mardi 30 août 2016

DE CHOSES ET D'AUTRES : Pokémon (livres) Go

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Il ne faut jamais désespérer des modes. Cet été le jeu Pokémon Go a déferlé sur la France. L'engouement pour cette chasse aux bestioles virtuelles finira bien par retomber. Plus intéressant, certains y ont trouvé des idées pour ajouter un zeste de culture. Une directrice d'école belge a décidé d'utiliser les "Pokéstops" (lieux où les Pokémon sont nombreux) pour y déposer les livres en fin de vie de la bibliothèque scolaire. Le principe du bookcrossing combiné à la géolocalisation. Des dizaines de livres aban'donnés' ont leur page sur un groupe Facebook dédié avec la possibilité de savoir où ils ont été déposés et de les suivre à la trace. Car le principe, une fois l'ouvrage lu, est de lui permettre de prolonger son voyage. Une initiative belge concentrée sur la partie francophone du pays.
L'idée a fait des émules en France, notamment en Gironde. Mais le succès est moindre. Plus de 52 000 membres pour le groupe belge contre seulement 83 près de Bordeaux. Mais en une seule journée !
En ces temps de rentrée littéraire, il est toujours bon de saluer les initiatives favorables à la lecture. Plus de 600 romans vont tenter de trouver leur public sur deux petits mois. Il y aura forcément beaucoup de déçus. Alors messieurs les éditeurs, au lieu de confier tous vos invendus au pilon, chargez des brigades de "chasseurs de livres" d'en dispatcher une partie un peu partout en France. Une seconde chance pour certains auteurs et la certitude de donner envie de lire à des hommes et femmes qui n'en ont pas les moyens financiers.

BD : mythologie indienne

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Comment puiser dans la mythologie pour renouveler le western ? Xavier Dorison, scénariste d'Ulysse 1781 a trouvé la solution. Le héros, un mercenaire téméraire, est chargé de convoyer à travers les montagnes de cette Amérique du Nord encore sous la coupe des Anglais un bateau sur roues. Mais son équipage s'aventure dans une vallée maudite et il doit affronter un Wendigo, esprit sacré indien incarné dans un géant. Dessiné par Hérenguel, le second tome de cette série prometteuse est presque entièrement consacré au combat entre Ulysse et le monstre. Beaucoup d'action et des décors gigantesques dans ces 50 pages se terminant par un double rebondissement, pour Ulysse mais également pour sa femme, restée en ville et convoitée par d'infâmes soldats britanniques.
« Ulysse 1781 » (tome 2), Delcourt, 15,50€


lundi 29 août 2016

DE CHOSES ET D'AUTRES : Bouchon dur

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470 kilomètres de bouchons sur les routes de France samedi pour le dernier chassé-croisé des vacances. Un chiffre abstrait sauf quand on se retrouve au cœur de ce grand embouteillage. Prudents, pour revenir dans le sud après une semaine de vacances, nous avons, mon épouse et moi, préféré anticiper et avaler vendredi les 1 195 kilomètres entre Oisquercq (Belgique) et Pollestres (Occi... pardon, Pays catalan). Bonne pioche à part un petit ralentissement à Montpellier. Radio bloquée sur le 107,7 Mhz, celle de l'autoroute, les incidents signalés ne nous concernent heureusement pas : beaucoup de morceaux de pneus sur la chaussée, un piéton sur le terre-plein central, un semi-remorque immobilisé suite à la rupture de son arbre de transmission et même un sanglier écrasé.
Passé Lyon, cela se complique. Mais uniquement pour les malheureux obligés de quitter le soleil du Midi pour les froidures du Nord (même si ce week-end, on y constatait des températures bien plus élevées). Sur trois voies et une cinquantaine de kilomètres, voitures et camions se retrouvent à l'arrêt. Un carambolage ? Non, selon les journalistes, de simples "ralentissements" dus à des "coups de frein". Même pas un embouteillage, encore moins un bouchon.
Il semble que dans ce milieu, un bouchon corresponde minimum à une heure d'immobilisation. Quand ce temps est dépassé (comme ce fut le cas samedi), la radio de l'autoroute parle de "bouchon dur". J'ai appris quelque chose. Par chance, je ne l'ai pas vécu.
Et maintenant, en route pour les nouvelles aventures de la rentrée.

