Pas évident de trouver le sommeil après avoir causé la mort d’une petite fille. Le professeur Bell, héros imaginé par Joann Sfar et dessiné depuis trois albums par Hervé Tanquerelle, a dont tué par inadvertance la fille unique de son pire ennemi, Adam Worth. Conséquence, les nuits de Bell sont courtes et agitées. Cauchemars incessants, réveils en sursaut : c’est un véritable calvaire qui pousse Bell à commettre l’irréparable : tenter d’assassiner Worth. Il échoue lamentablement et tout le monde le pousse à prendre quelques jours de vacances. Il choisit la verte Irlande au grand désespoir de son valet et confident, Ossour. Son impétuosité le pousse à s’attaquer à des lutins qui le capturent et vont lui jouer un drôle de tour. Moins mouvementée, plus cérébrale, voire philosophique, cette nouvelle aventure de Bell porte véritablement la marque de fabrique de Sfar, parfaitement enluminée par un Tanquerelle au trait adapté aux différentes ambiances. Il se permet même un dessin pleine page digne du grand-guignol. (Delcourt, 12,90 €)
Quelques chroniques de livres et BD qui méritent d'être lus et les critiques cinéma des dernières nouveautés. Par Michel et Fabienne Litout
jeudi 13 juillet 2006
BD - Le Professeur Bell rajeunit
Pas évident de trouver le sommeil après avoir causé la mort d’une petite fille. Le professeur Bell, héros imaginé par Joann Sfar et dessiné depuis trois albums par Hervé Tanquerelle, a dont tué par inadvertance la fille unique de son pire ennemi, Adam Worth. Conséquence, les nuits de Bell sont courtes et agitées. Cauchemars incessants, réveils en sursaut : c’est un véritable calvaire qui pousse Bell à commettre l’irréparable : tenter d’assassiner Worth. Il échoue lamentablement et tout le monde le pousse à prendre quelques jours de vacances. Il choisit la verte Irlande au grand désespoir de son valet et confident, Ossour. Son impétuosité le pousse à s’attaquer à des lutins qui le capturent et vont lui jouer un drôle de tour. Moins mouvementée, plus cérébrale, voire philosophique, cette nouvelle aventure de Bell porte véritablement la marque de fabrique de Sfar, parfaitement enluminée par un Tanquerelle au trait adapté aux différentes ambiances. Il se permet même un dessin pleine page digne du grand-guignol. (Delcourt, 12,90 €)
mercredi 12 juillet 2006
BD - Mic Mac Adam et l'amazone
Dans « L’Amazone des ténèbres », quatrième titre de ses nouvelles aventures, Mic Mac Adam retrouve Miss Vickie Pitcott. Cette vieille connaissance avait disparu. Mais ce n’est pas la véritable Vickie qu’il rencontre au cours d’un reportage sur les lignes allemandes en pleine première guerre mondiale. La jeune femme, possédée par une entité fantastique, s’est mise au service du 2e Reich. Dans son avion biplan, grâce à l’aide de créatures magiques, elle décime toute une escadrille française. En Allemagne, les puissances magiques maléfiques entrent en jeu alors que chez les Anglais, le paisible peuple des Kobbels met sa maîtrise de l’agriculture pour approvisionner les troupes alliées. Mais cela ne semble pas suffisant. Ils devraient prendre aux aussi les armes. Double intrigue, des deux côtés du front, pour une série fantastique toujours dessinée par André Benn, auteur belge très talentueux, trop souvent dans l’ombre, mais scénarisé par deux jeunes, Luc Brunschwig et Sylvain Runberg. (Dargaud, 11 €)
mardi 11 juillet 2006
BD - Le terrorisme du futur
Polar américain avec un zeste de sabre japonais et de cheval comme à la grande époque de la conquête de l’Ouest, New West de Palmiotti (scénario) et Noto (dessin) est surtout l’occasion pour ses auteurs d’imaginer Los Angeles dans un futur proche, « après l’impulsion ». L’intrigue, une prise d’otage qui tourne mal, est supplantée par cette fameuse impulsion et ses conséquences. Un beau jour, des terroristes coréens, mécontents de l’américanisation de leur pays, ont bricolé une bombe électronique aux effets ravageurs. Une fois actionnée, elle a éliminé toute forme d’électricité à des kilomètres à la ronde. Le premier signe cela a été les avions qui sont tombés du ciel, ensuite les catastrophes se sont enchaînées inexorablement. Et comme cette impulsion agit toujours, c’est un détective privé à cheval et armé d’un sabre qui va tenter de retrouver le maire, lui aussi kidnappé. Dan Wise, politiquement incorrect, découvrira le pot aux roses. Sous des airs de BD d’action et de combat, un beau message contre les manipulations des grands de ce monde. (Bamboo, Angle Comics, 10 €)
lundi 10 juillet 2006
BD - Interrogations d'artistes
Carlos Sampayo, créateur d’Alack Sinner avec Munoz, signe un récit complet dessiné par Oscar Zarate sur les affres de la création.
