vendredi 11 décembre 2015

DE CHOSES ET D'AUTRES : Tournez bourré


Après le "Roulez bourré" chanson parodique du groupe Au bonheur des dames, une bande de cinéastes américains frappe encore plus fort et invente le concept du "Tournez bourré". Partant du constat que souvent les créateurs usent de l'alcool pour débrider leur imagination et se désinhiber, des petits rigolos se sont lancés dans la réalisation de courts métrages où tous les acteurs jouent ivres morts.
De Star Drunk à Med Drunk en passant par Love Drunk, ils passent tous les genres à la moulinette du "3 grammes dans le sang". Le résultat est hallucinant. Même en version originale, on capte immédiatement la prononciation chuintante, les paupières lourdes, le regard vague et la démarche titubante. Quand un super-héros en joli justaucorps fluo débite des sentences définitives en trébuchant sur les mots de plus de trois syllabes, cela devient un pur bonheur.
La série "Urgences" en version drunk collerait peut-être plus à la réalité que l'originale tant il faut une bonne dose de "remontant" pour supporter la pression d'un métier harassant. Le meilleur reste la parodie du "Tournez manège" US. Le présentateur est saoul, la candidate aussi bête qu'ivrogne. Comme ses trois prétendants. On préfère ne pas imaginer leur descendance. Et pour ceux qui doutent de la réalité de l'expérience, visionnez aussi les coulisses du tournage. On y découvre les acteurs se "préparer" à grand renfort de longues rasades.
Par contre plaignons les techniciens : avant d'avoir une scène exploitable, ils supportent des heures de bégaiements, erreurs, oublis de texte sans compter les départs précipités aux toilettes et les comas éthyliques.

jeudi 10 décembre 2015

Cinéma : "Back home", vies fantômes


Comment continuer à vivre une fois que le pilier d'une famille disparaît ? Cette interrogation est au centre du film de Joachim Trier, avec Isabelle Huppert en vedette.



Photographe de guerre, Isabelle Reed (Isabelle Huppert), depuis des années, est souvent en reportage sur les points les plus dangereux de la planète. De longues absences au cours desquelles sa famille continue de vivre comme si de rien n'était. Ses deux garçons, Jonah (Jesse Eisenberg) et Conrad (Devin Druid), vont au lycée, s'amusent avec leurs copains sous la responsabilité de leur père Gene (Gabriel Byrne), professeur qui a fait un trait sur sa carrière d'acteur pour permettre à sa femme de vivre pleinement sa passion professionnelle. Au début du film, Gene est dans l'agence de presse qui employait sa femme pour préparer une exposition hommage. Isabelle, après des années à risquer sa vie au milieu des bombes, parfois blessée, avait enfin décidé de ne plus "partir". Un retour à la maison qu'elle a voulu définitif. Peu de temps après, elle se tue dans un accident de la circulation, à quelques kilomètres de sa maison. Une version officielle loin de la vérité. Isabelle s'est suicidée, lasse de cette non-vie. Comme si elle avait l'impression d'être de trop dans sa famille, qu'ils pouvaient vivre exactement de la même façon que quand elle n'était pas là.
Les fils et la mère
Ce postulat expliqué en début de film par le réalisateur norvégien Joachim Trier, est porté par des acteurs au jeu d'une rare intensité. Isabelle Huppert, en mère incomprise et photographe de talent, est celle qui doit jouer avec le plus d'intériorité. Au cours de flashbacks ou de rêves, elle semble comme absente, tout en étant présente. Un fantôme avant et après sa mort.
Gabriel Byrne, le mari, n'est pas le gentil fonctionnaire qu'il donne parfois l'impression d'être. Il a longtemps harcelé sa femme pour qu'elle cesse ses missions trop dangereuses. Pas par peur de la perdre (comme si leur amour s'était étiolé inexorablement), mais pour protéger leurs fils de cette mort redoutée qui pourrait les détruire.
Finalement, le drame a lieu et l'essentiel du film, très intimiste pour ne pas dire introspectif, raconte les parcours des fils, Jonah et Conrad. Le premier, brillant universitaire, sera professeur comme son père. Marié, il vient d'être papa d'une petite fille. Il bascule de l'autre côté de la famille au moment même où la préparation de l'exposition sur sa mère le pousse à replonger dans ses jeunes années. Il se remet dramatiquement en question, se découvrant plus complexe qu'il ne le croyait.
Quant à Conrad, il est l'archétype du lycéen renfermé sur lui. Brillant, intelligent, il a un gros problème avec la réalité. En permanence un casque sur les oreilles, mais sans la moindre musique, il s'écoute respirer, observe son entourage, tombe amoureux d'une cheerleader aussi idiote que mignonne, passe ses nuits à jouer en ligne à des jeux vidéos où, sous l'apparence d'un elfe ou d'un barbare, il trucide tout ce qui bouge. Incompris, tant par son père que ses professeurs. La puissance du film est là, dans cette description d'une cellule familiale bancale, en pleine décomposition en raison de l'omniprésence du fantôme de la mère absente. On craint parfois le pire, mais c'est un joli message d'espoir qui est délivré au final. La vie sera toujours plus forte que la mort, même quand elle s'allie avec les fantômes du passé. Isabelle (Isabelle Huppert) s'éloigne inexorablement de son mari Gene (Gabriel Byrne). Encore plus quand elle décide de ne plus partir en reportage.

