mardi 26 juillet 2022

Polar historique - Céret d’antan

Chassé-croisé à Céret n’est pas une nouveauté, mais mérite toujours d’être découvert, quatre années après sa sortie. Deux sœurs, Julie Roussel Cros et Laetitia Roussel, ont écrit ce court roman policier historique. Nous sommes en 1673, un jeune policier parisien débarque dans la sous-préfecture catalane pour tenter de découvrir les dessous d’une affaire d’empoisonnements.

Matthieu Barbet, qui connaît bien la région pour être originaire de Perpignan, tout en enquêtant, nous fait découvrir les environs. Une balade historique, de Pollestres et son fameux vin au Perthus et ses fortifications, sans oublier, bien évidemment, Céret et sa chaîne industrieuse du tissage. L’intrigue policière n’est qu’un prétexte pour décrire la vie des Cérétans de l’époque, de la foire au marché, en passant par les cuisines des riches notables, complotant (déjà !), pour que la Catalogne retrouve son indépendance récemment perdue.

Pour vous procurer ce livre, édité aussi en anglais et en catalan, il vous suffit de contacter les auteurs par mail : juliecros7@gmail.com ou tout simplement de vous rendre, le samedi matin au marché… de Céret.

« Chassé-croisé dans Céret » de Julie Roussel Cros et Laetitia Roussel, Éditions du Simiot, 10 €

lundi 25 juillet 2022

BD - L’amour au comptoir

Habitué de l’humour très noir, trash et gore, Jonathan Munoz cache, pourtant, derrière ses histoires terribles (Annick Tamaire, Godman) un petit cœur sensible et romantique. Il réussit le tour de force de mettre les deux facettes, totalement opposées, de sa personnalité dans un seul et unique album. L’inconnue du bar raconte l’amour platonique d’un serveur de bar, Joshua, pour une jeune femme, Dara, qui dessine ses BD en terrasse.

L’album alterne les tentatives de drague de Joshua avec les histoires courtes de Dara. Ces dernières sont du pur Jonathan Munoz avec la fille d’un pirate abandonnée sur une île déserte et qui, devenue adulte et institutrice, tyrannise ses élèves. Ce petit garçon, si gentil, si dépendant de sa maman, qui va virer leader fasciste ou ce méchant cow-boy découvrant qu’il ne peut plus tuer. Alors, il se met à donner des bisous, provoquant une véritable hécatombe.

Quant à l’histoire d’amour entre le serveur et la dessinatrice, elle va connaître une fin assez étonnante.

Sans rien en dévoiler, sachez qu’elle est en totale opposition avec l’esprit des récits courts de Dara.

« L’inconnue du bar », Fluide Glacial, 12,90 €

BD - Bragon et la graine


Lancée en 1982, alors que le genre de l’heroic fantasy n’était pas à la mode, La Quête de l’Oiseau du temps, de Le Tendre et Loisel, a connu un formidable engouement. 40 années plus tard, un nouvel album de la série paraît, le 11e seulement. Folle graine est le 7e épisode du cycle dit « Avant la quête ».

On y retrouve Bragon, le ténébreux chevalier, mais pas Pelisse. Bragon amoureux fou de Mara, tentant d’empêcher la secte de l’Ordre du Signe de prendre le pouvoir en s’emparant de la Conque de Ramor. Dans cet album, dessiné par Etien, Bragon et Mara bravent une entité des ombres pour dérober une graine mystérieuse qui aurait le pouvoir « d’affaiblir la menace du retour du dieu Ramor. »


68 pages de toute beauté, avec les personnages habituels de ce cycle (l’impétueux Bulrog, la belle et redoutable Kryll) et quelques nouveaux venus, dont le prince Bodias qui rêve de séduire Mara. La BD se termine par un coup de théâtre qui annonce parfaitement le dernier épisode de la saga et permet déjà de faire lien avec la série principale.

