lundi 6 août 2007

Thriller - Un homme seul face au complot

Thriller bourré d'action et de suspense, ce premier roman de Daniel Rezlan entraîne le lecteur du Liban à New York en passant par Paris et la Catalogne.

Le roman d'action et d'espionnage a toujours bien fonctionné pour les lecteurs en manque d'émotions fortes. Daniel Rezlan, directeur d'une entreprise informatique, investit le genre pour signer un premier roman très abouti, à l'intrigue bien ficelée et aux personnages forts appelés à connaître de nouvelles aventures.

Le héros, Tom Valmer, est en fâcheuse posture dans les premières pages. En mission secrète et nocturne au cœur du Liban, il tente de libérer un soldat israélien capturé par un groupe de terroristes islamistes. Ses trois compagnons viennent d'être abattus, repérés par des satellites espions surveillant la propriété. Il se retrouve seul pour se sortir de ce guêpier. Avec une efficacité radicale (les cadavres ne se comptent plus derrière son passage), il va mettre en échec les terroristes, délivrer le soldat de Tsahal et fuir en hélicoptère pour finalement se poser en héros près de Tel Haviv.

Un héros qui veut rester très discret. Membre de l'UTAIR, Unité transnationale d'action et d'intervention rapide dépendant de l'ONU, il n'a pas officiellement d'existence. Tom Valmer ne se doute pas que son coup d'éclat contre ce qu'il croit être un nid de fanatiques est en fait un coup dur porté à une organisation mondiale du crime, l'ECTRE. Qui tombe d'autant plus mal qu'une vaste opération est sur le point d'être déclenchée.

Tom Valmer se fait des ennemis redoutables et croise à nouveau leur chemin à Paris au cours de sa mission suivante. Il est chargé de surveiller Léa Keller. Cette jeune femme, mariée à un riche Arabe, pourrait les renseigner sur un possible réseau dormant en France. Léa Keller qui est devenue très encombrante pour l'ECTRE qui décide de l'éliminer. L'assassinat est programmé en pleine rue à Paris. Mais Tom, en surveillance, ne peut s'empêcher d'intervenir et sauve Léa Keller. Il contrecarre pour la seconde fois les projets de l'ECTRE.

Menace sur la planète

Malgré l'opposition de ses chefs, Tom protège Léa, la suivant comme son ombre, de moins en moins insensible à son charme : « Elle n'était pas à proprement parler belle, se dit Valmer en la regardant monter dans sa voiture, mais il se dégageait de cette femme une aura qui retenait le regard. Son visage était régulier et fin, ses yeux vifs et on comprenait facilement qu'ils pouvaient être durs au point de vous mettre mal à l'aise. Les yeux d'une femme qui a souffert. Ce mélange de force et de dynamisme était en complète contradiction avec la tristesse du regard. » Tom apprendra à mieux connaître sa protégée. Elle vit un chantage permanent car son fils a été enlevé par les hommes d'ECTRE. Elle a cependant des documents qu'elle va négocier, avec l'aide de Tom.

De Figuères à New York en passant par les beaux quartiers de Paris et le Pakistan, ce thriller va aller crescendo, dévoilant au fil des coups de théâtre le véritable but d'ECTRE, organisation alliée avec les pires mouvements terroristes, de l'IRA au réseau d'Al Qaida. A la lecture de ces 370 pages nerveuses et détonantes, on est séduit en premier lieu par les personnages, exceptionnels tout en restant humains. Si l'objectif final de l'organisation mondiale mafieuse semble très utopique, il reste qu'au niveau local, dans diverses régions du monde, elle semble on ne peut plus plausible. Mais tant que Tom Valmer reste dans les parages, les démocraties peuvent dormir sur leurs deux oreilles...

« Il faut tuer Léa Keller », Daniel Rezlan, Albin Michel, 19,80 € 

dimanche 5 août 2007

BD - Infernal, mais branché

L’Enfer s’est modernisé. Dès les années 50, les démons chargés de recruter les âmes des damnés ont révisé leurs méthodes. Exit les signes ostensibles pour un simple costard cravate d’un employé de bureau. Maxime Murène étrenne son nouvel uniforme pour sa première mission en tant que RDA, représentant démoniaque assermenté. 