BD : les petits riens du délire quotidien


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Geoffroy Monde, auteur de « De rien », recueil d'histoire courtes, avoue être influencé par Goossens. En réalité, ses nouvelles graphiques ressemblent à du Goossens tout craché. Totalement absurdes, ces sortes de sketches auraient tout à fait leur place dans Fluide Glacial. Parmi les quelques perles de ces 160 pages, ne manquez pas « L'interrogatoire ». Dans une cave, deux policiers tentent de faire parler un suspect. A grand renfort de gifles? ils veulent des réponses « Donne le C horizontal, ordure. Allez, crache. 7 lettres, putain. » Ou comment faire ses mots croisés sans se fatiguer... Beaucoup plus mouvementée la scène avec Jackie Chan en vedette. Dessin numérique en couleur, décor au trait : Geoffroy Monde est de plus un excellent illustrateur au style très personnel.
« De rien », Delcourt, 17,95€


dimanche 28 août 2016

DVD : Vacances tragiques autour d'une piscine

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Remake très modifié de "La piscine" de Jacques Deray, "A Bigger Splash" de Luca Guadagnino avec Tilda Swinton, Ralph Fiennes et Dakota Johnson est le film parfait pour rester dans l'ambiance caniculaire de cet été 2016. Sur une petite île italienne au large de la Sardaigne, avec la Tunisie en ligne d'horizon, une rock star cherche calme et tranquillité. Opérée des cordes vocales, elle doit rester muette encore de longues semaines. Installée dans une villa luxueuse avec son boyfriend du moment, elle se partage entre balade dans la garrigue, séances de bronzette et plouf dans la piscine. Un séjour paisible qui vole en éclat quand son ancien amant et mentor dans la musique, débarque à l'improviste avec sa très jeune fille. Ce ménage à quatre provoque de fortes tensions, jusqu'au point de rupture. Ce huis clos au grand air offre un formidable rôle à Ralph Tiennes, exubérant au possible, passionné, manipulateur et sorte de démon de la star. Dakota Johnson, dans la fille lascive et provocante est parfaite et Tilda Swinton, partagée entre son passé tumultueux et son présent sage, ne sait plus quoi faire. Le film vaut essentiellement pour les performances d'acteurs au summum de leur art.
"A bigger splash", Studiocanal, 19,99 euros

samedi 27 août 2016

Cinéma : L'inexorable envie de fuite en avant de "Rester vertical"

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Face à l'adversité il faut "Rester vertical", titre du film d'Alain Guiraudie au cours duquel ses personnages semblent en permanence chercher un ailleurs inaccessible.