Chantal Fernandes est une journaliste parisienne spécialisée dans le domaine culturel. Alors que son ordinateur tombe en panne, elle reçoit la commande d’un reportage sur les trois artistes lauréats d’une fondation présidée par un certain Blanchard. Adriano Lazzari est un musicien virtuose, Maurice Malikian un peintre majeur et Diego Nogales un écrivain traduit sur toute la planète. Chantal va tenter de découvrir pourquoi ce sont ces trois artistes qui sont distingués cette année, et ce que se cache derrière leurs œuvres.
Le lecteur découvre Chantal dans son appartement en train de préparer son reportage, mais il comprend rapidement que ces scènes ne sont que des retours en arrière. Le présent, c’est Chantal étendue à terre, inanimée, la tête ensanglantée. Que s’est-il passé ?
Souvenirs parisiens
Sampayo avec toute son expérience de la narration elliptique va faire se rejoindre ces deux courbes du temps, jusqu’au coup tragique. Chantal, avant de pouvoir rencontrer les trois artistes qui viennent d’arriver et Paris et logent tous dans un palace, devra passer la barrière de Blanchard. Prétentieux, sûr de lui, considérant son personnel comme un cheptel corvéable à merci, il va tenter de séduire Chantal qui résistera pour ne pas cracher tout le dégoût que lui inspire cet homme. Les trois artistes se croisent dans l’hôtel, sans véritablement faire connaissance. A tour de rôle, ils se souviennent d’une période de leur vie, à Paris justement, dans leur jeunesse, alors qu’ils n’étaient pas encore reconnus par la profession et le public. Nogales par exemple, jeune père, ayant laissé sa famille au Mexique, tombe dans les bras d’une hôtesse de l’air française. En quelques jours une passion dévorante va transformer les deux amants. L’écrivain, sur un nuage, retrouvera durement la réalité. Au cours d’un voyage de nuit, sur des routes envahies de brouillard. Depuis, il détient en lui un secret terrible, source de son nouveau style faisant l’économie de certains mots qu’il ne peut plus prononcer.
Un visage lunaire
De la même façon Adriano Lazzari, alors adolescent, écrasé par son père, musicien virtuose, découvre l’amour dans les bras d’une jeune étudiante… Chantal Fernandes. L’histoire de Maurice Malikian est encore plus tortueuse. Ce maître de l’autoportrait a sculpté son visage, avec la complicité d’un chirurgien esthétique. Aujourd’hui il a gommé tout ce qui fait une personnalité : cheveux, lèvres, nez, sourcils, pommettes… Sa face est lunaire. Pourquoi s’est-il infligé cette torture ? Adriano aime-t-il toujours Chantal ? Qui l’a frappée ?
Au cours de ces 80 pages denses et dramatiques, les deux auteurs réussissent à explorer au plus profond ces trois âmes ayant certainement, à un moment donné de leur vie, trop sacrifié à leur art. Passionnante, cette BD a le souffle des grands romans, avec des personnages forts et attachants mais surtout fragiles, comme tous les génies…
« Trois artistes à Paris », dessin Zarate, scénario Sampayo, éditions Dupuis, 14 euros
Chantal Fernandes est une journaliste parisienne spécialisée dans le domaine culturel. Alors que son ordinateur tombe en panne, elle reçoit la commande d’un reportage sur les trois artistes lauréats d’une fondation présidée par un certain Blanchard. Adriano Lazzari est un musicien virtuose, Maurice Malikian un peintre majeur et Diego Nogales un écrivain traduit sur toute la planète. Chantal va tenter de découvrir pourquoi ce sont ces trois artistes qui sont distingués cette année, et ce que se cache derrière leurs œuvres.
