dimanche 11 août 2013

BD - Compostelle, chemin mystique


La bande dessinée historique est de nouveau à la mode. Lancée dans les années 80 par les éditions Glénat avec le magazine Vécu comme vecteur, elle a petit à petit disparue des rayonnages des libraires. Mais le formidable potentiel ne pouvait que de nouveau inspirer les scénaristes. Et la BD historique a retrouvé des lettres de noblesse grâce à son sérieux et son travail de vulgarisation. Nouvel exemple avec « Campus Stellae » qui, en quatre tomes, permet de découvrir les quatre plus connus des chemins de Compostelle traversant la France. Le premier chemin, du Puy à Moissac, passe par l'Aveyron. 
Une bonne partie de l'intrigue se déroule, au XIIIe siècle, entre Aubrac, Espalion et Conques. Pierre-Roland Saint-Dizier a imaginé la quête d'un trésor ramené d'une croisade. Pour le trouver, il faut déchiffrer des énigmes écrites dans des coquilles de pèlerins. Les réponses sont à deviner sur des monuments religieux comme le célèbre tympan de Conques. Alternant habilement intrigue et découverte architecturale, cette série séduira le plus grand nombre. Au dessin on retrouve Andréa Mutti, grand professionnel italien dont c'est la première incursion dans la BD historique. Il s'en tire à merveille.

« Campus Stellae » (tome 1), Glénat, 13,90 €


vendredi 9 août 2013

BD - Marcas, flic et maçon


Succès éditorial au Fleuve Noir, les aventures de Marcas, flic et Franc-Maçon a désormais son adaptation en BD. Giacometti et Ravenne supervisent eux-même le scénario qui est prédessiné par Ullcer puis finalisé par Parma. L'efficacité est au rendez-vous pour des péripéties mouvementées. Le second volume de la première enquête voit Marcas fuir face aux tueurs de la société occulte (et nazie) de Thulé. Il sauve sa peau mais sa collègue, Jade, de la DGSE, est capturée. Marcas va donc en faire une affaire personnelle. En plus de l'action pure, il y a toutes les théories qui ont fait le succès des livres de Giacometti et Ravenne, notamment le rituel de l'Ombre qui donne son titre à l'album. Et si la BD ne vous suffit pas, le dernier roman mettant en scène le commissaire Marcas vient de paraître début juin chez Pocket, « Le Temple noir ».

« Marcas » (tome 2), Delcourt, 14,30 €



jeudi 8 août 2013

BD - "Douce France" ou la réécriture de l'Histoire

Quand les témoins directs de certains événements historiques disparaissent, il ne reste plus que quelques vieillards à la mémoire vacillante pour témoigner. Ils oublient. Ou carrément réécrivent l'Histoire. C'est le thème central de ce roman graphique écrit par Simon Rochepeau et dessiné par Lionel Chouin. Christian, le personnage principal de l'album, est conducteur de travaux. Il vient d'être embauché par une multinationale du BTP pour construire un Mémorial de la Résistance. Vitrine du groupe, le bâtiment doit beaucoup aux souvenirs de Raymond Langlade, le chef du Maquis de Saint-Yves, localité où sera construit le Mémorial. Christian, jeune et ambitieux, tombe en admiration pour ce vieil aristocrate, symbole de la France qui s'est levée contre l'oppresseur. Mais entre ce que raconte Raymond et ce qu'il a fait, il y a quelques nuances. Notamment quand il était fonctionnaire pour le gouvernement de Vichy et qu'il planifiait les rafles des Juifs français. On retrouve en filigrane de cette BD l'affaire Bousquet et l'aveuglement d'une certaine jeunesse idéaliste.

« Douce France », Futuropolis, 19 €

mercredi 7 août 2013

Roman - La belle et le bourreau racontés par Didier Decoin


En racontant l'histoire de Ruth Ellis, la dernière femme pendue par la justice anglaise, Didier Decoin va beaucoup plus loin que le simple fait divers.


