samedi 8 novembre 2014

BD : Adorables voleurs


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Dans l'univers Disney, les méchants ne sont pas nombreux. Les frères Rapetou, voleurs maladroits, s'ils commettent de mauvaises actions, ne sont pas à proprement parler méchants. Dans la collection des grands Héros Disney, ce recueil de 150 pages propose une dizaine d'histoires courtes farfelues pour ces « irrécupérables Rapetou ». Attirés par les diamants, billets et autres babioles qui brillent, ils tentent en vain de cambrioler riches et nantis. Spécialistes des déguisements improbables, ils ratent systématiquement leurs coups et finissent régulièrement en prison. Mais ce n'est pas pour leur déplaire. Car en plus d'être voleurs, les Rapetou sont fainéants et passer quelques mois nourris logés blanchis n'est pas pour leur déplaire. Parfois, les histoires font penser à des aventures des Pieds Nickelés. Comme ce récit où ils découvrent les prix exorbitants de certaines œuvres d'art contemporain. Ils deviennent donc artistes et voient leur côte monter en flèche. Enfin riche ? Patatras, nouvelle désillusion... Simples et efficaces, ces histoires courtes traversent les décennies sans aucune difficulté.

« Irrécupérables Rapetou », Glénat, 14,95 €

DE CHOSES ET D'AUTRES : Les ragondins de la honte

ragondins, fnsea, agriculteurs, bardot, cruauté, animaux, requins marteauxQuelques ragondins maltraités lors d'une manifestation de la FNSEA ont suffi à réveiller les zélés activistes de la cause animale. Balancés sans ménagement par dessus les grilles d'une préfecture, repoussés à coups de pieds puis recouverts de peinture rouge, les pauvres bêtes n'ont pas compris ce qui leur arrivait.
D'accord, le ragondin n'a jamais été un animal très sympathique. Cet énorme rat colonise de plus en plus les points d'eau de France et de Navarre mais ne s'approche jamais des humains. Pas folle la bête...
Les sévices infligés à ces placides rongeurs ont totalement éclipsé les motifs de désespoir de la France agricole. La faute à quelques « intégristes verts » (selon la terminologie officielle du premier syndicat agricole) qui ont surfé sur ces images de cruauté envers d'innocentes créatures. L'image du paysan qui prend soin de ses bêtes en sort écornée...
Ces mêmes protecteurs des animaux ont taillé en pièces le livre de Vivien Le Jeune Durhin aux éditions des Requins Marteaux. Ce « Manuel de cruauté envers les animaux » donne force détails pour couper la tête à un poulet, arracher les ailes d'une mouche ou donner un coup de pied à un hippopotame. Il s'agit là bien évidemment d'un ouvrage satirique. L'auteur entend dénoncer certaines pratiques existantes, en précisant, dès la page 4, l'illégalité des tortures animales. Mais le second degré a parfois du mal à passer chez des militants trop investis. Résultat, une campagne de boycott du livre est lancée sur les réseaux sociaux.
Autant l'émoi suscité par les ragondins est compréhensible, autant cette seconde action est d'un ridicule achevé... 

vendredi 7 novembre 2014

BD : le Fantastique caché d'ANGE de Robillard


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Romans fantastiques destinés à la jeunesse, « A.N.G.E. » d'Anne Robillard est enfin adaptée en bande dessinée. La romancière québécoise signe les scénarios en personne et confie les destins graphiques de ses personnages à Cristi Pacurariu. L'Agence nationale de gestion de l'étrange, l'Ange, existe depuis le 19e siècle. Fondée par deux francs-maçons, elle a pour but de percer les mystères de certaines croyances. De nos jours, à Montréal, Océane Chevalier, jeune membre d'Ange, est chargée de former Cindy Bloom, nouvellement engagée. Elles travaillent au service des faux prophètes. Leur mission : démasquer les charlatans cupides qui profitent de la naïveté des gens. Leur premier client est Eros, « unique représentant du kyriotétès en Amérique ». Rapidement neutralisé, il est emprisonné par la police canadienne. Mais au cours de son incarcération il est abattu par un démon au service de l'antéchrist. C'est le début d'un violent combat entre les agents d'Ange et ces sous-diables malfaisants. On retrouve dans la BD toute l'ambiance fantastique des romans. Le dessinateur assombrit son trait pour amplifier l'impression de ténèbres. Une BD efficace, parfaite pour ceux qui veulent retrouver l'atmosphère des romans d'Anne Robillard.