A la demande d’un certain Duras, il doit tout faire pour retrouver sa fille, une certaine Julie. Le contrat dûment signé, Murène se met en chasse. Il doit dans un premier temps remuer tout un tas de paperasserie, car dans les enfers comme ailleurs, la bureaucratie a pris le pouvoir. Des heures à chercher pour finalement découvrir que le dossier de Julie est verrouillé car il s’agit d’une VAS, vierge en attente de sainteté. Et là tout se complique car on quitte le domaine de l’humain pour celui du sacré. La vieille guerre entre démons et anges reprend le dessus, le fantastique aussi. 

Premier titre de Jarry et Nouhaud, ce Maxime Murène détonne par son ton décalé et son graphisme léché. Il n’y a pas de suite annoncée. Pour une fois, c’est bien dommage…

 ("Maxime Murène", Delcourt, 12,50 €) 

samedi 4 août 2007

BD - Où est le soleil Inca ?


Pour les Incas, le Soleil est plus important que tout. Quand un matin, ils constatent que leur Dieu n'a pas daigné se lever, c'est la grosse panique. Il faut trouver des explications et si possible des remèdes. Le premier coupable ce sera Maki le manchot. 

Ce gardien de lamas, dans un rêve prémonitoire, a raconté à un enfant l'absence du soleil. Mal lui en a pris. Il sera sacrifié. De même que quantité d'animaux... Mais ce grand bouleversement donne également des idées à des nobles pour collecter un impôt supplémentaire et à des villageois pour se rebeller. 

Une série écrite par Vehlmann et dessinée par Franz Duchazeau au style anguleux et brillant. 

("La nuit de l'Inca", Dargaud, 9,45 €) 

vendredi 3 août 2007

BD - Conte d'Ouessant

A l'extrémité de la Bretagne, l'île d'Ouesssant a toujours été une terre de légendes. Elle a inspiré de nombreux conteurs. Anatole Le Braz en fait partie. Sa nouvelle « Le sang de la sirène » sert de trame à cet album de BD, le premier de Sandro, le dessinateur. 

C'est François Debois qui a adapté le texte original. L'action se déroule en 1897. Anatole, un écrivain se rend sur Ouessant pour recueillir les légendes locales et les retranscrire en vue de les publier dans un gros recueil. 

Au cours de la traversée, il rencontre la belle et secrète Marie-Ange Morvac'h. Ce serait la dernière descendante de la sirène ayant trahi les siennes pour rejoindre un beau pêcheur d'Ouessant. Anatole découvre cette légende au cours de son séjour. Les langues ne se délient pas facilement car la famille est frappée d'une malédiction. Anatole, le cœur brisé, n'est pas insensible au charme de Marie-Ange. 

Mais les événements vont s'accélérer et toute idée romantique déserter l'île, battue par de redoutable tempêtes. 

Publié dans la collection Celtic, ce récit complet nous fait voyager sur cette terre désolée où s'accroche contre vents et marées une communauté qui trouve toute sa force dans une cohésion à toute épreuve. 

("Le sang de la sirène", Soleil, 12,90 €) 

jeudi 2 août 2007

BD - Chien à tout faire

Amateurs de coca frappé, cette BD est pour vous. Du coca très agité, qui fait beaucoup de mousse. Suffisamment pour transformer la bouteille en réacteur capable de vous projeter dans les airs à une vitesse supersonique. C'est une des activités préférées de Tony, sale gamin toujours à la recherche d'une grosse bêtise à faire. Il a un chien, Alberto, brave toutou ne demandant rien à personne si ce n'est de faire des siestes en toute quiétude. 

Imaginés et dessinés par le Toulousain Dab's, ces gags sont irrésistibles. Avec de huitième album il a tous les personnages en main : le panda, les copains de Tony, Dominique la correspondante d'Alberto et Calogéro, le pigeon. Parmi les nouveatés de ce 8e opus, un collier électrique qui donne un pouvoir redoutable à Tony sur Alberto. Il suffit d'appuyer sur le bouton du boitier pour qu'une décharge électrique traverse le pauvre chien. A la limite du sadisme. Mais on se doute bien qu'à un moment ou un autre, cela se retournera contre le garnement. Cela ne manque pas et c'est d'autant plus savoureux. 

Une série devenue un must, comme Titeuf, que l'on retrouve chaque mois dans Tchô. 

("Tony et Alberto", Glénat, 9,40 €) 

mercredi 1 août 2007

BD - Ric Hochet au théâtre

Décidément, Ric Hochet, aura tout fait dans son interminable carrière. Dans le 73e album de ses aventures, il s'essaie au théâtre. Le propriétaire d'un théâtre en difficulté a eu la bonne idée de faire jouer son propre rôle au journaliste détective dans une pièce policière. Mais le soir de la première, on frôle l'accident : le pistolet utilisé par le « méchant » de la pièce a de vraies balles au lieu de munition à blanc comme prévu. 

