lundi 5 décembre 2022

Beau livre - Christophe Levillain magnifie "Le Pays Catalan"

En 200 pages et autant de photos, Christophe Levillain propose un superbe voyage iconographique dans les paysages les plus spectaculaires du département des Pyrénées-Orientales. Un beau livre et cadeau idéal pour faire découvrir Le Pays Catalan à ses proches


Difficile de mettre en valeur une photo parmi les plus de 200 qui composent le nouveau livre de Christophe Levillain. Toutes sont plus belles les unes que les autres, offrant à chaque fois une facette à découvrir d'un lieu ou d'une ambiance. Le photographe, par ailleurs grand randonneur devant l'éternel (il nous balade chaque dimanche dans l'Indépendant sur les plus beaux sentiers des Pyrénées-Orientales et de l'Aude), a largement puisé dans son immense photothèque pour proposer cet ouvrage retraçant l'histoire et le présent du Pays Catalan.  

À travers ces photos et les textes qui les renseignent, vous pourrez remonter les siècles de cette région à travers ses vestiges ou monuments culturels ou industriels, explorer les villages atypiques et les grandes villes touristiques. Pour Christophe Levillain, ce "territoire généreux, sublimé et dense, qu'est le Pays Catalan, hypnotise. Territoire le plus méridional de la France continentale, terroir de soleil et de lumière balayée par la Tramontane et le Marin, ce bout de terre pyrénéenne regorge de pépites patrimoniales, de trésors naturels et de décors cinématographiques." Feuilleter ce livre, plonger dans ces photos, apprendre à travers les textes, vous donnera une furieuse envie de mieux en profiter et d'enfiler vos chaussures de randonnée pour en profiter en réalité après la version papier. 


dimanche 4 décembre 2022

Fred Hidalgo rédige le roman de San-Antonio en deux gros volumes

Installé à Corbère-les-Cabanes dans les Pyrénées-Orientales, Fred Hidalgo connaissait Frédéric Dard, alias San-Antonio, depuis qu’il avait 15 ans. Une Amitié de plusieurs décennies, de multiples rencontres et entrevues qu’il a transformés en copieuse biographie scindée en deux volumes parus chez Balzac, maison d’édition basée à Baixas.

Certaines rencontres façonnent des vies. On en a rarement conscience au moment. Sauf quand c’est le commissaire San-Antonio, héros imaginé par Frédéric Dard et a dominé l’édition française durant des décennies avec des tirages dépassant les 500 000 exemplaires par nouveauté, qui entre par effraction dans la vie du jeune Fred Hidalgo. En 1964, l’adolescent de 15 ans attrape les oreillons. Il doit rester à la maison alité et décide, pour passer le temps, de lire les romans policiers signés San-Antonio récemment achetés à Dreux, ville de la région parisienne où il réside.

Le choc est immédiat. Il tombe en pâmoison : « Il y a la rigolade évidemment, ce côté iconoclaste, mais surtout le style, se remémore-t-il. Il s’adressait au lecteur, il lui parlait, lui faisait des confidences, le traitait de tous les noms parfois. Cela explique le titre du premier volume de la biographie : ‘San-Antonio poussa la porte et Frédéric Dard entra’. San-Antonio a poussé la porte de mes petites cellules grises et m’a fait découvrir un univers. » Immédiatement, Fred achète d’autres San-Antonio et décide d’écrire tout le bien qu’il pense de ses romans à son auteur. Une longue lettre envoyée au Fleuve Noir, l’éditeur, comme une bouteille jetée à la mer.

Le petit San-Antonien 

Quelques mois plus tard, San-Antonio répond au jeune lecteur enthousiaste. Qui l’invite immédiatement chez lui. Voilà comment, véritablement, Frédéric Dard, en juin 1965, a poussé la porte de la maison des Hidalgo et a fait une entrée tonitruante dans la vie du jeune lycéen, jusqu’en 2000, année de la mort de l’écrivain.

Pour prolonger ce début d’amitié et surtout porter la bonne parole sanantonienne partout en France et dans le monde, Fred Hidalgo se bombarde président du club San-Antonio. Il se lance, sans la moindre expérience dans la rédaction avec quelques copains du fanzine Le petit San-Antonien. Premières expériences de journalisme pour Fred Hidalgo qui à l’occasion découvrait sa voie professionnelle.

La suite de cette belle histoire d’amitié a donné la matière à Fred Hidalgo pour se lancer dans la rédaction de cette biographie de Frédéric Dard. Il a éprouvé beaucoup de plaisir mais aussi un peu de nostalgie à se replonger dans ces archives. Car « il me manque beaucoup », avoue-t-il les yeux un peu dans le vague.

