Quelques chroniques de livres et BD qui méritent d'être lus et les critiques cinéma des dernières nouveautés. Par Michel et Fabienne Litout
mercredi 27 septembre 2006
BD - Diaboliques souvenirs d'enfance
Olivier Ka a gardé longtemps le secret en lui. Le secret de l’été de ses 12 ans. Depuis quelques années il connaît Pierre, un curé de gauche, jovial, cool et drôle. Pierre organise une colonie de vacances. Olivier y passe des étés de rêve. Jusqu’à ce que Pierre révèle son côté obscur. Une nuit, il rejoint Olivier et… Olivier Ka explique pourquoi, plus de vingt ans après les faits, il a besoin de raconter. Un texte, mis en images par Alfred. Mieux qu’une thérapie, l’histoire pathétique d’un gamin naïf, n’osant pas refuser, pour ne pas décevoir son « ami ». Une œuvre essentielle pour la compréhension de la mentalité des pédophiles, savoir comment ces monstres manipulent les enfants et pourquoi si peu de victimes, même 20 ans après, osent raconter leur martyr.
Pourquoi j’ai tué Pierre ?, Delcourt, 14,95 euros
BD - Les noires combines de Brrémaud et Duhamel
Dans le Harlem du milieu des années 70, Ce trio de pieds Nickelés new look a la particularité d’être mixte et noir. Mose, le docker aux pectoraux très convaincants, est l’ami de Lennox, moins costaud et toujours à la recherche d’une bonne combine pour se renflouer. Il entraîne dans ses arnaques sa petite amie, Dolorès pin-up très panthère noire… Le trio va se lancer dans deux arnaques en parallèle qui vont finalement se rejoindre dans une apothéose calamiteuse. Mose, redoutable boxeur, a accepté de se coucher contre un moins bon que lui. A la clé pas mal de fric dans les paris et surtout une place pour interpréter Mohamed Ali dans la reconstitution filmée de son combat légendaire à Kinshasa contre George Foreman. Par ailleurs, Lennox et Dolorès vont braquer des camions qui déchargent deux fois par semaine dans le port de mystérieuses caisses. Le jour J tout dérape : Mose met son adversaire KO, Lennox constate que le trafic (des armes lourdes) est organisé par la police. On rigole beaucoup en lisant cet enchaînement de quiproquos aux conséquences désastreuses. Le scénario est de Brrémaud, le dessin de Duhamel : un duo (comme leur trio de héros) à suivre. (Vents d’Ouest, 9,40 €)
mardi 26 septembre 2006
BD - Quand Satan rend visite à Bois-Maury
Hermann au dessin, son fils Yves au scénario : le chevalier de Bois-Maury fait étape dans la Flandre en pleine inquisition. Le jeune Toone assiste à l’arrestation puis à l’exécution de ses parents accusés d’être luthériens. Il se vengera du haut des toits enneigés de cette ville plongée dans la terreur. Un album directement inspiré d’un tableau, « Dulle Griet » de Pieter Bruegel l’ancien reproduit en début d’ouvrage. Herman signe quelques planches très épurées. Comme un hommage aux anciens maîtres de la peinture. Une tragédie semblant clore la saga Bois-Maury. Offert avec cet album, un livret de 32 pages retraçant « Les itinéraires de Bois-Maury ».
Bois-Maury, tome 13, Glénat, 9,40 euros
lundi 25 septembre 2006
BD - Du vaudou dans le tome 3 de WEST
Cuba vient d’accueillir le sommet des pays non-alignés. Mais cette fière république n’a pas toujours été indépendante. Le troisième épisode de cette série écrite par Xavier Dorison et Fabien Nury avec Christian Rossi au dessin entraîne le lecteur au début du XXe siècle, alors que la grande île des Caraïbes vient de bouter les Espagnols avec l’aide des Américains. Des Américains qui aimeraient garder un pouvoir total sur ce pays aux ressources alléchantes. Les hommes de Morton Chapel ont pour mission de lever la menace Islero, sorcier vaudou au pouvoir grandissant. Il refuse les élections démocratiques et prône la lutte armée contre l’envahisseur yankee. Une armée de zombies semble sur le point de se lever.