« A.N.G.E. » (tome 1), Jungle Thriller, 11,95 €

DE CHOSES ET D'AUTRES : Cent livres ivres

cent titres, mélois, foenkinos, grasset,renaudot« Parlotte » de David Fouette-Nikos a remporté le prix Renaudot. Oups, pardon, j'ai mal lu. Le véritable lauréat est David Foenkinos pour « Charlotte ». En fait j'ai détourné par anticipation la couverture à la manière de Clémentine Mélois. Cette jeune écrivain-artiste vient de publier chez Grasset le livre le plus réjouissant de la rentrée littéraire.
« Cent titres » présente cent couvertures de livres réels ou imaginaires. Le principe est simple : prenez un chef-d'œuvre de la littérature, passez-le à la moulinette des jeux de mots abscons et vous obtenez un fou rire garanti. Avez-vous déjà lu « Du côté de Sichuan » de Proust ou « Wifigénie » de Racine ? Moins dramatique que l'original, « Légume des jours » de Boris Viande vous apportera votre ration quotidienne de vitamines.
Claude Levi-Strauss est doublement à l'honneur : « Cinq cent un » (comme les jean's) et « Tristes sunlights des tropiques » où un indigène arbore de superbes lunettes de soleil. Ces « Méditations poétiques » de Lamartine semblent normales si ce n'est, en couverture, la représentation du visage poupon de Martine, l'héroïne pour enfants.
Une page blanche remplie de ratures illustre « Maudit Bic » de Melville. On rit d'avance à ce titre inédit de Sade, « Justine Bieber ou les malheurs de la vertu ». Clémentine Mélois précise pour les incultes que « Justin Bieber est un chanteur-compositeur canadien à mèche. »
La plus compliquée à comprendre reste « Coyotte » de Jacques Lacan... Un indice, il y est question d'une chanson d'Hubert Félix-Thiéfaine à propos d'une spécialité de Franche-Comté...
Réponse en image :

jeudi 6 novembre 2014

Cinéma : Réfugiée dans son propre pays

Avant la chute du Mur, des Allemands de l'Est parvenaient à passer à l'Ouest. Récit de ce parcours éprouvant dans « De l'autre côté du mur ».
Un quart de siècle déjà que le symbole le plus fort de la partition du monde entre Est et Ouest est tombé. Il y a 25 ans, le mur de Berlin était abattu sous les coups de boutoir de la population de la RDA. 25 ans que l'Allemagne est redevenue une seule nation, reléguant aux oubliettes cette séparation idéologique obsolète.
Le film de Christian Schwochow ne raconte pas ce fait historique mais les à côtés de la guerre froide, en 197510. Quand la RFA servait de refuge à quelques rares dissidents suffisamment déterminés pour risquer leur vie. Nelly (Jördis Triebel), jeune mère d'Alexei, un garçon de dix ans, chercheuse en chimie, ne supporte plus la paranoïa de la RDA et les interrogatoires incessants de la Stasi. Elle décide de rejoindre la RFA et ses espoirs de liberté, de démocratie, de renaissance.

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La jeune femme n'est pas spécialement une dissidente. Son départ est plus personnel. Le père d'Alexei, un scientifique russe, a disparu du jour au lendemain. Nelly apprend qu'il aurait trouvé la mort dans un accident de la circulation à Moscou. Mais alors pourquoi la police politique ne cesse de l'interroger à son sujet. Et pourquoi a-t-elle perdu son emploi ?
Après un passage humiliant de la frontière (fouille au corps entièrement nue), Nelly est hébergée dans un centre provisoire. Là, dans cet ensemble qui a tout l'air d'une prison, des centaines de réfugiés de l'Est tentent d'obtenir le droit de librement circuler à l'Ouest. Ils doivent obtenir un sauf-conduit décerné par les services secrets des Alliés. Nelly quitte un cauchemar pour un mauvais rêve qui y ressemble furieusement. Là aussi elle a droit à une fouille au corps sans ménagement et à de longs interrogatoires par un agent américain, interprété par Jacky Ido, l'acteur français originaire du Burkina Faso. Les questions tournent essentiellement autour du père d'Alexei, Nelly est-elle venu le rejoindre ?

