vendredi 7 juillet 2006

BD - Aria, icone de la liberté


Aria traîne sur les routes depuis de nombreuses années. Souvent seule. Mais dans ce 28e titre de la série écrite et dessinée par Michel Weyland, elle est en compagnie de Sacham, son fils, et de Marvèle, fiancée de ce dernier. 
 Ils quittent une ville hostile pour rejoindre une contrée plus accueillante. Mais, pour cela, ils doivent passer par la forêt maudite. C'est à l'orée de ce lieu magique qu'une nuée de krylfes rend visite au petit groupe. Ces petits êtres volants, sorte de chauve-souris au dard de scorpion, sont très intéressés par les deux membres de leur communauté vivant depuis quelques mois en compagnie d'Aria. Farouchement attachée à sa liberté, elle pousse ses deux petits amis à voler de leurs propres ailes et à rejoindre leur communauté. 
 Ce qu'ils feront après une longue hésitation. 
 Aria regrettera amèrement ce départ car elle s'était attachée à ses krylfes. Et en plus, elle est depuis régulièrement attaquée par des êtres semblables mais plus gros. De village en village, elle tentera de comprendre pourquoi. Elle rencontrera en cours de route un nain barbu et dévergondé, promis à un bel avenir dans l'univers de cette série fantastique indémodable. (Dupuis, 9,80 €)

mercredi 5 juillet 2006

BD - Tony et Alberto, un couple trash pour les enfants


Alors que Roba est mort récemment, après avoir relu les gags de Boule & Bill, plongez dans ce 7e album de Tony & Alberto, version post-punk de la série vedette du journal de Spirou. Tony, le petit garçon, Alberto, le chien, ont des rapports dépassant l’entendement. Dab’s, scénariste et dessinateur de cette série très trash, y va très fort parfois dans la maltraitance des animaux. Il est notamment question dans cet album d’un pigeon voyageur mis à toutes les sauces par un Tony qui l’utilise comme messager. Pandi, le panda, apparu l’année précédente, squatte toujours la chambre de Tony. Et comme il hiberne, difficile de le réveiller. Ou alors c’est à ses risques et périls. Son point faible ce sont les fleurs. Il ne supporte pas leur parfum. Il faut s’en méfier ou l’utiliser à bon escient comme arme contre une équipe de rugby un peu plus forte. C’est souvent très visuel et Dab’s a énormément progressé à ce niveau depuis ses premiers croquis publiés dans les marges de Tcho, le journal de Titeuf. (Glénat, 9,40 €)

mardi 4 juillet 2006

BD - Le donjon au sommet


Donjon Zénith est la série phare du monde imaginé au fil des ans par Sfar et Trondheim. C’est ce dernier qui dessinait les aventures du Gardien, Herbert, Marvin et autres monstres. Pour ce cinquième tome intitulé « Un mariage à part », il a confié le dessin à Boulet. Jeune dessinateur réaliste à l’aise dans tous les styles, il remplit parfaitement sa tâche, respectant les bases de son prédécesseur tout en apportant un côté plus viril et guerrier aux combats ou scènes de foule. Le scénario, plein de clins d’œil et de niveaux différents de lecture, raconte le mariage, très intéressé, du Gardien avec la belle Isis. Herbert veut s’y opposer, le tout sur fond de saisie immobilière du Donjon. Trondheim a découvert Boulet grâce son blog dessiné, un des plus abouti de la toile, alternant croquis sur le vif, BD reportages sur les voyages de l’auteur à l’étranger et relecture de sa vie quotidienne au sein d’un studio. Si vous aimez rire et que vous n’êtes pas allergique aux rouquins, connectez vous sur http://www.bouletcorp.com/blog/ 
(Delcourt, 9,80 €)

