samedi 16 juillet 2016

DE CHOSES ET D'AUTRES : Un grand Tour (3/3)

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Le succès du Tour de France doit aussi beaucoup au direct. Malgré le dopage, les stratégies d'équipe et autres recours à la technologie de pointe (les oreillettes, pas les moteurs miniaturisés...), l'incertitude du sport y est érigée à son plus haut niveau. Parmi les grandes dates, l'arrivée main dans la main de Greg Lemond et Bernard Hinault au sommet de l'Alpe d'Huez.
En 1980, à Courchevel, les spectateurs découvrent étonnés un maillot jaune à côté de l'échappé du jour et futur vainqueur. En réalité il s'agit d'un indépendantiste basque, parvenu, dans les 800 derniers mètres, à s'immiscer au cœur de la course. Malgré sa fraîcheur, il est rapidement distancé. L'imposteur parvient cependant à franchir la ligne d'arrivée sous une bordée d'injures du commentateur de l'époque.
Parmi les impondérables, les manifestations des « paysans en colère » font partie des valeurs sûres. Si aujourd'hui ils se contentent de compositions dans les champs à base de vieilles machines et de bottes de foin, il fut un temps où ils ne plaisantaient pas. En 1974 dans les Landes, ils sèment des clous sur la route. Résultat, sur plusieurs centaines de mètres, les coureurs se retrouvent à pied, dans l'attente des voitures dépanneuses. Dernier exemple jeudi sur le final du Mont Ventoux où le maillot jaune, après une collision avec une moto, parcourt une partie du chemin au petit trot. En cause cette foule massive, excitée, incontrôlable.
Après l'horreur de l'avant-dernière nuit sur la Promenade des Anglais à Nice, espérons qu'un fanatique en mal de reconnaissance n'écrive pas une nouvelle page noire du Tour de France.

vendredi 15 juillet 2016

DE CHOSES ET D'AUTRES : Un grand Tour (2/3)

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Le Tour de France, comme le festival de Cannes ou le Tournoi des VI nations, rythme le passage des années. Premiers souvenirs télévisuels. Quand la première et la seconde chaîne se partageaient étrangement les droits sportifs. Sans doute pour ne pas faire jaloux, TF1 et Antenne 2 retransmettaient à tour de rôle l'étape du jour. Commentateurs différents, mais même réalisation déjà de haute volée de la défunte SFP (Société Française de Production).
Premier contact réel dans les années 80. Le peloton file dans les Landes girondines. J'ai marché un petit kilomètre dans les pins pour le voir passer. Du soleil, des klaxons, des couleurs : quelques secondes trop brèves. Le soir, dans le journal du Tour, je reconnais la longue ligne droite entre Sauternes et Villandrault. Comme des millions et des millions de Français, je ne suis pas allé voir le Tour de France, c'est la Grande Boucle qui est venue chez moi.
Devenu adulte, il m'est parfois arrivé de vivre et travailler dans des villes étapes. Pau par exemple. Moins charmé, je pestais à cause des difficultés de stationnement ou de la surcharge de travail. Une fois, à Sainte-Marie-la-Mer, heureusement de repos, je n'ai pas quitté l'appartement si ce n'est pour regarder du balcon les hélicoptères de la télévision survoler le littoral.
L'an dernier, j'ai carrément adapté un séjour en fonction de la date de passage du Tour en Aveyron. Pas pour voir les coureurs. Au contraire, juste pour arriver bien avant le grand chambardement. Car le Tour, plus le temps passe, plus je ne l'apprécie qu'à la télévision.

jeudi 14 juillet 2016

BD : de la violence, du ring à la famille

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Lecture croisée très enrichissante avec cet album de BD et le DVD documentaire l'accompagnant. D'un côté Barbara Pellerin, photographe et cinéaste, filme son père, ancien boxeur retraité. Mais en parallèle, Kris écrit un scénario sur les dessous de cette démarche, le tout illustré par Vincent Bailly. D'un simple film sur le monde de la boxe amateur, les auteurs se retrouvent à la tête d'un roman graphique sur les difficultés de communication entre une fille et son père. Une fille trop longtemps terrorisée par la méchanceté d'un papa capable des pires colères contre sa maman. De la violence des rings à la violence familiale il n'y a qu'un pas. Mais l'ensemble, à l'opposé d'un réquisitoire, est une belle déclaration d'amour posthume.
« Mon père était boxeur », Futuropolis, 20 €

