dimanche 17 avril 2022

Série télé - « Upload », seconde génération


Les plaisirs de la réalité virtuelle… après la mort. Dans Upload, série créée par Greg Daniels (The Office) pour Amazon, les riches peuvent continuer à vivre après leur mort dans un monde parfait. Il suffit de se faire « uploader » la mémoire… et de payer très cher. La saison 1 présentait aux téléspectateurs Nathan (Robbie Amell), jeune informaticien assassiné mais qui a été uploadé par sa fiancée richissime et Nora (Andy Allo, photo ci-dessus), la technicienne chargée dans la vraie vie de l’assister, son Ange dans l’Upload. Dans la saison 2, Nora a quitté la société pour rejoindre les technophobes qui luttent contre l’Upload. Nathan n’est plus seul puisque sa fiancée le rejoint dans l’Upload. 

L’intrigue criminelle (qui a tué Nathan, pourquoi ?), sans être abandonnée, est moins présente. Les créateurs ont préféré se concentrer sur les formidables possibilités de l’Upload où en réalité tout est possible. On rit beaucoup aux délires d’Ingrid (Allegra Edwards), la fiancée de Nathan. Son meilleur ami dans l’Upload, idiot et excessif dans tout, est aussi une source de gags sans limite. On apprécie aussi cette idée, folle mais digne de ce futur cauchemardesque, de proposer aux locataires de ce monde virtuel d’adopter un bébé numérique pour redécouvrir les joies de la famille. 

Et comme souvent dans les séries de Greg Daniels, les nombreux personnages secondaires, toujours très travaillés, apportent une grande richesse à un ensemble parfait pour se distraire tout en réfléchissant aux limites du virtuel.

 


BD - Panne de réseau


Histoire d’adolescents dans ce Moon signé Cyrille Pomès. Un roman graphique se déroulant, en septembre, dans une cité balnéaire inspirée du Barcarès, dans les Pyrénées-Orientales. Les touristes sont partis. Ne restent que les autochtones. L’auteur raconte le quotidien de plusieurs adolescents qui s’éveillent à l’amour. 

Il y a Gabriel, peu bavard et Luna, insolente et provocatrice. Ils vont se trouver, se découvrir à la faveur d’une panne complète de l’antenne relais du réseau de téléphone portable. Privés de leur drogue quotidienne, ils vont tous devoir réapprendre à vivre, sans partager photos et messages toutes les 10 secondes. Un album entre réalisme et poésie, aux décors lumineux, malgré la désolation de la période.   

« Moon », Rue de Sèvres, 18 €

samedi 16 avril 2022

Cinéma - Plus de famille, moins d’animaux fantastiques

Le 3e volet de cette saga imaginée par J. K. Rowling, maman de Harry Potter, s’intéresse aux secrets des frères Dumbledore.


Pour le troisième volet de la saga des Animaux fantastiques de J. K. Rowling, le réalisateur David Yates a mis un peu moins de bestioles étranges et un peu plus de tension familiale. Que les fans de la francise se rassurent, il reste nombre d’espèces magiques (notamment le qilin, au centre de l’intrigue), mais le film est essentiellement porté par les déboires et lourds secrets du passé de la famille Dumbledore. Une trame plus humaine (même si c’est dans une lignée de sorciers), qui permet au public de mieux s’identifier aux personnages principaux. 

Albus Dumbledore (Jude Law) vit avec son frère Aberforth, aubergiste à Poudlard. Ils sont tourmentés après la mort tragique de leur jeune sœur. De ce drame, on va découvrir les tenants et les aboutissants durant cette quête mouvementée, menée par Norbert Dragonneau (Eddie Redmayne) et son équipe. De Berlin et sa prison gardée par des monstres, New York ou le Royaume du Bouthan, en passant par une jungle non identifiée, lieu de naissance du qilin, Les animaux fantastiques : Le secret des Dumbledore en met plein la vue à un public conquis et qui ne sera pas déçu. Sauf les fans de Johnny Deep, obligé d’abandonner le rôle du grand méchant Gellert Grindelwald, confié à un Mads Mikkelsen encore plus crédible.