Reste l’œuvre et une vie intense, traversée par les succès, le renouvellement et la fidélité. Une fois le manuscrit achevé dans la quiétude de Corbère-les-Cabanes, Fred Hidalgo voit ses plans chamboulés. Le covid stoppe tout. L’éditeur autorise l’auteur à peaufiner le texte. Résultat d’un livre de 400 pages, il se retrouve à la tête de deux volumes de près de 350 pages chacun. Une somme qui fait hésiter le commanditaire, d’autant que l’année du centenaire de Frédéric Dard (2021), est passée.

Première version collector 

Alors Fred Hidalgo se lance dans le financement participatif pour éditer une version collector de l’ouvrage. Une première édition remarquée par Robert Triquère de Balzac éditions. Voilà comment les deux gros volumes du roman de San-Antonio se retrouvent dans toutes les librairies de la région pour cette fin d’année. Et toutes les plateformes de vente en ligne également.

L’ouvrage, très complet, raconte en fil rouge cette amitié entre Fred Hidalgo et son romancier préféré mais s’attache aussi à raconter la vie d’avant, quand Frédéric Dard vivote à Lyon et que le premier San-Antonio se vend péniblement à quelques centaines d’exemplaires.

La suite ce sont des centaines de romans, dans tous les genres. Les San-Antonio bien évidemment, qui lui assurent la postérité, mais aussi des romans plus sombres et classiques signés Frédéric Dard. Comme Faut-il tuer les petits garçons qui ont les mains sur les hanches ? considéré par Fred Hidalgo comme son chef-d’œuvre.

« Le roman de San-Antonio » (tomes 1 et 2), Balzac Éditeur, 25 € chaque volume

samedi 3 décembre 2022

De choses et d’autres - Le capitalisme est-il un jeu ?

Grosse polémique ce week-end autour du jeu de société Antifa retiré de la vente par la FNAC un peu trop vite. Jeu de cartes dérivé d’un outil de formation ludique du collectif antifasciste La Horde pendant plus de deux ans, Antifa a été simplifié et édité à 4 000 exemplaires.

En vente depuis un an, le scandale provoqué par le député d’extrême droite Grégoire de Fournas (qui est décidément de tous les mauvais coups), est parti d’allégations mensongères. L’élu RN y affirmait que le jeu incitait les joueurs à « tabasser un militant de droite » ou « lancer un cocktail molotov sur les CRS ». Les rares qui ont pu se procurer le jeu ont vite éventé l’invention grossière de celui qui voulait renvoyer en Afrique un député de gauche de couleur. Rares, car en deux jours, tous les exemplaires ont été vendus.

Finalement, une excellente publicité pour le collectif La Horde. Preuve que le capitalisme peut parfois se mordre la queue. En dénigrant ce qu’il considère comme un ennemi, le député RN a favorisé son succès.

Et la FNAC, en retirant le jeu à la va-vite, a récupéré le mauvais rôle de l’enseigne à boycotter pour les fêtes de fin d’année.

Pourtant, politique et jeu de société ont toujours fait bon ménage. La bonne paye par exemple. Mais le plus fort reste le Monopoly édité à plus de 275 millions d’exemplaires, toujours considéré comme la meilleure apologie du capitalisme sauvage. Le but du jeu est de s’enrichir le plus vite possible et de ruiner ses adversaires. Oui, ruiner, mettre sur la paille, transformer en SDF puis laisser mourir de froid sur le trottoir de la rue de la Paix, beaucoup trop chère pour vous. Un jeu finalement assez violent dans son concept qui mériterait, lui aussi, d’être retiré de la vente.

Billet paru en dernière page de l’Indépendant le mercredi 30 novembre 2022

vendredi 2 décembre 2022

De choses et d’autres - La mort prend son temps

La presse est toujours à la recherche d’informations amusantes pour traiter un jour férié récurrent. Le 1er novembre fait partie de ces fêtes religieuses au cours desquelles le pauvre rédacteur de service, ce jour-là, ne sait plus quoi écrire.

Par chance, il y a toujours des originaux pour lui sauver la mise. Cette année, pour la fameuse fête des morts, le reportage qui a fleuri, un peu partout, avait, en plus, l’avantage d’être dans l’air du temps et de prôner des économies d’énergie. La nouveauté vient de la société Le ciel et la terre.


Des pompes funèbres qui peuvent organiser les obsèques, mais avec une grosse différence. Terminés les corbillards qui roulent au diesel et polluent les vivants (les morts s’en moquent un peu, faut admettre). Pour son dernier déplacement, le cercueil prend place dans une corbicyclette, véhicule hybride avec un peu du vélo et beaucoup du corbillard.

