Quelques chroniques de livres et BD qui méritent d'être lus et les critiques cinéma des dernières nouveautés. Par Michel et Fabienne Litout
mercredi 23 octobre 2013
NET ET SANS BAVURE - Les gogos à plumer se ramassent à la pelle
Le financement participatif, d'exceptionnel, est devenu monnaie courante. Les plateformes se multiplient, les projets aussi. Le gouvernement français a même l'intention de légiférer sur une pratique en plein essor.
Il était une fois de belles histoires comme cet apiculteur des Pyrénées-Orientales qui a sauvé ses ruches grâce aux 409 contributeurs. Et puis le grand n'importe quoi. Le secteur semble donner beaucoup d'idées aux farfelus persuadés que les gogos de la toile sont prêts à leur céder toutes leurs économies.
Deux adolescents américains veulent réaliser un livre photo sur Paris et Rome. Of course, il leur faut se rendre sur place pour réaliser les clichés. 5 000 dollars leur sont indispensables. En clair, le coût de leur mois de vacances en Europe aux frais de la princesse. Bien tenté. Hélas la collecte ne dépasse pas les 200 billets verts.
Lassé de porter des pastèques dans des sacs en papier (on est toujours aux USA où, c'est bien connu, les gens achètent chaque jour une pastèque), un inventeur imagine des « sangles à pastèques ». Réalise des prototypes et propose une levée de fonds sur Kickstarter. 25000 dollars pour en lancer la fabrication industrielle. Après 30 jours, il récolte péniblement 332 dollars au pays du hamburger roi.
Enfin, Matt Tantra de l'Illinois, illuminé total, veut réaliser un documentaire sur « les deux réincarnations les plus récentes de l'apôtre saint Paul, le plus jeune d'entre eux est Joshua Tucker », un Canadien de 21 ans. Objectif : 70 000 dollars, résultat : zéro. Gogo, mais pas trop...
Retrouvez d'autres chroniques sur le blog lelitoulalu
BD - John Tiffany, le chasseur chassé
Tout lui sourit. John Tiffany, le meilleur dans sa branche professionnelle, multiplie les coups rémunérateurs. De quoi se payer une voiture de sport rouge et une call-girl pour trois mois. John, brun athlétique, est chasseur de primes. « Un métier de con » selon lui. Mais ça rapporte. De l'argent et des ennuis. Côté ennuis, Stephen Desberg, le scénariste, a chargé la mule dans ce premier album de la nouvelle série de la collection Troisième vague. Le chasseur de primes se transforme en gibier. Il apprend qu'une rançon de 800 000 dollars est mise sur sa tête par un mystérieux professeur pakistanais. Tiffany comprend que sa dernière mission, capturer un terroriste pour la CIA, lui a attiré de sérieuses inimitiés. Il essuie les premiers tirs à Mexico. Normalement personne ne sait qu'il y séjourne en dehors des quatre personnes qui lui sont le plus cher : son informaticien, son bras droit, le curé de sa paroisse et Magdalena, sa maîtresse, la call-girl dont il aimerait bien prolonger la location. A moins que ce ne soit elle la traître .. Desberg, encore plus percutant que dans ses autres séries (IRS, Empire USA) a confié le dessin à un expert en scènes d'action, Dan Panosian, formé à l'école des comics.
« John Tiffany » (tome 1), Le Lombard, 12 €
mardi 22 octobre 2013
NET ET SANS BAVURE - Idiots en escadrille
Force est de le reconnaître, les Américains nous sont supérieurs dans tous les domaines. Même les moins reluisants. « Les cons ça ose tout, c'est même à ça qu'on les reconnaît », célèbre réplique de Lino Ventura dans les « Tontons Flingueurs », devrait être réactualisée en « Les Américains ça ose tout... »
Veuf éploré, après la crémation de son épouse, il récupère les cendres. Elle était sans doute une adepte du shopping puisqu'il décide de vider l'urne funéraire dans un centre commercial de Floride. Le nuage de cendres cause une belle panique chez les commerçants et les clients persuadés d'une attaque terroriste à l'anthrax...A l'approche d'Halloween, les Américains aiment décorer leur maison. Une citrouille ? Trop classique pour cet adepte des effets spéciaux. Des oreillers, quelques habits et beaucoup de peinture rouge, le tout glissé sous la porte du garage et les voisins, sûrs d'être témoins d'une scène de crime, appellent la police. Le fan de films d'horreur a eu droit à une perquisition en règle de sa maison...