W.E.S.T., tome 3, Dargaud, 13 euros
dimanche 24 septembre 2006
Polar - Lediacre, flic atypique
Le divisionnaire Lediacre est un flic hors du commun. Avec un minimum de moyens, il fait tomber un maximum de truands…
Loin des clichés, le nouveau héros policier imaginé par Didier Sénécal n’est pas là pour épater la galerie. Au contraire, il aime agir dans l’ombre, quasiment aux frontières de la légalité, et avec une équipe réduite au minimum. Et pour l’instant, son équipe se résume à une personne : Jean-Louis Pommérieux, ancien des services secrets, travaillant presque à mi-temps puisqu’il ne passe au bureau qu’une fois dans la journée, en fin d’après-midi. Mais sa moisson est généralement très bonne : noms de dealers, d’acheteurs, date d’arrivage de drogue et de règlement de compte, il est le flic le mieux informé de Paris.
Une fliquette sous le charme
L’équipe de Lediacre qui va être renforcée avec l’arrivée du capitaine Hélène Vermeulen. C’est cette dernière qui va raconter ses débuts dans ce service peu banal. Elle raconte notamment sa première rencontre avec Lediacre, après avoir noté que son bureau se situe au dessus des ateliers de réparation des véhicules de la police. « Moyen, voilà l’impression que Lediacre donnait. Plutôt svelte pour quelqu’un de son âge, car ses cheveux grisonnants et son visage ridé indiquaient qu’il approchait de la cinquantaine. Son costume gris bien coupé et sa cravate à rayures auraient convenus à la moitié des hauts fonctionnaires de la place de Paris, ainsi qu’à des milliers de directeurs de banque, d’assureurs ou d’experts-comptables. C’est exactement cela : il avait une allure d’expert-comptable. » Mais les apparences sont souvent trompeuses et Vermeulen va rapidement s’en apercevoir. Si les méthodes de Lediacre sont peu banales, ses cibles non plus. Le commissaire aime s’attaquer à ce qu’il appelle les « Intouchables ». En gros, les dealers et toxicos du showbiz, les diplomates étrangers mouillés dans le trafic de cocaïne ou les avocats acoquinés avec le milieu.
Les starlettes au poste
Il va rapidement demander à Hélène Vermeulen de collecter un maximum de renseignements sur un dealer de banlieue attiré par le strass des vedettes médiatiques. Réceptionnant des kilos de cocaïne, il va livrer les grosses doses lui-même, rien que pour le plaisir de s’afficher avec la dernière starlette à la mode ou le plus célèbre chanteur de rock français, en haut de l’affiche depuis près d’un demi-siècle. C’est chez ce dernier, lors d’une fête mémorable, que Lediacre va frapper un grand coup. Mais avec ses effectifs réduits, il est obligé de demander de l’aide des stups, de la gendarmerie et même des services secrets français. Il pilotera cependant à distance toute l’opération avec dans la place, la belle Vermeulen, obligée de se faire passer pour un mannequin slave, légèrement idiote et peu vertueuse. Un rôle de composition pour cette austère fille du Nord, célibataire et jamais maquillée. Le récit des excès de ces demi-célébrités, ravies de s’encanailler dans une soirée huppée où la cocaïne est consommée comme du caviar à la petite cuillère, est d’autant plus réjouissant qu’ils finissent tous au poste malgré leurs cris d’orfraies.
Une opération spectaculaire mais qui n’est que la partie visible de la vaste machination ourdie par Lediacre pour faire tomber ses « Intouchables ». Il a une technique d’interrogatoire d’une rare efficacité mise au point depuis des années : « noyage du poisson, anesthésie de l’adversaire, question faussement naïve, attaque aussi soudaine que brutale, sans négliger le coup de pied à l’homme à terre. » Ce roman policier, très réaliste tant dans sa forme que sur le fond, permet au lecteur de découvrir une facette cachée de la police française. Pas clinquante, mais très efficace.
« Lediacre et les intouchables », Didier Sénécal, Fleuve Noir, 18 €
Loin des clichés, le nouveau héros policier imaginé par Didier Sénécal n’est pas là pour épater la galerie. Au contraire, il aime agir dans l’ombre, quasiment aux frontières de la légalité, et avec une équipe réduite au minimum. Et pour l’instant, son équipe se résume à une personne : Jean-Louis Pommérieux, ancien des services secrets, travaillant presque à mi-temps puisqu’il ne passe au bureau qu’une fois dans la journée, en fin d’après-midi. Mais sa moisson est généralement très bonne : noms de dealers, d’acheteurs, date d’arrivage de drogue et de règlement de compte, il est le flic le mieux informé de Paris.