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Jeunesse introvertie

Joachim Trier, après des films réalisés dans son pays d'origine et des succès d'estime dans les festivals (notamment à Cannes), passe à la vitesse supérieure. Une coproduction internationale, tournée en grande partie à New York, avec quelques acteurs de premier plan venus de divers horizons. Isabelle Huppert pour la partie française, Jesse Eisenberg en caution du "jeune acteur américain brillant et de séducteur". Mais la véritable révélation du film reste Devin Druid, l'interprète de Conrad, l'adolescent introverti. Il a composé un personnage complexe et torturé, refermé sur lui-même, incapable de communication, comme paralysé par la vie, la vraie. Pour déclarer sa flamme à la jolie Mélanie (Ruby Jerins), il écrit un long texte dans lequel il se dévoile sans pudeur. Mais au lieu de lui remettre en main propre, il le dépose sur le paillasson de l'entrée et s'enfuit en courant dans la rue, souriant, heureux d'avoir osé. Le réalisateur a parfaitement exploité cette pépite en devenir. Il en est pleinement conscient quand il confie "Je suis très fier d'avoir eu la chance de travailler avec Devin Druid avant que son talent ne s'impose à tous". Personne n'en doute et on reverra certainement cet acteur surdoué dans d'autres productions à la mesure de son aura.

DE CHOSES ET D'AUTRES : L'envol du comique


Le pilote d'un avion de la compagnie aérienne indonésienne Lion Air a fait les frais de son humour un peu graveleux. Au départ d'un vol vers Bali, il s'excuse du retard et en guise de dédommagement "offre" aux passagers "une hôtesse de l'air divorcée". Pour encore plus de réalisme, il diffuse des gémissements douteux en provenance du cockpit dans la salle des passagers.
Mauvaise blague qui a conduit la compagnie à suspendre le pilote après les plaintes des passagers. Outre le manque de respect au personnel navigant, plusieurs clients n'ont pas caché leur angoisse à propos de la santé mentale du commandant de bord. D'autant qu'en plein vol, il a également souhaité un bon anniversaire à un membre du personnel. Pilote ou ambianceur ?
La compagnie asiatique n'en est pas à un scandale près. En 2014, son PDG s'attire les foudres des organisations féministes quand il dévoile les nouveaux uniformes des hôtesses. Le moins que l'on puisse dire, c'est que leurs tenues ne les auraient pas entravées. La jupe, ultracourte, couvrait le moins de jambes possible. Et si par malheur elles devaient se pencher, les passagers placés derrière elles jouiraient d'une vue capable de les propulser au 7e ciel sans l'aide du moindre pilote amateur de blagues douteuses. Les hôtesses ont refusé de travailler si court vêtues, mais Lion Air s'est payé, à moindre frais, un joli coup de pub.
La récente péripétie en vol confirme, voire amplifie, une réputation sulfureuse qui, n'en doutons pas, attirera des clients qui fantasment encore sur ce "corps" de métier si particulier.

mercredi 9 décembre 2015

DE CHOSES ET D'AUTRES : "La faute au chat"

Connaissez-vous la parabole du chat ? Simple comme bonjour : vous prenez un chat et vous l'accusez de tous les maux de la terre. Ça marche à tous les coups.
A Pau le week-end dernier, une grosse querelle familiale nécessite l'intervention de plusieurs policiers tant les coups tombent drus. Dans la République des Pyrénées, le journaliste de service chargé des faits-divers raconte : "(...) ce qui n'a pas plu à son beau-frère, qui a illico asséné un coup au père le mettant au tapis. Puis l'oncle très énervé a aligné une gifle à sa sœur qui tentait de s'interposer. Et il a même un peu bousculé sa propre mère. Voyant le spectacle, l'hôte des lieux est intervenue : la jeune femme a pris une bouteille et l'a cassée sur la tête de son oncle."
Les policiers séparent tout ce beau monde et s'enquièrent de la cause de ce déchaînement de violence. "C'est la faute au chat", répondent-ils tous en cœur. En plein repas de famille, le chat de la maison monte sur la table. Le père n'apprécie pas et le chasse vigoureusement. Premier mouvement de la future bagarre générale. Et comme tout est de la faute du chat, personne n'a porté plainte...
Donnez un chat à n'importe qui, il trouvera le moyen de lui faire endosser ses pires turpitudes. Vous n'êtes pas allé voter dimanche ? "Je cherchais mon chat qui s'est échappé." Vous avez voté FN : "Parce que leur sigle me fait penser au mot FéliN."
Cette chronique n'a ni queue ni tête ? Si. Cherchez bien. Vous trouverez au moins la queue d'un chat.