Le lecteur découvre Chantal dans son appartement en train de préparer son reportage, mais il comprend rapidement que ces scènes ne sont que des retours en arrière. Le présent, c’est Chantal étendue à terre, inanimée, la tête ensanglantée. Que s’est-il passé ?
Souvenirs parisiens
Sampayo avec toute son expérience de la narration elliptique va faire se rejoindre ces deux courbes du temps, jusqu’au coup tragique. Chantal, avant de pouvoir rencontrer les trois artistes qui viennent d’arriver et Paris et logent tous dans un palace, devra passer la barrière de Blanchard. Prétentieux, sûr de lui, considérant son personnel comme un cheptel corvéable à merci, il va tenter de séduire Chantal qui résistera pour ne pas cracher tout le dégoût que lui inspire cet homme. Les trois artistes se croisent dans l’hôtel, sans véritablement faire connaissance. A tour de rôle, ils se souviennent d’une période de leur vie, à Paris justement, dans leur jeunesse, alors qu’ils n’étaient pas encore reconnus par la profession et le public. Nogales par exemple, jeune père, ayant laissé sa famille au Mexique, tombe dans les bras d’une hôtesse de l’air française. En quelques jours une passion dévorante va transformer les deux amants. L’écrivain, sur un nuage, retrouvera durement la réalité. Au cours d’un voyage de nuit, sur des routes envahies de brouillard. Depuis, il détient en lui un secret terrible, source de son nouveau style faisant l’économie de certains mots qu’il ne peut plus prononcer.
Un visage lunaire
De la même façon Adriano Lazzari, alors adolescent, écrasé par son père, musicien virtuose, découvre l’amour dans les bras d’une jeune étudiante… Chantal Fernandes. L’histoire de Maurice Malikian est encore plus tortueuse. Ce maître de l’autoportrait a sculpté son visage, avec la complicité d’un chirurgien esthétique. Aujourd’hui il a gommé tout ce qui fait une personnalité : cheveux, lèvres, nez, sourcils, pommettes… Sa face est lunaire. Pourquoi s’est-il infligé cette torture ? Adriano aime-t-il toujours Chantal ? Qui l’a frappée ?
Au cours de ces 80 pages denses et dramatiques, les deux auteurs réussissent à explorer au plus profond ces trois âmes ayant certainement, à un moment donné de leur vie, trop sacrifié à leur art. Passionnante, cette BD a le souffle des grands romans, avec des personnages forts et attachants mais surtout fragiles, comme tous les génies…
« Trois artistes à Paris », dessin Zarate, scénario Sampayo, éditions Dupuis, 14 euros
dimanche 9 juillet 2006
Polar - Où les borgnes sont rois
Loin des clichés de la Côte Ouest américaine qui fait rêver, ce thriller de Jess Walter conduit le lecteur dans les bas-fonds de la conscience humaine.
Une nuit froide dans la ville de Spokane située au coeur de l'Etat de Washington, pas loin du Canada, mais très éloignée du miracle économique de la côte Ouest des USA, de Seattle à Los Angeles. Spokane ville sinistrée économiquement, encaissée au pied de montagnes presque perpétuellement enneigées. La police locale, sans être submergée, a beaucoup à faire. La patrouille a trouvé un homme, un borgne avec bandeau noir de pirate, au sommet d'un hôtel désaffecté. Il semblait vouloir se suicider. Refusant de parler, il attend dans une salle d'interrogatoire. Caroline Mabry, bien qu'elle soit sur le point de finir son service et de partir en week-end, décide d'entendre cet inconnu. Il lui faudra beaucoup de temps pour rompre la glace et finalement il avouera un meurtre et voudra se confesser à la policière. Une confession écrite qui constitue le gros de ce roman policier de Jess Walter, ancien journaliste connaissant parfaitement la région de l'action. Elle alterne avec l'enquête plus classique de l'agent Mabry qui doit dans un premier temps découvrir l'identité de l'homme s'accusant de meurtre.