Un premier avertissement pour Ric qui va rapidement se lancer sur les traces d'un tueur en série, affronter le Bourreau dont c'est le grand retour, se battre avec son père, apprendre que sa mère n'est peut-être pas morte et jouer devant le ministre de l'Intérieur, futur président de la République beaucoup moins courageux que notre héros. Bref, André-Paul Duchâteau, le scénariste, une nouvelle fois, a mis le maximum de rebondissements, d'action et de fausses pistes dans ce récit à la facture très classique. Tibet, le dessinateur, ne semble pas se lasser de ces aventures policières mouvementées. 

Il se fait parfois plaisir comme cette caricature du ministre de l'Intérieur ou la représentation de Nadine, l'amie de cœur de Ric Hochet, les seins nus... (Le Lombard, 8,70 €) 

mardi 31 juillet 2007

BD - Déviances anglaises

Thème d'actualité pour le 5e album de la série « Les Rochester » de Jean Dufaux et Philippe Wurm. Le couple de héros vit à Londres. Une ville qui a radicalement changé depuis les attentats du 7 juillet 2005. Les bombes posées par les réseaux islamistes radicaux a provoqué un choc dans la population. La communauté musulmane est rejetée. Certains jeunes Anglais ont décidé de passer à l'action préventive. Ces « jeunes gens en colère » de très bonne famille sont au centre de l'album. Ils cherchent un certain Aziz, à la tête d'une branche préparant de nouvelles actions d'éclat. 

Aziz qui est fort occupé à endoctriner la belle Ledilia, sœur de Mosli, journaliste et ami de Jack Lord, le héros récurrent de la série, assez à côté de ses pompes dans ces 48 pages à l'intrigue soignée et implacable. 

Complot, violence, fanatisme d'un côté, insouciance, humour et dilletantisme de l'autre : vous ferez le grand écart dans cet album à l'esprit très british. Le tout dessiné dans un style ligne claire très « jacobsien » par Philippe Wurm. Comme pour renforcer le côté « gracieuse majesté » de l'ensemble.

 ("Les Rochester, Jeunes gens en colère", Dupuis, 13 €) 

lundi 30 juillet 2007

Roman - Bon appétit monsieur le critique !

Quand un critique gastronomique sans le sou a des idées et des relations géniales, cela donne un roman se dégustant comme un plat dans un quatre étoiles.


Sortez votre bavoir, pourléchez-vous les babines, affûtez vos papilles : ce roman de Pierre Rival, se déroulant entièrement dans le milieu de la grande gastronomie française et internationale est un véritable délice. Il a ce brin de folie qui de plus en plus fait tout le sel de la grande cuisine actuelle.

Paul Rebell est critique de restaurants. Un beau métier où il faut avoir du coffre et un solide estomac. A l'abri du besoin, il vit beaucoup plus des largesses de sa femme, banquière, que des revenus de ses écrits. Quand son épouse décide de le quitter, il se retrouve rapidement dans une situation financière délicate. Mais cette péripétie n'est là que pour mettre un peu de suspense dans ce roman destiné essentiellement à dévoiler les coulisses de la vie d'un critique gastronomique. Pierre Rival sait de quoi il parle puisqu'il fréquente les plus grands restaurants du monde entier depuis des années.

Il raconte donc comment son héros va de table en table, goûtant à ce qui se fait de mieux, ne vivant que pour cette excellence, de plus en plus chère, de plus en plus rare. Un livre bourré d'anecdotes comme ce repas d'un couple dans un célèbre établissement. La dame décide du menu : pour son mari ce sera salade de carottes, veau aux carottes et en dessert un gâteau aux carottes. Explication de la cliente au maître d'hôtel interloqué : « Vous comprenez, monsieur baise comme un lapin, alors il mange comme un lapin ! »

Goût neutre et tête de veau

Paul Rebell pour s'en sortir va devoir composer avec sa banquière. Pas son ex-femme, mais la simple employée, peu sensible aux découverts, même s'ils sont provoqués par l'achat de vins ou de whiskies exceptionnels. Un passage du livre très réussi. Le critique est persuadé que la jeune femme, pourtant moderne et très dans le vent, ne saura pas résister au luxe d'un dîner dans un palace. Il a besoin d'elle pour obtenir un prêt permettant de créer une société sur le net pour donner à rêver aux fortunés. Accompagné de son fils, il organise un repas d'affaires qui se termine dans la suite présidentielle. Où comment faire croire à une petite employée de banque qu'elle aussi peut profiter de certains privilèges... Il y a beaucoup de cynisme dans ces scènes, mais c'est souvent comme cela que fonctionne ce milieu.

