jeudi 19 mai 2022

Cinéma - Bruce Willis, du meilleur au pire


L’évolution de la carrière de certaines stars d’Hollywood n’est pas à l’image de leurs débuts. L’exemple de Bruce Willis est un cas d’école. Lui qui vient d’annoncer qu’il ne tournerait plus pour des raisons de santé, est apparu ces cinq dernières années dans une cinquantaine de productions de piètre qualité, autant de cachets faciles à encaisser pour un comédien qui a fait fructifier jusqu’au bout sa popularité, au risque de se perdre dans des navets d’anthologie. 

Tout débute quand ce bad boy, révélé dans Clair de Lune, une série télé très sarcastique, explose littéralement dans la franchise Die Hard (Piège de cristal). Il enchaîne ensuite quantité d’excellents films avec des cinéastes de renom. Bruce Willis, une super-star des années 80-90 qui tape dans l’œil de Tarantino, M. Night Shyamalan, Michael Bay ou Luc Besson. Peu de déchets dans une carrière éclectique, du thriller à la SF en passant par la comédie. Avec des rôles qui resteront dans l’histoire du cinéma américain comme ce psychiatre dans Sixième sens qui discute avec ce qu’il croit être le fantôme d’un enfant. Ou en interprétant James Cole, homme qui doute dans un futur sinistre imaginé par Terry Gillian dans L’armée des 12 singes. 

Pourtant au fil des ans, les bons rôles se raréfient. La bascule semble se faire en 2006. Il est du générique de 7 longs-métrages. Il commence à privilégier le nombre à la qualité. Bruce Willis est aussi moins regardant sur les scénarios. Il commence à devenir la caricature de lui-même. Pratique car cela demande un minimum de travail. Même en endossant le rôle principal, les durées de tournages se réduisent. 

Ensuite ce sera la course au chiffre. Souvent dix films par an, avec un record de onze en 2021. Du pain béni pour les plateformes de streaming qui mettent toujours le nom du comédien en exergue, oubliant de préciser que les films sont dramatiquement médiocres pour ne pas dire totalement nuls. Sur Prime Vidéo, on peut découvrir, plus pour la curiosité que le plaisir, Anti-life, film de SF signé John Suits, sorte de sous-alien fauché, où Willis dégomme du monstre avec un lance-flammes dans un vaisseau spatial en perdition. Plus terre à terre, Fortress de James Cullen Bressack. Bruce Willis y est un agent secret à la retraite qui doit reprendre du service (rien à voir avec Expendables…). Quitte à découvrir Bruce Willis dans sa version caricaturale de héros primaire bas du front, autant profiter sur Netflix de Planète Terreur de Robert Rodriguez. C’est du mauvais Bruce Willis, mais dans un bon film.

Roman - 666, l’histoire du Sphinx

Que restera-t-il des deux quinquennats d’Emmanuel Macron. Alors qu’il vient d’être investi hier pour son second mandant, c’est un autre président de la République, François Mitterrand, lui aussi élu à deux reprises, qui se retrouve au centre du second thriller signé Jérémy Wulc. L’action se déroule pourtant de nos jours. Sur le parvis lu Louvre, à quelques mètres de la fameuse pyramide, le corps d’une jeune touriste japonaise est découvert. Si elle est morte noyée, l’homicide ne fait aucun doute au vu des blessures infligées sur son corps. 

Avec un scalpel, l’assassin a pris le temps de graver à même la chair le chiffre de « 666, un pentagramme, et sur le côté, le compas et l’équerre, les symboles maçonniques. » Début tout en horreur pour cette enquête menée par Stanislas Diaminck. Ce policier très expérimenté est à la dérive. Il adore son boulot. Au point qu’il a négligé sa famille. Quand sa femme le quitte avec pertes et fracas en emmenant avec leurs deux enfants, il prend conscience combien il passait à côté de sa vie. Depuis il ne dort plus, passe ses nuits dans sa voiture, devant le nouvel appartement de son ex, à regarder, désespéré, ses fils partir à l’école. Cette enquête devrait le remettre en selle. Même si la pression est maximale car la jeune morte est la fille d’une sommité nipponne. 

Problème, dès le lendemain, un autre corps est découvert, avec les mêmes signes macabres, dans le réseau d’évacuation d’eau des colonnes de Buren. Un tueur en série qui risque de paniquer la capitale et faire beaucoup de dégâts dans le milieu très lucratif du tourisme culturel parisien. 