Ce film, à l'ambiance lourde et paranoïaque, montre comment la guerre froide, la suspicion permanente et la crainte des agents infiltrés a parfois dégoûté des hommes et des femmes de cette liberté promise à l'Ouest mais jamais accordée. Une page noire de l'histoire de la RFA méconnue et parfaitement expliquée dans un film sobre mais pas aussi pessimiste qu'il ne semble.

mercredi 5 novembre 2014

DE CHOSES ET D'AUTRES : Inaccessibles étoiles

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Aujourd'hui sort "Interstellar" le film de Christopher Nolan. Près de trois heures d'évasion totale sur la conquête spatiale comme on n'a jamais osé la mettre en images. Sur une trame classique (et on ne peut plus d'actualité), les États font le constat que les réserves de la Terre s'épuisent. Encore une génération et clap de fin pour l'Humanité. Il y a urgence à trouver un autre monde pour la survie des Humains. Le héros, interprété par Matthew McConaughey, pilote un vaisseau spatial pionnier vers ces inaccessibles étoiles.
Film le plus attendu de cette fin d'année, "Interstellar" permettra aux rêveurs impénitents de mon genre de se consoler face à la triste réalité de la conquête spatiale actuelle. Car dans les faits, nous ne sommes même plus capables de faire des sauts de puce hors de l'atmosphère. La dernière fusée de ravitaillement de la station spatiale a explosé juste après le décollage, transformant le pas de tir en fournaise ardente.
Pire, le vaisseau élaboré dans le plus grand secret par Virgin Galactic, SpaceShipTwo, s'est écrasé au cours de son troisième vol d'essai. Un pilote est mort dans le crash, le second est grièvement blessé.
D'un côté un film grandiose enrichi d'effets spéciaux et des technologies innovantes, de l'autre des échecs, preuves de l'extrême difficulté de quitter le plancher des vaches. On pourrait déprimer, se dire que finalement les dés sont jetés, il est trop tard... C'est sans compter avec l'opiniâtreté de Richard Branson, PDG de Virgin. Même si quelques minutes en apesanteur, qui plus est réservées aux plus riches, ne sauveront pas notre planète...
En bonus internet, la bande annonce d'Interstellar


et la vidéo de l'explosion de la fusée américaine...

BD : l'histoire d'un gros mangeur racontée par Cha et Eldiablo


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Cha et Eldiablo aiment faire dans le culinaire. Après le très noir « Pizza Roadtrip » (en cours d'adaptation au cinéma), ils proposent, toujours chez Ankama, « Un homme de goût ». Au Guatemala de nos jours, un riche industriel, grand, fort et musclé, quitte son bureau et rejoint sa luxueuse villa. Son homme à tout faire confirme la venue dans moins d'une heure d'une jeune femme brune. Il se détend un peu et quand la sonnerie retentit, commence à se lécher les babines. Mais la brune attendue est finalement blonde, très maigre et vieille. Le face à face entre Jamie Colgate, policière américaine retraitée et Nekros débute. Elle le neutralise et l'enferme dans la cave. Elle va lui rafraichir la mémoire. Leur premier contact date des années 80. Jamie, nouvellement affectée à Las Suertes, suspecte le directeur du casino local d'avoir fait disparaître quelques joueurs trop chanceux. Une rencontre cuisante pour Jamie qui y perdra un sein et sa place. Elle n'abandonne cependant pas et retrouve la trace de Nekros aux USA, à Cuba, en France et en dernier au Guatemala. Problème, l'homme semble traverser les époques. A Cuba c'était dans les années 50 lors de la révolution et en France vers 1847. Cet album de 65 pages permet à Cha de dessiner quatre époques avec autant de styles différents. Une invention graphique qui ne fait que relever le niveau de cette série très réussie.
« Un homme de goût » (tome1), Ankama, 13,90 €



mardi 4 novembre 2014

DE CHOSES ET D'AUTRES : Trop vieille pour surfer

facebook, jeunisme
Pas de jeunisme sur les réseaux sociaux. Les vieux aussi ont le droit de surfer. C'est ce que croyait Anna Stoehr en s'inscrivant le mois dernier sur Facebook. Cette Américaine, née en 1900, n'a pas pu valider son profil. La ligne "date de naissance" demeure désespérément en erreur. Elle aura dû se rajeunir de 15 ans pour enfin débloquer la machine. Il semble que cette limite de 99 ans soit le chiffre butoir maximum autorisé.
On savait que le journal Tintin s'adressait aux "jeunes de 7 à 77 ans", on apprend donc que Facebook est interdit aux centenaires. Il n'y a là rien d'idéologique dans cette barrière infranchissable. L'explication est sans doute à trouver dans les codes et autres algorithmes nécessaires au bon fonctionnement de l'ensemble. En moins de 20 ans, internet a totalement révolutionné notre vie, nos rapports au monde et avec nos amis.
Cette histoire de limite d'âge est révélatrice du fossé qui s'est creusé entre les générations. Ce qui est une évidence pour les gens nés après 1970 (utiliser quotidiennement le net pour communiquer, s'informer, acheter, se divertir), l'est beaucoup moins pour les autres. Il existe une zone tampon entre les années 40 et 70 où certains ont pris le train en marche alors que d'autres sont restés complètement en rade lors du passage au numérique. Les plus âgés, ceux qui aujourd'hui ont plus de 80 ans, ont définitivement abandonné l'idée de comprendre, à quelques rares exceptions près comme Anna Stoehr.
Par contre, en 2070, tous les centenaires seront sur le Net. Enfin, si le net existe toujours...