Si "L'inconnu du lac" a fait scandale lors de sa sortie, "Rester vertical", dernier film d'Alain Guiraudie ne devrait pas lui non plus passer inaperçu. Le réalisateur filme des scènes d'amour sans détour, avec un réalisme qui se moque des apparences et des codes du genre. Côté politique, il aborde également des sujets très clivants comme l'euthanasie assistée ou, de façon indirecte, la GPA, gestion pour autrui réclamée par la communauté homosexuelle. Reste que ce n'est pas l'essentiel du film, ancré dans le réel, mais avec surtout des personnages déboussolés, perdus dans leur propre vie qu'ils n'assument plus.
La fermière et le scénariste
Le héros, Léo (Damien Bonnard) est un scénariste en perdition. Son producteur lui réclame un début d'histoire, quelques scènes, juste de quoi justifier les nombreuses avances déjà consenties. Mais Léo est sec. Il erre sur le Causse Méjean, homoncule dans une nature grandiose. Il croise le chemin de Marie (India Hair), jeune bergère. Elle surveille son troupeau de brebis, un fusil à l'épaule. Les attaques de loups se multiplient. Léo et Marie, presque comme dans un film romantique à la "Farrebique", se plaisent, s'aiment. Le scénariste abandonne ses tracas d'écriture pour vivre le parfait amour dans cette ferme appartenant au père de Marie, Jean-Louis (Raphael Thiéry). Un an plus tard, Léo cache pourtant bien des choses à Marie, la mère de son enfant. Il va régulièrement dans une petite bourgade pour tenter de rencontrer Yoann, jeune éphèbe qu'il rêve de faire apparaître dans son prochain film. Léo a la sexualité aussi sinueuse que les routes de Lozère où est tourné le film, comme toujours dans les créations d'Alain Guiraudie, parfait exemple de récits politiquement non corrects. Quand Marie quitte la ferme, abandonnant le bébé à un Léo désemparé, le film bascule dans la fable sociale grinçante. Un homme seul, avec un bébé, sans domicile fixe ni revenus ? Difficile de s'intégrer dans le paysage français policé. La suite du film consiste à plusieurs allers-retours entre la ferme sous la menace des loups, le marais poitevin et une druidesse très nature, et Brest, sa grisaille et ses clochards. En passant par Séverac-le-Château, village d'Aveyron où Léo fausse compagnie à des gendarmes, personnages récurrents de tous les films de Guiraudie. Pour boucler cette histoire, il fallait l'intervention d'un élément extérieur fort. Le loup, dont la menace a plané tout le long du film peut entrer en scène.
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Partir, toujours partir
rester vertical,gay,guiraudie,berger,loupMoins extravagant que ses précédents longs-métrages, "Rester vertical" d'Alain Guiraudie charme par ces magnifiques paysages d'une nature dure et généreuse. Les scènes sur Causse donnent une furieuse envie d'aller s'y balader, seul, comme Léo, avec un simple petit sac à dos. À moins que les plus bucoliques ne préfèrent les promenades en barque dans le marais poitevin noyé de soleil. Images et décors d'une rare beauté, contrepoints d'une histoire âpre. Cinquième film d'Alain Guiraudie, "Rester vertical" a parfois des ressemblances avec "Le roi de l'évasion", son troisième long-métrage. Léo, recherché par son producteur puis par les gendarmes, au lieu de faire face à l'adversité, choisit la fuite. Dans "Le roi de l'évasion" aussi le personnage principal prenait ses jambes à son cou quand la situation devenait trop compliquée. Autre ressemblance entre les deux films, le milieu social. Il y est beaucoup question de paysans et de personnes isolées. Et d'envie de tout plaquer pour aller vivre ailleurs, mieux, forcément mieux. Quand Léo se retrouve bloqué dans des buissons, c'est comme quand Armand et Curly fonçaient dans les bois. Ils parvenaient à semer les chiens de la gendarmerie en marchant dans une rivière. Léo, de la même façon, disparaît aux yeux de son producteur en se plongeant dans le marais poitevin. Et puis il y a la question de l'homosexualité. Chez Alain Guiraudie, elle semble généralisée. Quasiment tous les personnages du "Roi de l'évasion" étaient homosexuels, du commissaire aux agriculteurs en passant par Armand, représentant de commerce. Même constat dans "Rester vertical où, étrangement, le père de Marie, ogre terrifiant, devient tout doux quand il avoue à Léo qu'il a envie de lui...

vendredi 26 août 2016

Rentrée littéraire : les platanes de Christian Laborde


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Écrivain du Sud-Ouest, Occitan oserait-on dire au risque d'irriter quelques Catalans, Christian Laborde a beaucoup écrit sur le sport. Dans ce, roman lancé dans la cohue de la rentrée littéraire, il préfère jouer sur la corde nostalgique. A deux niveaux. Rock pour le narrateur, France profonde pour le portrait des grands-parents disparus.
L'occasion aussi de pousser quelques gueulantes : contre les multinationales du net qui tuent les libraires et les élus qui coupent des platanes sous couvert de sécurité routière.
D'une écriture alternant uppercut rageurs et tirades lyriques. Tom, le narrateur, quitte la région parisienne pour rejoindre ce Sud tant aimé. Sa grand-mère vient de mourir. Un voyage triste ? Non car il part avec la belle Joy, pétillante copine qui n'a pas sa langue dans la poche.
Presque un road movie, avec de gros morceaux d'amour dedans, le tout saupoudré de souvenirs joyeux. A déguster frais, à l'ombre de ces platanes devenus trop rares le long des routes de la région.
« Le sérieux bienveillant des platanes » de Christian Laborde, éditions du Rocher, 14 €.

