mercredi 5 janvier 2022

De choses et d’autres - Fantastique galette

 


Mardi 4 janvier 2022. Je sors de ma sieste quotidienne avec une incroyable envie de galette des Rois. La bonne frangipane, cachée sous la pâte feuilletée dorée ; la fève, si dangereuse pour les dents ; la couronne, si ridicule, une fois sur la tête.

 

Mais, est-il encore politiquement correct de parler de galette des Rois en ces temps où le wokisme s’invite à toutes les tables.

Pourquoi des rois et pas des reines ? Pourquoi des cadeaux pour la naissance de Jésus ? Pourquoi ces rois sont-ils exotiques ? En vrai, mon estomac ne s’est jamais posé ces questions. Aussi, quand je découvre qu’un journal local de Besançon, L’Écho de la Boucle, annonce que la maire écolo vient de recommander aux boulangers de sa ville de ne plus vendre des Galettes des Rois, mais une « Fantastique Galette », je sens à plein nez le site parodique, genre Gorafi de province. Bingo.

Désormais, le plus marrant, dans ces pièges, ce n’est plus l’idée en elle-même, mais les cris d’indignation, sur les réseaux sociaux, des couillons - qui vivent, sans doute, dans une réalité parallèle pour penser que cette recommandation est du domaine du possible. On trouve, dans le lot, quelques journalistes de droite, des élus (de droite aussi) et d’extrême droite également, mais ça, on s’en serait douté. Marrant, certes, mais comme le fait remarquer la maire de la ville, cette promptitude à croire l’incroyable « révèle à quel point l’idéologie anti EELV de ces personnes les pousse à croire et relayer ce qui n’est qu’une blague ».

Que cela ne vous empêche pas de savourer une fantastique Galette des Rois achetée chez votre boulanger, ce sont les meilleures, et de trouver la fève pour couronner le tout.

Chronique parue en dernière page de l’Indépendant le mercredi 5 janvier 2022

Rentrée littéraire d’hiver : L’amour chez les jeunes et… les vieux



Maladie la plus agréable qui soit, l’amour frappe sans discernement. Les jeunes filles de 13 ans comme les vieux messieurs de 60 ans. Ces deux romans de la rentrée d’hiver sont des témoignages. Des expériences aux deux extrêmes de la vie, la découverte de l’amour et des choses du sexe par une adolescente, le retour de flamme pour un homme de 60 ans. Dans les deux cas, la passion est dévorante.

Dans un collège privé de Beyrouth, des filles de 13 ans n’ont qu’une seule envie : goûter aux garçons. Dans son premier roman au titre si explicite, Le goût des garçons, Joy Majdalani raconte comment sa narratrice cherche la bonne amie, celle qui lui permettra d’en apprendre plus sur ces mystérieux garçons, leur sexe, leurs désirs. Elle en rêve et craint ne jamais pouvoir devenir une femme. « Des hommes, j’étais condamnée à ne glaner que des bribes, la compagnie circonstancielle et désintéressée d’oncles, de professeurs, de pères d’amies. Jamais je ne serais initiée à leurs mystères. » Pourtant elle va enfin trouver le Graal. Un premier baiser, quelques caresses puis le grand saut conté dans une langue vraie, crue et audacieuse. 



À l’opposé, dans Pars, oublie et sois heureuse de Pierre Mérot, c’est le récit d’un amour inespéré qui vient ensoleiller la vie de l’écrivain l’année de ses 60 ans. Sandy est professeur, comme lui. Il va lui écrire quotidiennement des emails de septembre 2019 à janvier 2021. Le roman ne contient que ces courts textes, pas les réponses hormis une lettre de rupture. La plupart du temps on devine ce qu’elle lui dit, comment deux êtres qui ont pourtant tout vécu peuvent redécouvrir l’enchantement de l’existence quand on tombe amoureux, les rendez-vous rares mais intenses et, malgré l’âge, les jeux coquins. « Heureusement qu’il y a ta photographie hors la loi le jour où l’on a soixante ans… Soixante ans, c’est-à-dire une âme enfantine dans un corps qui a marché si longuement. » 

Ce superbe réveil de la flamme du désir va finalement se révéler très destructeur. Un texte entre beauté de la passion, tristesse de l’éloignement et excitation des scènes érotiques.

