dimanche 18 septembre 2022

Cinéma - Un futur très visitable

La série imaginée par François Descraques, « Le visiteur du futur » se décline aussi au cinéma dans un long-métrage hilarant.


De la science-fiction française réussie ! Il y a longtemps que le spectateur exigeant dans ce genre périlleux n’avait pas eu l’occasion de ressortir heureux d’une salle obscure. Le visiteur du futur de François Descraques, en plus d’être fidèle à la série télé d’origine, offre intrigue intelligente et multitudes de gags, le tout avec des décors soignés et des effets spéciaux réussis.

Tout débute par une catastrophe dans une centrale nucléaire française. Renard, le visiteur du futur (Florent Dorin), tente de l’empêcher. En vain. Alors il décide de tout faire pour annuler la construction du complexe. Il va tenter d’influencer Gilbert (Arnaud Ducret), le député qui a lancé ce projet « d’avenir ».

Exactement comme la fille du politique, Alice (Enya Baroux) qui, elle, a la fibre écolo. Mais la brigade temporelle veille. Alors Renard, le père et la fille s’échappe dans le futur, sur cette terre ravagée qui n’en a plus pour longtemps.

Ribambelle d’excellents seconds rôles 

On apprécie dans ce film le ton encore très gamin de la série. Les héros sont désopilants, avec une mention spéciale au docteur Castaforle interprété par Slimane-Baptiste Berhoun. Mais tous les seconds rôles valent le détour. On trouve, d’ailleurs, dans la distribution, une ribambelle de rigolos patentés, souvent méconnaissables mais toujours hilarants.

Ouvrez l’œil pour repérer McFly et Carlito en ingénieurs totalement dépassés face à une situation d’urgence, Kyan Khojandi en clodo alcoolo, Marc Risso en barman spécialiste en jus de chaussette, Davy Mourier en marchand de gros, (« Mais vous vendez quoi ? Des gros ! ») M. Poulpe en mangeur d’enfant, Simon Astier en fonctionnaire servile ou David Marsais en délateur décomplexé.

Rajoutez quelques zombies (des lents mais aussi des rapides), des flics ignares et un peu d’émotion pour un final presque larmoyant et vous avez un bon film, abouti, qui ne se prend pas au sérieux tout en faisant passer un message aux générations futures : le nucléaire c’est bien aujourd’hui, mais dans le futur, ça risque de sérieusement craindre.

Film français de François Descraques avec Florent Dorin, Arnaud Ducret, Enya Baroux
 

samedi 17 septembre 2022

BD - La touchante tendresse de Monsieur Léon


C’est un petit bonhomme terne et insignifiant. De ceux que personne de remarque dans les transports en commun. Un discret qui vit sa vie sans bruit, bien à l’abri derrière les murs de son deux-pièces. Pourtant monsieur Léon mérite bien qu’Arnaud le Gouëfflec et Julien Solé lui consacrent tout un album de BD.

Car Monsieur Léon cache bien son jeu. Il aime les vieilles ritournelles d’antan, pratiquer le tango et autres danses de salon, jouer au golf nu dans son salon ou porter secours aux poissons rouges dépressifs. Surtout, Monsieur Léon, en cette période de confinement, est capable de braver les forces de l’ordre et l’interdiction de circuler, juste pour plaire à sa voisine, la si timide et prude Mademoiselle Sophie.

Parues dans Fluide Glacial, ces petites histoires complètes sont plus poétiques qu’humoristiques. Elles racontent un monde moins mercantile que notre quotidien. Julien Solé, au dessin, excelle dans le mariage entre noir et blanc et couleurs éclatantes. Un dessinateur qui sait alterner les styles, toujours à l’affût d’expérimentations graphiques. Julien Solé qui fait partie des auteurs présents à Perpignan ce week-end dans le cadre du festival de la BD.

« Monsieur Léon », Fluide Glacial, 13.90 €


Cinéma - « Le Tigre et le Président », un film sur Paul Deschanel, le président lunaire

Biopic historique sur l'affrontement entre un politique iconoclaste et le grand Clemenceau. 


Il y a les petites histoires et la grande Histoire. Le Tigre et le Président, premier film de Jean-Marc Peyrefitte fait parfaitement la synthèse de ces deux façons de raconter le passé. D’un côté Clemenceau, homme d’État dont on aime encore aujourd’hui se référer, de l’autre Paul Deschanel, éphémère président de la République dont on ne se souvient que d’une chose : il est tombé d’un train.