Le pire vient de cette vidéo postée fièrement par deux chefs scouts de l'Utah. Au cours d'une sortie dans un parc national, ils remarquent un énorme rocher en équilibre. « Et si on le faisait tomber ? » demande l'un. « OK, je filme ! » répond l'autre. Résultat : ils détruisent par leur idiotie un rocher datant de 170 millions d'années, issu d'une formation géologique très rare. Et ils en sont fiers ! Les Américains, ça ose tout !
Chronique "Net et sans bavure" parue ce mardi en dernière page de l'Indépendant.
"Je sais qui tu es", thriller islandais réfrigérant
Garoar, au chômage depuis quelques mois dans une Islande durement touchée par la crise, a investi ses dernières économies dans l'achat d'une maison à Hesteyri. Il a pour ambition de transformer la bâtisse en gîte. Idéalement située, loin de tout, au cœur du parc naturel, elle ne devrait pas désemplir en été. Il débarque à l'automne avec matériel et vivres pour une semaine de travaux intensifs.
Il n'est pas seul, accompagné de sa femme, Katrin et de Lif, la veuve de son meilleur ami, associé mort d'une crise cardiaque avant l'aboutissement du projet. Mais le lieu, abandonné, semble même hanté. Le cadre majestueux et sauvage devient source inépuisable de terreur.
Rarement un roman (signé Yrsa Sigurdardottir) aura suscité autant d'angoisse au lecteur. A ne pas lire seul dans sa maison de campagne. A moins de rechercher des sensations fortes. (Points, 7,70 €)
lundi 21 octobre 2013
BD - La violence des antipodes dans "Maori" de Ferey et Camuncoli
La Nouvelle-Zélande, ses moutons, ses rugbymen... sa violence. Petit pays aux antipodes de la France, il fascine Caryl Férey. L'écrivain français y a passé quelques années. Suffisamment pour s'imprégner de la culture maori et de la recracher dans un polar sombre et violent dans la Série Noire. Un roman adapté par Férey lui-même et dessiné par Camuncoli, un Italien qui n'a plus rien à prouver après avoir, notamment, signé quelques aventures de Spider-Man. Jack Kenu, flic à la criminelle d'Auckland, est chargé de l'enquête sur le meurtre d'une jeune maorie retrouvée la tête fracassée sur une plage fréquentée par des surfeurs. Il ne croit pas une seconde au crime d'un rôdeur.
D'autant que la victime, non identifiée au début, se révèle être la fille du leader de l'opposition au Premier ministre conservateur. A quelques jours des élections, ce rebondissement sanglant ne sera pas sans conséquence sur le résultat. Avec une noirceur absolue, Caryl Férey trimbale son anti-héros dans une Nouvelle-Zélande minée par la crise, où le capitalisme fait des ravages, essentiellement chez les pauvres composés en grande majorité de Maoris. Au final, la première partie de ce diptyque se révèle plus politique que policière. Mais avant tout passionnante.
« Maori » (tome 1), Ankama, 14,90 €
NET ET SANS BAVURE - Joggeek
L'application, installée sur le smartphone du sportif, permet de suivre sa course à la seconde près grâce au GPS. Le petit point bleu parcourt mon écran et la carte de Google Earth. Un peu d'imagination et on halète à son côté. Sur un sentier, il fait un écart de 5 mètres. Soit il a repéré une belle grappe de muscat oubliée par les vendangeurs, soit il a fait une pause pipi à l'abri des regards. Dans une zone résidentielle, son rythme devient irrégulier. Il pique un sprint. Saine émulation avec un autre joggeur ou un chien agressif ? L'avantage avec cette application, c'est que le coureur est toujours localisable.
Mais dans notre monde un peu tordu, le petit plus peut se transformer en gros inconvénient. Supposons : le sportif que vous êtes veut profiter de ses escapades pour batifoler avec sa maîtresse. Raté. A l'inverse, pendant que vous avalez les kilomètres, madame sait qu'elle dispose d'une excellente fenêtre de tir pour vous tromper en toute quiétude. Il suffit de garder un œil sur le petit point bleu... Sans parler des cambrioleurs un peu branchés. Non seulement vous donnez votre adresse, mais vous leur indiquez de combien de temps ils disposent pour vous dépouiller...