Un homme. Une femme. Albert Pierrepoint et Ruth Ellis. Le roman de Didier Decoin, inspiré de faits réels, raconte à distance la seule et unique rencontre entre la jeune femme blonde et l'austère patron d'un pub londonien. Ruth croise le chemin d'Albert le 13 juillet 1955. Dans une prison. Quelques minutes plus tard Ruth est morte, pendue par Albert, exécuteur en chef du royaume britannique. Cette fin inéluctable puisque partie intégrante de l'histoire de l'Angleterre, n'est que la conclusion de deux trajectoires magnifiquement racontées par l'écrivain français. Ruth Ellis n'a jamais eu la vie facile. Violée dès son plus jeune âge par un père alcoolique, elle a cru à l'amour d'un beau soldat canadien venu à Londres pour libérer l'Europe du joug nazi. Quand il apprend qu'elle est enceinte, il préfère retourner de l'autre côté de l'Atlantique retrouver femme et enfants officiels... Seule, abandonnée, un bébé sur les bras, en pleine période de rationnement, elle décide de s'appuyer sur la seule chose qui ne l'a jamais trahie : son physique. Elle répond à une petite annonce et met toutes les chances de son côté. « Elle est ce soir particulièrement élégante dans une robe noire au décolleté discrètement souligné de strass, qui rehausse la blondeur de ses cheveux et en particulier la guiche qui boucle sur son front, adorable accroche-cœur qu'elle a fixé avec de l'eau très sucrée. » Elle devient danseuse et entraîneuse dans des clubs louches. Elle est coquette, fière de de sa chevelure d'un blond absolu. En réalité, c'est une simple prostituée qui essaie de survivre dans un monde dominé par les pulsions des mâles.

La bonne longueur de corde
Albert Pierrepoint a pris la succession de son père. Exécuteur. Bourreau. Il pend avec précision. Il fait tout pour que la mort soit quasi instantanée. En ces lendemains de seconde guerre mondiale, il est chargé de pendre les criminels nazis. Il va régulièrement et Allemagne et tue des dizaines de condamnés au cours de journées intenses. Il est froid, sans émotion. Un véritable robot. Sans faille. « En me fondant sur la table officielle établie par le Home Office à partir des calculs de James Berry, lequel avait officié comme exécuteur de 1884 à 1891, je décidai donc de passer au cou d'Irma Grese une corde longue de très précisément deux mètres et 23 centimètres. » Irma Grese a 22 ans. Albert s'en moque.
L'essentiel du roman est consacré à Ruth. Comment après des années et des années de souffrance, elle tombe amoureuse d'un pilote de course sans le sou. Elle se ruine pour lui. Perd son travail. Lui ne s'intéresse qu'à ses bolides. Et à la moindre contrariété bat sa maîtresse. Jusqu'à la faire avorter. Un jour, Ruth en a assez. Manipulée par un prétendant, elle abat son amant au sortir d'un pub.
La dernière partie du roman est d'une force étonnante. Albert s'humanise. Hésite même à se charger de cette exécution. Ruth semble soulagée. Derrière les murs de la prison elle est enfin à l'abri de ces hommes qui, de son père à son dernier amant, ont jouit de son corps avant de l'utiliser comme un vulgaire punching-ball.
Un homme. Une femme. La mort. Une tragédie...
 
« La pendue de Londres » de Didier Decoin, Grasset, 18,90 € (disponible au format poche au Livre de Poche)


BD - Les Aztèques conquérants de Kris et Duhamel


Ukronia est une agence chargée de surveiller le temps. Et surtout du bon déroulement de l'Histoire de l'Humanité. La découverte du voyage dans le temps a donné des idées à certains esprits tordus. Des manipulateurs tentés de modifier le passé. Avec les conséquences irréversibles pour l'avenir. Les brigades du temps sont chargées de veiller au grain. Dans le second tome de cette série de
Kris et Duhamel, on retrouve les deux agents débutants (un blanc-bec orphelin et un solide Écossais) en pleine mission en Amérique centrale. Ils doivent absolument remettre l'Histoire sur de bons rails. L'arrivée de conquistadores ne s'est pas soldée par l'asservissement des Aztèques. Au contraire ce sont ces derniers qui montent une grande armada et vont se lancer à la conquête de l'Europe... Une mise en perspective de la folie du pouvoir, avec une bonne dose d'humour. Duhamel dessine des milliers de guerriers en armes. Sans compter les temples, forêts vierges et autres galions. Le travail fourni pour boucler ces 46 pages représente l'équivalent de 77 albums de Bastien Vivès...

