vendredi 27 octobre 2023

Cinéma - “La comédie humaine” en trois actes japonais


Trois histoires, trois tons, presque trois genres de cinéma. La comédie humaine de Kôji Fukada sort enfin en France. S’il a affronté le public japonais en 2008, ce n’est qu’en 2023 que les cinéphiles francophones peuvent déguster ce bijou d’analyse de la société japonaise. Et malgré les années, il reste totalement d’actualité, notamment dans les thèmes abordés : l’amour et la solitude.

L’amour entre une jeune femme et son petit ami. Elle pense le retrouver le soir pour profiter d’une pièce de théâtre. Mais il ne vient pas. Rompt même au téléphone. Avec sa place en trop, elle invite une inconnue en instance de divorce qui ne retrouve plus son billet. Une amitié va naître. Elles vont dîner, se confier. La première partie, à l’énigmatique titre de « Chat blanc », parle de mariage, de tradition et de trahison.

On retrouve dans le second acte le mari de la future divorcée. Il a une galerie d’art. Il expose les photos d’une jeune artiste. Ou du moins c’est ce qu’elle croit. Personne ne vient au vernissage. La grande solitude des médiocres. C’est cruel. Tant du côté des amis honteux que de la photographe qui refuse de voir la réalité en face.

Enfin, attendez vous à un choc avec « Le bras droit ». On bascule presque dans le fantastique (après la romance et la critique sociale). Après un accident de la circulation, un homme est amputé du bras droit. Un membre qui continue à le perturber, prenant presque le contrôle de son ancien hôte. Glaçant et très réussi.

 Film japonais de Kôji Fukada avec Masayuki Yamamoto, Kanji Furutachi, Minako Inoue.

jeudi 26 octobre 2023

Un beau livre - L’odyssée agricole racontée dans des centaines de photos


Souvent agitée, l’histoire agricole en France est aussi peu documentée. Grâce à cet ouvrage coordonné par Michel Bonneau et Pascal Roblin de l’association le Centre de la presse créé en 1993 dans le Cher, les grandes étapes de l’agriculture sont racontées par l’intermédiaire des journaux agricoles locaux. 

On constate par exemple qu’après la première guerre mondiale, le manque de main-d’œuvre pousse à la mécanisation. Des articles ou publicités, parues dans La vie à la campagne ou L’Agriculture nouvelle, encouragent ce mouvement. Des éditoriaux de l’époque, des unes et reportages donnent un côté rétro et vintage à l’ensemble. 

Un panorama passionnant sur le dynamisme de cette presse agricole encore très présente dans bien des régions.

« L’odyssée agricole », De Borée, 168 pages, 31 €

BD - Démon des forêts

Le fantastique poétique manque d’intérêt pour les adolescents. Ce qu’ils veulent, passé la puberté, c’est se faire peur. Le démon de Bolingbroke est exemplaire dans cette catégorie. L’action se déroule dans une petite ville américaine, notamment un collège où les clans se regardent tels des chiens en faïence, Val et Lanie font bande à part.

 Elles sont toutes les deux dans la même classe de 4e, sont amies depuis longtemps et se passionnent pour des sujets assez incongrus. Logique quand on sait que Val est autiste Asperger et que Lani semble la bipolaire typique.

En proposant un travail sur les événements extraordinaires du passé de la ville, elles ne se doutent pas qu’elles vont réveiller un démon qui a longtemps terrorisé Bolingbroke. Val et Lanie vont avoir fort à faire pour terrasser l’Ojja-Wojja. Une histoire effrayante écrite par Magdalene Visaggio de New York et dessinée par Jenn St-Onge de Toronto. Un scénario très contemporain où les références à Star Wars ou Stranger Things sont légion.

On soulignera l’exceptionnelle qualité du dessin de Jenn St-Onge. Ses personnages respirent l’intelligence, les décors sont très réalistes et quand elle s’attaque aux démons, c’est comme si elle sortait l’artillerie lourde. Sans compter son travail très judicieux sur les couleurs. Le type d’album où l’on regrette rapidement que les planches ne bénéficient pas d’un format deux fois plus grand pour en apprécier tous les détails.