Le cas Eli Boyle
L'inconnu borgne débute son récit quand il était encore élève en CM2 et qu'il devait prendre le bus scolaire chaque matin. C'est là qu'il a rencontré pour la première fois Eli Boyle. "Je n'ai jamais connu d'élève aussi âgé qui faisait encore pipi à l'école, qui pleurait, qui s'asseyait à l'avant et appelait sa maman. Il devait porter des chaussures orthopédiques à cause d'un pied déformé, souffrait d'une scoliose, de lésions cutanées et de la gale, et l'infirmière scolaire l'emmenait sans cesse pour un impétigo, une indigestion, une occlusion intestinale, ou toute autre saleté qu'il traînait dans son sillage comme seuls amis". Eli Boyle dont il s'accuse d'avoir pris la vie. Eli qui était devenu son ami, son protégé. Il a toujours été là pour le protéger, notamment depuis qu'il a perdu un oeil dans une bête bataille au pistolet à plomb. C'est Eli, en prévenant les secours, qui lui a sauvé la vie.
La majeure partie du roman est donc composée de ces souvenirs d'enfance et d'adolescence, avec les progrès incessants d'Eli pour tenter de s'insérer dans la vie active. Le narrateur au fil des pages se dévoile, alors qu'en parallèle Caroline Mabry elle aussi parvient petit à petit à reconstituer le puzzle, cherchant ce cadavre sans lequel les aveux du borgne ne restent qu'affabulations.
Policière dépressive
Caroline qui elle aussi profite de cette enquête atypique pour se poser quelques questions sur sa vie. La solitude lui pèse, son métier la déprime et elle connaît trop bien cette ville. Se remettre en question ? La belle affaire. "C'est facile d'être seul, le week-end. D'habitude, à cette heure-ci, le samedi après-midi, Caroline Mabry a oublié jusqu'à l'existence d'autrui et s'est installée devant son écran de télévision ou d'ordinateur, enfin à l'aise avec elle-même après une semaine pénible au bureau." Bref la jeune policière est au bord de la dépression et sans qu'elle sache pourquoi elle va totalement s'investir dans cette enquête, passant trois jours sans dormir, remuant ciel et terre pour prouver que l'inconnu a menti. Une certitude qui s'affirme de page en page, alors même qu'elle se découvre une attirance, une concordance, avec ce paumé de la vie, ne supportant les coups que le sort lui a donné au cours de ces dernières années.
Ce thriller social et romantique de Jess Walter est remarquable par sa construction jonglant avec les allers-retours entre présent et passé et surtout le personnage d'Eli Boyle, apparent monstre mais véritable âme d'un roman cru sur la misère humaine.
« Où les borgnes sont rois », Jess Walter, Seuil, 19 €
Une nuit froide dans la ville de Spokane située au coeur de l'Etat de Washington, pas loin du Canada, mais très éloignée du miracle économique de la côte Ouest des USA, de Seattle à Los Angeles. Spokane ville sinistrée économiquement, encaissée au pied de montagnes presque perpétuellement enneigées. La police locale, sans être submergée, a beaucoup à faire. La patrouille a trouvé un homme, un borgne avec bandeau noir de pirate, au sommet d'un hôtel désaffecté. Il semblait vouloir se suicider. Refusant de parler, il attend dans une salle d'interrogatoire. Caroline Mabry, bien qu'elle soit sur le point de finir son service et de partir en week-end, décide d'entendre cet inconnu. Il lui faudra beaucoup de temps pour rompre la glace et finalement il avouera un meurtre et voudra se confesser à la policière. Une confession écrite qui constitue le gros de ce roman policier de Jess Walter, ancien journaliste connaissant parfaitement la région de l'action. Elle alterne avec l'enquête plus classique de l'agent Mabry qui doit dans un premier temps découvrir l'identité de l'homme s'accusant de meurtre.
Le cas Eli Boyle
L'inconnu borgne débute son récit quand il était encore élève en CM2 et qu'il devait prendre le bus scolaire chaque matin. C'est là qu'il a rencontré pour la première fois Eli Boyle. "Je n'ai jamais connu d'élève aussi âgé qui faisait encore pipi à l'école, qui pleurait, qui s'asseyait à l'avant et appelait sa maman. Il devait porter des chaussures orthopédiques à cause d'un pied déformé, souffrait d'une scoliose, de lésions cutanées et de la gale, et l'infirmière scolaire l'emmenait sans cesse pour un impétigo, une indigestion, une occlusion intestinale, ou toute autre saleté qu'il traînait dans son sillage comme seuls amis". Eli Boyle dont il s'accuse d'avoir pris la vie. Eli qui était devenu son ami, son protégé. Il a toujours été là pour le protéger, notamment depuis qu'il a perdu un oeil dans une bête bataille au pistolet à plomb. C'est Eli, en prévenant les secours, qui lui a sauvé la vie.