Justine chez les satanistes

Ce polar, assez classique dans son intrigue, devient plus original dans sa distribution. En plus du dépressif et très destroy Stan, on retrouve son adjoint, Khalid, jeune, compétent et dévoué. S’y ajoute une jeune policière, repérée par Stan sur la seconde scène de crime, Justine. Un sacré caractère qu’il décide, sur un coup de tête, d’intégrer à l’enquête. Le trio, très complémentaire, va se partager les pistes. Stan chez les Francs-Maçons, Justine dans les milieux satanistes qui vénèrent le diable et son chiffre, le 666. 

Quasiment deux romans en parallèle, qui n’ont parfois plus rien à voir l’un avec l’autre. Mais finalement la piste de François Mitterrand va permettre à Stan de résoudre l’affaire. Un héros sombre par certains côtés (son divorce, ses envies de suicide), mais si attachant par d’autres quand il compense son mal-être à coups de kebabs, de hamburgers et de litres de sodas. Reste le cas de Justine. Elle aussi fait partie de ces héroïnes qui marquent dans ce genre de littérature. 

Reste à savoir si Jérémy Wulc décidera d’en faire un personnage récurrent. Malgré quelques indices contraires, le lecteur ne peut qu’en avoir envie.     

« 666 » de Jérémy Wulc, Pygmalion, 19,90 €


mercredi 18 mai 2022

Série télé - Jane the virgin, fausse télénovela, vraie comédie

Certaines séries télé américaines cachent bien leur jeu. On pense être face à une énième variation sur les amours compliquées d’une jeune Américaine typique alors que se cache derrière une intrigue teintée de rose une comédie loufoque, caustique et totalement foutraque. 

Si Jane the virgin en est à sa 5e saison, ce n’est pas pour sa romance sans fin mais pour l’originalité de l’histoire, de la narration et des personnages. Sans oublier la facétie des scénaristes qui semblent s’amuser comme des fous à imaginer des rebondissements incroyables, pires que les trouvailles des feuilletonistes français du début du XXe siècle. Jane Villanueva (Gina Rodriguez) vit le parfait amour avec Michael (Michael Cordero Jr). Elle est serveuse dans un grand hôtel à Miami, lui policier. Amis d’enfance, ils sont en couple depuis trois ans, mais à la demande de sa grand-mère, Jane entend préserver sa virginité pour sa nuit de noces. 

La vie de Jane bascule quand une gynécologue, au lieu de lui faire un frottis, l’insémine avec la semence de Rafael (Justin Baldoni), le patron de l’hôtel. Une vierge enceinte ! Dans la communauté hispanique de Floride ! Alléluia ! La suite est une caricature des télénovelas d’Amérique du Sud, avec intrigue policière à rebondissements et histoires d’amour contrariées. Car Jane, enceinte de Rafael, va se découvrir des sentiments pour ce beau gosse très riche. Pas étonnant quand on découvre qu’il est marié à une méchante de la pire espèce, interprétée par Yael Grobglas, excellente actrice franco-israélienne.

 Cinq saisons plus tard et une centaine d’épisodes tous disponibles sur Netflix, les fans se demandent s’il y aura un jour une 6e et dernière partie à cette série définitive hors normes. 

 

Polar - De si bonnes mères

Céline de Roany vit en Australie. Mais elle est originaire de la région de Nantes, décor des aventures de Céleste Ibar. Cette policière marquée par la vie, pour sa seconde enquête, découvre les charmes de la Brière, un marais très touristique. Une jeune femme vient d’y être découverte assassinée. Comme il y a des similitudes avec un premier meurtre dont s’occupe Céleste, elle hérite de l’affaire. Mais en duo avec les gendarmes locaux.  L’entente est compliquée. Pourtant tout avance rapidement et dans ce petit milieu où tout le monde se connaît, un suspect est interpellé. Reste le mobile. Et surtout la découverte de fœtus de bébés. Et si la maternité était la cause de ce déferlement de violence ?  Un polar parfaitement documenté, crédible et plein de rebondissements. Avec une héroïne de plus en plus attachante.

« De si bonnes mères » de Céline de Roany, Presses de la Cité, 21 € 

mardi 17 mai 2022

Cinéma - “Les folies fermières” : un joyeux cabaret rural

De la botte de paille au flacon de paillettes, tout est bon pour sauver l’agriculture française.