DE CHOSES ET D'AUTRES : Un grand Tour (1/3)

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Le Tour de France exerce une forte fascination sur des millions de Français. On pourrait croire qu'il est question de performances sportives, d'exploits individuels, de « cocorico ».
Plus prosaïquement, on a tous un souvenir, soit de passage du peloton près de chez soi, soit de découverte de paysages grandioses au cœur du pays, sans parler des endroits connus et que l'on se plaît à retrouver dans le direct télé. Mardi, en quittant les Pyrénées pour rejoindre le pied de la Montagne noire, la grande boucle a traversé le Lauragais. Région que j'ai longtemps écumée en « localier ».
Une bouffée de nostalgie, à près de 45 km/h. Il me semble reconnaître la descente vers Villeneuve-la-Comptal. Route incontournable pour aller couvrir les reportages dans la Piège. J'ai droit à deux passages pour cause d'échappée. En ville, la remontée le long du cours de la République me permet de revoir d'un côté les cafés, de l'autre la Halle aux Grains, l'agence du journal à moins de 50 mètres. Des centaines de spectateurs. J'essaie de distinguer des visages, des façades. Juste une impression d'ensemble, mais reste intact le plaisir d'être téléporté durant quelques secondes dans des lieux que l'on a arpenté des centaines de fois.
L'étape se poursuit route de Revel. Cette longue ligne droite que je prenais tous les jours pour aller travailler. Une dernière vue aérienne me fait craquer : le moulin du Cugarel, la Collégiale, le grand bassin au loin. Toute la magie des images du Tour, entre découvertes et souvenirs personnels. (A suivre)

mercredi 13 juillet 2016

Beau livre : deux passionnés de vélos à la rencontre des hommes

Traverser les Pyrénées, à vélo, en une semaine, en passant par les plus grands cols : Jerôme Yager et Victor Ferreira ont réalisé un rêve.

Passionnés de vélos, Jérôme Yager et Victor Ferreira ont rapidement trouvé des terrains de jeu commun. Le premier, journaliste à l'Indépendant dans le Lauragais a rencontré le second à Castelnaudary. Ancien légionnaire, il est resté près de ces plaines quand il a quitté l'uniforme. Devenu photographe et vidéaste, du bas du Lauragais, par moment, les Pyrénées offrent une vue magnifique. La Montagne Noire semblant bien banale, les deux hommes ont décidé de mettre à l'épreuve leurs montures à deux roues (et surtout leurs muscles) dans une traversée du massif contée dans ce beau livre richement illustré des photos de Jules Clamens, étudiant en audiovisuel à l'université de Madrid.
Énergique Jean Lassalle
Loin d'être un simple « roadbook » reprenant étape par étape les sept journées harassantes sur des pentes pouvant aller à plus de 13 %, le livre est une mine d'informations sur ces montagnes mais aussi et surtout une belle réflexion sur l'amitié, l'adversité et la volonté de rencontrer des gens. Du Pays Basque aux plages de Sainte-Marie-la-Mer, durant une semaine intense, ils ont enrichi leur imaginaire, touché la légende (Pourtalet, Tourmalet). Ils ont croisé des cyclistes anglais, des producteurs locaux, d'anciens champions ou François Bayrou, maire de Pau qui affirme sans ambages (et donne ainsi une autre explication à son obstination présidentielle) : « le maître mot de la culture, des valeurs pyrénéennes, c'est l'indépendance ».
Parmi les temps forts, la rencontre avec Jean Lassalle, député des Pyrénées-Atlantiques, chantre de ces Pyrénées fortes et éternelles. Son discours, ses convictions, sa vision du pays convainquent les auteurs. Leur donne une envie encore plus forte de sillonner ce pays, ces routes en lacets, ces communautés isolées. « L'échange a été réciproque, l'énergie coule aussi dans nos veines. Notre pèlerinage sera traversé par d'autres moments comme celui-là, entre écoute, échange, partage d'idées et le sentiment de faire partie d'une même communauté modestement montagnarde : celle des Pyrénées et, qui sait, peut-être des hommes que la terre fait honneur de recevoir ».
Au final, les deux auteurs semblent comme transfigurés. Comme si chaque coup de pédale était un morceau d'humanité mieux compris, mieux assimilé. Les Pyrénées n'ont pas fini de charmer et fasciner, cyclistes, randonneurs ou simples terriens capables de lever la tête vers les cimes.
« La traversée des Pyrénées » de Jérôme Yager, Victor Ferreira et Jules Clamens, Les Presses littéraires, 27 €.