Film américain de David Yates avec Eddie Redmayne, Jude Law, Mads Mikkelsen, Jessica Williams, Dan Fogler

Roman - Un fantôme nommé Marcello

Mais qui est ce vieil homme qui tombe littéralement sur la tête du narrateur ? Ce roman de Thomas Vignau, se déroulant dans une ville fantasmée qui ressemble étrangement au Montpellier de sa jeunesse, fait se croiser deux originaux. 

Le narrateur, donc, un étudiant qui ne sait plus trop quoi faire de sa vie entre études dilettantes, boulot alimentaire (à cuire des frites), soirées destroy avec les potes, fumette et visionnage intensif de films du patrimoine. Il se cherche. Tous les jours : « Aujourd’hui était une montagne devant moi. Chaque matin je me retrouvais à ses pieds et je recommençais l’escalade à zéro. L’unique caillasse que je trimballais sous les nuages […], c’était ma solitude. » L’autre protagoniste de Marcello & Co c’est justement le fameux Marcello. On ne sait pas s’il s’appelle véritablement comme ça. Mais pour le narrateur, sa ressemblance avec l’acteur italien de 8 et demi est une évidence. Marcello, tombé du ciel en pleine rue, qui va tous les matins boire des rosés en lisant le journal avant de distribuer des petits bouts de papiers à des connaissances. Le narrateur l’observe, se passionne pour cet homme énigmatique et ses rituels, s’interroge aussi : « Pourquoi est-ce que cela me faisait tant d’effet ? Est-ce que je commençais simplement à partir en sucette ? »

Le style direct et sans fioritures de Thomas Vinau permet au lecteur de ressentir la curiosité de l’étudiant, découvrant avec lui ce jardin merveilleux, préservé en pleine ville, sorte d’antre de savant fou. Une échappée vers le fantastique, qui donne une ampleur à ce texte très étonnant. Finalement, après une partie d’une poésie absolue, on comprend la finalité de ce qui ressemble à la naissance d’une vocation quand il prend conscience que « chaque expérience, même quotidienne, même triviale, heureuse ou pas, pourrait m’aider à écrire. Et inversement, que le moindre moment consacré à la littérature m’aiderait à vivre. »

« Marcello & Co » de Thomas Vinau, Gallimard, 19 €

vendredi 15 avril 2022

Cinéma - Les cœurs du chœur carcéral

Mais quel joli film choral et musical que cet A l’ombre des filles d’Étienne Comar. Pourtant l’exercice s’annonçait périlleux.


Luc (Alex Lutz) est un célèbre chanteur lyrique. Il semble obligé de faire une pause dans sa carrière, après un événement dramatique. Loin des scènes européennes ou des festivals estivaux, il va passer une partie de l’été à animer un atelier de chant dans une prison pour femmes. La première partie du film va permettre au spectateur de faire connaissance avec ces femmes, ce professeur si particulier et cet univers oppressant. 

Si Luc n’en dit pas beaucoup sur sa carrière, il n’en demande pas plus à ses stagiaires. Comme il l’explique, un peu plus tard, il ne veut pas savoir pourquoi elles sont en prison, ce qui l’intéresse c’est leur personnalité. Le tour de force du film aura été de réunir un casting assez incroyable pour un film choral au ton très social. 

Parmi les chanteuses, qui au final se produiront devant les autres détenues, il y a Carole (Veerle Baetens), grande gueule qui espère devenir chanteuse pro, star exactement,  Jeanine (Marie Berto), la plus âgée, la moins douée et qui sait parfaitement qu’elle mourra en détention, Jess (Hafsia Herzi), la plus jeune, la plus fragile, bourrée de médocs, au ralenti, brindille portée par le courant, Noor (Fatima Berriah), la politique qui n’hésite pas à dire ses 4 vérités au prof qui vient s’acheter une bonne conscience, Marzena (Anna Najder), polonaise qui espère surtout améliorer son français. 