La société, pour illustrer un film montrant un croque-mort sportif pédaler allègrement, explique que certains jours « il faut pouvoir et savoir prendre son temps » La famille suit le cercueil dans les allées du cimetière, « à pied, à bicyclette, en patins à roulettes… »

Le dernier moyen de locomotion n’est certainement pas le meilleur. La tante Gabrielle, 64 ans, mais encore 17 dans sa tête, a effectivement voulu rechausser ses vieux patins pour enterrer Mémé Gertrude. Mais les graviers ont freiné sa progression. Et surtout, un grand écart intempestif l’a propulsée violemment à terre, au grand désespoir de son col du fémur. Les autres participants n’ont pas réussi à éviter l’obstacle provoquant une chute du peloton.

On s’en souviendra longtemps des obsèques de Mémé Gertrude en corbicyclette.

Billet paru en dernière page de l’Indépendant le mercredi 16 novembre 2022

jeudi 1 décembre 2022

De choses et d’autres - Merci Monsieur

Selon plusieurs témoignages recensés sur le net, la pratique serait courante. Pour se faire respecter, une femme doit, parfois, signer certains documents avec un nom… d’homme. La preuve qu’il n’y a pas qu’en Iran qu’être une femme n’est pas toujours aisé.

Dans notre société, moderne et démocratique, mais encore très patriarcale, il y a encore pas mal de chemin à parcourir. Une prestataire de service a trouvé le truc pour, enfin, se faire payer les factures en retard. Car quand elle relance, en son nom propre, rien ne se passe. Alors elle a inventé un certain Jean-Jacques, son assistant, qui s’occupe, spécifiquement, des impayés. Et là, comme par miracle, elle a constaté que le taux de recouvrement augmentait, considérablement. Là où Isabelle est ignorée, Jean-Jacques est craint.

Autre exemple, celui d’une journaliste free-lance. Elle proposait des articles, prêts à être publiés, à différentes rédactions. Peu de réponses. Mais les mêmes papiers, signés par un nom masculin, étaient, tout à coup, pris en considération.

Rien de nouveau, puisque plusieurs journalistes ou autrices, dans le passé, ont pris un pseudonyme masculin pour ouvrir les portes des rédactions ou des maisons d’édition.

Le paradoxe, c’est qu’il existe aussi le contraire à ce petit truc. Un patron s’est inventé, lui aussi, une assistante. Une certaine Pauline, gentille collaboratrice, si utile parfois. Quand il se plante dans une décision ou rate un marché, il la ressort du placard et lui fait endosser toute la responsabilité : « Et voilà, Pauline s’est encore plantée ! » Et comme de bien entendu, ça passe comme une lettre à la Poste.

Billet paru en dernière page de l’Indépendant le mardi 15 novembre 2022

mercredi 30 novembre 2022

BD - Corbeau, le retour

Le corbeau est de retour. Ce sinistre oiseau est l’emblème de la revue Lowreader lancée par Run au Label 619. Pour cette seconde fournée, trois histoires complètes et quelques articles au sommaire. 

Petit Rapace fait découvrir aux lecteurs l’enfer des décharges aux Philippines, Pivwan dessine les jolies chanteuses de K-Pop et Chesnot la nature sauvage du nord canada. 

Avec un point commun : des scènes horribles et sanglantes pour conclure ces récits complets réservés à un public averti.

« Lowreader » (tome 2), Rue de Sèvres - Label 619, 14,90 €

DVD et blu-ray - Joyeuse retraite passe la seconde


Comme le reconnaît Michèle Laroque dans le supplément du DVD Joyeuse retraite 2 (M6 Vidéo), ce ne sont pas les comédiens ou le réalisateur qui a souhaité une suite, mais le public. Plus d’un million d’entrées pour le premier opus mettant en scène le couple Laroque-Lhermitte ont justifié ce chapitre 2 se déroulant entièrement au Portugal. 

Philippe et Marilou, pour leurs 35 ans de mariage, s’offrent une résidence secondaire au Portugal. Ils partent avec leur belle-fille Léa (Constance Labbé) et leurs petits-enfants profiter de ce petit paradis. Mais arrivés sur place, catastrophe, la maison n’est pas terminée. Pour couronner le tout, un âne squatte le jardin (le terrain vague selon Léa). Le ressort comique du film est tenu en grande partie par le cousin Olivier (Nicolas Martinez), grand gaffeur devant l’éternel et source de déboires sans fin. 