lundi 3 juillet 2006

BD - Les petits ruisseaux des petits vieux


Pascal Rabaté en signant ce récit complet de 96 pages a placé la barre très haut. Il a ciselé une histoire envoûtante avec pour héros un retraité, pêcheur et veuf. Cela semble ne pas payer de mine, mais rapidement on est subjugué par les petites histoires de Pierre. Il passe ses journées à pêcher avec son copain Edmond et le soir il regarde la télé. Mais Edmond meurt brutalement. Pierre décide alors d’aller à un rendez-vous de son copain avec une dame rencontrée dans une agence. Car Pierre aussi se sent de plus en plus seul. Peut-on tomber amoureux à près de 70 ans ? Est-ce bien raisonnable d’essayer de retrouver ses souvenirs d’enfance ? S’endormir pour toujours est-ce la solution ? Plus le récit avance, plus le lecteur s’identifie totalement à ce vieux monsieur conscient d’avoir encore un peu de ressources. Le bonheur se trouve peut-être tout simplement à un croisement de départementale ? Si ce n’était pas de la BD, on lui donnerait le Goncourt. Et pourquoi pas après tout ? (Futuropolis, 15,90 €)

dimanche 2 juillet 2006

BD - Bob Morane , toujours prêt !


Bob Morane nage en plein paradoxe temporel dans le 42e titre de la série retraçant ses aventures écrites par Henri Vernes et dessinées par Coria. En balade sur les routes du Périgord au volant de sa Jaguar, il se retrouve inexplicablement en Chine, en pleine attaque des forces japonaises en 1937. Mais il en faut plus pour déstabiliser le célèbre aventurier qui au passage prendra sous son aile une jeune et belle journaliste couvrant les événements. Il devra également combattre quelques soldats nippons avinés et sanguinaires. Au même moment, Sophia Paramount, fait du bateau au large de Hawaï. Et elle aussi est projetée dans le passé, exactement à Pearl Harbour, la veille de l’attaque japonaise. Elle tente de prévenir les autorités mais elles la prennent pour une folle. Et pour augmenter le mystère, c’est Bill Balantine, l’ami de Bob Morane qui est lui aussi plongé dans le passé. Les trois héros parviendront-ils à sauver leur peau ? Oseront-ils changer l’Histoire ? Réponse dans le prochain tome puisque exceptionnellement cette histoire est en deux parties. (Le Lombard, 9,80 euros)

samedi 1 juillet 2006

Roman - SF - Notre passé fout le camp

Andrew Wiener joue avec deux réalités parallèles pour donner encore plus de relief à son histoire de détective privé du futur. 

Amateurs d’histoires alambiquées, ce roman de science-fiction inédit d’Andrew Wiener devrait totalement assouvir votre vice. Cela débute comme un polar américain classique. Joe Kay est détective privé. Blasé, pas très vaillant, il s’est spécialisé dans la recherche des personnes disparues. Sa ténacité et son opiniâtreté font qu’il est devenu au fil des affaires le meilleur dans son secteur d’activité. Quand Victor Lazare, avocat, pénètre dans son bureau pour lui demander de retrouver Walter Hertz, simple cadre aux archives municipales, Kay accepte et, tel un fauve reniflant la piste fraîche d’un animal, il va rapidement plonger dans le passé du disparu.
 A priori, Lazare agit pour le compte de la femme de Hertz. Ce dernier aurait filé après avoir rencontré une autre femme, Marcia Tromb, une peintre. Or, dans ce futur très aseptisé décrit par Andrew Weiner, les artistes ont très mauvaise presse. Accusés de propager des idées subversives, ils ont rarement l’occasion de s’exprimer librement.

Disparition inéluctable
 Les doutes de Kay vont naître quand Marcia va lui prétendre mordicus que Hertz n’est pas marié. Sa femme ne serait qu’une actrice embauchée pour donner le change. En se penchant sur le passé de Hertz, Kay va réaliser que toutes les traces de l’existence de l’archiviste sont en train de s’effacer. Les personnes l’ayant connu vont lentement mais sûrement disparaître. Hertz est en train de s’évanouir. Seule la mémoire de Kay va le pousser à prolonger son enquête. Mais pourquoi retrouver cet homme puisque même le commanditaire semble n’avoir jamais existé ? Un cauchemar ? Non, la découverte par Kay que sa réalité n’est peut-être qu’une vaste mise en scène. Et il fait de plus en plus attention aux graffitis ornant les murs de la ville. Des appels à la révolte ou à une certaine prise de conscience comme « franchis la ligne », « la réalité n’est que temporaire » ou « rendez-vous au mur ». Pour tenter de comprendre ce qui lui arrive, il entre en contact avec les jeunes taggueurs. Ces derniers, se cachant dans les tunnels désaffectés du métro, lui expliquent que, régulièrement, les autorités effacent la mémoire de certains habitants et les déportent hors de la ville. Kay, très sceptique au début, finira finalement par accepter ce fait quand il lui sera impossible de franchir un pont. Au-delà d’une certaine limite, il perd connaissance, comme plongé dans un brouillard noir et dense, incapable d’agir mais surtout de se souvenir de son identité.