Le monde agricole se meurt. Cette réalité impitoyable, si bien expliquée dans Petit Paysan, est au cœur d’un autre film sur ce sujet. Mais le réalisateur, Jean-Pierre Améris, dans Folies fermières, traite le sujet avec une bonne dose d’optimisme en s’inspirant d’une histoire vraie.

Dans le Cantal, l’exploitation de vaches laitières  de David (Alban Ivanov) est sur le point d’être placé en liquidation judiciaire. Il obtient du juge une ultime chance, deux mois de sursis au cours desquels il doit prouver la rentabilité de l’affaire. Très déprimé, après une tournée des bars d’Aurillac, il tombe par hasard sur une petite salle de spectacle proposant magie et danseuses. C’est l’illumination pour ce trentenaire trop longtemps considéré comme un rêveur par son grand-père (Guy Marchand). Il va transformer la grande grange inutilisée en cabaret, le premier implanté en pleine campagne. Ce seront les Folies fermières, mais il va falloir aller vite et surmonter nombre d’obstacles.

Casting improbable

Pour la partie artistique, il persuade  Bonnie (Sabrina Ouazani) de s’impliquer dans l’aventure. Sans doute la partie du film la plus comique. Car cette danseuse, toujours en minijupe et talons hauts, découvre boue, fumier et toiles d’araignée. Ce n’est pas son monde. David devra batailler pour la persuader. Et c’est ensemble qu’ils vont recruter les « talents » locaux qui vont constituer l’affiche du spectacle. Une magicienne muette, des danseuses jumelles désaccordées, un hypnotiseur souffrant de narcolepsie et un travesti qui chante du Dalida, mais que les chansons tristes car il trouve trop kitsch la période disco (un comble…). 

Bref il y a du travail, mais à force de répétitions, de sacrifices et de volonté, la mayonnaise va prendre et David va pouvoir entraîner dans son projet sa mère (Michèle Bernier) et son ancienne petite amie, Laetitia (Bérengère Krief), coiffeuse à domicile. Alban Ivanov domine de la tête et des épaules ce film humain et positif. Sa bonne bouille de candide est parfaitement adaptée à ce personnage d’agriculteur, fier de son métier, mais conscient que pour s’en sortir, de nos jours, il faut forcément s’adapter et faire des concessions. Une évolution inacceptable pour le grand-père, seul grain de sable dans la belle mécanique, dernier représentant de cette vieille école paysanne rétrograde et hostile à tout changement.

"Folies fermières", film français de Jean-Pierre Améris avec Alban Ivanov, Sabrina Ouazani, Michèle Bernier, Bérengère Krief

De choses et d’autres - Eurovision tripatouillée

Je n’ai pas regardé, ce samedi, le concours de l’Eurovision. D’abord, car je ne suis pas très chanson. Aussi, car si, durant quelques années, je me suis délecté de visionner au second degré ce show grotesque, persuadé que la majorité des millions de téléspectateurs avaient le même état d’esprit que moi, j’ai finalement compris que non ; le public apprécie au premier degré ces musiques formatées, ces chorégraphies ridicules et ce nationalisme à tous crins qui embrigaderait la culture.

Et puis, de toute manière, ce n’était pas la peine de regarder cette année puisque tout le monde savait qu’à la fin, c’était l’Ukraine qui l’emporterait.

Pourtant, dès le dimanche, des voix se sont élevées, en Europe, pour crier à la tricherie. La Roumanie, par exemple, a expliqué que son vote a été modifié. Les fameux 12 points (« twelve points ») avaient été normalement attribués à la Moldavie. Mais le jury de l’Eurovision, ayant détecté une possible manipulation avec « certains schémas de vote irréguliers », a modifié le résultat. Six pays ont vu leur classement rectifié. Au profit de l’Ukraine qui devait, quoi qu’il arrive, être déclarée gagnante. Un tripatouillage qui n’honore pas l’Europe, à l’heure de la chasse aux fake news, aux tentatives de manipulation de l’opinion.
Dans cette Eurovision 2022, une seule chose n’a pas changé, les candidats français ont terminé dans les profondeurs du classement. Pour l’emporter une nouvelle fois (remember Marie Myriam et son Oiseau et l’enfant), il ne reste qu’une solution : que l’Espagne, l’Italie ou la Belgique nous déclarent la guerre et tentent de nous envahir.