« Le démon de Bolingbroke », Jungle, 192 pages, 16,95 €

mercredi 25 octobre 2023

En vidéo, “Sisu” le soldat immortel


Tel un western lapon, Sisu, de l’or et du sang de Jalmari Helander, propose une longue vengeance. Un chercheur d’or (Jorma Tommila), ancien soldat finlandais, est aux prises avec un commando nazi qui en veut à ses pépites. 

Sur la steppe déserte, le vieux combattant va méticuleusement éliminer les méchants. Si le scénario n’a rien d’extraordinaire, ce film de série finlandais vaut surtout pour les effets spéciaux et l’interprétation. Jorma Tommila, sans le moindre dialogue, campe un Rambo nordique à la puissance mille. Face à lui, un officier nazi (Aksel Hennie) odieux, qu’on adore détester. 

La sortie en vidéo chez M6 s’accompagne d’un long making of et d’un reportage très complet sur la fabrication des effets spéciaux. 

Un poche - Redécouvrir le feuilleton des Mystères de Paris


Ce roman n’est pas de toute première jeunesse mais reste passionnant près de deux siècles après sa parution. Si Les mystères de Paris d’Eugène Sue, enfin disponibles en poche, n’a pas pris une ride, c’est en raison de son audace dans le style feuilleton. De plus, il racontait la vie dans la capitale sans édulcorer les mauvaises mœurs. 

De plus, en raison de sa parution au quotidien, les rebondissements étaient permanents, le suspense entretenu avec art. Alors le moment est venu de remettre en avant ce texte qui a inspiré les plus grands. 

Plongez, vous aussi, dans les aventures de Fleur-de-Marie et du Prince Rodolphe, succombez à leur passion, vibrez à leur malheur.

« Les mystères de Paris », tome 1 et 2, 10/18, 7,90 € le volume

BD - Mini-écolier dans la classe des créatures perdues


Il ne mesure pas plus de 3 centimètres de haut. Ambre est un tout petit garçon, perdu dans une grande ville. Il vit seul dans un appartement abandonné et n’a qu’une envie : aller à l’école pour en apprendre plus sur le monde qui l’entoure. Mais sa taille l’empêche de se mêler aux autres enfants. Des géants, dangereux. Sa petite vie va basculer quand il rencontre sur une plage Lua, une tortue marine.

Cette dernière, avec qui il peut parler, lui explique qu’il existe au milieu de l’océan une île qui accueille les enfants différents comme lui. Il y a même une école. Ambre, accepte sa proposition et après des mois de navigation atteint enfin le rivage de cette île où tout est possible.

Écrit et dessiné par Jason Pamment, un Australien reconnu dans le milieu de l’animation, séduit par son imaginaire sans limite. Car sur l’île, Ambre va rencontrer d’autres spécimens tout aussi petits et étranges que lui. Un lézard, arrogant et expert en mimétisme, une hirondelle qui se prend pour un pélican, une salamandre si fière de ses jolies branchies ou un rocher, muet mais très agile. Sans compter les différents « monstres » qui peuplent l’île.

Un bestiaire extraordinaire qui semble sans fin et devrait passionner les plus jeunes, toujours prompts à inventer des animaux fantastiques.

« Ambre et l’île des créatures perdues », Jungle, 288 pages, 17,95 €

mardi 24 octobre 2023

Cinéma - Des amours passées ne faisons pas table rase

« Le syndrome des amours passées », film d’Ann Sirot et Raphaël Balboni avec Lucie Debay, Lazare Gousseau, Nora Hamzawi, Florence Loiret-Caille.

Film belge, Le syndrome des amours passées fait partie des rares réalisations de cette fin d’année 2023 qui sort un peu du convenu. Écrit et réalisé par un couple de jeunes réalisateurs, le film raconte la quête d’enfant de Sandra (Lucie Debay) et Rémi (Lazare Gousseau). 

