Il se considère comme le meilleur dans sa spécialité. Riley Wolfe, cambrioleur de son état, n’est pas modeste. Mais il se trouve qu’il est effectivement le plus grand voleur de tous les temps. C’est ainsi que l’a imaginé Jeff Lindsay, l’auteur de ce polar ingénieux et magistralement mené, malgré une intrigue outrageusement compliquée. Riley, après avoir subtilisé une statue de plusieurs tonnes dans le premier chapitre, voudrait dérober quelque chose d’encore plus spectaculaire. Il va se lancer un défi : subtiliser le plus gros diamant du monde.
Le problème, c’est qu’il est dans un musée à Téhéran, surveillé par les Gardiens de la Révolution. Quand il apprend que le gros caillou va être exposé dans un musée de New York, Riley élabore son plan pour entrer définitivement dans la légende de la cambriole.
On apprécie particulièrement le caractère de ce voleur. Prétentieux, certes, mais il reste humain et a une certaine éthique. Pas étonnant, il vient de très bas, continue de veiller sur sa vieille maman et ne parvient pas à conclure avec la femme qu’il aime. Mais c’est temporaire, car Riley en est sûr, « il y a toujours un moyen. »
« Riley tente l’impossible » de Jeff Lindsay, Série Noire, 20 €
Cela semble si simple et efficace, la vente par correspondance. Un petit clic et le colis arrive chez vous, quelques jours plus tard. Pourtant, derrière ce miracle qui signe l’arrêt de mort de milliers de petits commerces de proximité, se cache aussi une machine à broyer les consciences ouvrières.
Lénaïc Vilain, auteur de BD qui paie de sa personne, est devenu un expert de la mise en situation. Pas toujours voulue. Pour simplement payer son loyer, il doit accepter tous les emplois proposés par Pôle emploi. Même ceux qui l’obligent à aller travailler pour le géant de la vente en ligne. Dans cet album de 128 pages, il raconte son parcours dans ce labyrinthe qu’est un entrepôt où sont mis en boîte les achats de ces millions de Français. Le royaume de l’attitude cool, mais qui oblige les employés à faire des tâches répétitives sans fin. Et les managers ressemblent plus à des gardes-chiourmes qu’à de gentils organisateurs.
Tous les nouveaux (des dizaines chaque semaine) sont en CDD. Seuls les meilleurs seront conservés, avec un CDI à la clé. Les meilleurs ou les plus compatibles avec l’esprit aliénant du géant de la vente en ligne ? La BD de Lénaïc Vilain est un véritable brûlot.
En cette première semaine d’août, si vous êtes en vacances avec des enfants (entre 3 et 6 ans), n’hésitez pas à leur lire la dernière aventure de Palomino, le petit poney imaginé par Michael Escoffier et dont les albums sont illustrés par Matthieu Maudet. Bonnes vacances, Palomino, est parfaitement d’actualité.
Le jeune poney va donc passer quelques jours au bord de la mer en compagnie de ses parents. Il ne peut malheureusement pas emmener sa meilleure amie, la petite fille Scarlett. En chemin, la voiture fait un drôle de bruit. Cela vient du coffre. Surprise, Scarlett s’est cachée dans la valise de son copain.
Les deux amis pourront donc s’amuser ensemble sur la plage. Mais attention, les dangers sont nombreux. Notamment la marée qui bloque les deux petits sur des rochers. Comment faire pour rejoindre la terre ferme ?
Un album simple et amusant, illustré dans un style très lisible pour permettre aux apprentis lecteurs de bien suivre les péripéties des deux héros.
« Bonnes vacances, Palomino », École des Loisirs, 12,50 €
Ils semblent faire une petite fixette sur les robots. Ou, du moins, ils les inspirent. Les Béka, couple de scénaristes composé du Toulousain Bertand Escaich et de la Catalane Caroline Roque, après Cœurs de ferraille, proposent une nouvelle BD ayant un robot pour vedette. A-Lan, dessiné par Thomas Labourot, est au service de Nao et Emoji. Un robot, deux humains et une société futuriste où les intelligences artificielles pourraient dominer le monde, mais ce sont toujours les Humains qui ont le pouvoir.
Nao et Emoji, deux adolescents, ont en commun de ne pas supporter de vivre en société. La première, élevée par une androïde qui se considère comme sa mère, n’a jamais quitté sa maison. Emoji est le premier humain qu’elle rencontre. Un étudiant qui ne supporte pas la foule. Exactement, il perd ses moyens en présence de trois personnes et plus. Dans ce futur où le virtuel est omniprésent, l’intrigue se déroule à deux niveaux. Dans le vrai monde, par robots interposés et dans le métavers où les humains s’écharpent sous forme d’avatars.