Une fliquette sous le charme
L’équipe de Lediacre qui va être renforcée avec l’arrivée du capitaine Hélène Vermeulen. C’est cette dernière qui va raconter ses débuts dans ce service peu banal. Elle raconte notamment sa première rencontre avec Lediacre, après avoir noté que son bureau se situe au dessus des ateliers de réparation des véhicules de la police. « Moyen, voilà l’impression que Lediacre donnait. Plutôt svelte pour quelqu’un de son âge, car ses cheveux grisonnants et son visage ridé indiquaient qu’il approchait de la cinquantaine. Son costume gris bien coupé et sa cravate à rayures auraient convenus à la moitié des hauts fonctionnaires de la place de Paris, ainsi qu’à des milliers de directeurs de banque, d’assureurs ou d’experts-comptables. C’est exactement cela : il avait une allure d’expert-comptable. » Mais les apparences sont souvent trompeuses et Vermeulen va rapidement s’en apercevoir. Si les méthodes de Lediacre sont peu banales, ses cibles non plus. Le commissaire aime s’attaquer à ce qu’il appelle les « Intouchables ». En gros, les dealers et toxicos du showbiz, les diplomates étrangers mouillés dans le trafic de cocaïne ou les avocats acoquinés avec le milieu.
Les starlettes au poste
Il va rapidement demander à Hélène Vermeulen de collecter un maximum de renseignements sur un dealer de banlieue attiré par le strass des vedettes médiatiques. Réceptionnant des kilos de cocaïne, il va livrer les grosses doses lui-même, rien que pour le plaisir de s’afficher avec la dernière starlette à la mode ou le plus célèbre chanteur de rock français, en haut de l’affiche depuis près d’un demi-siècle. C’est chez ce dernier, lors d’une fête mémorable, que Lediacre va frapper un grand coup. Mais avec ses effectifs réduits, il est obligé de demander de l’aide des stups, de la gendarmerie et même des services secrets français. Il pilotera cependant à distance toute l’opération avec dans la place, la belle Vermeulen, obligée de se faire passer pour un mannequin slave, légèrement idiote et peu vertueuse. Un rôle de composition pour cette austère fille du Nord, célibataire et jamais maquillée. Le récit des excès de ces demi-célébrités, ravies de s’encanailler dans une soirée huppée où la cocaïne est consommée comme du caviar à la petite cuillère, est d’autant plus réjouissant qu’ils finissent tous au poste malgré leurs cris d’orfraies.
Une opération spectaculaire mais qui n’est que la partie visible de la vaste machination ourdie par Lediacre pour faire tomber ses « Intouchables ». Il a une technique d’interrogatoire d’une rare efficacité mise au point depuis des années : « noyage du poisson, anesthésie de l’adversaire, question faussement naïve, attaque aussi soudaine que brutale, sans négliger le coup de pied à l’homme à terre. » Ce roman policier, très réaliste tant dans sa forme que sur le fond, permet au lecteur de découvrir une facette cachée de la police française. Pas clinquante, mais très efficace.
« Lediacre et les intouchables », Didier Sénécal, Fleuve Noir, 18 €
samedi 23 septembre 2006
Roman - une baigneuse belle, mais morte
Moitié enquête policière, moitié réflexion sur l'art, ce premier roman de Philippe Authié laisse une impression bizarre d'inachevé, de mystère non résolu. Le narrateur quitte la capitale pour les montagnes ariégeoises. Il vient d'hériter d'une maison perdue dans une vallée après la disparition d'Adam, son cousin, un ancien peintre et critique d'art. Passé les premiers jours de tranquillité, le nouveau locataire découvre qu'Adam était obnibulé dans les derniers temps par un dramatique faits divers ayant secoué la région quelques mois plus tôt. Une jeune fille avait été retrouvée morte et nue au bord d'une rivière. Son père avait lui aussi été assassiné à quelques mètres. Une photo du cadavre a été pris et c'est ce cliché qui est au centre du roman. L'assassin a pris la peine de placer le corps exactement comme une peinture du XIXe siècle. La photo s'est retrouvée sur le net et un véritable culte s'est développé autour du "corps de la baigneuse". Gendarme curieux, photographe profiteur, antiquaire véreux... la galerie des personnages imaginés par Philippe Authié ne fait qu'accentuer la bizarrerie de ce roman qui fait par ailleurs la part belle à la place de l'art dans notre vie de tous les jours.