« Les brigades du temps » (tome 2), Dupuis, 12 €

lundi 5 août 2013

Roman - Sang et or en Guyane


Un village perdu au fond de la forêt guyanaise. La lie de l'humanité s'y retrouve et l'appât de l'or fait disjoncter les consciences.


Il n'existe plus beaucoup d'endroits sur la planète où la nature a gardé sa pureté originelle. La forêt amazonienne est un de ces sanctuaires. Mais plus pour longtemps. A Brésil la déforestation est intensive. Et même la Guyane française, pourtant mieux protégée, subit de plein fouet les dégâts causés par les Garimpeiros, les orpailleurs clandestins, polluant les cours d'eau à grand renfort de mercure.« Le bar du Caïman Noir », roman de Denis Humbert a pour cadre ce département français du bout du monde et plus spécialement la commune de Regina, au sud de Cayenne, loin de la rutilante et moderne base de Kourou. Regina, moins de 600 habitants disséminés sur une superficie largement supérieure au plus grand département de France métropolitaine.Construit comme une symphonie à plusieurs voix, le récit est raconté en grande partie par le médecin du secteur, le docteur Charpentier, jeune toubib en rupture. Il a accepté ce poste pour mettre un océan entre lui et la ville de province où il aurait dû reprendre le cabinet de son père. Aussi pour tenter d'oublier la femme qui l'a quitté.

Paradis originel
Les premiers temps, il s'est laissé grisé par cette impression de bout du monde où tout est possible. « En se posant ici, il avait cru à une rémission. Au début, il s'était dit que le paradis, ce délicieux fantasme, avait dû ressembler à cet endroit. Il était finalement possible de s'immerger dans une nature retrouvée; l'eau, l'air, la forêt inviolée, les oiseaux et les fleurs, la lourde chaleur de matrice originelle, les milliers d'espèces d'insectes et de plantes encore inconnues. » Rapidement il redescend sur terre. « Il avait découvert derrière le décor luxuriant suffisamment de souffrance et de misère pour nourrir son goût de sacrifice et son besoin d'expier les fautes qu'il n'avait pas commises. » Très torturé le médecin. Et les événements qui vont agiter Regina ne vont rien arranger.
En plus du toubib, l'auteur suit les destins de Thomas, un métro, magouilleur de première, porte-flingue de politiques corrompus. Il s'est fait prendre la main dans le sac. Ses appuis lui ont permis de changer d'identité. Mais exit les strass et signes de richesse. Il vivote à la tête de ce bar miteux ou sa serveuse, Sofia, une Brésilienne en situation irrégulière, arrondit les fins de mois en se prostituant. Caporal Bob, ancien légionnaire, assure le service d'ordre.
Frantz est un métis indien. Il vit dans sa tribu à une heure de pirogue par le fleuve. Mais il voit son peuple s'éteindre, bouffé par la télévision et le poison déversé par les orpailleurs dans le fleuve. Toxines que les enfants ingurgitent quotidiennement en mangeant les poissons pêchés. Tous les intervenants se retrouvent pour la scène finale. Sanglante et violente.
Pour donner un peu plus de corps à cette tragédie forestière, l'auteur y a rajouté deux personnages extérieurs : une scientifique et un consultant en entreprise. Ils font un peu cheveu sur la soupe. Mais Denis Humbert semblait vouloir insuffler un note d'espoir et d'amour dans ce décor moite et désespérant de réalisme.
 
« Le bar du caïman noir », Denis Humbert, Presses de la Cité, 19 €

dimanche 4 août 2013

BD - Saga inca chez Glénat

Les armes chimiques, si décriées en Syrie, ont fait leur apparition il y a des centaines d'années. Et à l'insu des armées les utilisant. Quand les Espagnols débarquent en Amérique du Sud à la recherche d'or, ils se trouvent confrontés aux troupes incas. Des milliers de guerriers redoutables et déterminés. Malgré leurs armures et leurs mousquets, les conquistadores auraient pu être balayés. Mais ils avaient une arme de destruction massive dans leurs bagages : la variole. Une maladie contagieuse qui a décimé les populations locales. Le premier tome de « Inca », saga écrite par Laurent Granier et Bollée et dessinée par Marty reprend cet épisode. Mais l'histoire se consacre aussi sur le destin de Amaru, orphelin retrouvé dans un berceau d'osier, comme Moïse. Un dieu vivant, un empereur, au destin fabuleux. Mais avant de pouvoir protéger son peuple, il devra affronter les foudres de ceux qui veulent sa perte. Une BD entre Histoire et légende fantastique.