« Le goût des garçons » de Joy Majdalani, Grasset, 16 € (en vente le 5 janvier)

« Pars, oublie et sois heureuse » de Pierre Mérot, Albin Michel, 18,90 € (en vente le 5 janvier)



mardi 4 janvier 2022

De choses et d’autres - Promis, on paiera nos impôts en France

 

Faire appel à sa communauté de fans pour animer ses réseaux sociaux peut parfois se révéler une très mauvaise idée. Le compte Instagram de Amazon Prime Vidéo en a fait les frais récemment.

 

A la base, un community manager en manque d’inspiration décide de solliciter ses abonnés. Il publie une photo d’une des héroïnes de la série The Boys avec cette légende : « Le meilleur commentaire sous ce post deviendra notre bio. » Succès fulgurant. Rapidement, des centaines de commentaires font leur apparition. Mais pour une proposition un peu sérieuse, même si elle cite
les principaux concurrents : « De Prime abord, vous n’êtes ni sur Netflix, ni sur Disney + », un commentaire revient en boucle, des dizaines, des centaines de fois : « Promis, on paiera nos impôts en France. » On sait que les grands groupes américains œuvrant dans les nouvelles technologies profitent de la dématérialisation de leur offre pour contourner quelques règles élémentaires en matière de fiscalité. Des millions de Français achètent sur Amazon. Un chiffre d’affaires conséquent qui échappe, en grande partie, aux fonctionnaires de Bercy.

Alors, les fans d’Amazon ont décidé de rappeler cette évidence, allant même jusqu’à suggérer à la multinationale de régulariser sa situation et même de transformer cette décision en slogan. Pas sûr que cela fonctionne.


Dans un premier temps, Amazon a tenté d’effacer les commentaires sur les impôts. Mais, face à la déferlante les petites mains ont abandonné. Et, pour l’instant, le commentaire sur les impôts continue à faire des petits (plus de 2000 hier soir).

Chronique parue en dernière page de l’Indépendant le mardi 4 janvier 2022

BD - Collégiennes curieuses



Garance et Linon ont 11 ans et sont dans la même classe au collège. Deux amies qui commencent à se poser beaucoup de questions. Notamment en ce qui concerne l’amour. Pour savoir où elles vont mettre les pieds (Linon est amoureuse d’un garçon mais n’ose pas lui parler), elles vont mener l’enquête.

Leur but : découvrir ce que c’est réellement que l’amour. Une BD écrite par les Béka et dessinée par une jeune Italienne, Maya. C’est particulièrement fin, très actuel et donne des réponses (ou du moins des pistes), à toutes les jeunes lectrices.

« Cœur Collège » (tome 1), Dupuis, 13,95 €  
 

lundi 3 janvier 2022

De choses et d’autres - Dans de beaux draps (eaux)

 

Il n’aura pas fallu deux jours pour que 2022 ressemble à 2021 sur le plan des polémiques à tendance populiste et nationaliste. Année électorale oblige, le moindre symbole est prétexte à s’indigner, main sur le cœur, regard braqué sur l’horizon, tel un général si fier de sa ligne Maginot qui mettrait le pays à l’abri des visées expansionnistes de voisins turbulents. Donc, pour marquer le fait que la France préside le conseil de l’Europe depuis le 1er janvier, le drapeau européen a flotté durant deux jours sous l’Arc de Triomphe. Exit le bleu blanc rouge, juste du bleu et 12 étoiles.