En bonus, une vidéo de chats vs concombres.

Une compilation de Chats ayant une Peur... par foozine

mardi 8 décembre 2015

DE CHOSES ET D'AUTRES : Le calendrier d'avant

Plus que 25 jours. 25 jours à attendre, à patienter comme quand on découvre avec gourmandise les chocolats du calendrier de l'Avent. Mais sans plaisir cette fois. 25 jours encore à subir cette satanée année 2015.
Pour la première fois de ma vie, j'avoue qu'il me tarde que le 1er janvier arrive. Vaine illusion certainement, mais tellement encourageante pour continuer. Continuer à croire en un monde meilleur, un avenir radieux, paisible. 25 jours pendant lesquels j'ai l'impression qu'il va me falloir ressasser encore et toujours les événements dramatiques de ces 12 derniers mois et tenter de les transformer en une résilience optimiste.
Première case : panser les plaies du 7 janvier. Malgré le poster dessiné par Cabu placardé dans l'escalier de la maison depuis des années.
Deuxième étape : abstraire le 9 janvier. Même quand je croque un succulent pain azyme au petit-déjeuner. Ensuite, tenter de guérir du 13 novembre. Encore plus délicat. Comment ne pas y songer quand je prends un verre en terrasse ou que j'écoute un morceau de rock. 2015 n'en finit pas de hanter mon esprit. Pourtant, comme des millions de Français, j'aimerais tant que dans 25 jours toute cette noirceur représente les ultimes réminiscences d'un mauvais cauchemar.
Je le crains malheureusement, nous n'en avons pas encore totalement terminé. Pas sur le front des attentats (quoique), mais des dates maudites. Si après le carnage du 13 novembre, les Français propulsent le FN au pouvoir régional le 13 décembre, alors là, définitivement, on pourra classer 2015 comme la pire année de ce siècle encore en devenir.

lundi 7 décembre 2015

BD : Fille à baba


Ellen Forney poursuit son autobiographie en bande dessinée. Exactement, le lecteur français peut enfin lire le premier tome de ses souvenirs. Après le succès de « Une case en moins » où elle racontait sa maladie (diagnostiquée bipolaire), voici la réédition de « J'avais 7 ans en 75 », publié en 1999 aux USA. La petite Ellen raconte sa vie de famille peu banale. Ses parents, membres de l'église Unitarienne, pratiquent le camping naturiste et surtout sont de grands fumeurs d'herbe. Cela ne les empêche pas d'être des parents aimant et protecteurs. Pour preuve la réussite d'Ellen dans ce milieu de la création graphique qui l'a toujours fascinée. Avec beaucoup de tendresse et de pudeur, la dessinatrice américaine se souvient de ces fêtes d'Halloween, notamment celle où elle a eu l'autorisation de se déguiser en bourreau, la lecture d'un roman pour grands adolescents, décrivant sans fioritures les premiers émois de l'héroïne, sa hantise qu'un idiot transforme son nom en « forniquer » ou la joie de sa mère de jouer au tennis, juste avec des chaussures aux pieds. Un témoignage passionnant sur le milieu libertaire d'une certaine Amérique.

« J'avais 7 ans en 75 », Delcourt, 16,95 €

dimanche 6 décembre 2015

BD : L'infirmière et les zombies



Un peu comme une série télé, Alice Matheson lorgne sur le succès de Walking Dead. Une histoire de zombies, mais avec deux ingrédients supplémentaires : le milieu hospitalier pour Urgences, avec une héroïne tueuse en série comme Dexter. Sans compte le rythme rapide de parution des albums (un tous les trois mois). Pourtant ce qui n'aurait pu être qu'une mauvaise recette destinée à récolter quelques ventes faciles se révèle être beaucoup plus que la simple opération commerciale. La « faute » à Jean-Luc Istin, le scénariste. Ses personnages ne sont pas trop caricaturaux et son Alice finalement plus mystérieuse que tueuse. Infirmière, totalement dénuée de sentiments, elle ne semble « vivre » qu'en injectant une dose mortelle de somnifère à des patients en fin de vie. Assassin. Mais pas trop. Un secret presque éventé par une autre infirmière, mais elle la mauvaise idée de le faire en pleine épidémie zombie. Cela arrange Alice (les gardes ont tendance à être sensibles de la gâchette) même si voir ses victimes revenir à la vie n'est pas toujours très agréable. Le second tome est dessiné par Radivojevic, excellent dans cette ambiance de mort et de furie.