Chronique parue en dernière page de l’Indépendant le vendredi 20 mai 2022

lundi 16 mai 2022

Cinéma - Les clichés de l’amour

"On sourit pour la photo", film français de François Uzan avec Jacques Gamblin, Pascale Arbillot, Pablo Pauly, Agnès Hurstel


Les comédies françaises sur la famille inspirent toujours autant les scénaristes. Cette fois c’est François Uzan qui écrit et réalise On sourit pour la photo, chronique d’un divorce annoncé et de vacances catastrophiques en Grèce. Un film un peu déstabilisant par moments, passant de la grosse rigolade efficace aux séquences émotion plus laborieuses. 

Dans la famille Hamelin, le père, Thierry (Jacques Gamblin), jeune retraité, cherche à s’occuper. Il se lance donc dans la numérisation de toutes les photos de famille. Une marotte qui a le don de prodigieusement énerver son épouse, Claire (Pascale Arbillot), médecin toujours en activité qui se découvre mariée à un homme ayant perdu toute son originalité. Les enfants aussi, devenus adultes, trouvent ce papa pénible. Quand Claire annonce à Thierry son intention de divorcer, il décide le tout pour le tout afin de reconquérir son épouse et retrouver la joie d’antan. Il tombe sur une photo d’eux quatre en Grèce lors de vacances en 1998. Il décide d’organiser le même périple estival, 20 ans plus tard. 

Le ressort comique doit beaucoup aux enfants. Karine (Agnès Hurstel), avocate, sérieuse et bosseuse, fiancée avec son amour d’enfance, posé et sentencieux, est l’exact opposé d’Antoine (Pablo Pauly), éternel ado tentant de lancer des start-up improbables tous les trois mois. Voulant respecter à la lettre le voyage de 1998, Thierry va devoir faire face à la révolte du reste de la famille. Pour tenter de s’en sortir, il va se lancer dans une spirale de mensonges aux lourdes conséquences. 

Loin d’être transcendant, ce premier film est gentil, parfois comique (merci Pablo Pauly, Agnès Hurstel et Ludovik dans le rôle du fiancé de Karine), mais ressemble souvent un peu trop à une sorte de film publicitaire décalé pour la Grèce, ses plages, ses restaurants et (un peu moins) ses hôtels.

De choses et d’autres - Nourriture évolutive

Quand on fait des métiers peu glorieux, il suffit parfois d’en changer l’orthographe pour en redorer le blason. A Montreuil, un jeune restaurateur a décidé de lancer son affaire. Mais comme ses compétences culinaires semblent assez limitées, il se contente d’ouvrir un énième kebab. Comment, dès lors, se démarquer de ses milliers de concurrents qui, eux, ont déjà pignon sur rue ?

Simple, il suffit de placer la barre de viande à l’horizontale, de nommer le restaurant Horizontal et de préciser en lettres très classes à côté sur la devanture : « artisan quebabiste ». Rien à voir avec le kebab : chez Horizontal, on sert des quebabs artisanaux à la viande cuisinée dans une cheminée, tel un gâteau à la broche aveyronnais. La diffusion sur les réseaux sociaux de la photo de la devanture du restaurant a été beaucoup commentée, permettant au génial « artisan quebabiste » de bénéficier d’une campagne publicitaire.

L’idée est si bonne qu’il serait idiot de ne pas la décliner, pour surfer sur la vague de la gastronomie renommée. J’imagine parfaitement un restaurant en spécialités anglaises servant des « Fiches Andes Ships » soit du poisson pané et des frites, mais présentés dans des fiches bristol fabriquées en Colombie et pliées en forme de petit bateau.

Accepteriez-vous de goûter à une Pizza Princesse ? C’est comme une pizza reine, mais un peu plus jeune, moins cuite quoi…

Et dans l’Aude, attendez-vous à voir arriver sur les tables sélectes le K-soulet. Comme le plat typique de Castelnaudary, mais avec des haricots et des saucisses en provenance de Corée. À déguster, en écoutant de la K-pop, évidemment.

Chronique parue en dernière page de l’Indépendant le jeudi 19 mai 2022

dimanche 15 mai 2022

Cinéma - Les belles années des “Passagers de la nuit”

À quoi ressemblait  la famille dans les années 80 ? Réponse avec "Les passagers de la nuit", très beau et très sensible film de Mikhaël Hers.