Dernière composante de la chorale : Catherine (Agnès Jaoui). Une voix pure, d’exception. Luc est en admiration. Mais chanter ne l’intéresse pas du tout. Elle ne fait cet atelier que pour obtenir une réduction de peine… 

Le reste du film montre ces répétitions, compliquées, enthousiasmantes, interrompues parfois par une bagarre. On n’oublie jamais que l’on est dans une prison. Notamment lors du spectacle final, apothéose d’un film musical pas comme les autres.

"A l’ombre des filles", film d’Etienne Comar avec Alex Lutz, Agnès Jaoui, Hafsia Herzi, Veerle Baetens, Marie Berto


De choses et d’autres - Brosse à mascara originale

Je vous ai raconté ici même, il y a quelques semaines (le 14 février dernier exactement, jour de la Saint-Valentin...), comment des chercheurs britanniques ont découvert que l’intérieur de certaines voitures étaient encore plus sales que des cuvettes de WC.

Ces chercheurs anglais sont visiblement passionnés par la saleté sous toute ses formes puisqu’une nouvelle étude vient de mettre en évidence un objet là aussi encore plus sale que ces fameuses cuvettes. En découvrant l’étude, je n’ai pas pu m’empêcher de me demander si c’étaient de nouveaux WC qui étaient analysés ? 

Si c’est bien le cas, je plains ce chercheur, persuadé au début de son cursus scientifique qu’il va décrocher un Nobel dans quelques décennies et qui se retrouve toutes les trois semaines à ponctionner à l’aide de cotons tiges les pires recoins des toilettes publiques de son laboratoire... On n’a pas toujours la carrière à laquelle on rêve en étant jeune. Quelle que soit sa spécialité.
Cette fois ce sont les pinceaux de maquillage contenus dans les trousses qui seraient beaucoup plus infectés par des microbes, bactéries et autres crasses rédhibitoires. Sur les 12 pinceaux testés, les scientifiques ont découvert plus de 4000 colonies de levures et de bactéries.

Cette étude scientifique on ne peut plus sérieuse se termine par une image qui risque de me hanter longtemps : En clair, mesdames, c’est comme si vous vous mettiez du mascara mais avec la brosse des WC. Pas pratique et vraiment dégoûtant.

Chronique parue en dernière page de l’Indépendant le vendredi 22 avril 2022

jeudi 14 avril 2022

DVD - "Le vétéran" vous tiendra éveillé...

DVD et Blu-ray. Un film avec Liam Neeson en vedette, c’est l’assurance qu’on ne s’endormira pas en cours de route. L’acteur aime l’action et les rôles qui dépotent. Il n’est pas déçu dans « Le vétéran », un film inédit en salles de Robert Lorenz qui vient de sortir en DVD et blu-ray chez M6 Vidéo. On retrouve dans la distribution de ce road movie à travers les étendues sauvages des USA, Katheryn Winnick (Vikings) et Juan Pablo Raba.  

Le scénario est classique dans le registre de la veuve et l’orphelin secourus par le « bon ». Poursuivis par les membres d’un cartel mexicain, une mère et son fils traversent la frontière qui sépare le Mexique de l’Arizona et se retrouvent sur les terres de Jim Hanson. Aigri, vieillissant, le vétéran de guerre veuf et désabusé va aider le garçon orphelin à traverser les États-Unis, poursuivis par des criminels et des policiers corrompus.

BD – Le retour des Mémés trash

Les personnes âgées sont de plus en plus à la mode dans la bande dessinée humoristique. Le succès des Vieux fourneaux (bientôt une seconde adaptation au cinéma avec Pierre Richard) en est la preuve. Pourtant les vieux ont toujours eu une place à part dans les pages de Fluide Glacial.