"Le corps de la baigneuse" de Philippe Authié. Editions du Seuil. 19 euros.
vendredi 22 septembre 2006
Roman historique - Alexandre et Alestria, amour historique
Alexandre le Grand a conquis la moitié de l'Europe et de l'Asie. Au prix de guerres sanglantes, romancées dans cet ouvrage épique de Shan Sa.
Alexandre le Grand fait partie de ces personnages historiques à la gloire sulfureuse auréolée de mystère. Un guerrier, un conquérant, intrépide et sans limite. Ce personnage, Shan Sa, se l'est approprié pour bâtir un roman épique et grandiose, plein de batailles, de complots, de grandes étendues sauvages... et d'amour.
Alexandre, quand il était enfant, s'habillait en fille. Le garçonnet, précieux et sensible, était à l'opposé de son père, Philippe, roi des rois, vainqueur des Grecs. Tout en recevant l'éducation d'Aristote, Alexandre doit finalement rejoindre l'école militaire sous les injonctions de son père. Un père violent, brutal, aimant faire la guerre et rudoyer son fils. Un fils qui en gagnant des amitiés dans la jeune élite de la Macédoine, va réussir là où beaucoup d'autres ont échoué : renverser Philippe. Il le fait assassiner et devient donc le maître incontesté en Macédoine et en Grèce. Mais cela ne suffit plus au guerrier fièrement monté sur son cheval Bucéphale. Il va partir à la conquête des territoires orientaux, attaquant les Perses pour étendre son empire. Partout où il passe, ses armées l'emporte. Il brûle des villes, récupère des généraux à l'adversaire, élabore des traités de paix audacieux, sait caresser dans le sens du poil avant de frapper à mort les comploteurs.
Au firmament du pouvoir
En quelques années d'une ascension continue, il règne sur un territoire immense. Tout le monde en parle comme le maître de l'univers. Alexandre en a conscience mais explique cette montée vers le firmament du pouvoir d'une façon très prosaïque : « Depuis la nuit des temps, la couronne terrestre n'attendait qu'un maître. Tous ceux qui la désiraient avaient échoué. Je l'avais saisie, non parce que j'étais plus fort, plus tactique, plus déterminé que mes rivaux. Moi, Alexandre de Macédoine, je ne craignais pas les astres de la décadence. Là où les hommes avaient reculé, j'avais avancé. Là où les hommes avaient renoncé, j'avais persévéré. »
Alexandre, très marqué par la violence de son père et la douceur de sa mère, espère toujours rencontrer la reine qui assurera sa descendance, sera une compagne pour la fin de ses jours. Mais il ne rencontre que courtisanes ou femelles obséquieuses. Il se console dans les bras de fiers guerriers comme Hephaestion ou Bagoas (il fait cependant émasculer ce dernier pour mieux le dominer).
Corps à corps avec une Amazone
Plus il avance vers l'Est, plus sa troupe s'amenuise. Il veut absolument tuer Darius, le roi des Perses, en fuite vers les steppes orientales. A la tête d'une petite troupe, il rencontre des guerriers nomades. Un combat féroce s'engage. Alexandre se lance dans un duel avec le plus fougueux d'entre eux. Durant quatre jours ils voyageront en se battant, s'isolant des autres militaires. Jusqu'à la révélation : le guerrier est une femme, une Amazone, Alestria. Alexandre est sous le charme, ils s'aiment, seuls dans les prairies immenses. Après, Alestria va se baigner, Alexandre raconte son bonheur : « Elle sortit de l'eau et vint vers moi. Son corps était celui d'une guerrière. Ses deux tresses noires scintillaient jusqu'à son nombril. Ses seins, ses hanches, ses cuisses brillaient et exhibaient de longues cicatrices et des plaies profondes comme des trophées. Son visage mouillé était celui d'une enfant aux lèvres charnues, aux joues brunies par le soleil. Elle me sauta au cou et me serra contre elle. » Début d'une belle histoire d'amour ? Ce serait sans compter avec les aléas de l'Histoire, la farouche détermination des Amazones, le sens tactique d'Alexandre. Sans oublier Shan Sa, seule maître à bord de ce roman rude, presque animal. Elle parvient à brosser les portraits de deux êtres d'exception, presque éternels. Victimes de leur amour fou.
