samedi 3 février 2007

BD - L'Argentine violente et romantique racontée par Trillo et Domingues sdans "La marque du péché"


L'histoire de l'Argentine a toujours été très agitée. Cette colonie espagnole est passée par plusieurs étapes de rébellion et de guerres civiles avant de connaître un semblant de stabilité depuis quelques décennies. L'action de cette nouvelle série se déroule en 1850. 

L'Argentine et l'Uruguay sont en conflit ouvert. Le général Rosas, dictateur sanguinaire, règne sur Buenos Aires. Les révolutionnaires tentent de le renverser. Dans cet imbroglio, Thomas Vida, dessinateur satirique fuyant les persécutions du régime de Louis Philippe, va se trouver confronté à un ange. Blessé, il est secouru par la belle Angustias. La jeune femme est veuve depuis peu. Quelques minutes après son mariage, son époux est abattu. 

Un sort tragique commun à tous les hommes qui l'approchent. Mais avec Thomas, c'est une nuit d'amour frénétique qui l'attend. Il va falloir maintenant aux tourtereaux éviter le courroux du frère, bras droit de Rosas. 

Écrite par Trillo, cette histoire romantique et passionnée, donne l'occasion à Domingues de dessiner les courbes tentantes et enchanteresses de la belle Angustias. 

"La marque du péché", Albin Michel, 13,90 € 

vendredi 2 février 2007

BD - Retour à la planète berceau pour la série "Nova Genesis" de Chabbert et Boisserie


Dernier épisode pour la série Nova Genesis écrite par Pierre Boisserie et dessinée par Eric Chabbert. Will, de banal étudiant américain, est devenu pilote d'un vaisseau spatial extraterrestre. Le jeune homme, pourchassé par l'armée comprend enfin d'où il vient et quel est son rôle. 

Dans cette quatrième partie, Will et ses amis, Bob, son guide et Lolita, sa petite amie, débarquent sur Nova, la planète d'origine. Mais il ne trouvent qu'une vile déserte. Les « Purs », la caste dominante, semblent s'être évaporés. 

Une simple illusion d'optique, les Purs ne sont pas complètement détruits mais l'équilibre de Nova, lui, n'est plus qu'un lointain souvenir. La caste inférieure, les Alpha, s'est révoltée. Les ruines sont nombreuses sur la planète ravagée. Mais le retour de Will va permettre de résoudre le principal problème de la population de Nova : l'impossibilité de procréer pour prolonger une civilisation en train de s'éteindre. 

Une série de science-fiction qui, après des épisodes particulièrement mouvementés, laisse beaucoup de place aux explications, parfois hermétiques, préparation d'une chute originale. (Glénat, 12,50 €)

jeudi 1 février 2007

BD - La planète détraquée c'est le "Biotope" de Brüno et Appollo


Biotope est une planète entièrement recouverte de forêt. Une base peuplée de scientifiques permet d'étudier ce milieu vierge. Seule une navette mensuelle relie Biotope à la Terre. La dernière arrivée débarque trois policiers. 

Un meurtre a été commis dans la section recherche géologique. Le commissaire Toussaint est chargé de découvrir pourquoi un chercheur a tué un collègue (et par ailleurs amant) avant de se suicider. Trois policiers noirs qui rapidement ne se sentent pas à leur place dans cet univers clos et aliénant. L'éloignement et le manque de communication joue imperceptiblement sur l'équilibre psychique des chercheurs. 

De plus, la forêt, impénétrable, omniprésente, comme vivante et douée de raison, semble jouer un rôle actif dans les événements. Et quand la nouvelle navette arrive, tout bascule pour le commissaire Toussaint. 

Le scénario d’Appollo fait savamment monter le sentiment de paranoïa ambiant. Brüno, dessinateur très seventies, entre base moderne et nature vierge, plante le décor d’une série prometteuse. (Dargaud, 9,80 €)

mercredi 31 janvier 2007

BD - Copain encombrant


Jean-Claude Denis est un orfèvre des sentiments. Il parvient, en quelques cases, à planter une ambiance, une personnalité, un milieu. Nouvel exemple avec cet album qui s’affirme comme un des plus réussis de cette rentrée de janvier, correspondant au festival d’Angoulême qui a eu lieu ce week-end. Melvin est un jeune patron dynamique et actif. Anita, son assistante, est secrètement amoureuse du boss. Ce dernier, en raison de sa réussite, passe à la télé. 