« La quête de l’Oiseau du temps - Folle graine », Dargaud, 15 €

dimanche 24 juillet 2022

Thriller - Le retour des Hommes de Paille

Troisième et dernier volet de la saga des Hommes de Paille signée Michael Marhsalle et parue au début des années 2000, les éditions Bragelonne proposent une version poche d’un thriller qui va glacer le sang des lecteurs, même les plus habitués à ce genre de littérature.

On retrouve Ward Hopkins et sa compagne, Nina, cachés dans un bungalow dans la forêt. Ils fuient les Hommes de Paille, sorte de conspiration de tueurs en série. A leur tête, Paul, le propre frère de Ward. Le cauchemar reprend quand des cadavres sont découverts dans une petite ville.

Nina, qui fait partie de l’élite du FBI, reprend du service et Ward discrètement la couvre. Il craint tout le monde : « Le problème avec la paranoïa, c’est qu’on ne sait plus s’arrêter. Dès que l’on se met à douter des principes élémentaires qui régissent les rapports humains, tout devient envisageable. » En l’occurrence le pire dans un final qui dépasse largement la folie du 11 septembre.

« Le sang des anges » de Michael Marshall, Bragelonne Terreur, 7,90 €

Polar - Un masque, deux intrigues

Coup double pour Jean-Christophe Portes. Après avoir remporté le prix du roman d’aventures des éditions du Masque en 2020 pour Minuit dans le jardin du manoir, il devient le lauréat du prix du Masque de l’année pour la suite des aventures de l’ancien notaire Denis Florin.

Le mystère du masque sacré est en réalité la seconde enquête de ce sympathique héros, peu préparé à une vie d’aventures lui qui a longtemps été un simple notaire en Normandie puis un spécialiste des plantes médicinales. Surtout, il est le petit-fils d’une espionne en chef pour la république française. Il va cette fois devoir aller jusqu’en Afrique pour démêler une sombre affaire de masque sacré qui donnerait un pouvoir absolu au sorcier qui le possède.

C’est très mouvementé, tout à fait plausible, avec l’ajout de quelques personnages (une gendarmette psychorigide qu’on espère revoir) et la suite des amours compliquées entre Denis et la belle Nadjet, journaliste reconvertie en influenceuse, couverture idéale pour ses missions secrètes aux quatre coins de la planète.

« Le mystère du masque sacré » de Jean-Christophe Portes, Le Masque, 8,50 € 

samedi 23 juillet 2022

Patrimoine - Romans arthuriens dans la collection Quarto de Gallimard

Il faut l’admettre, ce bouquin de la collection Quarto de chez Gallimard n’est pas idéal pour une lecture sur le sable en bord de mer. Plus de 1 000 pages et un bon kilo à tenir en bout de bras. De même, ce ne sera pas une lecture estivale car difficile de le terminer avant la fin du mois d’août.

Mais on peut y piocher quelques-uns des textes qui ont forgé, dès le Moyen Âge, la légende arthurienne. Dirigé par Martin Aurell et Michel Pastoureau (qui en signent une préface très instructive), cette compilation reprend notamment La quête du Saint Graal, écrite dans les années 1220 - 1225, « reprend le canevas fort classique du voyage d’aventures : présentation des héros et leur départ, épreuves subies durant leur itinéraire, objectif atteint et récompense finale. »

On apprend surtout que les légendes celtes deviennent une occasion pour que « la prédication cléricale gagne du terrain ».

Reste que les aventures d’Arthur et de ses chevaliers de la Table ronde sont un peu à l’origine du roman. La première fiction plus vraie que nature qui a fait rêver des dizaines de générations. Et ce n’est pas terminé !

« Les Chevaliers de la Table ronde, romans arthuriens », Gallimard Quarto, 1 080 pages, 158 documents en couleur, 34 €

vendredi 22 juillet 2022

BD - Boule rouge énigmatique


Les duos improbables, tels la carpe et le lapin, ont encore de beaux jours devant eux. Nouvel exemple avec les deux héros de ce gros album signé Éric Stalner. Le premier est commissaire de police, bourru et taciturne, la seconde, riche orpheline qui profite pleinement des années folles. Ils ont pourtant un point commun : le nom de famille du flic et le prénom de la belle, Bertille.