Elle approche de la quarantaine et craint rater la dernière occasion. Ils sont suivis par un scientifique qui ramène d’un congrès aux USA un nouveau protocole : Pour débloquer la situation, il faut que chaque composante du couple refasse l’amour avec tous ses partenaires passés. Les consentants uniquement… Sandra et Rémi vont aller puiser dans leurs souvenirs pour en tirer une liste plus ou moins importante. Plus d’une vingtaine pour madame, seulement trois pour monsieur. Ce premier déséquilibre est une première source de gags pour un film qui au début ne fait pas dans la dentelle. Car Sandra y va franco pour aligner les soirées libidineuses débloquantes. 

Pour Rémi, c’est plus compliqué. Parmi les trois, il y a sa sœur (Nora Hamzawi). Exactement, la fille de l’homme avec qui sa mère a refait sa vie. Mais qu’il considère désormais comme sa sœur. Et sa dernière petite amie avant Sandra ne répond pas à ses sms, mails et autres coups de téléphone. Alors pour rééquilibrer le deal, Sandra lui conseille de rencontrer des femmes sur des sites. 

La thérapie pour avoir un enfant va lentement mais sûrement avoir de graves conséquences sur l’équilibre de ces deux amoureux fous. Le spectateur rit un peu moins, se questionnant sur ce faux libertinage, parfois liberticide. Un film réjouissant, torride parfois, poilant (dans tous les sens du terme) et qui au final se termine par une jolie pirouette très positive.

Un livre jeunesse - Sur les traces de l’ours

Comment donner l’envie aux plus jeunes de sortir de leur chambre pour aller à la découverte de la faune de la région ? Ce joli album de Magali Bardos est une partie de la solution.

Elle raconte en 44 pages illustrées de jolies aquarelles, l’aventure de trois jeunes cavaliers à la recherche des animaux de la forêt des Pyrénées. Ils cherchent l’ours, mais découvrent surtout des traces de martre, de sanglier, de cerf ou de renard. 


Les animaux omniprésents dans l’ouvrage puisque ce sont eux qui racontent le périple des petits humains. Une découverte de la nature environnante ludique et intelligente. Ce livre a reçu le soutien d’Occitanie Livre & Lecture.

« Sur les traces de l’ours » de Magali Bardos, L’école des Loisirs - Pastel, 15 €

BD - Ombres maléfiques


Déclinée en quatre tomes comme les quatre saisons, la série Le temps des Ombres est une remarquable variation sur le thème d’une malédiction s’abattant sur une petite communauté. Dans ce monde imaginé par David Furtaen et mis en images par Pauline Pernette, deux adolescents vont devoir oublier leurs différends pour tenter de sauver les habitants de leurs villages.

Mycène croit au pouvoir des plantes. Apprentie herboriste, elle concocte des potions pour soigner. Roch, esprit scientifique, fait la même chose, mais rationnellement. La tradition contre la modernité. Mais un même but : sauver les villageois victimes d’un mystérieux mal. Ils semblent pris dans un cocon sombre, devenant de véritables zombies. Le second tome, L’été de feu, vient de paraître et décrit le périple de Mycène et Roch à la recherche d’une vieille femme qui aurait le remède au mal des Terres d’Ombre.

Beaucoup de poésie dans ce récit initiatique, non dénué d’humour mais aussi de drames et de critiques indirectes de notre propre société. Une jolie découverte à mettre entre toutes les mains des jeunes à partir de 10 ans.

« Le temps des Ombres » (tome 2), Éditions de la Gouttière, 88 pages, 15,70 €

lundi 23 octobre 2023

Un beau livre de poésie - Une saison en enfer par Rimbaud et Patti Smith


Patti Smith, chanteuse et poétesse américaine, a régulièrement cité Rimbaud en exemple. C’est donc tout naturellement qu’elle intègre la luxueuse collection « Grande Blanche illustrée » en proposant une soixantaine de photos, dessins documents ou textes inédits en regard des poèmes de Rimbaud parus dans Une saison en enfer

Un beau livre permettant de redécouvrir sous une approche très actuelle ces textes parus il y a 150 ans. Patti Smith qui signe également, textes et photos de son quotidien dans Un livre de jours (Gallimard, 400 pages, 26,50 €)

« Une saison en enfer », Rimbaud et Patti Smith, Gallimard, 45 €