On apprécie aussi la belle complicité entre Michèle Laroque et Thierry Lhermitte qui creuse un peu plus la psychologie très égoïste de ces deux grands-parents pas du tout prêts à s’occuper de petits-enfants épuisants. Fabrice Bracq à la réalisation s’offre quelques scènes très abouties (notamment un carambolage au ralenti).

DVD et Blu-ray - "Decision to leave", de l'enquête criminelle à l'amour

Decision to leave (M6 vidéo) le nouveau film de Park Chan-wook, virtuose du cinéma coréen, est une belle et triste romance qui débute par la découverte d’un cadavre. Hae-Joon (Park Hae-il), est chargé de cette enquête de routine. 

Un homme a été retrouvé mort au pied d’une montagne. Il aurait dévissé lors de son ascension. Cet ancien agent de l’immigration est marié avec Sore (Tang Wei), une jeune Chinoise, récemment naturalisée. Le policier, un modèle de professionnalisme, consciencieux, opiniâtre, passant au crible tous les détails de l’enquête, ne peut pas s’empêcher de suspecter la veuve tout en la réconfortant. 

Elle aussi remarque ce policier qui passe ses nuits à son chevet et va se trouver attirée par lui. 

D’une banale intrigue policière, Park Chan-wook transforme Decision to leave en film d’amour ambigu. Au dernier festival de Cannes le réalisateur coréen a remporté le Prix de la mise en scène.

mardi 29 novembre 2022

BD - La Buse, pirate légendaire

Peintre officiel de la Marine belge, Jean-Yves Delitte est un expert des voiliers de la grande époque de la piraterie. Sa nouvelle série a pour personnage principal La Buse, un célèbre pirate ayant écumé l’océan Indien durant des décennies. 


Entre sa base, Libertalia sur la côte malgache et la Réunion (encore île Bourbon à l’époque), il détrousse les navires marchands revenant d’Inde. 

Il accumule un formidable trésor qui fait toujours vibrer quelques passionnés, persuadés qu’une fortune les attend dans une grotte non loin d’une crique. 

« La Buse » (tome 1), Glénat, 14,50 €


Série télé - Reusss : les trois de Sète

Le pari est risqué : tenter de mélanger série télé et comédie musicale. France Télévision a lancé un appel à projets et c’est un projet entièrement tourné à Sète qui a décroché le gros lot. Reusss raconte l’histoire de trois adolescentes (trois sœurs de misère, reusss en verlan) vivant dans un quartier sensible de la ville portuaire héraultaise. Elles ne se ressemblent pas du tout, mais sont fidèles en amitié depuis leur petite enfance. Trois presque femmes qui doivent décider ce qu’elles vont faire d e leur vie. 

Sur ce fond psychologique et social, se greffe une intrigue policière avec l’agression du grand frère de Hanane, l’intello du trio. Le premier épisode la voit très angoissée avant de découvrir les résultats du bac.  La question n’est pas de savoir si elle l’a ou pas mais du niveau de sa mention. Hanane (Inès Ouchaaou) vise des prépas, notamment à Sciences-Po. Avec ce très bien son horizon s’éclaircit, elle va enfin pouvoir quitter le quartier. Première chanson et chorégraphie très réussie. Ambre (Charlie Loiselier) aussi est anxieuse. Elle doit passer une dernière épreuve pour décrocher sa place dans l’école de danse de l’opéra. Poussée par une mère étouffante, elle va réussir et rapidement se poser des questions sur ce choix. La dernière des trois n’attend plus grand-chose de la vie. 

Maïssa (Assa Sylla) a abandonné les études et bosse dans une pizzeria. Elle jongle avec ses horaires décalés pour s’occuper de ses deux petits frères. Leur mère, dépressive, ne quitte plus sa chambre, totalement démissionnaire. Ces trois parcours, parfois un peu caricaturaux, illustrent quand même assez bien les difficultés des jeunes de banlieue pour trouver leur place. Surtout quand on est des filles et issues de l’immigration comme c’est le cas de Hanane (parents maghrébins) et Maïssa (mère africaine). 

Des états d’âme qui n’empêchent pas de tomber amoureuses. Des bluettes qui permettent de rythmer la série de 10 épisodes de 25 minutes de chansons romantiques et bien balancées mélangeant les genres, du rap au rock en passant par la pure variété française. A ce petit jeu, Charlie Boiselier l’emporte largement. Par contre pour ce qui est du jeu, Inès Ouchaaou est une véritable révélation. Mais les trois sont tellement complices que le jury du dernier festival Séries Mania de Lille a décidé de leur remettre conjointement le prix de la meilleure actrice dans une série française. Une récompense largement méritée pour les trois de Sète.