On reprend les mêmes…
C’est sur cette scène que s’achève la première partie assez ténébreuse de l’histoire. Nouveau début avec l’entrée en scène de Joseph Kaminsky, le meilleur limier de la ville. Un certain Victor Lazare lui demande de retrouver sa femme, disparue depuis quelques jours. Le lecteur a l’impression de revoir le même film mais avec un nouveau décor et des acteurs différents.
 Le détective, lui, ayant de vagues souvenirs de la précédente affaire, se pose de plus en plus de questions sur son monde. Ne serait-il pas un simple jouet dans les mains de savants fous à la recherche de cobayes dociles ? En toile de fond de ce roman déroutant, il y a l’interprétation des rêves. Mais est-ce véritablement des rêves ? Pourquoi pas des réminiscences de réalités parallèles ou de vies antérieures ? Andrew Wiener semble prendre beaucoup de plaisir à décrire la dérive de son héros, de plus en plus dépassé, de plus en plus individualiste, de plus en plus humain, tout simplement…

« Boulevard des disparus », Andrew Weiner, Folio SF, 7 €

vendredi 30 juin 2006

Thriller - Belle mais dangereuse....

Plongée dans les travers de la petite bourgeoisie de province. Un polar au goût de terroir signé Sylvie Granotier


On ne dira jamais assez le pouvoir néfaste des congés payés et autres RTT obligeant les stakhanovistes du travail à faire des breaks non désirés. Pierre Mangin, commissaire à la police judiciaire parisienne, a trop accumulé de retard dans ses repos légaux. Il accepte donc de faire une pause de quelques jours et décide, soyons fous, de passer ces moments de loisirs à la campagne. Et pas n'importe quelle campagne. Plutôt que de choisir la proche Normandie ou la dépaysante Provence, il opte pour la Creuse, « le bout du monde ». 
Il va rendre visite à de vieux amis, Robert et Anne-Marie, installés près de Guéret depuis des années. Mangin, le narrateur de ce polar écrit par Sylvie Granotier, décrit ainsi sa plongée dans le terroir : « La vraie panique surgit lorsque je me rendis compte que je ne traversais plus que des villages coupés en deux par la nationale, (...) autour de moi, la verdure gagnait, les champs aussi, vallonnés et remplis de vaches d'abord, de moutons placides ensuite. Seul un tracteur, de-ci de-là, rappelait la présence de l'homme. Et puis vint la forêt, de plus en plus envahissante, dans son état dénudé, le pire de l'année, même pas de neige pour habiller tout ça ». On le comprend, notre citadin regrette sa décision. Mais il a promis à ses amis de passer quelques jours en leur compagnie. Donc... 
 À son arrivée il tombe dans une famille on ne peut plus classique. Robert, entrepreneur débordé, passe toutes ses journées au travail, Anne-Marie, de jeune étudiante du temps de sa rencontre avec Mangin, s'est transformée en mère de famille en guerre avec ses deux ados. Le fils aîné, s'est réfugié dans la lecture et internet alors que la plus jeune, 14 ans, ne jure que par son portable et les aventures amoureuses de ses copines. Mangin, le devine vite, ce ne sera pas une sinécure. 

Ariane, l'apparition 
 Mais dans la grisaille, apparaît un rayon de soleil : Ariane. Il la rencontre brièvement au cours de sa première balade. Une jeune et farouche chercheuse de champignons. Second contact le soir même puisqu'elle fait partie des invités au grand repas organisé par Anne-Marie. Ariane, bibliothécaire, célibataire, mystérieuse, si belle. Mangin n'en croit pas ses yeux. Il aura fallu qu'il débarque dans ce trou perdu pour qu'il tombe éperdument amoureux. Mais la belle est insensible au charme viril du policier parisien. Elle repousse ses avances, avec calme mais détermination. 
 Mangin, déçu, cafardeux, va trouver un dérivatif en prêtant main forte au gendarme du cru dans la recherche d'un tueur en série de jeunes autostoppeurs. Et les rares indices vont le mener tout droit vers... Ariane. 
 Sylvie Granotier prend visiblement beaucoup de plaisir à décrire sans concession les mentalités parfois très obtuses et rétrogrades de cette petite bourgeoisie provinciale. Mais elle n'est pas tendre non plus pour son héros, Parigot, urbain, trop sûr de lui, fumeur invétéré car dit-il, « Aimant la vie, je ne renoncerai pas au tabac que j'aime, sous prétexte qu'il tue. ». Et puis, il y a surtout au centre de ce roman le personnage d'Ariane, complexe, tourmenté, au passé chargé de lourds secrets. Ange ou démon, jusqu'au bout le lecteur se posera la question. 

