mardi 8 août 2006

BD - Michel Vaillant contre le grand capital


Michel Vaillant est toujours dans la course. Jean Graton, le dessinateur créateur de ce héros de BD ayant fait rêvé plusieurs générations de lecteurs de 7 à 77 ans (la série passait dans le journal de Tintin) a passé la main. Son fils, Philippe, assure le scénario alors que le dessin est réalisé par un studio fidèle au style originel. Délaissant les circuits de Formule 1, Michel en compagnie de Steve Warson est engagé sur le rallye d’Orient en Turquie. Avec son buggy au moteur révolutionnaire il est sur le point de gagner une nouvelle spéciale quand il est obligé de quitter la route pour éviter un enfant errant au milieu de la piste. Le pilote au grand coeur, va prendre l’enfant sous son aile, tenter de découvrir d’où il vient et l’aider à retrouver sa famille. Une histoire très réaliste puisque en plus de l’intervention de personnages réels comme René Metge, le scénario va lever le voile sur le travail des enfants dans les pays émergents. Une thématique courageuse dénonçant les pratiques de certains constructeurs automobiles... (Graton Editeur, 10 €)

lundi 7 août 2006

BD - Simon Nian, un goût de Tillieux


Jouant sur le ressort de la nostalgie, savoureuse à souhait, cette BD écrite par Corteggianni et dessinée par Rodier comblera tous les nostalgiques de la grande époque de Maurice Tillieux. Il y a même une Peugeot 404 en couverture, mais rassurez-vous, Simon Nian est bien actuel. Cet avocat au sang bouillant, doit se rendre dans le sud-est de la France pour régler quelques problèmes après le décès dans une chute de vélo d’un de ses amis, expert en oeuvres d’art. Hors le lecteur sait parfaitement que l’intéressé n’est pas mort tout seul, balancé qu’il a été par un couple d’affreux jojos. Simon va se lancer dans une enquête à rebondissement avec nonnes belliqueuses, démons assassins, peintre faussaires et trésor caché. Avec en guest-star, Monsieur Choc, le célèbre "méchant" de Tif et Tondu, la série dessinée par Will et scénarisée par... Tillieux. Intitulée "Les démons de Partransac", le second tome de cette série se permet même quelques piques contre « le nain de la place beauvau qui se prend pour les sept à lui tout seul et qui n’aime pas qu’on évoque ses problèmes avec Blanche-Neige ». (Glénat, 9,40 €)

dimanche 6 août 2006

BD - Caroline et les Indiens


Installée au Québec, Caroline Baldwin, privé au féminin, est chargée de « récupérer » un jeune Indien parti en dissidence. Entraîné par des meneurs plus intéressés par les conséquences financières (notamment grâce au trafic de cigarettes) que le fond politique, il participe à des barrages pour obtenir l’indépendance des réserves, dernier vestige de leur domination des terres et forêts canadiennes. Dans le même temps, Caroline accepte de retrouver le père d’une jeune Libanaise, un ancien militaire français. Deux intrigues croisées qui vont interférer dans les dernières pages particulièrement denses. André Taymans, auteur complet de cette série comptant 12 titres, est particulièrement productif. En plus de sa série fétiche, il signe le scénario de plusieurs autres bandes dessinées et surtout travaille actuellement sur la reprise de Lefranc en parallèle avec celle de Francis Carin. Son trait classique et enlevé, parfois très épuré, gagne en rigueur dans les premières planches dévoilées sur plusieurs sites internet consacrés aux héros imaginés par Jacques Martin. (Casterman, 9,80 €)

Littérature jeunesse - Tags intempestifs


Comment déclarer sa flamme à la fille qu’on aime quand on est trop timide pour lui dire de vive voix ? Eliot, l’amoureux de Mickette, se pose la question et trouve la solution en prenant conscience de la laideur de la façade toute décrépie de l’école. Il achète des bombes de peinture et, la nuit venue, écrit en gros et de toutes les couleurs sa déclaration d’amour. Mais alors qu’il admire son tag il est dérangé par une horde d’hommes invisibles qui eux aussi écrivent sur le mur. Mais c’est beaucoup moins poétique. Qui sont ces fantômes ? Eliot ne le sait pas car dès qu’il les a vus, il a pris ses jambes à son cou. Problème, Eliot est accusé d’être le taggueur et se retrouve renvoyé de l’école. Cela ne plait pas à Mickette, sensible à la déclaration d’amour, qui va enquêter pour découvrir l’identité des véritables fauteurs de trouble. Un roman très actuel sans être trop fleur bleue de Gudule (créatrice de Mickette, héroïne de deux autres aventures) illustré par Christophe Durual pour les 8 – 10 ans. (Nathan, 4,50 €)

vendredi 4 août 2006

Roman - L'héritage de Mme Picmol

Quand la gardienne d’un immeuble découvre le luxe dans un palace, le mélange des classes sociales peut virer au tragique. 