La majeure partie du roman est donc composée de ces souvenirs d'enfance et d'adolescence, avec les progrès incessants d'Eli pour tenter de s'insérer dans la vie active. Le narrateur au fil des pages se dévoile, alors qu'en parallèle Caroline Mabry elle aussi parvient petit à petit à reconstituer le puzzle, cherchant ce cadavre sans lequel les aveux du borgne ne restent qu'affabulations.
Policière dépressive
Caroline qui elle aussi profite de cette enquête atypique pour se poser quelques questions sur sa vie. La solitude lui pèse, son métier la déprime et elle connaît trop bien cette ville. Se remettre en question ? La belle affaire. "C'est facile d'être seul, le week-end. D'habitude, à cette heure-ci, le samedi après-midi, Caroline Mabry a oublié jusqu'à l'existence d'autrui et s'est installée devant son écran de télévision ou d'ordinateur, enfin à l'aise avec elle-même après une semaine pénible au bureau." Bref la jeune policière est au bord de la dépression et sans qu'elle sache pourquoi elle va totalement s'investir dans cette enquête, passant trois jours sans dormir, remuant ciel et terre pour prouver que l'inconnu a menti. Une certitude qui s'affirme de page en page, alors même qu'elle se découvre une attirance, une concordance, avec ce paumé de la vie, ne supportant les coups que le sort lui a donné au cours de ces dernières années.
Ce thriller social et romantique de Jess Walter est remarquable par sa construction jonglant avec les allers-retours entre présent et passé et surtout le personnage d'Eli Boyle, apparent monstre mais véritable âme d'un roman cru sur la misère humaine.
« Où les borgnes sont rois », Jess Walter, Seuil, 19 €
samedi 8 juillet 2006
Roman - Des veuves au kilo...
Ce roman de Philippe Carrese est un road movie familial sur les routes de France en compagnie d’un flic de base et du fils d’un aristocrate.
On roule beaucoup dans "Les veuves gigognes", polar signé du Marseillais Philippe Carrese. La première scène se passe au bord d’une rivière, mais très rapidement une voiture va faire irruption dans cette scène bucolique. Une Jaguar venant de défoncer un parapet de cette route de montagne et qui plonge inexorablement vers le vide. Le conducteur, un ancien député de droite, meurt sur le coup. Une mort lourde de conséquence pour nombre de personnes qui ignoraient même son existence. En premier lieu Lucas Rosarian, flic dépressif en disponibilité après le départ de sa femme pour des cieux plus gais. Quand on vient livrer un bouquet de 38 roses à Mme Rosarian, il le prend très mal. Jusqu’à ce qu’il comprenne que ce n’est pas pour sa femme infidèle mais sa mère qui pourtant n’habite plus là depuis quelques années.
Encore plus étonnant la personne qui tient à offrir ce bouquet à sa mère. André-Marie Vilevirain de Saint-Chamons est un aristocrate quadragénaire « à tête de poireau. Au sommet de son crâne d’œuf, une méchante mèche rebelle flotte au gré du petit mistral qui se lève. Elle balaie sa calvitie naissante comme un plumeau monté sur un mécanisme d’essuie-glace. (…) L’aristocrate a le teint pâle, les lèvres fines et les yeux globuleux ».
Maîtresses et euros
André-Marie explique à Lucas qu’il est en service commandé. Son père, récemment décédé, veut qu’il remette 50 000 euros à chacune des « femmes de sa vie ». Car le député, catholique pratiquant très respecté des autorités ecclésiastiques, menait une double vie, collectionnant les aventures et parfois les maîtresses sur de longues périodes. Parmi elles, la mère de Lucas, aujourd’hui à la retraite. C’était il y a 39 ans, quelques temps avant la naissance de Lucas qui tout à coup a un doute sur l’identité de son père et pourrait se retrouver avec un demi frère « à tête de poireau », riche à million roulant en Porsche Cayenne. Il décidera même de suppléer l’aristocrate dans sa recherche des autres femmes de député cavaleur.