Lascars et Workingirls : des séries télé courtes et bonnes

Pas tout à fait des sitcoms, ces formats courts brillent par leur impertinence. Développés par Canal +, on y retrouve tout l’esprit caustique et inventif de la chaîne criptée.

lascars, workingGirls, studiocanal, dvd, blanche Gardin, Monsiur PoulpeUne entreprise sans âme dans un building en verre. Dans ces opens space des femmes travaillent. Du moins font acte de présence, notamment quand la patrone est là. La vision de l’entreprise donnée dans la série “Workingirls” est des plus étonnante. La DRH, totalement nymphomane, se désintéresse de ses employés, surtout s’ils sont du sexe féminin, la responsable communication ne manque jamais d’idées pour animer les équipes. Quant aux filles de l’accueil, gare, ce sont de vraies racailles.
La troisième et dernière saison est toujours aussi décapante. On retient de ces 12 épisodes de 13 minutes l’arrivée d’une vigile musclée et “burnée “interprétée par Anne Marivin et la superbe évolution pour Hélène : elle a un fiancé ! Pierrick employé au service courrier. Le couple, joué par Blanche Gardin et Monsieur Poulpe, mériterait presque une série à lui tout seul...
lascars, workingGirls, studiocanal, dvd, blanche Gardin, Monsiur PoulpeElDiablo, scénariste multitâches, après l’animation et la BD transporte son univers banlieusard des Lascars dans une série au casting impeccable. Les quatre potes vivent la “good life” dans leur banlieue. Du moins, ça, c’était la saison 1. La saison 2 débute par une scène où les Lascars se morfondent en prison. Mais qu’ont-ils fait pour finir au trou ? Ce sera le fil rouge de la série de 12 épisodes de 15 minutes chacun. Criblés de dettes, ils n’ont d’autre solution pour rembourser de travailler dans le “grec “de Mamadou, la star du quartier. Entre frites et kebab, ils vont multiplier les impairs et se mettre dans des situations pathétiques. Le tout dans un débit de paroles qui risque de désorienter toute personne qui n’a jamais entendu répéter dix fois en une minute « J’menbalécouyes ». C’est trash mais vrai. Et surtout hilarant.
"Workingirls”, Studiocanal, 14,99 euros
"Les Lascars”, Studiocanal, 14,99 euros

DE CHOSES ET D'AUTRES : Le temps qui passe

Une semaine. Je me suis octroyé sept jours pleins de vacances tel un enseignant épuisé après six semaines de cours. Rien de prémédité. Une opportunité à saisir. Constatant la persistance d'un temps estival, je me suis dit que finalement, faire le plein de vitamines D en octobre est encore mieux qu'en juillet (où de toute manière bronzer restait une gageure...). Autant profiter de ce fichu réchauffement climatique pour se promener bras nus, par 30 degrés, dans des vignes rougeoyantes et des forêts transpercées de lumière aux rais obliques dans lesquelles ne pas marcher sur des cèpes relève de l'exploit.
Mais jeudi dernier, à l'entrée de mon village, la dure réalité du calendrier a repris le dessus. Encore tout transpirant de la longue balade en plein air, je ralentis en voyant une camionnette, garée au milieu de la rue, tous gyrophares allumés. Une nacelle transporte un homme en hauteur. Des travaux sur le réseau électrique ? L'installation de la fibre promise lors des élections ? La vérification du bon fonctionnement des lampadaires ? Rien de tout cela. En ce 27 octobre, ces ouvriers sont tout simplement en train de monter et brancher les illuminations de Noël. Des myriades d'ampoules et des guirlandes de petites leds (diodes électroluminescentes) qui transforment joliment, chaque fin d'année, la rue principale en mini Champs-Elysées.
Voilà comment ma modeste semaine de vacances s'est transformée en gouffre spatio-temporel qui m'a directement transporté de la fin de l'été au début de l'hiver. Les trois mois d'automne, ma saison préférée ? Je reviendrai tenter ma chance l'année prochaine.