« Alexandre et Alestria », Shan Sa, Albin Michel, 19,50 €
Alexandre le Grand fait partie de ces personnages historiques à la gloire sulfureuse auréolée de mystère. Un guerrier, un conquérant, intrépide et sans limite. Ce personnage, Shan Sa, se l'est approprié pour bâtir un roman épique et grandiose, plein de batailles, de complots, de grandes étendues sauvages... et d'amour.
Alexandre, quand il était enfant, s'habillait en fille. Le garçonnet, précieux et sensible, était à l'opposé de son père, Philippe, roi des rois, vainqueur des Grecs. Tout en recevant l'éducation d'Aristote, Alexandre doit finalement rejoindre l'école militaire sous les injonctions de son père. Un père violent, brutal, aimant faire la guerre et rudoyer son fils. Un fils qui en gagnant des amitiés dans la jeune élite de la Macédoine, va réussir là où beaucoup d'autres ont échoué : renverser Philippe. Il le fait assassiner et devient donc le maître incontesté en Macédoine et en Grèce. Mais cela ne suffit plus au guerrier fièrement monté sur son cheval Bucéphale. Il va partir à la conquête des territoires orientaux, attaquant les Perses pour étendre son empire. Partout où il passe, ses armées l'emporte. Il brûle des villes, récupère des généraux à l'adversaire, élabore des traités de paix audacieux, sait caresser dans le sens du poil avant de frapper à mort les comploteurs.
Au firmament du pouvoir
En quelques années d'une ascension continue, il règne sur un territoire immense. Tout le monde en parle comme le maître de l'univers. Alexandre en a conscience mais explique cette montée vers le firmament du pouvoir d'une façon très prosaïque : « Depuis la nuit des temps, la couronne terrestre n'attendait qu'un maître. Tous ceux qui la désiraient avaient échoué. Je l'avais saisie, non parce que j'étais plus fort, plus tactique, plus déterminé que mes rivaux. Moi, Alexandre de Macédoine, je ne craignais pas les astres de la décadence. Là où les hommes avaient reculé, j'avais avancé. Là où les hommes avaient renoncé, j'avais persévéré. »
Alexandre, très marqué par la violence de son père et la douceur de sa mère, espère toujours rencontrer la reine qui assurera sa descendance, sera une compagne pour la fin de ses jours. Mais il ne rencontre que courtisanes ou femelles obséquieuses. Il se console dans les bras de fiers guerriers comme Hephaestion ou Bagoas (il fait cependant émasculer ce dernier pour mieux le dominer).
Corps à corps avec une Amazone
Plus il avance vers l'Est, plus sa troupe s'amenuise. Il veut absolument tuer Darius, le roi des Perses, en fuite vers les steppes orientales. A la tête d'une petite troupe, il rencontre des guerriers nomades. Un combat féroce s'engage. Alexandre se lance dans un duel avec le plus fougueux d'entre eux. Durant quatre jours ils voyageront en se battant, s'isolant des autres militaires. Jusqu'à la révélation : le guerrier est une femme, une Amazone, Alestria. Alexandre est sous le charme, ils s'aiment, seuls dans les prairies immenses. Après, Alestria va se baigner, Alexandre raconte son bonheur : « Elle sortit de l'eau et vint vers moi. Son corps était celui d'une guerrière. Ses deux tresses noires scintillaient jusqu'à son nombril. Ses seins, ses hanches, ses cuisses brillaient et exhibaient de longues cicatrices et des plaies profondes comme des trophées. Son visage mouillé était celui d'une enfant aux lèvres charnues, aux joues brunies par le soleil. Elle me sauta au cou et me serra contre elle. » Début d'une belle histoire d'amour ? Ce serait sans compter avec les aléas de l'Histoire, la farouche détermination des Amazones, le sens tactique d'Alexandre. Sans oublier Shan Sa, seule maître à bord de ce roman rude, presque animal. Elle parvient à brosser les portraits de deux êtres d'exception, presque éternels. Victimes de leur amour fou.