jeudi 25 août 2016

Rentrée littéraire : Le vilain canard et la belle endormie d'Amélie Nothomb

Amélie Nothomb s'aventure sur les terres du conte pour une nouvelle fable sur la différence.
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Rendez-vous incontournable de la rentrée littéraire, le nouveau roman d'Amélie Nothomb s'aventure sur les terres du conte. En intitulant son roman « Riquet à la houppe », elle plante clairement le décor. Deux héros aux prénoms bizarres, comme toujours avec la romancière belge. Déodat, laid et savant. Trémière, belle et mutique.
Le livre se déroule de leur naissance à leur rencontre. Bébés, puis obligés d'aller à l'école, source de toutes les brimades. Premier sujet de plaisanterie : leur prénoms. Déodat devient dans la bouche des caïds vulgaires de la cour de récré « Déodorant ». Trémière, pour les petites pestes, futures lectrices de magazines spécialisés dans les ragots, se transforme en « la crémière ». Mais il en faut plus à ces deux introvertis pour être déstabilisés. Leur force intérieure est bien supérieure aux mesquineries du quotidien.
Surdoué, Déodat s'intéresse à tout, jusqu'au jour où un événement cocasse lui fait lever les yeux aux ciel et qu'il découvre l'existence des oiseaux. Il se passionne, ne vit plus que par eux, devient de fait un ornithologue renommé.
La trop belle Trémière
Malgré sa laideur, comme dans le conte de Perrault, il plait beaucoup aux femmes. Femmes dont il ne comprend pas toujours les demandes d'attention quand elle sont amoureuses. « A la réflexion, l'insatisfaction et la vulgarité pouvaient s'interpréter comme les versions féminines et masculine d'une force identique : le désir. Celui-ci constituait le socle, la définition, le magma originel. » Visage ingrat et de plus quasi bossu. Heureusement la médecine moderne le redresse, au prix de quelques années coincé dans un corset métallique et de deux années de massages par une charmante kinésithérapeute qui malheureusement n'est pas sensible aux charmes de celui qui est surnommé « Riquet à la huppe » par ses facétieux collègues.
A l'opposé du jeune homme, Trémière paraît idiote. Sa mère la confie à la grand-mère, cartomancienne fascinée par les bijoux et les pierres précieuses. Trémière, belle mais bête ? Non, simplement contemplative, passive. C'est comme ça qu'elle supporte les moqueries de ses méchantes camarades, par l'indifférence. Car souvent, la trop grande beauté est tout aussi moquée que la laideur.
Le roman d'Amélie Nothomb est construit comme un double miroir inversé. Les itinéraires parallèles de Déodat et Trémière finissent par se rejoindre et la fin de l'histoire, si elle avait fait partie de la Comédie humaine de Balzac, serait dans la petite minorité (6 % des cent quarante sept ouvrages) mise en lumière par Amélie Nothomb qui parvient une nouvelle fois à nous distraire tout en nous apprenant quantité de choses sur l'art, la vie et l'amour.
« Riquet à la houppe » par Amélie Nothomb, Albin Michel, 16,90 €.

mercredi 24 août 2016

BD : Renoir et ses deux muses


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La collection « Les grands peintres » loin d'être une simple encyclopédie, permet à des auteurs de BD de proposer des regards originaux sur ces maîtres du passé. Dodo et Ben Radis se penchent sur Renoir. Mais au lieu de raconter linéairement la vie d'un des précurseurs de l'impressionnisme, le couple parle des modèles. Pour peindre, un artiste a besoin d'une muse, d'un modèle qui l'inspire. Renoir en a eu deux qui ont beaucoup compté. En 1893, en pleine remise en question de son style, il reçoit la commande de deux toiles. Suzanne Valandon posera pour « Danse à la ville », Aline Charigot pour « Danse à la campagne ». L'histoire de ces deux toiles, les rivalités des deux femmes et l'amour très partagé de l'artiste est au centre de cet album d'une grande érudition. On croise également dans ces pages Satie, Cézanne et Monet en plein déménagement vers Giverny.
« Renoir », Glénat, 14,50 €

mardi 23 août 2016

BD : "Red Skin", une héroïne en rouge vif


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Capitalistes numérotez vos acabits, « Red Skin », la justicière communiste débarque aux USA. Écrite par Xavier Dorison et dessinée par Terry Dodson, cette série entre humour et glamour, brocarde les histoires de superhéros et les bondieuseries américaines. Red Skin c'est Véra Yienikof, espionne au service de l'URSS à la fin des années 70. Envoyée en mission en Californie, elle doit favoriser la signature du traité de désarment Salt. Sa couverture ? Assistante d'un réalisateur de films pornographiques. Un rôle loin de déranger la belle soviétique qui, en dehors de siroter de la vodka, aime particulièrement faire l'amour où et quand et avec qui elle veut. Sur son chemin se dresse Le Charpentier, catholique intégriste. Un combat homérique l'oppose donc à la justicière communiste armée d'un marteau et d'une faucille. Ce récit plus savant qu'on ne le croit, bénéficie des dessins de Dodson, expert en jeunes femmes dénudées pour le plaisir des yeux de ses nombreux lecteurs esthètes (et un peu salaces...).
« Red Skin » (tome 2), Glénat, 14,50€