jeudi 6 mai 2010

BD - Aux sources de l'inspiration de Jules Verne


Deux jeunes auteurs espagnols rendent hommage au génie de Jules Verne dans cette série pour adolescents. 

Jules Verne, avant de devenir l'écrivain à l'imagination foisonnante, a été un enfant. Et déjà il était enclin à inventer des histoires. Nous sommes en novembre 1857 près de Nantes, le jeune Jules Verne a déjà pour ambition de vivre de sa plume. Avec son frère Paul et sa cousine Caroline, ils se voient déjà en train de voguer sur les mers, à la découvert de l'île de Robinson Crusoë. En fait un ilot sur la Loire. 

Mais l'aventure est quand même au coin du bois. Un énorme dolmen et un fantôme provoquent une belle frousse aux enfants. Cet album, signé Jorge Garcia (scénario) et Pedro Rodriguez (dessin) est une extrapolation sur les sources d'inspiration de Jules Verne. 

Un peu de fantastique, un soupçon d'aventure saupoudré de vie familiale : l'ensemble est très plaisant. En bonus, une nouvelle en fin d'album raconte la rencontre entre le jeune Jules Verne et les deux auteurs espagnols, voyageurs dans le temps.

« Les aventures du jeune Jules Verne » (tome 1), Glénat, 9,40 € 

mercredi 5 mai 2010

BD - Mémoire fugitive


En couverture, les auteurs de Re-mind annoncent la couleur : « La technologie du FBI n'a plus de limites ». Cette série (en deux parties seulement) est à la frontière entre thriller et science-fiction. Tout commence le 11 septembre 2001. John Geb est médecin aux urgences. Il est au pied des tours. Il parvient à sauver une femme en arrêt cardiaque. Elle lui en sera reconnaissante, avouant après coup avoir vu sa vie défiler devant ses yeux. 

Un phénomène bien connu du FBI qui a mis au point un appareil permettant de filmer cette vie en accéléré. Il faut juste être là au bon moment. Une formidable machine à aveux. Car si la personne ne veut pas parler, il suffit de l'abattre pour récupérer toutes ses connaissances. Une vie contre des informations. Les froids agents du FBI ne se posent pas longtemps la question. John va en faire les frais, obligé de mettre son fils à l'abri car il détiendrai des révélations sur un possible attentat. 

Palpitant, digne d'un film à grand spectacle américain, cette BD d'Alcante (Pandora Box) est illustrée par l'Italien Andrea Mutti (Nero).

« Re-mind » (tome 1), Dargaud, 10,95 € 

mardi 4 mai 2010

BD - Ric Hochet et les acteurs


Ric Hochet a été, durant des décennies, un des héros emblématique de l'hebdo Tintin, le journal des jeunes de 7 à 77 ans. 77, un chiffre symbole, qui est en couverture du 77e titre de la série imaginée par Duchâteau et dessinée par Tibet. Un chiffre maudit également car il marque la mort de Tibet. « Ici 77 ! » aura été le dernier album entièrement dessiné par Tibet, mort en janvier dernier. 

Ric Hochet se plonge cette fois dans le milieu des feuilletons télévisés. Il doit démasquer un tueur dans l'équipe de tournage d'une série policière. Il se trouve surtout face à des acteurs qui cabotinent en diable. La vieille star sur le retour qui ne veut pas laisser la place à la jeune première, l'acteur en fin de carrière que les producteurs veulent à tout prix faire mourir pour injecter un peu de jeunesse dans la distribution, le scénariste frustré, le metteur en scène ayant la folie des grandeurs mais pas le budget... 

Duchâteau prend beaucoup de plaisir à brocarder un milieu qui ressemble parfois étrangement à celui de la BD.

« Ric Hochet » (tome 77), Le Lombard, 9,95 € 

lundi 3 mai 2010

Roman - Les papys pètent les plombs

« Série Z », de J. M. Erre, est un roman déjanté où un scénariste immature imagine un film de série Z joué par des acteurs retraités de seconde zone.