« Alice Matheson » (tome 2), Soleil, 14,50 €

samedi 5 décembre 2015

BD : Terminus à Antarès



Avouons-le : c'est toujours avec une certaine appréhension que l'on débute la lecture d'un album censé clore un cycle des Mondes d'Aldebaran de Léo. Ce sixième épisode d'Antarès, paru fin août, met un point final aux tribulations de Kim et ses amis sur cette planète. Avant le résumé des titres précédents, l'éditeur a eu la bonne idée de raconter en quatre pages illustrées « Les voyages de Kim ». Une façon de remettre le lecteur dans le bain avant cet ultime galop à la surface d'Antarès. Kim et Alexandra disparaissent dans une navette fantôme. Elles retrouvent la petite fille de Kim et la sœur de Zao. Le contact avec les extraterrestres a enfin lieu. Mais ces derniers sont excessivement prudents. Si l'intrigue donne quelques réponses, on sent que l'auteur a surtout ménagé le suspense pour la suite, le cycle 4, certainement sur Aldebaran. Kim a un nouvel amour, sa fille va rejoindre son père, Mai Lan tombe dans les bras de Marc... Les romances se succèdent et donnent du piment à une série digne des meilleurs feuilletons. On apprécie à ce titre l'arrivée d'une nouvelle forte tête, une certaine Darlène au caractère bien trempé.

« Antarès » (tome 6), Dargaud, 11,99 €

vendredi 4 décembre 2015

BD : Tout est bon dans le cochon


Il faudrait plus exactement dire « Tout est con dans le cochon » pour résumer cette BD de Mo CDM et Pixel Vengeur. Parce qu'ils sont particulièrement ignares les trois héros de ces histoires courtes écrites par l'esprit dérangé de Mo CDM et dessinée par un Pixel Vengeur toujours aussi à l'aise dans le mélange des genres. Chaque récit débute de la même façon : les trois petits cochons dansent la farandole devant la maison de leur mère. Mais cette dernière en a marre et les chasse pour qu'ils fassent leur vie (et au passage qu'elle puisse se consacrer à sa seconde passion après le repassage : la drogue). Alors les trois frères vont, au gré des scénarios, au bordel, à Mururoa, en prison, à Pôle emploi, chez le Père Noël ou dans l'espace. Sans aucune limite dans l'absurde, ces contes revisités vous réconcilieront avec l'humour et le cochon. Car effectivement, on constate avec joie que plus plus c'est con, plus c'est bon...

« Les trois petits cochons reloaded », Fluide Glacial, 12 €

jeudi 3 décembre 2015

BD : Fin du voyage glacé du Transperceneige


Il est des séries qui, une fois terminées, laissent comme un goût d'inachevé. Débutée au début des années 80, la saga du Transperceneige a connu un premier contretemps avec la mort de Jacques Lob, le scénariste. Un premier tome, une histoire laissée longtemps dans le vide, Rochette, le dessinateur, hésitant entre laisser le tout en l'état et la volonté de trouver un digne successeur. Il faudra attendre l'an 2000 pour que la « Sainte Loco » reprenne son périple sans fin. Benjamin Legrand, a imaginé deux tomes supplémentaires pour conduire les naufragés à bon port. Mais 15 ans plus tard, grâce au succès de l'adaptation ciné, le Transperceneige bouge de nouveau dans un énorme et ultime* volume imaginé cette fois par Olivier Bocquet. Sur le point d'abandonner tout espoir, les personnages principaux décident finalement de chercher d'où vient l'énergie qui fait fonctionner cette radio jouant une étrange musique. Ils s'enfonceront au plus profond de la terre, dans un monde presque clément au niveau température, mais guère plus rassurant. On s'éloigne de la surface, des étendues glacées et des routes infinies pour un scénario angoissant, oppressant. Une suite qui vaut surtout pour les planches de Jean-Marc Rochette. En épurant son trait, en simplifiant la mise en page et en jouant beaucoup sur des couleurs dominantes, il signe peut-être son chef-d'œuvre.
« Le Transperceneige, terminus », Casterman, 25 €

* Mais une suite de la fin serait déjà en chantier