DE CHOSES ET D'AUTRES : Hôpital, on est mal (3/3)

hôpital,opération,douleur,piqûre,anticoagualntNe jamais douter de la puissance de la médecine. Non seulement je n'ai plus aucun souvenir de mon anesthésie, mais je n'ai mal nulle part. Pourtant, voilà moins de six heures, le chirurgien m'ouvrait le ventre "par voie médiane". On vient de me reconduire dans la chambre. Le plus dur est à venir.
Selon une légende populaire, les hommes sont plus sensibles à la douleur que les femmes. Je ne sais pas si c'est la réalité, mais tout mon entourage féminin semble se liguer contre moi pour me le prouver. Le brouillard de l'anesthésie s'estompe. Une infirmière me demande, sentencieuse : "A quel niveau placeriez-vous votre douleur de 1 à 10 ?" Je réponds un timide "6". "4" corrige immédiatement mon épouse lucide et experte en "jérémiades de mari douillet".
Une heure après, une autre infirmière déboule dans la chambre. "Je viens pour la piqûre !". La piqûre ? Quelle piqûre ? Pour éviter une phlébite dans les jambes, une injection d'anticoagulant est prévue durant dix jours. Je blêmis. Vu mon état, une injection risque de m'achever. Prévenante, mon épouse me conseille de me détendre, de penser à autre chose, de ne pas regarder. L'infirmière moins diplomate me brandit la seringue devant le nez. "Regardez, c'est une toute petite aiguille". Comment lui expliquer qu'une aiguille reste piquante. Donc douloureuse.
Malgré les restes de l'anesthésie et les antidouleurs, cette injection me semble encore plus difficile à supporter que la cicatrice de 10 cm et les 20 agrafes. Peut-être la légende a-t-elle un fond de vérité...

mardi 12 juillet 2016

BD : Une vengeance Choc

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Comment le personnage de Monsieur Choc est-il devenu le «méchant» de l'univers de Tif et Tondu ? Sans rien dévoiler de son identité mystérieuse cachée derrière un heaume d'armure, Colman (scénario) et Maltaite (dessin) poursuivent cette exploration d'une vengeance implacable. Car, à la base, le jeune Eden n'est pas spécialement agressif et calculateur. Mais la mort de son père puis de sa mère, les brimades des nobles, la survie dans les bas-fonds de Londres, lui ont forgé un caractère de fer, sans le moindre état d'âme. Entre récit d'enfance, premiers coups et mise en place finale, la seconde partie permet de découvrir le véritable mentor de Choc, un jeune lord déluré aux attitudes équivoques.
« Choc » (tome 2), Dupuis, 16,50 €


DE CHOSES ET D'AUTRES : Hôpital, on est mal (2/3)