« Inca » (tome 1), Glénat, 13,90 €

samedi 3 août 2013

BD - Chasseurs de robot


La mondialisation touche aussi la bande dessinée. Les auteurs chinois vont-ils envahir le marché de la BD franco-belge ? S'ils sont aussi talentueux que Shang Xiao, le dessinateur de la série de science-fiction « S.A.M. » ce serait tout à fait justifié. Il met en scène un futur apocalyptique imaginé par Richard Marazano. La terre n'est plus qu'un champ de ruines. Les robots se sont rebellés. Ils ont systématiquement tué toute forme de vie. Ne reste plus que quelques petites communautés d'enfants, terrés dans les décombres comme les rats qui constituent leur alimentation de base. Pourtant tous les robots ne sont pas hostiles. Pour preuve l'attitude de S.A.M. à l'égard de Yann. Il n'hésite pas à tuer ses congénères d'acier pour défendre le gamin et ses amis. La cohabitation humains machines est-elle possible ? C'est la question en filigrane de cette BD aux illustrations d'une incroyable richesse. Il est vrai que Shang Xiao est un artiste méticuleux qui fignole ses compositions. Bref, l'inverse d'une certaine image du « made in China », preuve que la BD ne fera jamais comme tout le monde...

« S.A.M. » (tome 2), Dargaud, 13,99 €

vendredi 2 août 2013

BD - Moréa, belle et vénéneuse


Rien ne va plus pour la belle Moréa. La rousse pulpeuse est toujours immortelle, mais elle est mise sur la touche par ses collègues dragons. Elle a tenté un rapprochement avec les ennemis héréditaire, les anges, mais a payé le prix fort de la trahison de Immaros. Ce dernier, avec un peu de sang de Moréa, a mis au point un virus mortel pour les dragons. Moréa est devenue l'arme fatale qui a provoqué la mort de son ami, le chevalier Terkio. Sur cette trame déjà connue, Latil (qui reprend seul le scénario de la série créée par Arleston) et Libessart au dessin, lancent un nouveau cycle. L'héroïne va devoir partager la vedette avec une nouvelle arrivée tout aussi sexy et intrépide. Bishop est agent de l'ONU. Mais il est loin le temps des casques bleus timorés de l'organisation internationale. Dans ce futur proche, Bishop a tous pouvoirs pour intervenir n'importe où sur la planète. Un attentat en Russie la mettra sur le chemin de Moréa. La rencontre des deux beautés va faire des étincelles et le lecteur ne saura plus où donner de la tête...

« Moréa » (tome 7), Soleil, 10,95 €

jeudi 1 août 2013

BD - Les chiens racés des Sisters de Cazenove et William

Les éditions Bamboo doivent leur succès à des BD humoristiques qui n'ont jamais révolutionné le genre, de Profs aux Gendarmes en passant par « Les Sisters ». Mais la petite maison d'édition provinciale a plus d'ambition que certaines grandes sociétés. Notamment sur le côté éducatif. Ainsi « Les Sisters » de Cazenove et William, après avoir dévoilé les coulisses des relations entre deux sœurs malicieuses, se penche sur les chiens de ces dernières. Une quinzaine de planches, de nombreux dessins humoristiques et surtout des présentations de diverses races de chiens. De l'épagneul breton au boxer sans oublier le caniche et le berger allemand, tous ont droit à des fiches très riches et parfaitement détaillées. Et le sérieux de l'album est assuré par la contribution d'un vétérinaire, le Dr Artis, excellent vulgarisateur. A ne pas manquer pour les fans du genre canin.

« Les toutous des Sisters », Bamboo, 10,60 €