 

De Pécresse à Ciotti, ils ont tous tenté de surréagir plus vite et sur un ton encore plus offusqué que les « patriotes » patentés que sont Philippot, Le Pen ou l’autre candidat d’extrême droite pour qui « impossible n’est pas Français », « l’année de tous les possibles » selon le président Macron. Franchement, je me réjouis de leurs réactions. Au moins cela prouve qu’ils connaissent le drapeau européen. Il y a 40 ans, la majorité d’entre eux auraient été incapables d’identifier ces couleurs symboles de la paix dans le vieux continent.

La palme de la réaction déplacée revient à Éric Ciotti. Comment peut-il s’indigner de ce grand remplacement temporaire de drapeau « au-dessus de la flamme du soldat inconnu » ? Au moins, le soldat inconnu aura servi son pays. Pas comme le député des Alpes-Maritimes qui a réussi à échapper au service militaire, « l’appel sous les drapeaux » comme on disait à l’époque.

Et dire qu’Éric Ciotti milite pour un retour au service militaire obligatoire. Il mériterait d’être nommé ministre des réformés, pour ne pas utiliser un terme plus dégradant.

Chronique parue en dernière page de l’Indépendant le lundi 3 janvier 2022

BD - Fin du cauchemar



Cinquième et dernier tome de La Brigade des Cauchemars, série imaginée par Franck Thilliez. Un savant a mis au point une machine permettant à certains jeunes de se déplacer dans les rêves des dormeurs.

Dans cet ultime épisode ils vont défier Léonard, grand amateur de cauchemars et qui garde prisonnière dans son esprit la femme du savant. Le but de la brigade est simple : la libérer. Yomgui Dumont au dessin a parfaitement animé graphiquement cette série qui passe de la banale réalité à un monde des rêves extraordinaire.

« La brigade des cauchemars » (tome 5), Jungle, 13,95 € 

dimanche 2 janvier 2022

BD - Bretons contre Écossais

 

Nicolas Cado, dessinateur breton, est également entraîneur de lancer de marteau. Dans sa Bretagne natale, il coache des jeunes bercés par les légendes celtes. Quand il leur propose de participer aux highland games en Écosse, ils acceptent immédiatement.

Dans ces jeux écossais il y a effectivement le lancer de marteau, mais aussi de la botte de foin ou du tronc d’arbre. Une histoire vécue, romancée par Fabien Grolleau, dessinée par Nicolas Cado et qui raconte essentiellement une belle histoire d’amitié.

« Highland Games », Delcourt, 19,99 € 

samedi 1 janvier 2022

De choses et d’autres - Un jour comme un autre

 


En ce premier jour de l’année, faut-il se retourner pour analyser 2021 ou garder le regard braqué vers l’avenir et faire des spéculations sur 2022 ? Ces questions, purement théoriques, ne résistent pas à la routine.

 

On est samedi, un jour comme un autre, pas très différent des 365 qui viennent de s’égrener et sans doute très comparable aux 365 qui s’annoncent. Réveillon et cotillons seront oubliés après-demain, lundi, rentrée des classes des plus jeunes et reprise du boulot pour beaucoup. On se demandera juste, comme la semaine dernière, si on va encore réussir à passer à travers. A travers les gouttes de la pandémie.

Malgré la vaccination, malgré les gestes barrières, malgré une prudence de Sioux, le virus gagne du terrain. On se sent comme cerné par le vilain variant qui se joue de toutes les ruses élaborées pour en rester éloigné. Plusieurs collègues infectés, encore plus dans la famille, les voisins claquemurés, par précaution ou obligation : ce samedi ressemble à vendredi et jeudi derniers et leurs 200 000 cas de Covid-19 relevés en France.

Pourtant, la grande majorité d’entre vous a fait la fête vendredi. Mais finalement, n’est-ce pas ce que les Humains ont toujours fait dans l’adversité. Je comprends mieux désormais pourquoi l’orchestre du Titanic a joué jusqu’à la dernière seconde.

Donc en ce samedi, jour comme un autre, je ne me permettrais pas de vous souhaiter une bonne année, chers lecteurs et auditeurs. Juste espérer qu’elle soit un peu moins pire que les deux précédentes.