Pourtant, ce film porté par deux grands comédiens (Jacques Gamblin est Deschanel, André Dussollier est Clemenceau), montre une tout autre réalité. Clemenceau, revanchard, cynique et assoiffé de pouvoir veut devenir président de la République. mais il se fera battre au Congrès par Paul Deschanel, farfelu, poète, visionnaire.
Or, en 1920, Deschanel représentait le futur radieux d’une France qui voulait s’émanciper. Il voulait donner le droit de vote aux femmes, abolir la peine de mort, interdire le travail de nuit. Pourtant, en 2022, il ne reste rien de sa pensée, avant-gardiste pour l’époque. Comme si cet homme était trop en avance sur son temps.

Le film, un peu didactique par moments, nous permet de le redécouvrir. En réalité de le découvrir tout court pour la majorité des Français.

Film français de Jean-Marc Peyrefitte avec Jacques Gamblin, André Dussollier

vendredi 16 septembre 2022

BD - Barney Stax, le détective privé du pire


Le mythe du détective privé à la Marlowe a encore de beaux jours devant lui. Question dérision, l’album de James et Guerse est un bijou d’humour. Généralement, Barney Stax n’a absolument rien à faire de ses journées.

Mais quand une jolie blonde débarque dans son bureau et lui demande de suivre son mari pour comprendre pourquoi il ne la trompe pas (elle est nymphomane et paiera Barney en nature), il ne se doute pas qu’il est en train de plonger dans une guerre secrète entre CIA et KGB. Car le mari, plombier de son état, est en réalité un espion. Dialogues hilarants, situations cocasses, chutes incongrues, rebondissements abracadabrantesques : Barney Stax va regretter d’avoir dit oui.

« Barney Stax », Fluide Glacial, 13,90 €

De choses et d’autres - Et pourquoi pas en pédalo ?


Ils sont contrariants ces footballeurs. On leur demande juste de courir derrière une balle, et eux en profitent pour faire le buzz sur tout et n’importe quoi. Prenez Mbappé. L’attaquant du PSG et de l’équipe de France se retrouve au centre de deux affaires regrettables.

 

Une sordide histoire de marabout et un fou rire qui passe mal. Dans le premier cas, rien à rajouter. La Justice tranchera. Mais je ris intérieurement en imaginant le malaise des juges devant évaluer le niveau d’infraction d’un maraboutage…


Le fou rire est consécutif au dérapage de l’entraîneur du PSG et de son char à voile en conférence de presse. Si Kylian rigole comme un bossu à la sortie de son boss, ironisant sur une question plus que d’actualité sur l’utilisation d’un jet privé pour rallier Paris depuis Nantes, une bonne partie de la France rit jaune. Car, au même moment, le président Macron en personne demandait à tous les Français de faire des efforts en réduisant leur consommation d’énergie.

Si le commun des mortels doit faire des sacrifices, avoir froid cet hiver, rogner sur ce qu’il reste de leur petit train de vie, les footballeurs professionnels bénéficient toujours de privilèges qu’ils ne veulent surtout pas remettre en cause.

Si j’avais un pouvoir quelconque, je déciderais sur-le-champ que pour rallier les stades climatisés du Qatar où se déroule la prochaine coupe du monde, les sélectionnés tricolores n’iront pas en avion mais en pédalo. Au moins, ils seront en forme à leur arrivée.

Et si l’électricité doit être coupée cet hiver, je choisirai comme première date le 22 novembre de 20 h à 23 h. Partout en France. Les Français auront une excuse en béton pour ne pas suivre les tribulations des milliardaires du ballon rond à la télévision.

Billet paru en dernière page de l’Indépendant le mercredi 7 septembre 2022

jeudi 15 septembre 2022

BD - Une apprentie flic au 36 quai des Orfèvres


Si vous êtes jeune et qu’une carrière de policier vous tente, plongez dans ce roman graphique réaliste. Henri Scala, commissaire de police s’est associé au scénariste Mark Eacersall pour raconter les premiers pas d’une jeune policière à la brigade criminelle à Paris.


Un long et dur apprentissage dessiné sur près de 120 pages par Boris Golzio. Pauline, gardienne de la paix, a été repérée en haut lieu. On lui donne l’opportunité de rejoindre ce prestigieux service.

Elle va apprendre le métier, passer des nuits blanches et tout faire pour clore une vieille enquête sur une femme retrouvée découpée au bord de l’autoroute.

« Cristal 417 », Glénat, 19,50 €

De choses et d’autres - Y aura-t-il du gaz à Noël ?

Le titre du billet du jour est à fredonner sur l’air de la chanson de Stephan Eicher où il posait ces deux questions cruciales : « Crois-tu qu’il va neiger ? Me feras-tu un bébé pour Noël ? » La neige, même si on en a ras le bol de la chaleur, on s’en passera. Neige égale froid. Or, la véritable question qui nous turlupine, actuellement, c’est « Crois-tu qu’il y aura du gaz pour Noël ? » Si l’on en croit le gouvernement, les cuves sont pleines.


