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dimanche 4 décembre 2022

Fred Hidalgo rédige le roman de San-Antonio en deux gros volumes

Installé à Corbère-les-Cabanes dans les Pyrénées-Orientales, Fred Hidalgo connaissait Frédéric Dard, alias San-Antonio, depuis qu’il avait 15 ans. Une Amitié de plusieurs décennies, de multiples rencontres et entrevues qu’il a transformés en copieuse biographie scindée en deux volumes parus chez Balzac, maison d’édition basée à Baixas.

Certaines rencontres façonnent des vies. On en a rarement conscience au moment. Sauf quand c’est le commissaire San-Antonio, héros imaginé par Frédéric Dard et a dominé l’édition française durant des décennies avec des tirages dépassant les 500 000 exemplaires par nouveauté, qui entre par effraction dans la vie du jeune Fred Hidalgo. En 1964, l’adolescent de 15 ans attrape les oreillons. Il doit rester à la maison alité et décide, pour passer le temps, de lire les romans policiers signés San-Antonio récemment achetés à Dreux, ville de la région parisienne où il réside.

Le choc est immédiat. Il tombe en pâmoison : « Il y a la rigolade évidemment, ce côté iconoclaste, mais surtout le style, se remémore-t-il. Il s’adressait au lecteur, il lui parlait, lui faisait des confidences, le traitait de tous les noms parfois. Cela explique le titre du premier volume de la biographie : ‘San-Antonio poussa la porte et Frédéric Dard entra’. San-Antonio a poussé la porte de mes petites cellules grises et m’a fait découvrir un univers. » Immédiatement, Fred achète d’autres San-Antonio et décide d’écrire tout le bien qu’il pense de ses romans à son auteur. Une longue lettre envoyée au Fleuve Noir, l’éditeur, comme une bouteille jetée à la mer.

Le petit San-Antonien 

Quelques mois plus tard, San-Antonio répond au jeune lecteur enthousiaste. Qui l’invite immédiatement chez lui. Voilà comment, véritablement, Frédéric Dard, en juin 1965, a poussé la porte de la maison des Hidalgo et a fait une entrée tonitruante dans la vie du jeune lycéen, jusqu’en 2000, année de la mort de l’écrivain.

Pour prolonger ce début d’amitié et surtout porter la bonne parole sanantonienne partout en France et dans le monde, Fred Hidalgo se bombarde président du club San-Antonio. Il se lance, sans la moindre expérience dans la rédaction avec quelques copains du fanzine Le petit San-Antonien. Premières expériences de journalisme pour Fred Hidalgo qui à l’occasion découvrait sa voie professionnelle.

La suite de cette belle histoire d’amitié a donné la matière à Fred Hidalgo pour se lancer dans la rédaction de cette biographie de Frédéric Dard. Il a éprouvé beaucoup de plaisir mais aussi un peu de nostalgie à se replonger dans ces archives. Car « il me manque beaucoup », avoue-t-il les yeux un peu dans le vague.

Reste l’œuvre et une vie intense, traversée par les succès, le renouvellement et la fidélité. Une fois le manuscrit achevé dans la quiétude de Corbère-les-Cabanes, Fred Hidalgo voit ses plans chamboulés. Le covid stoppe tout. L’éditeur autorise l’auteur à peaufiner le texte. Résultat d’un livre de 400 pages, il se retrouve à la tête de deux volumes de près de 350 pages chacun. Une somme qui fait hésiter le commanditaire, d’autant que l’année du centenaire de Frédéric Dard (2021), est passée.

Première version collector 

Alors Fred Hidalgo se lance dans le financement participatif pour éditer une version collector de l’ouvrage. Une première édition remarquée par Robert Triquère de Balzac éditions. Voilà comment les deux gros volumes du roman de San-Antonio se retrouvent dans toutes les librairies de la région pour cette fin d’année. Et toutes les plateformes de vente en ligne également.

L’ouvrage, très complet, raconte en fil rouge cette amitié entre Fred Hidalgo et son romancier préféré mais s’attache aussi à raconter la vie d’avant, quand Frédéric Dard vivote à Lyon et que le premier San-Antonio se vend péniblement à quelques centaines d’exemplaires.