« Alexandre et Alestria », Shan Sa, Albin Michel, 19,50 €
jeudi 21 septembre 2006
BD - Les portes magiques de Wisher
Les éditions du Lombard, pour leur 60e anniversaire, loin de se reposer sur leurs lauriers, lancent une nouvelle collection. Portail se veut une ouverture sur le monde fantastique : « Au-delà du Portail, la réalité que nous connaissons n’a plus cours », prévient l’éditeur. Wisher est donc le premier titre de cet univers nouveau mais que la vénérable maison belge connaît bien avec Thorgal ou Aria. Sébastien Latour, le scénariste, signe son premier album. Le second suit en octobre, toujours au Lombard, avec Griffo au dessin. De Vita s’est chargé de l’illustration de Wisher. Dans un Londres futuriste (mais pas trop), un jeune marchand d’art, Nigel, est sur le point de conclure une affaire importante avec un faussaire, Karfeld. Une rame de métro en décide autrement. Karfeld semble s’être suicidé. Mais tout le monde doute, Nigel le premier. Il va devenir un personnage très recherché découvrant qu’il est au centre d’une guerre millénaire entre les hommes et les créatures féeriques. L’intrigue est bien menée, certains personnages (comme les policiers du M10) très réussis. De Vita gagne en assurance et en inventivité à chaque album. Un surdoué qui ira loin. (Le Lombard, 13 €)
mardi 19 septembre 2006
BD - Fuis, petit, fuis !
1941, dans une campagne du Nord de la France. Le jeune Simon ne se doute pas du drame dans lequel est plongé le pays. Il aime, en allant à l’école, regarder les oiseaux. Il aime tant les voir voler. Simon est dans une pension chez le curé du village. Ce dernier, bon cœur, ne peut pas grand-chose contre les forces maléfiques qui s’abattent sur le région. Le Juif est devenu l’ennemi de la Nation. Simon est juif, ce n’est qu’un enfant, mais il est des « bons Français » pour le dénoncer. Et les gendarmes font leur travail. Sans trop se poser de question. Heureusement, le curé a de la ressource et envoie Simon à Paris, dans le dernier refuge qu’il connaisse : une maison de correction. Le petit Simon, l’ami des oiseaux, va se retrouver en cage avec des petits caïds qui vont eux aussi lui faire comprendre qu’il n’est pas comme les autres. Un peu dans la veine du « Sac de billes » de Joseph Joffo, cette BD de Galandon (scénario) et Monin (dessin) intitulée "L’envolée sauvage" raconte la fuite de cet innocent dans une France prête aux pires extrémités pour bien se faire voir de l’occupant. (Bamboo, Angle de vue, 12,90 €)
lundi 11 septembre 2006
BD - Amours transparentes ches les Passe-murailles
Ils sont jeunes, urbains, modernes. Ils ont l'air normaux. En couple ou célibataires, leur vie est faite de repas entre amis, de soirées, de journées de travail... Mais ils, ou plus exactement elles, ont un secret fantastique . Le pouvoir de passer à travers les murs et les êtres humains. Cette goutte d'extraordinaire dans un quotidien banal transforme ces tranches de vie en nouvelles passionnantes. Corinne, par exemple, partage sa vie entre son petit ami, Michel, son amie Brigitte et son python, Monty. Quand ce dernier avale la veste en latex de Michel, Corinne dévoile son secret et va récupérer le vêtement à l'intérieur de son serpent. Elle y trouve également un deuxième bout de tissu qui va changer sa vie. Corinne qui, quand elle était jeune, a joué avec son pouvoir, jusqu'à l'extrême. Laurence a le même don. Elle l'utilise, un soir de beuverie, pour se venger d'un voisin un peu trop dragueur. Sans en mesurer toutes les conséquences. Ecrites par Cornette, ces histoires sont dessinées par Oiry qui, sous un trait qui semble parfois hésitant, bluffe le lecteur par ses ambiances. (Les Humanoïdes associés, 10 €)
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