouve un peu limite. Mais enfin, il mate, c'est tout ! Ça compte pour du beurre. » Celui-là, il est un peu plus qu'insupportable.

« Les insupportables », Sven Ortoli et Michel Etchaninoff, Seuil, 15 € 

mercredi 3 juin 2009

BD - Bataille médiévale


« Les aigles décapitées », dernière série encore existante des débuts de la collection Vécu, propose dans ce 21e tome de suivre, dans le détail, le siège d'un château fort au Moyen Age. Michel Pierret qui assure scénario et dessin explique avec force détails les différents plans des armées du roi pour faire tomber le château de Noirlac. 

Hugues, le héros de la série, va mettre ses compétences au service des agresseurs pour obtenir la libération de son fils, Sigwald. Cette très bonne série, imaginée par Patrice Pellerin, était dessinée à la base par Jean-Charles Kraehn. 

Au 4e volume il en prend les rênes seul, avant de confier le dessin à Pierret au n° 6. Ce dernier a « récupéré » le scénario depuis le tome 17, après un court intérim d'Eric Arnoux. Tous ont la particularité d'être avant tout des dessinateurs.

« Les aigles décapitées » (tome 21), Glénat, 9,40 € 

mardi 2 juin 2009

BD - La nuit des aigles


Wayne Shelton a lui aussi connu une « reprise » (voir note d'hier). Mais pour une fois ce n'est pas le dessinateur qui a passé la main, Denayer est toujours fidèle au poste, mais le scénariste, créateur de la série, qui a choisi son successeur. Wayne Shelton, imaginé par Jean Van Hamme, vit désormais des aventures écrites par Thierry Cailleteau. Ce dernier a conservé la personnalité du héros (un aventurier, âgé mais intrépide) tout en étoffant l'univers dans lequel il évolue. « La nuit des aigles » se déroule essentiellement en Argentine, dans un village bavarois reconstitué par des Nazis en fuite. Ils vont tenter de faire ressusciter Hitler en personne. Le héros veille, mais il a fort à faire...

« Wayne Shelton » (tome 8), Dargaud, 10,40 € 

lundi 1 juin 2009

BD - Alix en Bretagne

 


A ce rythme, la série Alix créée par Jacques Martin, va battre le record de reprise au niveau des dessinateurs. Cette fois c'est Ferry qui signe le 28e tome des aventures du jeune Romain, sur un scénario de Patrick Weber. 

Ferry, le dessinateur de Ian Kalédine, au style très personnel, ce qui explique sa difficulté à se fondre dans ce moule graphique contraignant. Heureusement pour lui, cet épisode se déroule en Bretagne et il se « lâche » un peu graphiquement en dessinant des Celtes beaucoup plus sauvages, barbus et chevelus que les sages Romains. Alix est en mission pour tenter d'éviter une nouvelle guerre. Mais ce sera peine perdue et la puissance impériale fera plier ces irréductibles Bretons. Album intéressant mais loin de la série originale.

« Alix » (tome 28), Casterman, 10 € 

vendredi 29 mai 2009

BD - Linda Glamouze, icône très c...


Pour devenir une icône de la mode, mieux vaut ne pas trop réfléchir. Cela tombe bien pour Linda Glamouze, héroïne créée par Camille Burger, elle ne brille pas par son intelligence hors du commun. Ce serait même l'inverse. 

En fait, Linda est très conne, et c'est tout ce qui fait son charme, paradoxalement. Devenue le mannequin star de la marque « 8 Thons », elle sait lancer les modes en fonction des nécessités. Si elle entretient parfaitement son « ticket de métro », elle oublie parfois de s'épiler les aisselles. Qu'à cela ne tienne, deux élastiques et elle transforme ces touffes en chignons qui vont devenir « in » en très peu de temps. Pour réussir il faut parfois coucher. Mais pas systématiquement. Souvent il suffit d'être « anorexique et désinvolte ». 

Cette critique au vitriol du milieu du luxe et de l'inutile est salutaire en ces périodes de crise. Camille a trouvé sa voie en féminisant l'esprit de Reiser avec un soupçon de Vuillemin. C'est trash. Cela risque devenir tendance...

« Linda Glamouze », Fluide Glacial, 9,95 € 

jeudi 28 mai 2009

BD - Au cœur de la guerre avec Anne Nivat


Anne Nivat fait partie de ces journalistes qui vivent leur métier comme un sacerdoce, 24 heures sur 24. Correspondante à Moscou pour des quotidiens français et des radios, elle a découvert qu'une guerre, quasi secrète, se déroulait à quelques centaines de kilomètres de la capitale russe en pleine renaissance après la chute de la dictature communiste. 

Elle va régulièrement aller en Tchétchénie, se glisser dans la population locale pour raconter le quotidien de ces civils trop souvent au centre des tirs et des bombardements. Anne Nivat en a fait des livres. Daphné Collignon a souhaité aller un peu plus loin. La dessinatrice a rencontré la correspondante de guerre et transformé leurs longues conversations en un album très réaliste. 

Ce tête-à-tête entre les deux femmes permet au lecteur de mieux saisir la démarche de la journaliste. Elle se livre sans détour, n'hésitant pas à revenir sur sa vie privée quand elle a interféré directement avec son travail. Un témoignage essentiel pour comprendre ce métier risqué mais passionnant.

« Correspondante de guerre », Soleil, 15,95 €


 





Et aussi sur le groupe PriceMinister : Livres, Voiture occasion



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mercredi 27 mai 2009

BD - Mettre les voiles avec "Transat" d'Aude Picault


Quand on vit dans un studio à Paris, il faut parfois savoir ouvrir les vannes pour décompresser. Rien de tel qu'un grand bol d'air frais à bord d'un voilier pour découvrir de nouveaux horizons. Cette expérience, Aude Picault, après l'avoir vécue, la raconte dans ce roman graphique de 170 pages. 

Au début, elle plante le décor de sa vie. Sans fard. Superficialité de ses « amies », travail peu intéressant dans l'illustration, solitude dans une ville de deux millions d'habitants. Tout pour déprimer. Mais ce n'est pas le genre de la maison. Elle s'évade en projetant une traversée de l'Atlantique sur le voilier d'Yvon Fauconnier. 

Elle prépare l'échéance en passant une semaine sur une île au large de la Bretagne. Seule, avec juste des moutons et des mouettes pour compagnons. La seconde partie du récit se déroule en mer. La dessinatrice abandonne le cadre étriqué des cases pour dessiner des doubles pages retraçant toutes les émotions de cette transatlantique de rêve. 

Une BD très personnelle mais qui touche à l'universel par son thème.

« Transat », Delcourt, 14,95 €