Mais pas les gentils, les marrants, plutôt les hargneux, sales, méchants et dégoûtants. Pervers Pépère en tête, sans oublier Carmen Cru. Deux dignes représentants de la vieillesse indigne rejoints par Les Mémés de Sylvain Frécon. Un second tome de gags de ces trois mégères décaties devrait faire rire aux éclats toutes les générations.

Toujours très attirées par le sexe (même si elles ne pratiquent plus), elles se posent aussi beaucoup de questions sur la mort. Du moins en dehors des horaires d’ouverture du Coccimarket. Elles sont souvent malades, souffrent d’Alzheimer du dos ou d’œdipe du pied.

Il y a même une allusion aux prochaines élections. A la sortie du bureau de vote, Huguette demande à Lucette « Vous avez voté pour qui ? ». Réponse embarrassée de la copine « Je sais pas trop… j’ai oublié mes lunettes ! »

Rassurant quand on sait que le prochain président de la République sera essentiellement élu par le 3e âge.

«#Lesmémés » (tome 2), Fluide Glacial, 12,90 €

 

Chronique parue en dernière page de l’Indépendant le samedi 26 mars 2022

mercredi 13 avril 2022

DVD - Les petits tracas d'une "Femme du monde"

DVD. Un métier comme un autre ? Certainement pas ! Des préoccupations quotidiennes comme les autres ? Évidemment. ! Le métier de prostituée est au centre du film « Une femme du monde » de Cécile Ducrocq qui sort en DVD chez M6 Vidéo. 

Marie (Laure Calamy), exerce à Strasbourg, en totale indépendance. Elle cherche le client au volant de sa voiture, a quelques habitués. 

Elle n’a pas beaucoup d’argent, mais suffisamment pour élever son fils. Mais face à son échec scolaire, elle décide de l’inscrire dans une école privée élitiste. Elle va devoir trouver une grosse somme d’argent en peu de temps. Marie quitte son relatif confort pour aller enchaîner les passes dans un bordel allemand. 

Un film réaliste et social avec une Laure Calamy magistrale dans ce personnage partagé entre un métier si dur et ce rôle de mère aimante si compliqué à assumer.  


De choses et d'autres - Pénélope pique la place d'Ulysse

Petite révolution dans le monde de la critique cinématographique : le journal Télérama, bible des cinéphiles exigeants, a décidé de bouleverser, en profondeur, son système de notation des films. Depuis les années 50, en plus des critiques écrites et étayées, le journal place à côté du titre un petit pictogramme (il y en a 5 de disponibles) pour dire si l’œuvre est excellente (Bravo !) ou à fuir (Hélas). Ces indications passaient par le visage d’un petit personnage nommé Ulysse.

Or, désormais, Ulysse est parti à la retraite et a laissé la place à… Pénélope. Une femme à la place d’un homme, voilà bien une tendance générale qui ne se dément pas. Et même dans la réalisation des visages stylisés de la nouvelle critique de Télérama, une femme est à l’honneur. Le dernier Ulysse était dessiné par Riad Sattouf, la nouvelle Pénélope est croquée par Pénélope Bagieu.

En présentant Pénélope, l’hebdomadaire culturel a refait l’historique de son système de notation. On découvre, alors, assez étonné, que pendant longtemps, en plus des critiques artistiques, le journal, issu d’un groupe de presse chrétien, émettait également des réserves dans le domaine moral. Le plus étonnant, une certaine « Centrale catholique du cinéma » donnait aussi des avis, peu conciliant. Il était recommandé de « s’abstenir de voir » certains films, d’autres, sans doute moins sulfureux, étaient simplement « à ne pas voir, sauf pour de sérieuses raisons. »

Voilà une formulation qui me laisse assez dubitatif. Surtout quand elle concerne un film comme « Le Rebelle » (1950) de King Vidor, avec Gary Cooper, qui aurait, selon certains, sa place au Panthéon du cinéma américain.

Chronique parue en dernière page de l’Indépendant le jeudi 24 mars 2022