La suite ce sont des centaines de romans, dans tous les genres. Les San-Antonio bien évidemment, qui lui assurent la postérité, mais aussi des romans plus sombres et classiques signés Frédéric Dard. Comme Faut-il tuer les petits garçons qui ont les mains sur les hanches ? considéré par Fred Hidalgo comme son chef-d’œuvre.

« Le roman de San-Antonio » (tomes 1 et 2), Balzac Éditeur, 25 € chaque volume

dimanche 28 juin 2020

BD - San-Antonio chez les Bretons




Les vieux héros sont toujours verts. Encore plus quand il s’agit de San-Antonio, commissaire et grand séducteur créé par Frédéric Dard. Avec ses acolytes Bérurier et Pinaud, il revit en BD des histoires parues précédemment. Dans le rôle de celui qui ressuscite : Michaël Sanlaville. 


Après le mythique « San-Antonio chez les Gones », il s’attaque à une aventure bretonne du pétillant flic. Muté avec Béru et Pinuche à Ploumac’h Vermoh, bled paumé de la Bretagne extrême. Une mutation sanction, comme leur patron, rétrogradé au poste de sous-préfet. 

Par chance, un meurtre est commis dans le village. San-A est de retour, tremblez voyous et veuves éplorées. Une adaptation fidèle, avec ce qu’il faut de grivoiserie, d’action et de rebondissements. 

« San-Antonio » (tome 2), Casterman, 16 €

mercredi 9 novembre 2011

Biographie - Frédéric Dard, dernière ! Entretiens inédits avec le père de San-Antonio

Plus de 10 ans après la mort de Frédéric Dard, Francis Gillery et François Rivière publient des entretiens inédits avec le père de San-Antonio.

Serial-écrivain ayant des centaines de titres à son actif, Frédéric Dard a longtemps vécu dans l'ombre de son personnage vedette, San-Antonio. Ils sont pourtant nombreux a avoir tenté de casser la carapace et de comprendre l'homme, le romancier, le raconteur d'histoires. En 1995, Francis Gillery et François Rivière se sont longuement entretenus avec Frédéric Dard dans le cadre de la préparation d'un documentaire télévisé. Ce sont ces passages, non retenus dans le montage final, qui sont repris dans ces 200 pages 100 % Dard.

Famille, origines, amours : on en apprend beaucoup en lisant de livre. De ses racines paysannes et lyonnaises, Frédéric Dard conserve surtout cet amour pour sa grand-mère. C'est elle qui lui a donné l'envie de raconter des histoires. Comme quand il a imaginé qu'un avion s'était posé dans un champ près de la ferme. Au début c'est un petit mensonge, puis cela devient une véritable histoire, l'aviateur a même un nom.

 L'écriture, un véritable vice

 De son enfance à Lyon, Frédéric Dard se souvient de la pauvreté de ses parents. Pourtant il est heureux. Et en ces temps difficiles (c'est la seconde guerre mondiale), il trouve du travail dans un journal local. Apprenti journaliste il y rencontrera les premiers personnages qui lui inspireront les Bérurier, Pinaud et autres Félicie. Le jeune homme ne se reconnaît qu'un seul vice ; l'écriture. Il a besoin, chaque jour, de passer plusieurs heures derrière sa table de travail à imaginer des histoires. Plusieurs romans paraîtront grâce à un éditeur lyonnais. Sans grand succès.

 Après la Libération, marié, père de famille, il décide de « monter à Paris » pour réussir. Il se donne six mois. Ce sera effectivement le temps qu'il lui faudra pour convaincre un éditeur, Armand de Caro, le créateur des éditions Fleuve Noir.

 Réussite enivrante

La mode est aux héros américains. Il donnera le nom d'une ville texane à son personnage principal. San-Antonio est né. Une première histoire était parue à Lyon, Armand de Caro veut que Frédéric Dard continue dans la même veine. Mais l'éditeur impose ses conditions : « Il faut une programmation, explique-t-il à Frédéric Dard. Alors vous allez entrer en San-Antonio comme d'autres rentrent en religion et vous allez me pondre des San-Antonio et moi je me charge du reste. » Rapidement les tirages explosent, le commissaire devient une légende, chaque nouvelle aventure est attendue par des milliers de fans. Et Dard de se souvenir de cette époque : « c'était quelque chose de grisant, vraiment de grisant parce que toute réussite est enivrante. » Le succès, la fortune mais le doute aussi, « sincèrement, ça me culpabilisait presque. » Conséquence, une période noire, qu'il évoque entre les lignes, notamment ce jour où il a tenté de se suicider.