Philippe Carrese, avec son style vif et léger, bourré de bons mots et de personnages truculents, entraîne le lecteur dans une folle course poursuite de Marseille à Nice en passant par le Havre et Paris. Le couple formé par Lucas et Jean-Marie va trouver sur son chemin quelques aigrefins appâtés par les liasses de billets à distribuer aux anciennes maîtresses. A moins qu’ils ne cherchent autre chose dans les souvenirs de ce député à la vie en total décalage avec ses convictions politiques. Il y a du San-Antonio dans ce roman, situations, personnages et coups de théâtre défilant à toute vitesse au fil des pages.
« Les veuves gigognes », Philippe Carrese, Fleuve Noir, 19 euros
On roule beaucoup dans "Les veuves gigognes", polar signé du Marseillais Philippe Carrese. La première scène se passe au bord d’une rivière, mais très rapidement une voiture va faire irruption dans cette scène bucolique. Une Jaguar venant de défoncer un parapet de cette route de montagne et qui plonge inexorablement vers le vide. Le conducteur, un ancien député de droite, meurt sur le coup. Une mort lourde de conséquence pour nombre de personnes qui ignoraient même son existence. En premier lieu Lucas Rosarian, flic dépressif en disponibilité après le départ de sa femme pour des cieux plus gais. Quand on vient livrer un bouquet de 38 roses à Mme Rosarian, il le prend très mal. Jusqu’à ce qu’il comprenne que ce n’est pas pour sa femme infidèle mais sa mère qui pourtant n’habite plus là depuis quelques années.
Encore plus étonnant la personne qui tient à offrir ce bouquet à sa mère. André-Marie Vilevirain de Saint-Chamons est un aristocrate quadragénaire « à tête de poireau. Au sommet de son crâne d’œuf, une méchante mèche rebelle flotte au gré du petit mistral qui se lève. Elle balaie sa calvitie naissante comme un plumeau monté sur un mécanisme d’essuie-glace. (…) L’aristocrate a le teint pâle, les lèvres fines et les yeux globuleux ».
Maîtresses et euros
André-Marie explique à Lucas qu’il est en service commandé. Son père, récemment décédé, veut qu’il remette 50 000 euros à chacune des « femmes de sa vie ». Car le député, catholique pratiquant très respecté des autorités ecclésiastiques, menait une double vie, collectionnant les aventures et parfois les maîtresses sur de longues périodes. Parmi elles, la mère de Lucas, aujourd’hui à la retraite. C’était il y a 39 ans, quelques temps avant la naissance de Lucas qui tout à coup a un doute sur l’identité de son père et pourrait se retrouver avec un demi frère « à tête de poireau », riche à million roulant en Porsche Cayenne. Il décidera même de suppléer l’aristocrate dans sa recherche des autres femmes de député cavaleur.
Philippe Carrese, avec son style vif et léger, bourré de bons mots et de personnages truculents, entraîne le lecteur dans une folle course poursuite de Marseille à Nice en passant par le Havre et Paris. Le couple formé par Lucas et Jean-Marie va trouver sur son chemin quelques aigrefins appâtés par les liasses de billets à distribuer aux anciennes maîtresses. A moins qu’ils ne cherchent autre chose dans les souvenirs de ce député à la vie en total décalage avec ses convictions politiques. Il y a du San-Antonio dans ce roman, situations, personnages et coups de théâtre défilant à toute vitesse au fil des pages.
« Les veuves gigognes », Philippe Carrese, Fleuve Noir, 19 euros
vendredi 7 juillet 2006
BD - Aria, icone de la liberté
Aria traîne sur les routes depuis de nombreuses années. Souvent seule. Mais dans ce 28e titre de la série écrite et dessinée par Michel Weyland, elle est en compagnie de Sacham, son fils, et de Marvèle, fiancée de ce dernier.
Ils quittent une ville hostile pour rejoindre une contrée plus accueillante. Mais, pour cela, ils doivent passer par la forêt maudite. C'est à l'orée de ce lieu magique qu'une nuée de krylfes rend visite au petit groupe. Ces petits êtres volants, sorte de chauve-souris au dard de scorpion, sont très intéressés par les deux membres de leur communauté vivant depuis quelques mois en compagnie d'Aria. Farouchement attachée à sa liberté, elle pousse ses deux petits amis à voler de leurs propres ailes et à rejoindre leur communauté.