Il ne se passe pas une semaine sans qu’un ministre claironne haut et fort le pourcentage de remplissage des réserves stratégiques. Il y a quatre jours, Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition énergétique, osait le 92 %. En avance par rapport aux prévisions.

On est rassuré pour le gaz, mais qu’en sera-t-il pour l’électricité ? Des délestages pourraient plonger villes et quartiers dans le froid et l’obscurité.

Pour certains complotistes, le conditionnel permet de ressortir une de leur marotte : le compteur Linky. Réputé intelligent, ce nouveau compteur serait en réalité une arme contre les Français. Si vous avez refusé de le faire installer chez vous, comme quelques angoissés du progrès l’ont réclamé, vous ne serez pas concerné par les coupures. Car, d’après eux, le fournisseur peut directement sélectionner le foyer à couper s’il est équipé du Linky.

Toute personne dotée d’un brin de jugeotte et de sens pratique ricane. Est-il plus simple, dans un quartier, de sélectionner 25 compteurs sur 30 pour les couper ou fermer l’alimentation générale ? C’est comme si les Russes, pour embêter les Occidentaux, préféraient envoyer un employé couper l’arrivée de gaz chez chacun d’entre nous au lieu de fermer, plus simplement, le gazoduc principal.

Dans complotiste, c’est la première syllabe la plus significative.

Billet paru en dernière page de l’Indépendant le mardi 6 septembre 2022

mercredi 14 septembre 2022

BD - Furie féminine chez les « Filles uniques »


Sierra est en colère. En permanence. Cette adolescente, une des cinq amies membre du club des Mal Barrées, vit avec sa mère dans un mobile home. Elle est en colère contre les hommes. Tous les hommes.

Sierra au centre du 3e volume de la série Filles uniques écrit par Beka et dessiné par Camille Méhu. Ses amies vont tenter de la calmer, en vain, puis de comprendre la source de cette furie continuelle.

Et de découvrir l’histoire de cette enfant qui a trop fait confiance et qui désormais n’entend plus se laisser faire.

« Filles uniques » (tome 3), Dargaud, 12,50 €

De choses et d’autres - La mue du canard


Si tant de fake news trouvent preneur auprès de la population c’est aussi en raison de certaines décisions qui ont tout de la blague tendance Gorafi. Ainsi la semaine dernière, quand arrive à mes oreilles la possibilité de remplacer le canard nécessaire dans certaines préparations culinaires par du poulet, je subodore une vieille blague éculée.

 

Genre une campagne contre Darmanin et sa propension à rajouter des policiers dès qu’il y a un problème.


Perdu ! En raison de la grippe aviaire et de la rareté du canard français dans les prochains mois, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a très sérieusement pris un arrêté autorisant les industriels à remplacer le canard dans leurs préparations par du poulet. Si vous achetez des rillettes de canard et trouvez que le goût est différent, vérifiez si un petit autocollant « dérogation » n’est pas collé sur l’étiquette.

Car non seulement vous allez manger du poulet à la place du canard, mais les listes des ingrédients, déjà imprimées, ne sont pas modifiées. Il suffit d’y apposer ce simple mot, « dérogation », et le fabricant est couvert.

Il y a quelques années, une entreprise de la région a fait scandale à cause de viande de cheval mise incognito dans des lasagnes… au bœuf. Aujourd’hui, cette « tromperie » du consommateur (même si le mot est un peu fort) est légale.

Si les pénuries persistent (guerre, sécheresse…) notre plat national audois va radicalement changer. À la place du canard, du poulet donc, exit les haricots et place à la semoule et bye-bye les saucisses, vivent les merguez. Mais à ce compte, autant changer les étiquettes du cassoulet par celles du couscous, ce sera plus explicite que « dérogation » au pluriel.

Billet paru en dernière page de l’Indépendant le lundi 5 septembre 2022

mardi 13 septembre 2022

BD - Croisade fantôme de sept « Ex-people »


Dans un Moyen Âge d’opérette, les sept héros de cette série, écrite par Desberg et dessinée par Utkin, partent en croisade. Sept fantômes, privés de leur véritable apparence.

Il y a deux hommes, deux femmes, un cheval, un oiseau et un chat. Des fantômes. Ils vont devenir mercenaires pour accumuler de l’or destiné à payer des prêtres qui auraient une potion pour rompre leur mauvais sort.

Une BD fantastique, sous forme de conte, malicieuse et immorale, sur la méchanceté humaine, la vengeance et le désir de rédemption. Une des plus surprenantes histoires de cette rentrée 2022.

« The Ex People » (tome 1), Bamboo Grand Angle, 16,90 €