 Ensuite il y a eu la Suisse, son nouvel amour (avec la fille de son éditeur), et une sorte d'équilibre avec des romans plus ambitieux venant casser la routine des San-Antonio. Ces entretiens, réalisés 5 ans avant sa disparition, montrent un homme apaisé, conscient de son œuvre, heureux de vivre, enchanté surtout de se souvenir de sa jeunesse simple et gaie dans l'ombre protectrice d'une grand-mère aimante.

« Je me suis raconté des histoires très tôt », propos inédits de Frédéric Dard recueillis par Francis Gillery et François Rivière, Fleuve Noir,13 € 

vendredi 30 septembre 2011

L'hôpital et ses monstres : le nouveau San-Antonio de Patrice Dard décape les zygomatiques

Quand San-Antonio met les pieds dans un hôpital, le trou de la sécu n'a plus qu'à compter ses abattis car les malades se transforment en morts !


Qu'on le veuille ou non, les nouvelles aventures de San-Antonio rédigées par Patrice Dard, n'ont rien perdu de leur truculence ni de leur régularité. « Comme sur des roulettes » est le second titre à paraître cette année chez Fayard. Le héros, toujours le cœur sur la main, décide d'accompagner sa maman au chevet de Bérurier. L'adjoint au sexe gigantesque est terrassé par une crise de goutte. Rien d'étonnant quand on sait les quantités de cochonnailles et de picrate ingurgitées par l'ogre du quai des Orfèvres. L'intrigue est lancée par la curiosité maladive de San-Antonio. En descendant du bus et en jetant ses tickets, il remarque dans la poubelle un cahier rouge. Et le subtilise. Dans la minute qui suit, un infirmier farfouille dans la poubelle et retourne dans l'hôpital, soucieux. Sentant l'embrouille, le flic le plus célèbre de France le suit et débarque dans le service RTT. N'allez pas croire que des salariés français tombent malade de devoir moins travailler (San-Antonio c'est de la fiction mais faut quand même pas exagérer). RTT veut dire « recherche en thérapie tératologique ». Et des monstres, s'il n'y en a pas beaucoup dans ce petit service, ils sont particulièrement difformes et effrayants.

C'est pas pour me vanter, mais des histoires tordues j'en ai lues des centaines dans ma carrière de petit chroniqueur littéraire provincial. Et cette fois encore, Patrice Dard parvient à m'étonner. L'infirmier est retrouvé mort, enfermé dans un placard, un bistouri dans le ventre. Le cahier rouge semble être la cause de ce décès, mais San-A se le réserve pour un peu plus tard, comme un atout planqué dans la manche. Après, les péripéties s'enchaînent avec maestria : action, poursuite, baston, rebondissements. Manque les traditionnelles dites « de cul ». Exactement elles sont dissociées du récit. L'auteur explique dans un avertissement que « suite à la misérable embrouille DSQ (ce Strauss qui préfère le frotti-frotta à la valse), j'ai décidé de rester prudent vis-à-vis du sexe. J'ai jugé préférable de rassembler toutes les séquences olé olé à la fin de l'ouvrage, dans un chapitre spécial que tu pourras arracher afin de les soustraire à la lecture de tes bambins déjà presque aussi concupiscents que toi. »

Lourdes et ses miraculés

On aura beau dire, un polar français sans scène se déroulant en province c'est un peu comme un roman de Katherine Pancol sans répétition : ça manque de crédibilité. L'équipe de San-Antonio, les méchants et quelques monstres en goguette vont faire un tour à Lourdes, cité de Bernadette et des marchands du temple, chassés en leur temps de Jérusalem par un certain Jésus. La vision de cette débauche de religion nous fait un peu penser aux scènes du « Miraculé », superbe film (un pléonasme de plus...) de Jean-Pierre Mocky. Et ça file un peu le bourdon au commissaire qui est beaucoup plus philosophe depuis sa reprise en mains par le fiston Dard.