« Belle à tuer », Sylvie Granotier, Albin Michel 18 €.

jeudi 29 juin 2006

BD : La croisière de Martin Veyron nous amuse


Rien de tel qu’une bonne croisière pour oublier ses soucis de riche oisif. Dans Papy Plouf, Martin Veyron transforme cette balade nautique en jeu de massacre absolu. Quelques retraités engraissés avec les bénéficies des fonds de pensions dilapident une petite partie de leur fortune à bord d’un paquebot aussi luxueux que dangereux. Car cette croisière semble marquée par une incroyable malédiction. Les cadavres se ramassent à la pelle et la morgue est pleine. « Il y a largement la place d’en mettre deux tête-bêche » propose le second en ouvrant un tiroir. Le docteur, lui, commence à se faire du mouron. D’autant que le commandant, perdant de plus en plus les pédales, a tendance à mettre les récalcitrants aux fers, comme dans l’ancien temps. Mutinerie, changement de cap, attaque de pirates, tsunami : rien ne sera épargné aux personnages de Martin Veyron. Il n’y en pas un pour rattraper l’autre, tous plus lâches, pleutres et calculateurs les uns que les autres. A part l’infirmière. Mais comme elle est amoureuse… (Albin Michel, 13,90 €)

mercredi 28 juin 2006

BD - Trois antiquaires particuliers sur les traces des Sapiens


En pleine canicule, une vieille dame meurt dans sa chambre d’hôtel. Le gérant expédie le corps à la morgue car son fils a disparu depuis quelques jours. Ce dernier, en volant de la limonade pour sa maman, s’est retrouvé en garde à vue. Quand il est enfin relâché, il n’y a plus rien dans la piaule. Tout a été récupéré par Simon, un brocanteur peu regardant sur la qualité de la marchandise. Simon qui découvre dans une boite en fer un reliquaire contenant un très vieux crâne humain. Avec sa petite amie, Rebecca, vendeuse de livres anciens, il contacte Ernst-Lazare, antiquaire de rang international. La découverte est tellement intéressante que le trio va former une association pour découvrir d’où provient exactement cette pièce unique. Philippe Riche reprend les personnages créés dans « Pas de chance », histoire en deux parties parue dans la collection Tohu Bohu. Un trio qui devra se méfier de trois furies, adeptes de la gâchette prêtes à tueur pour récupérer le reliquaire. Action, culture, fantastique : il y en a pour tous les goûts. (Les Humanoïdes Associés, 10 €)

mardi 27 juin 2006

BD - La magie du Codex angélique


La mort rode la nuit dans les rues de Paris à la belle époque. Au petit matin, la police retrouve les cadavres de prostituées proprement éventrées. Il manque généralement le cœur aux pauvres filles. La police fait du surplace mais cette série de faits divers n’intéresse pratiquement pas le jeune Thomas, étudiant dans une université huppée. Il doit subir la folie de son oncle. Son tuteur depuis que sa mère est morte. Enfin pas véritablement, car l’oncle, par ailleurs inventeur, a plongé le corps de sa sœur dans un mélange glacé. Il a bon espoir de lui rendre la vie. Mais pour cela il lui faut des formules magiques collectées dans le Codex angélique qui lui font défaut. Première collaboration entre deux jeunes auteurs débutants. Thierry Gloris, à la tête d’un diplôme d’historien, signe un scénario mêlant magie et jeux sexuels alors que Mikaël Bourgoin, fraîchement sorti de l’école Emile Cohl, a particulièrement travaillé les couleurs de cette série semblant vouloir basculer dans le fantastique et l’horreur. (Delcourt, 12,90 €)