La nostalgie, camarade ! Les passagers de la nuit, film de Mikhaël Hers, s’ouvre le 10 mai 1981, soir de l’élection de François Mitterrand. Sans doute la dernière fois que le France, toutes origines confondues, était en fête. Depuis il y a eu d’autres victoires, mais pas de fête. Encore moins de grand soir. La politique est omniprésente dans cette histoire qui dépeint une famille parisienne dans ces insouciantes et très optimistes années 80. Pourtant, rien ne va plus dans la vie d’Élisabeth (Charlotte Gainsbourg), la mère de deux grands adolescents, Mathias (Quito Rayon Richter) et Judith (Megan Northam). 

Son mari vient de la quitter. Elle se retrouve seule dans cet immense appartement d’une encore plus grande tour du quartier de Beaugrenelle. Une mère au foyer qui va devoir rapidement trouver du travail. Grande insomniaque, elle va tout simplement solliciter Vanda (Emmanuelle Béart), l’animatrice de l’émission de confidences nocturnes “Les passagers de la nuit” qu’elle écoute régulièrement. C’est là, alors qu’elle filtre les appels au standard, qu’elle va rencontrer Talulah (Noée Abita), une jeune un peu paumée, allant de squat en squat. Elle va lui proposer une chambre et agrandir temporairement la famille. 

Après le très remarqué Amanda, avec Vincent Lacoste, Mikhaël Hers récidive dans la chronique sociale. Mais en plaçant son récit dans ces années 80 (de 1981 à 1988 exactement, un septennat…), il offre également à nombre de spectateurs une appréciable bouffée de nostalgie. Que la vie était simple et pleine d’opportunités à cette époque. Élisabeth, avec son don pour l’écoute des autres, va s’épanouir à la radio.  

Mathias peut se rêver en poète ou écrivain. Il a un emploi alimentaire mais propose toujours ses écrits aux maisons d’éditions, attendant avec impatience les réponses par courrier. Judith poursuit ses études et a envie de faire de la politique. A gauche évidemment. Quant à Talulah, petit oiseau fragile, elle va se reposer dans ce havre de paix, mais ses démons intérieurs la font culpabiliser de ce bonheur qu’elle estime ne pas mériter. Quatre parcours de vie typiques de ces années 80, libres et enthousiastes, une période que le réalisateur regrette tant de ne pas avoir vécu à l’âge de Mathias ou Judith. 

Film de Mikhaël Hers avec Charlotte Gainsbourg, Quito Rayon Richter, Noée Abita, Emmanuelle Béart

De choses et d’autres - Ne pas dépasser les bornes

La nomination d’Élisabeth Borne à Matignon a suscité une déferlante de réactions. Rarement favorables, il faut bien le reconnaître. Car dans la masse de commentateurs encartés de la politique française, il y a beaucoup plus d’hommes que de femmes. Or, pour ces derniers, la nomination de l’ancienne ministre du Travail au poste de chef du gouvernement est, avant tout, un coup de griffe à leurs privilèges.

D’entrée, le communiqué de l’Élysée a parlé de « Première ministre ». Une féminisation de la fonction qui en dit long et que beaucoup ont eue toutes les difficultés à appliquer. Mais en ces temps de parité et d’égalité, difficile de s’attaquer frontalement au genre de la Première ministre. Alors, ils se sont lâchés en trouvant quantité de jeux de mots ou références se voulant comiques autour du nom.

En français, cela a permis à certains de faire remarquer que Macron, pour recharger les batteries de son gouvernement, doit passer par la borne. En anglais, c’est le « Borne out » qui a eu le plus de succès. D’abord lancé en pâture par Fabien Roussel, ancien candidat du parti communiste : « Cette nouvelle première ministre, c’est le borne out immédiat pour tous les Français. »

Quasiment la même formulation de la part de Jean-Luc Mélenchon (comme quoi, parfois, communistes et Insoumis peuvent se trouver des points communs) « A la SNCF, ils l’appelaient madame burn-out. »

La misogynie a donc fait un retour en force, en France, ce lundi. Mais il y a deux ans, c’était la glottophobie (la haine des accents) qui s’imposait dans l’intelligentsia parisienne pour se moquer de l’arrivée de Jean Castex à Matignon.

Chronique parue en dernière page de l’Indépendant le mercredi 18 mai 2022