Amateurs de bon goût à la française, passez votre chemin. « Série Z », roman de J. M. Erre a tendance à dépasser les bornes. Rien ne semble trop osé pour cet auteur à la plume alerte. Il y a du San Antonio dans les situations scabreuses qu'il imagine. Du politiquement incorrect, à la Jean-Pierre Mocky, un cinéaste régulièrement cité dans ce roman hommage aux nanars, de France et d'ailleurs.

Félix Zac est mieux connu sur le net sous le pseudo de Docteur Z. Il anime un blog entièrement consacré aux pires films de séries Z. Félix, 33 ans, père d'une petite Zoé encore bébé mais déjà turbulente, vit un peu aux crochets de son amie, Sophie. L'animation du blog ne rapporte pas un centime et, au contraire, l'achat de dizaines de cassettes vidéo dans les vide-greniers, grève sérieusement le budget familial. Pourtant Félix sent que son heure est venue. Il va proposer à un producteur son scénario de film d'horreur : « L'hospice de l'angoisse ».

La société secrète des VV

J. M. Erre ne livre pas toutes ces informations d'un bloc. Il aime distiller lentement et entrelarder de digressions les différentes séquences. Entre notes du blog, coupures publicitaires et apartés avec un lecteur de Knokke-le-Zoute, on a droit notamment à de longs extraits du scénario qui vaut son pesant de cacahuètes. L'action se déroule dans une maison de retraite n'accueillant que des acteurs en fin de vie. Tous plus cabotins les uns que les autres, ils sont mesquins, méchants, séniles et rarement propres.

Or en moins de deux mois, quatre pensionnaires ont disparus. De quoi faire cogiter les membres de « la société secrète des VV, alias les Vétérans Vigilants ». A moins que cela ne soit les « Vaillants Valides » ou les « Vigoureux Vioques ». Pour en faire partie il suffit de réussir les trois épreuves de base : « Courir le cent mètres en moins de cinq minutes, retrouver en quelle année nous sommes en moins de dix secondes, changer sa couche tout seul. » Le lecteur sait à partir de ce moment que les personnes âgées du roman ne seront pas forcément très fréquentables. D'autant que certaines sont d'anciennes stars du cinéma porno et que malgré le poids des années, ils sont toujours partant pour quelques galipettes, les contorsions en moins, l'arthrose en plus...

Boucheries productions

Tout se complique pour le héros, Félix, quand il rencontre son futur producteur : « Isidore Boudini, le roi de la bidoche discount ». Ce boucher accueille Félix dans son abattoir rempli de cadavres environnés de rivières de sang. Et lui explique qu'il cherche un scénario pour son fils qui s'est mis en tête de devenir cinéaste. Il tique un peu en lisant le début du scénario (trop de vieux, pas assez de sexe et d'hémoglobine), mais semble emballé après que Félix lui ait assuré qu'il pourrait y rajouter, selon les désirs du producteur, « de la mamelle et du cannibale. » Sans oublier « un monstre marin et un extraterrestre ». Le gros problème pour Félix c'est l'hospice existe vraiment de même que ses personnages. Et la police enquête justement sur ces disparitions qui sont en fait de véritables meurtres. Son scénario transforme Félix en suspect numéro 1.

Totalement déjanté, un peu foutraque mais regorgeant de trouvailles, ce roman, entre la parodie et le polar, est un réel hommage à ce cinéma du pauvre, où souvent le meilleur était dans le titre du film. Des titres repris comme tête de chapitres, de « Y a un os dans la moulinette » (Raoul André, 1974) à « Arrête de ramer, t'attaques la falaise » (Michel Caputo, 1979).

« Série Z » de J. M. Erre, Buchet-Chastel, 20 € 

dimanche 2 mai 2010

BD - Tranches de vies à l'américaine


La nouvelle BD indépendante américaine regorge de talents mis en valeur dans Outsider, la nouvelle collection des éditions Delcourt. Gabrielle Bell est indéniablement une très belle découverte. Scénariste et dessinatrice de ces courts récits, elle a débuté en s'auto-publiant puis s'est lancée dans une longue autobiographie. 