Léo, un de ses anciens amis du lycée le reconnaît et le retrouve. Léo, un looser absolu, qui, après une séance d’hypnose, devient absent et dépendant, à la charge de Melvin. Une sorte de légume qui fait ce qu'on lui demande mais n'a plus aucune volonté propre. Un poids supplémentaire qui a le don de fortement énerver le jeune patron ambitieux. 

D'autant que ses affaires déclinent et que côté sexe, une jeune étudiante lui résiste. Bref il va devoir sérieusement se remettre en question. 

L'opposition entre le gagneur dynamique et le perdant tragique est savoureuse et révèle bien des surprises au final.

"Le sommeil de Léo", Futuropolis, 16 €

mardi 30 janvier 2007

Roman - Les lettres du prisonnier

Quand un de ses lecteurs, par ailleurs prisonnier, écrit à Michel Ragon, l’écrivain y trouve prétexte à se remémorer sa jeunesse.


Ecrivain prolixe, Michel Ragon a traversé la seconde partie du XXe siècle. Ses œuvres, souvent historiques, abordaient rarement le « je ». Dans ce court roman, il ose, racontant ses amours, ses passions, ses origines. Le prétexte ? Une lettre de lecteur. Un lecteur prisonnier qui parvient à l’intriguer en déclarant dans ses missives qu’il connaît la femme de l’écrivain, Christine. L’inconnu écrit « Christine et moi étions du même monde. Nés dans le même milieu privilégié, ayant poursuivi les mêmes études. Et nous nous sommes abandonnés aux mêmes dérives. Les miennes m’ont conduit à l’incarcération. Les siennes l’ont menée vers vous ». Quelles dérives s’interroge l’auteur, se demandant s’il n’a pas manqué une partie importante de la personnalité de la femme avec qui il a vécu dix ans. Interloqué, intrigué, il se décide à aborder le sujet avec son ancienne épouse. Qui est cet homme ? Par ces missives, il désirait en fait retrouver l’adresse de Christine. Cette dernière est-elle d’accord ? Réponse sans équivoque : « Qu’il crève ! ».

La deuxième femme

L’inconnu prétend dans ses écrits que Michel Ragon s’est inspiré de Christine pour créer plusieurs de ses héroïnes. L’auteur, sans à priori, va tenter de se laisser convaincre par ces affirmations. Mais en recherchant dans sa mémoire, rapidement, ce n’est pas Christine qui s’impose, mais Louise, serveuse dans un bistrot, gouailleuse, désinvolte, libre. Louise qui lui permet de découvrir la vie, la vraie, dans la grande ville : « Venu avec ma mère veuve d’une campagne encore endormie dans son passé agricole, finalement douce à vivre, dans une grande ville industrielle, bruyante, remuante, je n’avais eu d’autre désir que de me cacher dans un trou de souris. » Louise est là pour le déniaiser, lui donner confiance. Louise qu’il retrouve des années plus tard à Paris. Le prisonnier continue ses parallèles entre Christine et les héroïnes, Michel Ragon est de plus en plus persuadé que ses personnages féminins tiennent beaucoup de la fougueuse Louise. Un cours magistral sur les sources d’inspiration des romanciers, leurs muses, conscientes ou inconscientes.

« Le prisonnier », Michel Ragon, Albin Michel, 12,50 €

lundi 29 janvier 2007

BD - Beautés vénéneuses


En 1958, le Congo n’en plus pour longtemps à être belge. Les activistes africains veulent le pouvoir. Les fonctionnaires belges font comme si de rien n’était. Enfin pas tous. Jean, policier dans une petite ville, est tombé sous le charme du pays. Et de ses femmes. 

Il y a perdu son épouse, repartie vers la capitale avec les enfants. De plus, Jean doit enquêter sur le meurtre d’un Africain, retrouvé écrasé sur une piste. 

Ce roman graphique, réaliste et historique, permet une nouvelle fois au duo Warnauts et Raives de dessiner ces tropiques qu’ils aiment tant. Des planches en couleur où l’on retrouve toute la magie sulfureuse de la région.