Pour preuve, la société de Paul Rebell, Alimentation générale, propose au client de passer une soirée dans le saint des saints, une cuisine d'un grand restaurant, pourvoir connaître les secrets de fabrication, discuter avec les chefs, s'approcher de la légende. Rebell profite de ses connaissances pour proposer des soirées inoubliables à de riches héritières.

Parmi ces clientes, une veuve chinoise désireuse de découvrir « l'ultime expérience gastronomique française ». Le critique va organiser la dégustation d'ortolans, petits oiseaux strictement protégés. Difficile de ne pas saliver en lisant cet extrait « Le jus de l'ortolan jaillit comme une flaque de soleil sus sa langue, les os craquèrent comme des bâtonnets d'encens sous ses dents, et de toute cette bouillie de jour et de nuit il sentit que l'âme du passereau, après avoir longuement infusé, communiait enfin avec la sienne. A cet instant précis, il ne faisait plus qu'un avec l'oiseau mythique. »

Il séduira la veuve, ira vivre à Hong Kong, découvrira le goût du neutre et sombrera dans une dépression redoutable ne se nourrissant plus que de pâtes à l'eau ou de riz blanc. Il ne devra son salut qu'à son plat préféré : la tête de veau sauce tortue, tout un roman...

« Alimentation générale », Pierre Rival, Flammarion, 14 € 

dimanche 29 juillet 2007

BD - Spirou et Franquin pour toujours

Troisième volume de la reprise intégrale des aventures de Spirou et Fantasio par André Franquin. Ce gros volume de plus de 200 pages propose trois aventures du célèbre groom parues entre 1952 et 1954 : « La corne de rhinocéros », « Le dictateur et le champignon » et « La mauvaise tête ». 

Relire ces histoires est un véritable régal, renforcé par la présence de nombreuses illustrations pleines pages, couvertures du magazine Spirou ou des recueils du même titre. Comme pour les deux premiers volumes, un important dossier, richement illustré de dessins de Franquin, apporte quelques éclairages sur le travail de ce maître de la BD franco-belge. Comment il concevait ses intrigues, les passages qu'il préférait dans les albums ou les petites anecdotes intervenues en cours de réalisation. Ainsi il est expliqué pourquoi des gangsters poursuivent Spirou le poing fermé. 

La censure était passée par là, obligeant l'auteur à effacer des revolvers jugés trop agressifs pour le jeune public... Vous apprendrez également de qui Franquin s'est inspiré pour le personnage du dictateur et comment le rôle de Seccotine a pris de l'importance au fil des pages de ce même album.

 ("Spirou et Fantasio, voyages autour du monde", Dupuis, 16 €) 

samedi 28 juillet 2007

BD - "Célestin Gobe-la-Lune", fable romantico-révolutionnaire


Célestin, poète et traîne-savate, surnommé Gobe-la-Lune, a la fâcheuse manie de séduire les jeunes files avec quelques vers de mirlitons. Parfois cela passe, souvent cela casse. Comme ce rendez-vous galant avec une délicate future duchesse. Tout se déroulait à merveille jusqu'à l'intervention du père de la belle vierge. Une course poursuite s'engage dans les rues de la ville. 

Célestin ne doit son salut qu'à l'abordage d'une barque naviguant sur le canal. Il tombe alors sur la plus ravissante des jeunes filles. La plus inabordable également car c'est la princesse Pimprinule, la fille du roi. Célestin, malgré les conditions peu favorables, tente de la séduire. La jeune fille accepte finalement qu'il participe aux jeux de la fête du printemps. S'il gagne, elle lui donnera son coeur.

 Imaginée par Lupano, cette fable « romantico-révolutionnaire » se veut un hommage aux « azimutés, zozos, zigotos, zouaves en tous genre, aux agités du cœur et du bocal, bref à tous ceux qui ont le bon goût de n'être pas comme tout le monde ». Corboz, dont c'est le premier album, signe dessin et couleurs.

 ("Célestin Gobe-la-Lune", Delcourt, 12,90 €)