« Si on réfléchit bien, il faudrait arrêter de réfléchir pour être heureux. Moi ce qui me gangrène la vie, ce sont mes idées, mes pensées, mes envies, mes dégoûts. Tout ce qui agite mon esprit sans jamais l'apaiser. (…) J'aspire au froid de mes sentiments, à la rigidité cadavérique de mes sensations, à la paix de la viande, laquelle passe toujours, hélas, par l'extinction des feux de l'âme. » Il est triste San-Antonio, voire dépressif ? Non, simplement un peu fatigué après un peu plus de 200 romans menés tambour battant. Mais ce bref séjour à l'hôpital devrait lui redonner un peu de vitalité.

« Comme sur des roulettes », Patrice Dard, Fayard, 6,90 € 

mardi 19 avril 2011

polar - Deux p'tites tours et puis s'en vont


San-Antonio est de retour, de nouveau en format poche, comme au plus beau temps, quand Frédéric Dard proposait trois romans par an au Fleuve Noir. 

Cette fois ce sont les éditions Fayard qui publient les nouvelles aventures dues à la plume du fils, Patrice. « Deux p'tites tours et puis s'en vont » aborde un sujet d'actualité brûlant : le terrorisme islamique. La menace plane sur la France et pour tenter de déjouer un attentat en préparation, notre sémillant héros se rend aux USA. 

Il a dans ses bagages Bérurier, incognito grâce à un passeport belge. Cela donne quelques dialogues surréalistes, moitié argot, moitié englishe. 

Patrice Dard fait voler en éclat toute idée de politiquement correct. Un défouloir idéal pour les dépressifs et qui devrait être remboursé par la sécu ! (Fayard, 6,90 €) 

lundi 14 juin 2010

San-Antonio : un monument de la littérature française

Une intégrale dans la collection Bouquins, une biographie en poche, des romans réédités chez Fleuve Noir : San-Antonio est toujours dans le coup.


Mort le 6 juin 2000, Frédéric Dard n'en finit plus de conquérir de nouveaux lecteurs. Son héros, le commissaire San-Antonio, est toujours aussi présent dans les bacs des libraires. Si les éditions Fleuve Noir poursuivent la réédition (avec des couvertures inédites de Boucq) de tous les titres parus depuis 1949, vous aurez également la possibilité de découvrir les 175 épisodes de cette saga, policière et lubrique, dans la collection Bouquins de Robert Laffont. Une édition « publiée selon son texte original et pour la première fois dans sa chronologie » explique dans sa préface François Rivière, le coordonnateur de ce vaste projet éditorial. Le premier recueil, reprenant les débuts du commissaire le plus célèbre de France, est composé des titres suivants : Réglez-lui son compte, Laissez tomber la fille, Les souris ont la peau tendre, Mes hommages à la donzelle, Du plomb dans les tripes, Des dragées sans baptême, Des clients pour la morgue, Descendez à la prochaine, et Passez-moi la Joconde. Un pavé de 1 200 pages à savourer sans tarder, même si tous les ingrédients du monde « sanantoniesque » ne sont pas encore présents.

Incontournable Bérurier

A la fin des années 40, Frédéric Dard est déjà un écrivain très productif. Il multiplie les romans policiers, psychologiques, grivois... Il réside à Lyon et doit faire vivre sa famille de sa plume. En 49, la première aventure ayant San-Antonio pour héros paraît chez l'éditeur lyonnais Granger. Sans aucun succès. Mais le personnage aura une seconde chance quand Frédéric Dard est contacté par une jeune maison d'édition, le Fleuve Noir, désireuse de lancer des héros récurrents sur le modèle du Saint ou de OSS 117. Là aussi le succès mettra du temps à venir. Une genèse racontée brillamment par François Rivière.