A vivre tout le temps par procuration, on peut parfois perdre toute notion de réalité. C’est un peu ce qui arrive à Angélique dans « Le destin de Madame Picmol » de Claudie Pernusch. Angélique Picmol, gardienne d’immeuble dans le civil, la cinquantaine assez bien conservée, vénérant son petit chien, Pupuce, et lisant un peu trop souvent les articles flatteurs sur les princesses, « sa préférée, son idole, c’est celle aux lévriers : la princesse Estelle, « Estie » pour les intimes, c’est-à-dire pour tout le monde ». Or, voilà qu’après des années d’économies et un héritage imprévu, une cousine se rompant le cou à la pêche aux moules, Madame Picmol se paie une folie totale : un mois en pension complète au Chamois d’or, un palace planté au pied des pistes d’une station huppée et surtout du château d’Estie. Elle croit même l’apercevoir une fois dans sa voiture et se con sole en allant acheter du bourguignon haché pour Pupuce chez le même boucher que les lévriers d’Estie. Mais Angélique comprend rapidement qu’elle est une pièce rapportée dans cet univers de riches habitués à être servis en permanence. Elle, a plutôt l’habitude de servir les autres. C’est encore plus flagrant au restaurant, quand un larbin se charge même de lui rapprocher sa chaise juste avant de s’asseoir. 

Le bel Edouard
 C’est un peu trop pour Madame Picmol, mais à son grand étonnement elle s’habituera vite à cet état de fait. Et quand un homme s’intéresse à elle, c’est un choc incroyable, comme une renaissance, l’espoir d’une nouvelle vie. Dès son entrée dans la salle à manger, Angélique a remarqué la belle prestance d’Edouard : « Il est de taille moyenne, un peu ventru, avec des cheveux blancs fournis, une moustache grise, des yeux téméraires, démesurément grands derrière ses lunettes. » Elle, dans la glace de sa chambre, avait détaillé ses atouts : « Stature moyenne, bien en chair sans excès, la taille encore mince malgré des hanches larges. Elle a des yeux vert amande, un nez court arrondi, des pommettes rebondies, un bouche bien dessinée, l’épiderme fin légèrement couperosé, une poitrine généreuse, des jambes un peu maigrelettes ». Edouard lui raconte son veuvage, les petits enfants, dans un manoir. Il montre même des photos du dernier Noël. Angélique prend l’habitude de dîner avec lui le soir. 

 Confidences à Pupuce
 Son séjour devient merveilleux. Elle a enfin quelqu’un à qui parler, se confier. Une tâche jusqu’alors tenue par son chien. La journée, elle attend son rendez-vous avec Edmond et se confie : « Tu sais Pupuce, il y a des lunes que ta Mamine n’a pas attendu ! Parce que y a attendre et attendre, hein. Attendre quelqu’un qui vous attend pas et attendre quelqu’un qui vous attend. Dans le premier cas on se fait écho, dans l’autre on fait un duo. Attendre et s’attendre, c’est pas pareil, Pupuce. Là, tu vois, Edmond et moi on s’attend. » 
Alors, ce roman ne serait qu’une romance entre quinquagénaire ? Ce n’est pas véritablement le style de Claudie Pernusch, conceptrice-rédactrice de publicité. Son premier roman est tranchant et incisif. Madame Picmol semble aveuglée par le luxe, Edmond pas si clair que cela et certains employés du palace très gênés par la situation. Reste Pupuce. Il n’aime pas Edmond, par contre adore le boucher qui lui donne toujours quelques restes. Cette comédie douce amère décortique le changement de vie de Madame Picmol, ses espoirs de revanche. Quant à savoir si la fin est morale, bien malin celui qui pourra avoir un avis tranché… 

« Le destin de Madame Picmol, Claudie Pernusch, Albin Michel, 14,50 €

jeudi 3 août 2006

BD - Cochons voyageurs


L’univers graphique de Nicolas de Crécy n’a rien de commun. Ses histoires sont également tout sauf conventionnelles. Après des romans graphiques très ambitieux comme « Léon La Came » et l’éblouissant « Prosopopus », il s’essaie à la série avec héros récurrent. Salvatore, chien garagiste, est amoureux de Julie. Mais elle est partie en Amérique du Sud. Pour la rejoindre, il construit un véhicule expérimental. Et pour le faire fonctionner, il doit retrouver une pièce subtilisée par une vache artiste. Il partira en ville en compagnie de son gardien, homme nain, peu bavard, peureux mais fidèle. Au même moment, la cochonne Amandine s’échappe de la maternité en compagnie de ses 12 cochonnets prématurés. Elle aussi est à la recherche de quelque chose. Quelqu’un exactement, François, son treizième rejeton. Ce dernier, perdu dans les égouts, est recueilli par une chatte gothique. La trame de l’intrigue paraît assez décousue, pourtant tout ce petit monde improbable évolue sous le pinceau de Nicolas de Crécy avec une intelligence de tous les instants. Imagination et invention, le lecteur en a pour son argent. (Dupuis, 9,80 €)