De la SF un peu compliquée pour les plus anciens, mais qui passionnera les adolescents.
Découvertes en mars dernier dans leur première aventure, Amour et vieilles dentelles, les Panthères grises sont déjà de retour pour leur deuxième enquête. Ces Panthères ce sont quatre vieilles dames inventées par Williams Crépin qui se piquent de résoudre des énigmes policières. Attention, si vous êtes amateur des romans de Miss Marple, passez votre chemin, car ces mamies ne sont pas très sortables.
Alice est en pleine dépression. Un chagrin d’amour. Pourtant cette veuve active n’a pas tendance à se laisser aller. Mais cette déconvenue semble être celle de trop. Alors ses copines décident de mettre un peu de paillettes dans sa vie. Pour son anniversaire, elles débarquent dans le petit pavillon de banlieue avec un strip-teaseur. Grosse fiesta à laquelle se joint Chloé, la nouvelle voisine d’Alice.
Une très jeune femme, qui semble battue par son compagnon. Une affaire pour les Panthères ? Pour la police aussi car le couple est soupçonné de préparer un braquage. Voilà comment deux flics vont s’installer chez Alice pour surveiller les suspects tout en supportant les blagues et récriminations des vieilles harpies. On rit beaucoup aux outrances de ces mémés sans gêne.
« Flics au pair » de Williams Crépin, Albin Michel, 15,90 €
Si vous n’avez pas envie de vous entasser avec les milliers de touristes qui s’agglutinent sur les plages de la région pour ce début août tant redoutée par les agoraphobes. Si même la présence de quelques vaches ou brebis dans les estives des montagnes désertes vous perturbent il ne vous reste plus qu’une solution : partir en vacances sur Mars. Compliqué si l’on n’a pas la fortune d’Elon Musk. Mais pour moins de 20 euros, vous pouvez découvrir les charmes cachés de la planète rouge en vous plongeant dans les 290 pages du numéro 3 de la nouvelle formule de Métal Hurlant.
Que des histoires originales pour cette livraison, avec pour thème, donc, Mars et ses attraits touristiques. Coordonné par Jerry Frissen, le contenu de la revue offre quelques belles surprises comme le retour à la BD de Marc Caro, la découverte de deux signatures féminines talentueuses (Virginie Augustin et Aimée de Jongh).
Seul bémol, c’est beau et intelligent mais manque d’audace et d’originalité, la marque de fabrique du Métal première génération. Exceptée la fresque de Jean Dalin intitulée : A la recherche du Mob.
Un requin sème la panique sur une plage du Sud-Ouest, mais les gendarmes veillent. Cette réalisation des frères Boukherma oscille entre comédie et série Z.
Les habitants et touristes de La Pointe, station balnéaire du Sud-Ouest de la France (sorte de mélange d’Arcachon et de Capbreton), l’été venu, aiment se planter le cul dans le sable à regarder. C’est du moins ce que nous apprend le narrateur (Ludovic Torrent, déjà vu dans Teddy) de L’année du requin, film des frères Boukherma. Ces derniers n’ont pas posé leur cul sur le sable mais entre deux chaises. Ils n’ont pas su choisir entre la pure comédie et le film d’horreur classique avec action et attaque de requin. Le spectateur se retrouve donc face à un objet hybride, allant du pire des films de gendarmes quand ils se ridiculisaient à Saint-Tropez au presque plus risible long-métrage de série Z avec requin en carton-pâte.
Pourtant, ils sont prometteurs ces frères. Ils ont de l’idée et on sent bien qu’ils ont beaucoup regardé de chefs-d’œuvre avant de se lancer. Le résultat est encore très bancal, mais à n’en pas douter, ils trouveront leur voie avec le temps
A quelques jours de la retraite
Tout commence par la canicule. Au moins, ça ne nous changera pas de notre quotidien. Maja Bordenave (Marina Foïs), gendarme à 4 jours de la retraite, s’ennuie ferme. Mais en secourant deux touristes allemands coincés sur un banc de sable, elle voit passer à un mètre de son hors-bord un requin de cinq mètres. Pour elle, il faut fermer les plages, interdire la baignade et se lancer à la chasse au squale. Sauf que tout le monde lui rit au nez. Il n’y a pas de requins dans la région. Jusqu’à la découverte des restes d’un paddliste (il l’a bien mérité !).
Maja va en faire un combat personnel, jurant à son naïf de mari (Kad Mérad) qu’elle allait capturer le mangeur d’hommes avant son pot de départ. La première partie est clairement comique avec un Jean-Pascal Zadi un peu mieux exploité, pour une fois. La suite se veut dramatique, elle n’est souvent que pathétique.