C'est dans le courant des années 50, alors que cinq à six aventures de San-Antonio paraissent chaque année, que le public s'enthousiasme pour ces récits débridés, aux intrigues parfaitement ciselées et aux personnages de plus en plus truculents. San-Antonio semble le plus sortable du lot (si l'on excepte Félicie, la maman parfaite) face à Bérurier, Pinaud ou Berthe. Des personnages que l'on retrouve en partie dès dans le second tome de cette intégrale. Après une première salve en mai, les tomes 3 et 4 viennent de paraître cette semaine, toujours au prix de 28 euros le volume.

Deux romans à savourer

Le dixième anniversaire de la disparition de Frédéric Dard est également l'occasion pour le Fleuve Noir de reprendre les titres qui ont participé au succès phénoménal de San-Antonio. En grand format, savourez le truculent « L'histoire de France vue par San-Antonio ». Par Bérurier aurait été plus juste. Un roman qui avait dépassé le million d'exemplaires vendus l'année de sa parution, en 1964. Plus grave, mais tout aussi représentatif du talent de Frédéric Dard, « La vieille qui marchait dans la mer », roman paru en 1988. L'auteur explique qu'il s'agit de « l'ouvrage le plus grinçant de ma carrière, un conte de fées noir à vous en flanquer le vertige. » Si vous ne connaissez pas encore San-Antonio, ne manquez pas cette occasion de plonger dans un univers incomparable, une expérience littéraire ultime à déguster comme ces vins anciens qui ont pris du corps avec les années.

jeudi 1 avril 2010

San-Antonio - Neige, boules et bévues

Patrice Dard, pour le 20e titre des nouvelles aventures de San-Antonio, s'essaie au format poche.


Cela fait dix ans que Frédéric Dard a quitté ce monde. Le créateur de San-Antonio et de tout son petit monde (Bérurier, Pinaud, Berthe, Félicie...) est pourtant toujours présent dans le coeur de millions de lecteurs. Ce dixième anniversaire est l'occasion pour les éditions Fleuve Noir de ressusciter quelques romans devenus rares, tout en poursuivant la réédition, avec des couvertures inédites de Boucq, des premières aventures du célèbre commissaire de police, grand tombeur de ces dames. Premières car depuis dix ans, Patrice Dard, le fils de Frédéric, a repris en main la maison San-Antonio pour les éditions Fayard. Il publie en ce mois de mars 2010 la 20e enquête de la nouvelle série. Et pour la première fois, le roman est publié en poche, ce format économique, souvent décrié par les « grands auteurs », mais qui a assuré une popularité inégalée à l'oeuvre de Dard père.

Béru en ski

« Ça sent le sapin » est un roman d'hiver. Il se déroule essentiellement dans une station de sports d'hiver, aux alentours de Noël. Cela donne d'entrée une scène comme les fans en raffolent : Béru et madame sur des skis : « Le Gravos des cimes et sa Baleine des neiges, une grosse bobonne en doudoune d'un vert dégueulis d'épinard. » Le couple n'est pas là pour s'adonner aux joies des sports d'hiver (bien que Berthe ait accepté de prendre, dixit Béru, « des cours de surf avec Frédo, le grand moniteur blond qu'a un regard d'angelot et des biscoteaux de lutteur de foire. Attention, pas un risque-tout, le zigue. Il l'a convoquée dans son studio. »)

Béru est en service commandé. Il était chargé de protéger un certain Pipo, ancien skieur alpin qui pourrait bien être assassiné ce 23 décembre. Il semble être la prochaine victime d'un serial killer ayant déjà à son actif un kayakiste, un alpiniste et un golfeur.

La mission foire lamentablement mais San-Antonio ne lâche pas l'affaire. Il va remuer ciel et terre pour retrouver le tueur et comprendre les motifs de sa folie meurtrière. Au passage il emballera une certaine Dominique Patrault, médecin légiste de son état. Il croisera aussi une ancienne connaissance policière, un malfrat reconverti, une vendeuse de lingerie, une vieille bique mauvaise langue et une avocate fiscaliste. Un défilé savoureux de second rôles faisant tout le sel de ces aventures de San-Antonio.