mercredi 2 août 2006

Rubine, une sacrée fliquette


C’est toujours à la fin d’une journée de travail épuisante qu’un imprévu vient gâcher la paisible et reposante soirée en vue. Du moins pour les héroïnes de BD, surtout quand elles sont policières à Chicago. Un emploi que ne renie pas Rubine, mais qui parfois lui pèse. En rentrant chez elle, donc, elle assiste au suicide d’une jeune fille. Désespoir amoureux soldé par un plongeon du 50e étage. Quelques semaines plus tard c’est son frère qui se noie au cours d’une sortie en voilier. Et quand la femme de Peter Blackwood se suicide, Rubine ne peut que se poser des questions. Pourquoi cette série noire ? Est-ce que cela a un rapport avec les activités professionnelles de Blackwood, comptable d’un parrain de la mafia locale ? Mythic, le scénariste, signe une intrigue touffue et pleine de fausses pistes pour un beau coup de théâtre final. Les dessins de Boyan, encore un peu tortueux, gagneraient à s’alléger d’une épaisseur de trait pas toujours justifiée dans une histoire où le comique occupe encore une grande place. (Le Lombard, 8,70 €)

BD - Galata au sommet


Istambul, début du XVIe siècle. Alors qu’il vient de prendre ses fonctions de prévôt, le chevalier Ogier de Murol échappe à un attentat. Un poète est assassiné à sa place. Mais rapidement on le croit mort, empoisonné par une chemise enduite de ciguë. Heureusement il en réchappe et c’est un héros revanchard qui reprend du service dans le second tome de cette série historico-policière écrite par Alain Paris et Fred Le Berre alors que le dessinateur Stefano Palumbo s’occupe de la mise en images. Il découvre que la mort du poète n’est pas un hasard. Ce dernier cachait bien son jeu car il était en réalité un chasseur de primes sur le piste d’un chevalier voleur d’une grosse quantité d’ambre. Pour venger sa mort, Ogier doit retrouver le voleur. La seule piste le conduit dans un monastère perché au sommet d’un pic rocheux quasiment inaccessible. L’intrigue, assez complexe, sait parfois laisser la place à des scènes récréatives, notamment quand entre en scène l’adjoint d’Ogier, un jeune savant farfelu, sorte de Michel Ange avant l’heure… (Les Humanoïdes Associés, 10,40 €)

mardi 1 août 2006

BD - Territoire maudit


Rien ne va plus pour Nigel. Accusé de meurtre, blessé, il est conduit dans un hôpital par les policiers. Entre la vie et la mort, il revoit enfin la belle Kirstie. Cette femme, réapparaît régulièrement dans sa vie, avant de mourir, happée par des démons sortis d’un Territoire mystérieux et angoissant. Dans cette salle des urgences, elle lui explique qu’il est sur le point lui aussi de rejoindre le territoire. Qu’après il ne pourra plus l’aider. Il faut donc qu’il vive pour continuer de chercher une autre porte qui la délivrerait définitivement. Un baiser éthéré plus tard, il reprend conscience, au grand étonnement du corps médical. Il va se lancer sur la trace de Greg Sanders, sorte de gourou californien qui drogue ses disciples avec une plante hallucinogène. 
C'est déjà le quatrième tome de cette série écrite par Corbeyran et dessinée par Espé. Regrettons que l’intrigue n’avance pas beaucoup, par contre en fin de volume un dossier de 8 pages nous éclaire sur les peintures de Jean-Pierre Ugarte, le véritable inspirateur de cette BD fantastique. (Delcourt, 12,90 €) 

BD - "Welcome to Hope", l'Amérique abjecte

Hope, petite ville américaine entourée de milliers d’hectares de maïs. Quelques fermes par ci par là et un bar. Derrière le comptoir, Norma, jeune blonde qui, comme la moitié des Américaines, rêve de gloire sur une scène de Las Vegas. Autour de la belle inaccessible tourne Cody, mécano en liberté conditionnelle pour un vol qu’il n’a même pas commis. Un soir, avec un peu de baratin et quelques bières, il séduit la bimbo. Pour lui les ennuis vont commencer car le papa et le fiancé n’apprécient pas. En parallèle, Scott, joueur professionnel de poker débarque à Hope. Un bled de bouseux où il pense facilement gagner quelques billets. Mais pour lui aussi les choses vont se compliquer. Marie (scénario) et Vanders (dessin), décrivent un monde où tout le monde semble abject, sans aucune morale ni gentillesse. Seule la loi du plus fort et du plus vicieux semble avoir droit de cité. Un premier tome très noir s’achevant sur un coup de théâtre annonçant des développement encore plus extrêmes. 
(Bamboo, Grand Angle, 12,90 €)