De sa vie, on en retrouve des bribes dans les onze histoire courtes reprises dans ce recueil de 150 pages. La première est comme un uppercut. Une jeune femme, venue s'installer à New York, se sentant de plus en plus insignifiante, se transforme en chaise et débute une nouvelle vie, immobile. 

Gabrielle Bell raconte également la rencontre entre un grand artiste contemporain et une étudiante des beaux-arts dont les tableaux, très figuratifs, plaisent au jeune fils du sculpteur. Des tranches de vie entre insignifiance et banal ennui. Au final, magie de la création, cela se transforme en recherche graphique et littéraire de très haut niveau.

« Cecil et Jordan à New York », Delcourt, 17,50 € 

samedi 1 mai 2010

BD - Un quartier en fête


Cette BD de 80 pages a des airs de « Plus belle la vie ». Amélie Sarn et Marc Moreno ont écrit le quotidien de ce quartier où il fait encore bon vivre. L'illustration en a été confiée à Julien Mariolle qui signe son premier album et fait preuve, d'entrée, d'une forte personnalité dans son dessin, entre caricature gros nez, avec des décors réalistes et l'apparition de quelques scènes animalières criantes de vérité. 

Mme Mouchet, une charmante retraitée, ouvre et ferme ce premier tome. Elle parle à ses canaris, fait ses courses chez l'épicier du coin, houspille Aziz, son fils, un peu trop turbulent à son goût, croise Raymond, le balayeur, Robert Lesec, le pied-noir regrettant son village natal et Mlle Chmolowski, vieille fille qui débute sa tournée pour demander de l'aide dans l'organisation de la fête du quartier. 

Attendrissant par certains côtés, cette histoire est pourtant ancrée dans notre réalité sociale, notamment quand un couple d'homosexuelles tente vainement de louer un appartement dans le quartier.

« Le temps des cerises », Soleil Quadrants, 15 € 

vendredi 30 avril 2010

BD - La quête du père


Basile n'a pas de père. Du moins il ne le connaît pas. La quarantaine, il vit toujours chez sa mère, retraitée. Cet enfant, elle l'a conçu, comme beaucoup de Françaises à la fin des années 50, avec un militaire américain, un des soldats de la liberté. 

Basile, après de vaines tentatives pour devenir peintre à Paris, est revenu à Laon, vivre auprès de sa mère, rentrant dans le rang en devenant simple employé municipal. Il continue cependant à peindre. Il a abandonné sa passion des portraits pour ne peindre plus que des rues de villes américaines. Comme s'il était en permanence à la recherche de ce père qu'il n'a jamais connu. Cette petite vie simple est au centre de ce roman graphique sensible de Gabrielle Piquet. Tout en racontant les doutes et frustrations de Basile, elle revient sur cette période de l'histoire de France. 

Des années marquées par la construction de bases américaines apportant richesse et insouciance aux autochtones. Et laissant quelques « enfants de l'envie », signes tangibles du bon accueil de la part de la population féminine.

« Les enfants de l'envie », Casterman, 14 € 

jeudi 29 avril 2010

Roman - Les enfants perdus se retrouvent

Ce passionnant thriller de Patrick Graham mélange passé et présent, enfance violente et âge adulte plus calme et rangé. 


Amour, argent, réussite professionnelle, enfants : Peter Shepard a tout pour être heureux. Brillant avocat d'affaire vivant à San Francisco, il avait pourtant mal débuté dans la vie. Orphelin, fugueur, il a fait de nombreux séjours dans des centres de redressement, dont celui particulièrement strict de Rédemption. Aujourd'hui il ne se souvient plus de cette adolescence turbulente. Pourtant des relents de son passé vont lui exploser au visage et toute sa vie va s'écrouler.