Ils se rencontrent lorsque le premier vient d’arrêter un petit malfrat, la seconde rentre d’une nuit de fête chez une amie. Ils assistent éberlués à l’arrivée sur terre d’une boule rouge écarlate qui termine sa course folle dans une forêt. Expérience des Bolcheviques, débarquement des Martiens ? L’étrange boule rouge fascine Bertille & Bertille. Alors que le premier doit tenter de la faire disparaître à la demande du Préfet de police, la seconde ne peut cacher son admiration face à sa perfection. Problème : la boule grandit.

A un tel rythme que dans un mois, la France ne sera plus qu’un souvenir… Cette BD en noir et blanc (à part la boule) étonne par son intrigue entre politique, conspiration et fantastique. Mais le mieux reste les deux Bertille et leur étrange relation.

« Bertille & Bertille, l’étrange boule rouge », Grand Angle - Bamboo, 19,90 €

jeudi 21 juillet 2022

Thriller - Voyage agité à bord du "Bullet train" japonais

Le 3 août, dans deux semaines, sort au cinéma Bullet Train, film à grand spectacle avec Brad Pitt en vedette. Une production Sony adaptée du roman du même nom de l’écrivain japonais Kotaro Isaka et récemment publié en France aux Presses de la Cité.

Dans le Shinkansen, train à grande vitesse japonais, plusieurs tueurs vont se livrer au jeu du chat et de la souris avec une valise remplie de billets. Dans ce polar aux dialogues percutants et aux personnages complexes, c’est Kimura qui fait le premier son entrée en scène. Retiré des affaires, il arrive à bord du train ivre et armé. Il a l’intention de tuer un collégien qui a poussé son petit garçon du haut d’un immeuble. Il va croiser la route de Mandarine et Citron. Des experts des opérations spéciales. Ils viennent de libérer un adolescent et le ramènent à son père ainsi que la valise bourrée de l’argent de la rançon.

Une valise qui est l’objectif du dernier malfrat (Brad Pitt dans le film), Coccinelle. Il doit la voler. Mais comme il est toujours très malchanceux, les choses ne vont pas se dérouler comme prévu. Le huis clos dans le train est magistralement mené par un romancier à l’imagination débordante.

« Bullet Train » de Kotaro Isaka, Presses de la Cité, 22 €

mercredi 20 juillet 2022

BD - Perceval et la fée

Pour beaucoup de spécialiste c’est le meilleur dessinateur animalier du moment. Federico Bertolucci, dessinateur italien, délaisse pourtant un peu son univers privilégié pour s’attaquer à une histoire fantastique. Remarqué dans les albums Love (sur des scénarios de Brrémaud), racontant les déboires sans la moindre parole d’un chien, d’un lion ou de dinosaures, il s’attaque cette fois à la légende de Perceval.


Exactement la légende oubliée. Perceval n’est encore qu’un gamin vivant avec sa mère dans la forêt. Il chasse et s’invente des exploits en
compagnie de son hermine apprivoisée. Alors que les Saxons débarquent et vont attaquer le roi Arthur. Perceval, qui ne se doute pas qu’il sera un grand chevalier de la Table ronde fonce pour prévenir le monarque. Mais croise sur sa route une petite fée mal en point.

Superbement dessinée, cette histoire prévue en quatre tomes, a tout pour devenir une référence dans le genre du fantastique teinté d’historique. On va suivre l’apprentissage de Perceval et les aléas de la vie du petit peuple de la forêt.

« La légende oubliée de Perceval » (tome 1), Vents d’Ouest, 14,50 €

mardi 19 juillet 2022

Cinéma - Tous les films de Mia Hansen-Love au festival Ciné-rencontres de Prades

Après un florilège des films des frères Dardenne, le festival Ciné-rencontres de Prades propose un focus sur les œuvres de Mia Hansen-Love. La réalisatrice, présente dans la capitale du Conflent, apprécie que tous ses films, huit au total, soient programmés, dont "Un beau matin" en avant-première, sa dernière réalisation, présentée au festival de Cannes et qui ne sort qu'en octobre prochain. Rencontre.