Chronique "Net et sans bavure" parue en dernière page de l'Indépendant ce lundi matin.
dimanche 20 octobre 2013
Romans - Écrits familiaux
Même après le célèbre « Famille, je vous hais » de Gide, les témoignages font recette. Exemple avec Géraldine Danon, Arthur Loustalot et Nicolas Clément.
La famille, entière et exclusive, est au centre de ces trois livres pourtant très différents. Si Géraldine Danon raconte son périple dans les glaces de l'Antarctique, Nicolas Clément emmène le lecteur au bord de la folie meurtrière avec une fille décidée à venger sa mère de la violence du père alors qu'Arthur Loustalot, dans un style étonnamment imagé, enferme ses personnages dans un appartement exclusivement féminin mais hanté par la présence masculine. La cellule familiale, heureuse, aliénante ou détruite permet à ces trois auteurs de raconter ce qui fera toujours avancer le monde : la filiation et l'héritage.
Actrice dans sa jeunesse, Géraldine Danon a vécu superficiellement. Du moins c'est l'impression générale laissée après la lecture de son périple, en famille et en voilier, dans les glaces de l'Antarctique. La jolie blonde aux rôles parfois déshabillés a laissé la place à une maman de rêve. Sa vie a basculé après sa rencontre avec Philippe Poupon, le navigateur. Deux enfants (en plus de Loup d'un précédent mariage) et l'envie de partager la découverte de notre planète avec eux. Dans « Le continent inconnu », elle raconte comment la Fleur Australe, leur maison voilier, part à la conquête du pôle Sud. Un périple dans des endroits déserts, préservés mais très inhospitalier et dangereux. Est-ce un lieu pour des enfants ? Oui s'ils sont sous la responsabilité d'un père navigateur hors pair et d'une mère attentive. Le livre, agrémenté de deux cahiers photos, raconte la région mais aussi, et surtout, les réactions des enfants et les doutes des parents. Dépaysant et instructif, un voyage immobile pour le lecteur alors que la tribu Danon-Poupon est déjà repartie pour un nouveau périple.
Papa violent
Nicolas Clément dont c'est le premier roman place lui aussi la famille au centre de « Sauf les fleurs ». Marthe, la narratrice, est une adolescente presque heureuse dans une ferme d'une région montagneuse. Elle passe ses journées entre école, animaux et câlins complices avec son petit frère. Le problème de Marthe c'est le père. Il est violent. Notamment avec la mère, victime amoureuse. Et un jour le pire arrive. La mère meurt sous les coups du père... Famille éclatée. Le cadet est placé dans une famille d'accueil, Marthe avec son premier amour part aux USA. Mais un jour elle reviendra. Elle retrouvera son père... Style acéré, phrases chocs, tension perpétuelle, ce court texte ne laisse pas indifférent. Marthe c'est un peu la figure générique de toutes les victimes lassées de subir.
Maman folle
Une mère amoureuse d'un mari absent est au menu de « La ruche » d'Arthur Loustalot. Femme à la dérive, elle a heureusement ses trois filles pour placer des garde-fous à sa démence destructrice. Car si l'amant est parti, depuis elles restent toutes les quatre dans ce petit appartement décrit minutieusement par l'auteur. Il raconte par le menu les tâches ménagères des unes et des autres. Une plongée dans la trivialité du quotidien, comme pour mieux exorciser cette descente dans les bas-fonds de l'aliénation. Un roman dur, âpre, où la jeunesse et l'insouciance sont mises à mal par cette désespérance maternelle. Trois livres différents, opposés tout en étant complémentaires. Car s'il y a des familles heureuses, d'autres sont déchirées et certaines sont condamnées.