Chronique parue en dernière page de l’Indépendant le samedi 1er janvier 2022

BD - Edgar P. Jacobs intime


 

Il a marqué l’histoire de la bande dessinée. Pourtant Edgar P. Jacobs a longtemps préféré le chant au dessin. Une vie extraordinaire racontée dans ce roman graphique de François Rivière et Philippe Wurm. Le premier, scénariste, a parfaitement connu le créateur de Blake et Mortimer.

Toutes les anecdotes sont garanties authentiques et souvent de la bouche même du célèbre Belge. Wurm, au dessin, coule son graphisme dans une ligne claire de circonstance. Les vrais fans préféreront la version luxe, en noir et blanc et agrémentée d’un gros dossier, pour le prix de 49,50 €.

« Edgar P. Jacobs, le rêveur d’apocalypse », Glénat, 22,50 € 

mercredi 21 octobre 2020

Cinéma - “Adieu les cons” : la cavale ultime

Toujours aussi acerbe, Albert Dupontel brocarde de nouveau notre société devenue folle.

Le suicidaire (Albert Dupontel), la condamnée (Virgine Efira) et l’aveugle (Nicolas Marié), le trio improbable de la cavale du film Adieu les cons.  Jérôme Prébois - ADCB Films


Depuis toujours, Albert Dupontel a un faible pour les ratés, les oubliés de la vie, les imparfaits et autres inadaptés à notre société du toujours plus beau, toujours plus brillant. Il puise dans ces personnages des idées de scénario où toute sa loufoquerie couplée à un anarchisme radical permet de transformer le banal en extraordinaire. Adieu les cons n’échappe pas à cette règle, avec cependant de plus en plus de tendresse pour ces handicapés de la vie sociale.

Tout débute dans le cabinet d’un médecin. Suze Trappet (Virginie Efira) découvre les radios de ses poumons. Elle trouve ça très joli. Le toubib, lui, s’égare en circonvolutions pour ne pas avouer de but en blanc qu’elle est condamnée. JB (Albert Dupontel), informaticien austère, est mis au placard pour laisser la place à un jeune diplômé plus dynamique. Désespéré, il décide de se suicider. Cela tourne mal et le voilà en fuite avec Suze, qui va lui demander de retrouver le fils qu’elle a abandonné quand elle était adolescente. Pour cela ils vont avoir besoin de l’aide de M. Blin (Nicolas Marié), un archiviste rendu aveugle après une bavure policière. Ces Pieds Nickelés vont déjouer tous les pièges des forces de l’ordre et localiser le médecin qui a accouché Suze. Le docteur Lint (Jackie Berroyer), souffre de démence sénile, mais cette histoire lui permet de retrouver un peu de lucidité et finalement, après bien des péripéties improbables (qui font tout le sel du film), le trio va enfin mettre la main sur ce fils disparu et l’aider à mieux gérer sa vie sentimentale de geek coincé et introverti.

Trio équilibré

Cela semble touffu résumé de cette façon, et pourtant le film est d’une fluidité absolue. Les désespoirs de Suze, l’honnêteté de JB, les bravades de M. Blin permettent à chacun de tirer le meilleur de l’autre. Une réelle complicité, tendresse aussi, se noue entre les trois. A noter que dans le rôle de la petite amie du fils de Suze, Marilou Aussiloux, comédienne originaire de Narbonne, prouve qu’elle est aussi à l’aise en tailleur chic qu’en robe d’époque qu’elle porte dans La révolution série diffusée sur Netflix. Autre petit rôle remarqué (et remarquable), Terry Gilliam des Monty Python interprète d’un vendeur d’armes à feu qui pourrait faire de l’ombre à Trump. 

Et la morale de l’histoire me direz-vous ? Elle se résume par le titre du film : Adieu les cons !

Film français d’Albert Dupontel avec Virginie Efira, Albert Dupontel, Nicolas Marié