Reste le meilleur, les interventions de Bérurier, toujours aussi gras du bide, ordurier et obsédé. L'auteur, dans la bouche de San-Antonio, lui rend un long hommage dont voici un extrait : « Écoute-moi bien, Alexandre. Tu incarnes sans doute le personnage le plus répugnant de toute la littérature française. Tu es rustaud, trivial et aussi mal embouché qu'un chiotte à la turque. Chacune de tes phrases est un attentat contre la grammaire. Tu tourmentes le vocabulaire, persécutes la syntaxe, martyrise le subjonctif. (...) Ton haleine ferait avorter une couvée de vautours. Mais je dois humblement reconnaître que tu es un flic hors-pair ! » Patrice Dard a lui aussi compris que les enquêtes de San-Antonio, les intrigues et tout le rituel du polar ne sont que des prétextes pour mettre en scène le personnage ultime : Bérurier. Les second rôles ne sont rien sans les héros. Mais dieu que ces héros seraient fades sans leurs acolytes.

« Ça sent le sapin », San-Antonio, Patrice Dard, Fayard, 6,90 €

vendredi 1 août 2008

Polar - Coup de froid pour San-Antonio

Mission au Québec pour le héros « dardien » chargé de mettre hors d'état de nuire un serial killer, le « Postier », s'attaquant aux blondes.


Le petit monde de San-Antonio, malgré la disparition en 2000 de Frédéric Dard, continue d'évoluer, le fils, Patrice, ayant repris cette petite entreprise littéraire, certainement la plus originale de la création française. Les puristes regretteront l'absence d'une certaine folie, typique de l'écrivain aux centaines de romans. Le fils, s'il a parfaitement saisi les psychologies des principaux protagonistes, ne semble pas encore oser se lancer dans des romans complètement délirants, comme seul Frédéric Dard osait, fort de son succès commercial qui ne s'est jamais démenti. Patrice fait donc encore du San-Antonio classique, presque trop. Mais cela reste quand même une bouffée d'air pur dans une production livresque française parfois triste pour ne pas dire sinistre.

Postier killer

De l'air pur et en l'occurrence très frais puisque cette nouvelle aventure du commissaire, chéri de ses dames, se passe en grande partie au Québec. Les premières pages montrent une équipe en pleine déroute. Pinaud envisage de prendre sa retraite, Jérémie Blanc est retourné en Afrique, de même que Mathias, Toinet, le fils de San-Antonio, s'est mis aux abonnés absents, trop occupé à suivre la grossesse de sa compagne, Amélie. Ne reste que Bérurier, complètement déprimé puisque sa Berthe a décidé de le quitter pour un jeune et vigoureux gigolo. Bref, rien ne va plus dans la maison poulaga.

C'est le moment qu'a choisi le président de la République en personne pour confier à San-Antonio une mission très spéciale. Dans un dialogue d'anthologie où le premier personnage de l'Etat fait les questions et les réponses, il demande à notre valeureux héros, de démasquer et de mettre hors d'état de nuire, le « Postier », serial killer s'attaquant aux jeunes et jolies blondes québécoises. Après leur avoir rasé le pubis et envoyé, par courrier, cette fine toison à des anonymes, il continue son découpage avec d'autres parties du corps qui elles, malheureusement, ne repoussent pas...

Piégés par Matignon

Antoine, avec pour seul renfort Béru, le dernier de la bande, se rend au Québec. Mais rapidement la mission part en eau de boudin. Papiers et bagages volés, ils tombent dans un guet-apens à leur hôtel : accusés de meurtre ils sont obligés de prendre la fuite et d'entrer en clandestinité. Mais ce ne sont pas ces quelques contrariétés qui vont décourager notre duo de choc.

Ils vont se lancer sur les pistes enneigées de la Belle Province, pistant le Postier et tentant de déjouer les pièges d'un service qui serait téléguidé, depuis Paris, par le Premier ministre en personne qui n'aurait trouvé que ce moyen pour tenter de se démarquer de son patron. Quelques scène osées et autres trouvailles du langage fleuri d'Alexandre-Benoît Bérurier donnent au lecteur son minimum syndical de rire. Avec parfois quelques perles de Béru comme cet abyssal « Si j'me sens m'nacé par la mort, j'mettrai fin à mes jours pour me simplifier la vie ! »

« Arrête ton char, Béru ! », Patrice Dard, Fayard, 15 €