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 Réveil en fanfare. 5 h 30. Douche pré-opératoire, essentielle pour éviter les maladies nosocomiales et autres infections. Encore perdu dans mes rêves après avoir difficilement trouvé le sommeil. Même si je dois passer en premier, pourquoi un lever si tôt ? Volonté de faire gamberger le patient ou de l'épuiser ? Récuré de partout, je me recouche dans les draps propres, juste recouvert de la blouse ouverte à l'arrière. Contre toute attente je me rendors.
Nouveau réveil en sursaut. Cette fois le brancardier descend le lit vers le bloc. Beaucoup de lumière et climatisation à fond. Parqué entre deux autres patients, je découvre avec stupéfaction le visage de William Leymergie. Cela doit bien faire 20 ans que je n'ai pas regardé Télématin. Faut-il que j'aie fauté à ce point pour m'imposer cela alors qu'il existe statistiquement un pourcentage (infinitésimal mais réel) pour que je ne me réveille pas ?
Les derniers souvenirs de ma vie sur terre porteront-ils sur un reportage au musée de la lingerie à Londres et l'origine du mot baleine ? Pas le temps de disserter que je me retrouve au bloc, une perfusion dans le poignet. "Vous allez vite vous endormir", me rassure l'anesthésiste. Sauf si le sérum ne fait pas effet. Je vais alors être conscient quand on m'ouvrira le ventre. Bon dieu, et si ça m'arrivait, si je ne parvenais pas à m'endo......... ........................................................................... .................................................................................................... ..................................... ..................................... ...........................................(zzz...)

lundi 11 juillet 2016

BD : un bâtard au pouvoir

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Entre livre de contes et bande dessinée classique, le second tome de la série des « Ogres-Dieux » d'Hubert et Gatignol confirme l'exceptionnelle qualité du premier volet. Dans ce monde imaginaire, toutes les contrées sont dominées par les Ogres, devenus dieux pour les humains. Des Ogres-Dieux peu enclins à gérer leur royaume. Ils préfèrent déléguer ces tâches ingrates à un Chambellan, tout puissant mais au poste très exposé face aux colères des maîtres géants. « Demi-sang » c'est Yori, fils illégitime d'un Maître. Chassé du monde doré des grandes familles, il doit, comme sa mère, se prostituer pour subsister. Sa grande beauté lui permet de se faire « adopter » par une riche veuve et de devenir à son tour Chambellan. L'heure de la vengeance a sonné. Diversité des personnages, beauté grandiose des décors : une des BD les plus originales de ces derniers mois.
« Les Ogres-Dieux » (tome 2), Soleil Métamorphoses, 22,95 €.

DE CHOSES ET D'AUTRES : Hôpital, on est mal (1/3)

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Un jour, le couperet tombe, inéluctable. On ne peut plus y couper. Ou plutôt si, la coupure est obligatoire. L'opération, longtemps repoussée, devient tout à coup nécessaire. Ce sera donc par "voie médiane" selon l'expression géométrique du chirurgien conseillé par mon médecin traitant.
Rien de tel qu'un séjour en hôpital pour débuter ses vacances d'été. Surtout quand on sait que des mains a priori expertes mais relativement inconnues vont vous ouvrir le ventre demain au petit matin. Inquiet de nature, j'ai tenté une bête méthode de persuasion pour dédramatiser le moment. Ce n'est pas une chambre d'hôpital mais la suite d'un luxueux palace. Le lit, certes un peu étroit, bénéficie des dernières nouveautés en matière de réglage. Par la fenêtre, j'aperçois les Albères et en me penchant un peu, le Canigou. La salle de bain, large et fonctionnelle.
Le personnel est aux petits soins : "Café ou thé pour le goûter ?" Servi en chambre, ce n'est pas une option. Au repas du soir, délicieux relents de nostalgie scolaire avec le bouillon servi dans un bol, au fond duquel quatre vermicelles mollassons se battent en duel. Mais le summum reste cette séance que je tente d'assimiler au meilleur des traitements esthétiques : une épilation soignée du nombril au pubis.
A la tondeuse, et vas-y que je rase tout ce qui dépasse. Mon nombril redevient le cratère lisse du bébé de ma jeunesse envolée. Et là, l'angoisse reprend le dessus. La voie médiane c'est sous le nombril, tout autour ou carrément à travers ? La nuit risque d'être courte.
(à suivre)