Dans « Retour à Rédemption », Patrick Graham place la barre encore plus haut que ses précédents thrillers (« L'apocalypse selon Marie » vient d'être publié en poche chez Pocket). Cela débute par une conversation au téléphone entre Peter Shepard et sa femme, Barbara qui est au volant. En compagnie de ses deux fillettes, elle va rejoindre une tante dans une petite localité du Nevada. Une voiture de police lui intime l'ordre de se ranger au bord de la route.

Mortes dans le désert

La suite, Peter va l'entendre par l'intermédiaire du téléphone resté branché. Le faux policier se révèle être un vrai tueur. « Le shérif ôte son chapeau et gratte quelque chose au sommet de son crâne. Un serpentin vermillon coule le long de son visage. Il passe la main sur son cuir chevelu et se penche. Les yeux de Barbara s'arrondissent. Au milieu de la sueur et du sang, là où il devrait y avoir des cheveux, il y a des plaques de peau à vif et des sortes de boursouflures qui laissent apparaître des éclats blancs comme de l'os. » Barbara vient de rencontrer Ezzie, un camarade d'enfance de Peter. Ezzie qui va tuer Barbara et laisser mourir de soif, sanglées dans la voiture en plein désert, les deux fillettes de Shepard.

Ce dernier va tout mettre en œuvre pour retrouver l'assassin et par la même retrouver ce passé dont il n'a plus aucun souvenir.

Wendy, le premier amour

Une quête à travers les USA, au cours de laquelle il va retrouver Wendy, son premier amour, la seule fille du gang des « enfants perdus ». La bande s'est formée dans le centre de redressement de Rédemption. Un peu d'amitié ne pouvait que permettre à ces adolescents de mieux résister à la discipline de fer de Rédemption, « un ancien camp d'internement où les rebs entassaient les prisonniers yankees. Taux de mortalité maximum. Après la guerre de Sécession, c'est devenu un bagne puis un pénitencier puis un centre de redressement. On ne s'échappe pas de Rédemption. On se repent et un jour, on sort. Ou pas. » Les enfants, pour survivre, vont devoir devenir encore plus féroces et cruels que leurs geôliers.

Patrick Graham va alterner les scènes du passé et du présent. De la création de la bande à la course poursuite d'aujourd'hui. Car les enfants perdus avaient fait un pacte. Et quelqu'un l'a trahit. Un roman d'une grande intensité sur l'amitié, la résistance et l'oubli.

« Retour à Rédemption, Patrick Graham, Editions Anne Carrière, 21,50 €

mercredi 28 avril 2010

BD - Héros imaginaires


Tom est un petit garçon de 6 ans. Il découvre un véritable trésor dans une remise chez ses grands-parents : des illustrés des années 50-60. Il se plonge dedans et se délecte de ces aventures de cowboy, chevalier et super héros. 

Au bout de quelques heures de lecture intensive, il découvre que sa famille a disparu. Et quand des martiens l'attaquent, il demande la protection de Günnar, le Viking. Tom semble être le dernier survivant de son monde avec simplement quelques héros de BD pour compagnons. 

Cette histoire de 60 pages, la première de Laurent Lefeuvre, est un superbe hommage aux petits formats, souvent considérés comme des BD de série B, mais qui ont marqué l'imagination de millions d'enfants.

« Tom et William », Le Lombard, 15,50 € 

mardi 27 avril 2010

BD - Famille bretonne


Quatrième et dernier tome (du moins du premier cycle) de la série relatant les mésaventures de la famille des Porphyre. Une famille maudite sur cette lande bretonne. 

Un récit très romantique, se déroulant au 18e siècle, écrit par Balac, est mis en images par Parnotte, dessinateur réaliste hors-pair à classer parmi les « grands », entre Hermann et Giraud. Soizik, Konan et Gwemon sont bloqués dans la grotte secrète abritant le trésor du vieux Porphyre. 

Ces trois, tous descendants du vieux grigou, vont devoir affronter bagnards en cavale, pieuvre géante et naufrageurs. Sans oublier la belle Hermine, une guerrière prête à tout pour retrouver un médaillon. Embruns et vent de trahison soufflent sur cette BD.

« Le sang des Porphyre » (tome 4), Dargaud, 13,50 €