« Fleurs d’ébène », Casterman, 13,75 euros.

dimanche 28 janvier 2007

BD - Combattants amoureux


Dans le cahier spécial à la fin de cet album, reprenant des croquis et gouaches de préparation, les auteurs expliquent que cette BD est née d'un coup de cœur, celui qu'ils éprouvent pour cette terre d'entre les deux caps, sur la côte d'Opale. « La lumière y est parfois belle à couper le souffle » expliquent-ils. Mais c'est également sur ce sable que des hommes sont morts dans les années 40. Les Allemands avaient placé des blockhaus pour protéger la côte et bombarder l'Angleterre. 

Des dizaines d'années plus tard, Erwin revient en France en compagnie de sa jeune nièce. Le jeune soldat allemand est devenu un vieil homme encore hagard des atrocités commises par son camp. Dans cette région il a rencontré une jeune Française. On devine que ce pèlerinage est directement lié à cette histoire d'amour qui a résisté aux bombardements. 

Après l'Inde, Jean-François et Maryse Charles explorent les années 40. Réalisé en couleurs directes lumineuses, certaines planches de cet album sont de véritables tableaux. C'est évident, cette région est remarquablement belle. (Casterman, 11,95 €)

samedi 27 janvier 2007

BD - Clonage naturel


Les amateurs de science-fiction alliant philosophie et métaphysique vont adorer cette série écrite par Hugues Fléchard et mise en images par Stéphane Douay. 

Dans un immense Vaisseau-monde, des milliers de personnes vivent en vénérant le Grand Prêtre. Descendant direct du premier humain, il a cloné l'ensemble de la population. Mais dans cette humanité en réduction, certains prônent le dogme de la procréation. Des déviants, selon la religion intransigeante, affirmant que seul le Grand Prêtre peut donner la vie. Silenzio, le héros, est régulateur. Il a pour mission de débusquer les procréateurs. 

Mais en se lançant sur la piste de l'un d'entre eux, il découvre que le vaisseau est en train de se modifier et que le temps de la religion dominante est peut-être en train de s'achever. Le Vaisseau-mère a visiblement décidé de bouleverser la vie de ses habitants. 

Parabole sur l'évolution de l'humanité, cette bande dessinée est ambitieuse et surprenante, parfois hermétique, mais la fin est pleine de promesse. (Dupuis, 13 €)

vendredi 26 janvier 2007

BD - Le petit prof


Martin Vidberg, jeune professeur des écoles, est également passionné de bande dessinée. Il a concilié son activité professionnelle avec sa passion en entreprenant le récit d'une année scolaire sous forme de planches dessinées. Martin n'a pas encore de poste fixe. 

Il est remplaçant, prêt à aller dans les écoles quand un professeur est absent. En début d'année, après quelques jours passés sans affectation, il est envoyé dans une classe durant quelques semaines. Un premier remplacement court. Puis plus rien. On lui propose un poste dans un institut de redressement pour enfants violents mais il décline la proposition. 

Quelques semaines plus tard, il n'a plus le choix, sa hiérarchie lui impose ce poste. Il se retrouve face à six élèves, en échec scolaire complet. 

Martin raconte au jour le jour ses doutes, ses échecs et ses joies avec une grande franchise. Le dessin, étonnant au premier abord, les personnages ayant des formes de pommes de terre, s'efface rapidement au profit de ces tranches de vies captivantes. (Delcourt, 11,50 €)

jeudi 25 janvier 2007

BD - A la recherche du trésor de la reine de Saba


Du fog de Londres aux paysages arides de l'Afrique, le second tome du « Méridien des brumes » dessiné par Parras et écrit par Juszezak entraîne le lecteur dans une folle poursuite parsemée de cadavres. L'équarrisseur, tueur en série sévissant dans le Londres du début du siècle, a été mis hors d'état de nuire. 

Mais les héros de cette série, une charmante aliéniste et le chasseur de grands fauves John Coleridge, s'aperçoivent que le meurtrier n'était que l'arme d'une machination plus vaste. Au centre de cette intrigue mettant en scène traîtres, sociétés secrètes et sauvages, se trouve la recherche du trésor de la reine de Saba. L'intrigue, pleine de rebondissements et de surprises, permet à Parras d'illustrer cette période historique où la tradition le dispute aux innovations technologiques. 

La course poursuite en ballons dirigeables est exemplaire. Le final, dans le temple caché de la reine de Saba, est digne des meilleurs Indiana Jones. Une série plaisante et distrayante qui mérite le détour. (Dargaud, 13 €)