Pourquoi avoir accepté de venir à Prades présenter votre travail aux cinéphiles de la région ? 

On m'avait déjà sollicité l'an dernier, mais je n'ai pas pu répondre positivement car je n'étais pas libre. J'ai été très sensible au fait qu'on me réinvite l'année d'après. Je suis toujours touchée quand il y a une certaine fidélité ou patience. J'ai eu un bon contact avec le président Jean-Pierre Abizanda et de la façon dont il parlait de son festival.

Connaissiez-vous la région ? 

Pas du tout. Je ne suis pas du Sud. J'ai passé tous mes étés d'enfance dans la maison familiale de Haute-Loire. Pour mon travail, j'ai beaucoup voyagé dans le monde mais je connais très mal la France. Aujourd'hui, je suis très contente de découvrir la France. Il y a deux semaines j'étais au festival de La Rochelle, c'est une ville magnifique. Depuis mon arrivée à Prades, j'ai visité Saint-Michel de Cuixa et j'aimerais aller à Serrabone. Je suis particulièrement sensible à ces lieux spirituels quand ils sont dans un cadre comme ceux-là c’est-à-dire au milieu de la nature.  

Appréciez-vous que le festival programme l'ensemble de vos films ? 

C'est déjà arrivé et pas mal de fois, mais c'est la première fois en France. Donc je suis très heureuse et j'y accorde beaucoup d'importance d'autant plus que dès mon premier film, d'une certaine façon, j'ai pensé en termes d'œuvre. Cela peut paraître prétentieux, j'espère que ça ne l'est pas. J'ai toujours été intéressée à la cohérence de ce que je faisais. J'ai toujours eu envie que le sens de mon travail ne vienne pas seulement des films pris séparément mais de la façon dont ils se répondraient. Je voulais que mes films aient un dialogue entre eux, un lien organique. Donc, je trouve que j'ai beaucoup de chance que les huit films soient montrés ensemble et pas séparément. 

Samedi soir, en clôture du festival, vous présenterez votre dernière réalisation, "Un beau matin". Que représente ce film dans votre parcours ? 

Après avoir réalisé Bergman Island qui se déroulait beaucoup dans la nature en Suède, un film romanesque dans des espaces ouverts et qui échappait à une certaine forme de réalisme, quand j'ai commencé à écrire Un beau matin j'ai eu le sentiment de revenir à la maison après m'être échappée en Suède. Je suis revenu à la maison dans le sens que c'est un film autobiographique. Il est question de la relation entre un père et sa fille. Un père malade ayant une maladie neurodégénérative. Au-delà de ça, c'est un film tourné à Paris dans des décors très proches de moi, de mon quotidien, qui me ramène peut-être au réel auquel j'ai voulu échapper en Suède. Là, au contraire, j'ai voulu m'y confronter. 

Quels sont vos projets après le festival ? 

Je vais accompagner la sortie d'Un beau matin. Avant sa sortie mercredi 5 octobre en France, je serai aux USA, notamment à Los Angeles puis en compétition au festival de Toronto au Canada. Ensuite, je vais continuer à écrire un projet de mini-série assez atypique en six épisodes sur la vie d'Annemarie Schwarzenbach, une journaliste, voyageuse, écrivaine, suisse allemande, morte en 1942. Son parcours, son histoire, son œuvre, me hantent depuis très longtemps. J'ai pris conscience il y a quelques années que cela ne correspondait pas au format d'un film en termes de durée, ce qui m'a conduit à le transformer en série de six épisodes. Je commence à travailler dessus, mais c'est vraiment un projet de longue haleine avec beaucoup de recherches historiques. Je commence juste à écrire le premier épisode, donc je ne suis pas près de revenir au cinéma.