« Le continent inconnu », Géraldine Danon, Arthaud, 19,90 €
« Sauf les fleurs », Nicolas Clément, Buchet Chastel, 9 €
« La ruche », Arthur Loustalot, Lattès, 16 €
samedi 19 octobre 2013
BD - Espions en bleu par Cauvin et Lambil chez Dupuis
Blutch et Chesterfield, les héros des increvables Tuniques Bleues de Cauvin et Lambil, quittent une nouvelle fois l'uniforme de l'armée nordiste pour une mission en civil. Les deux soldats, toujours à la recherche de la gloriole pour l'un, de la planque tranquille pour l'autre, acceptent d'endosser le costume d'espions. Ils sont chargés d'infiltrer la bande d'esclavagistes menée par le cynique Capitaine Miller. Basée sur des faits historiques avérés, l'histoire raconte comment ces renégats harcèlent les Nordistes au cœur du Colorado. L'action se déroule en grande partie dans la montagne et une mine abandonnée, l'occasion pour Lambil de truffer ses vignettes de scènes animales bucoliques. Comme si, avec le temps, il fuyait la compagnie des hommes. Il est vrai que les chamailleries incessantes de Blutch et Chesterfield pourraient être pénibles si elles n'alimentaient avec bonheur l'essentiel du ressort comique de la série.
« Les Tuniques bleues » (tome 57), Dupuis, 10,60 €
NET ET SANS BAVURE - Trésor de geek made in Apple
Vous souvenez-vous de ce que vous faisiez en 1983 ? Personnellement j'achevais mes études de journalisme et ne pensais pas une seconde au futur me contentant du présent.
D'autres, plus visionnaires, ont laissé une trace indélébile. En 1983, Steve Jobs, jeune créateur d'Apple, participe à Aspen, dans le Colorado, à l'International Design Conference dont le thème est « L'avenir n'est plus ce qu'il était ». Un raout de crème de geeks au cours duquel Jobs imagine ce qui deviendra, près de 30 ans plus tard, l'iPad. A la fin du séminaire, chaque participant doit choisir un objet, le sceller dans une poche en plastique étanche et déposer le tout dans un tuyau d'acier long de 4 mètres. Cette « Time capsule », trésor de 1983, est enfouie dans un terrain près d'Aspen. Au fil des années, la localisation exacte de la Time capsule se perd.Diggers, une émission de National Geographic Channel se lance à sa recherche. Et la déterre fin septembre. Si certains ont déposé un téléphone (à cadran), les cassettes VHS des débats ou six bières, Jobs a choisi la souris de son ordinateur. En 1983, le Macintosh n'est pas encore commercialisé et Steve Jobs espère beaucoup en Lisa (du prénom de sa fille), un ordinateur de bureau doté d'une interface graphique et d'une souris. Lisa, trop cher, tombe dans les oubliettes. Mais la souris est toujours là.
Et comme aux USA tout se termine par une question d'argent, certains sont prêts à mettre des milliers de dollars si ce fossile informatique est mis aux enchères.
Chronique parue ce samedi en dernière page de l'Indépendant
vendredi 18 octobre 2013
NET ET SANS BAVURE - Cœur de Glass à la mode Google
Elles seront LE gadget geek de 2014. Encore expérimentales, les Google Glass n'en finissent pas de faire parler d'elles. Testées par quelques chanceux, elle dévoilent chaque jour de nouvelles possibilités.
Ainsi Google vient de déposer un étonnant brevet lié à ces lunettes du futur. Étonnant car il s'agit d'accomplir un simple geste. Vous avez déjà remarqué ces starlettes ou sportifs qui, pour exprimer tout leur amour envers leurs fans, forment un cœur avec les mains. Ce cœur, avec les Google Glass deviendra l'équivalent d'un « like » sur les réseaux sociaux.En balade, les binocles du futur sur le nez, vous tombez en admiration devant un paysage majestueux, type Canigou ou Cité de Carcassonne. Vous placez les mains devant vous et instantanément vos abonnés à Facebook ou Google+ savent que vous « aimez » ça. Vous discutez avec quelqu'un. Le moteur de recherche intégré aux lunettes l'identifie, vous branche sur sa page perso. Plus la peine de cliquer, un signe cœur et vous voilà ami avec lui. Le problème (il y a toujours un mais) : accepter de se montrer en public avec des lunettes ridicules et de faire des gestes tout aussi idiots... Dans la zone commentaires de l'article, un certain Arnaud ose un politiquement incorrect "Pour ceux qui ont qu'un bras, ça sera pas de bras, pas de like." Dans la même veine, au niveau des gestes explicites, j'en connais un autre (qui ne nécessite qu'une main et qu'un seul doigt) qui permettrait enfin de dire simplement « Je n'aime pas » ! Mais avec les Américains puritains, c'est pas demain la veille.
Chronique "Net et sans bavure" parue ce vendredi en dernière page de l'Indépendant.
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