À l’arrivée, plus qu’une galéjade sudiste ou un remake du pauvre Jaws de Spielberg, on a l’impression de voir un film de Jean-Pierre Mocky. La réalisation est parfois bordélique, les dialogues bourrés de références à l’actualité et nombre de comédiens ont des tronches, comme le génial réalisateur du Miraculé aimait en truffer ses créations. Genre Ludovic Torrent, pur Cérétan, arrivé sur Teddy presque par erreur et qui décroche un joli petit rôle dans L’année du requin.
Elle entend les sons en retard. L'héroïne de ce film espagnol voit sa vie bouleversée par une maladie rare.
Exigeante, experte, professionnelle. La meilleure dans son domaine. C. (Marta Nieto) est ingénieure du son dans un studio espagnol. Elle travaille à la synchronisation finale d’un film. Elle rajoute quelques bruitages, affine les tonalités des dialogues. Une femme active par excellence, mais remplie de failles, personnage principal de En décalage, film ténébreux et parfois angoissant de Juanjo Giménez Peña.
Récemment séparée de son compagnon, C. passe beaucoup de temps à son travail. Au point que parfois elle préfère dormir dans la salle de travail au lieu de rentrer dans son appartement. Le surmenage la guette. La dépression aussi. Est-ce cette conjonction de situations conflictuelles qui lui provoque ce dysfonctionnement de l’audition ? Alors qu’elle réécoute le montage son final du film, elle constate qu’un léger décalage existe entre image et son. Dans un premier temps, elle se persuade que c’est un défaut dans le logiciel. Mais, rapidement, elle constate que c’est elle qui perçoit les sons avec quelques secondes de retard. Une durée qui va en s’amplifiant. Incapable de travailler, elle se retrouve en situation très compliquée, virée de son appartement et de son travail.
Obligée de retourner vivre chez sa mère, retraitée, C. replonge dans son enfance, quand elle avait de gros problèmes d’élocution et que son père la faisait travailler en l’enregistrant. Cette maladie du décalage est-elle une réminiscence de ces difficultés enfantines . A moins qu’elle n’ait une origine génétique ?
Le talent de Marta Nieto
Ce film, entre thriller, étude psychologique avec un soupçon de fantastique (le décalage devient si grand, qu’elle peut entendre des voix dans des pièces longtemps après le dialogue) est un rôle en or pour Marta Nieto. Déjà encensée pour sa composition dans Madre de Rodrigo Sorogoyen, elle confirme sa force et sa présence dans cette histoire où elle doit beaucoup s’exprimer sans parler. L’émotion est très vite omniprésente : son désespoir de ne plus pouvoir travailler, son inquiétude de découvrir les secrets de famille, sa crainte de l’amour de son collègue Ivan (Miki Esparbé). Un sans faute pour cette comédienne d’exception.
Les Beka et Munuera continuent leur excellente collaboration avec cette nouvelle série de science-fiction pour adolescents. Ils ont imaginé un monde où les robots seraient devenus les esclaves des humains.
Pour comprendre les ressorts de cet univers, on découvre la relation fusionnelle entre jeune Iséa et sa nounou de fer, Debry. Cette dernière, très attentionnée, joue le rôle de maman.
La véritable génitrice d’Iséa, jalouse, décide de se débarrasser de Débry. Iséa va fuguer pour tenter de retrouver Debry qui aurait trouvé refuge dans une ville fantasmagorique où humains et robots vivent libres et égaux. Une très belle histoire d’amour et de sacrifice avec en fond la trame de Cyrano de Bergerac.
Au XIXe siècle, l’Inde, vaste sous-continent aux multiples divinités, est en train de tomber sous la coupe des colons anglais. Ces derniers, pour asseoir leur domination, interdisent de vénérer ces Dieux et Déesses ancestraux. Alors, la résistance s’organise, car c’est la survie du pays qui est en jeu.
Arjuna, jeune mercenaire locale, préfère aider l’occupant. Elle monnaye sa dextérité à l’épée pour tuer les dernières divinités indiennes comme Kali ou Hanuman, le Dieu-Singe. Au même moment, la fille du gouverneur, blonde délurée aimant se dévergonder dans les bas-fonds de Bombay, se retrouve enceinte. Elle porterait en elle la nouvelle forme humaine de Ravana, le dieu qui veut répandre la destruction sur terre. Résultat les autres dieux et les Anglais la pourchassent.
Elle a la chance d’être protégée par Arjuna (grassement payée par le père de la jeune femme) et un pirate sans foi ni loi.
Beaucoup d’aventures, de combats et de décors merveilleux, dans ce roman graphique grand format, écrit par Mathieu Mariolle, dessiné par Laurence Baldetti et mis en couleur par Nicolas Vial.