Ce qu'ils feront après une longue hésitation.
Aria regrettera amèrement ce départ car elle s'était attachée à ses krylfes. Et en plus, elle est depuis régulièrement attaquée par des êtres semblables mais plus gros. De village en village, elle tentera de comprendre pourquoi. Elle rencontrera en cours de route un nain barbu et dévergondé, promis à un bel avenir dans l'univers de cette série fantastique indémodable. (Dupuis, 9,80 €)
mercredi 5 juillet 2006
BD - Tony et Alberto, un couple trash pour les enfants
Alors que Roba est mort récemment, après avoir relu les gags de Boule & Bill, plongez dans ce 7e album de Tony & Alberto, version post-punk de la série vedette du journal de Spirou. Tony, le petit garçon, Alberto, le chien, ont des rapports dépassant l’entendement. Dab’s, scénariste et dessinateur de cette série très trash, y va très fort parfois dans la maltraitance des animaux. Il est notamment question dans cet album d’un pigeon voyageur mis à toutes les sauces par un Tony qui l’utilise comme messager. Pandi, le panda, apparu l’année précédente, squatte toujours la chambre de Tony. Et comme il hiberne, difficile de le réveiller. Ou alors c’est à ses risques et périls. Son point faible ce sont les fleurs. Il ne supporte pas leur parfum. Il faut s’en méfier ou l’utiliser à bon escient comme arme contre une équipe de rugby un peu plus forte. C’est souvent très visuel et Dab’s a énormément progressé à ce niveau depuis ses premiers croquis publiés dans les marges de Tcho, le journal de Titeuf. (Glénat, 9,40 €)
mardi 4 juillet 2006
BD - Le donjon au sommet
Donjon Zénith est la série phare du monde imaginé au fil des ans par Sfar et Trondheim. C’est ce dernier qui dessinait les aventures du Gardien, Herbert, Marvin et autres monstres. Pour ce cinquième tome intitulé « Un mariage à part », il a confié le dessin à Boulet. Jeune dessinateur réaliste à l’aise dans tous les styles, il remplit parfaitement sa tâche, respectant les bases de son prédécesseur tout en apportant un côté plus viril et guerrier aux combats ou scènes de foule. Le scénario, plein de clins d’œil et de niveaux différents de lecture, raconte le mariage, très intéressé, du Gardien avec la belle Isis. Herbert veut s’y opposer, le tout sur fond de saisie immobilière du Donjon. Trondheim a découvert Boulet grâce son blog dessiné, un des plus abouti de la toile, alternant croquis sur le vif, BD reportages sur les voyages de l’auteur à l’étranger et relecture de sa vie quotidienne au sein d’un studio. Si vous aimez rire et que vous n’êtes pas allergique aux rouquins, connectez vous sur http://www.bouletcorp.com/blog/
(Delcourt, 9,80 €)
lundi 3 juillet 2006
BD - Les petits ruisseaux des petits vieux
Pascal Rabaté en signant ce récit complet de 96 pages a placé la barre très haut. Il a ciselé une histoire envoûtante avec pour héros un retraité, pêcheur et veuf. Cela semble ne pas payer de mine, mais rapidement on est subjugué par les petites histoires de Pierre. Il passe ses journées à pêcher avec son copain Edmond et le soir il regarde la télé. Mais Edmond meurt brutalement. Pierre décide alors d’aller à un rendez-vous de son copain avec une dame rencontrée dans une agence. Car Pierre aussi se sent de plus en plus seul. Peut-on tomber amoureux à près de 70 ans ? Est-ce bien raisonnable d’essayer de retrouver ses souvenirs d’enfance ? S’endormir pour toujours est-ce la solution ? Plus le récit avance, plus le lecteur s’identifie totalement à ce vieux monsieur conscient d’avoir encore un peu de ressources. Le bonheur se trouve peut-être tout simplement à un croisement de départementale ? Si ce n’était pas de la BD, on lui donnerait le Goncourt. Et pourquoi pas après tout ? (Futuropolis, 15,90 €)
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