mardi 15 septembre 2015

Livres : Le roman des beaux parleurs


Derrida, Foucault, BHL, Althusser... Belle brochette d'intellectuels dans le roman phénomène de Laurent Binet. Avec une question lancinante : qui a tué Roland Barthes ?

Laurent Binet, grasset, barthes, sollers, BHLLa bonne littérature a l'immense avantage de rendre plus intelligent. Du moins, de se croire plus intelligent. Démonstration parfaite avec « La septième fonction du langage » de Laurent Binet, faux roman policier et véritable ouvrage de vulgarisation de sémiologie. Le lecteur pourra lire des passages savants sur les recherches de Roland Barthes, Michel Foucault ou Philippe Sollers tout en se distrayant au cœur d'une intrigue mêlant réalité historique et pure invention romanesque. Un cocktail gagnant-gagnant qui a déjà permis à l'auteur de remporter le prix du roman FNAC 2015. Par contre il brille par son absence dans la première sélection du Goncourt. Les jurés n'ont certainement pas le besoin de se sentir intelligents...
D'abord les faits. Le 25 février 1980, Roland Barthes est renversé par une camionnette en plein Paris. Grièvement blessé, il est hospitalisé. Un mois plus tard il rend son dernier souffle dans cette chambre où tous ses amis (et ennemis) lui ont rendu visite. Pour l'Histoire officielle, il s'agit d'un bête accident. Mais le romancier préfère y voir un assassinat, motivé par une découverte explosive de Barthes : « La septième fonction du langage ».

L'outil du pouvoir
Au début des années 80, Mitterrand n'est que le candidat perpétuel de la gauche. Giscard est au pouvoir et règne sur la France tel un roitelet plein d'ambition. La mort de Barthes est suspecte. Il demande donc directement à un de ses policiers les plus fidèles, le commissaire Jacques Bayard, de trouver les coupables. Rien que par le portrait de ce flic « ancienne génération », le roman de Laurent Binet vaut le détour. Caricature du bourgeois réactionnaire hanté par la possible arrivée des communistes au pouvoir au sein de l'union de la gauche, il va devoir interroger pléthore d'intellectuels, tous plus incompréhensibles les uns que les autres. Bayard « réquisitionne » un jeune prof, Simon Herzog chargé de « traduire » les déclarations des Foucault, Sollers et autres intellectuels de haut vol gravitant autour de Roland Barthes.
Cet improbable duo, tels des Laurel et Hardy de la culture et de l'inculture, vont remuer ciel et terre pour retrouver la fameuse septième fonction du langage découverte par le sémiologue et mobile du crime. Car pour Laurent Binet, pas de doute, Roland Barthes a bien été assassiné. Il révèle même par qui dans le roman. L'enquête est surtout un bon prétexte pour se replonger dans cette année 1980, quand la France était sur le point de basculer à gauche. Il est justement beaucoup question de Mitterrand dans ces pages. Barthes, quelques heures avant son accident, déjeunait avec le candidat de la gauche : « Barthes se dit qu'il a en face de lui un très beau spécimen de maniaque obsessionnel : cet homme veut le pouvoir et a cristallisé dans son adversaire direct toute la rancœur qu'il pouvait éprouver envers une fortune trop longtemps contraire.(...) La défaite est décidément la plus grande école. »
Mais pourquoi tout le monde recherche cette hypothétique septième fonction ? Tout simplement car « celui qui aurait la connaissance et la maîtrise d'une telle fonction serait virtuellement le maître du monde. Sa puissance serait sans limite. » Alors entre les universitaires jaloux, les politiques en mal de popularité, les services secrets et mouvements révolutionnaires, cela complote à tire-larigot autour de la dépouille de Barthes. Bourré de références, hommages et moqueries, ce roman se dévore comme un thriller américain, avec l'intelligence en plus.


« La septième fonction du langage », Laurent Binet, Grasset, 22 €

DE CHOSES ET D'AUTRES : Le champignon invisible

Comme chaque année, l'irrésistible envie d'aller aux champignons me submerge. Comme chaque année, je m'apprête à rentrer bredouille. Chez les cueilleurs de champignons deux espèces se distinguent : ceux qui trouvent... et les autres. J'appartiens définitivement à la seconde catégorie.
Pourtant je ne me considère pas comme un néophyte en la matière. Les petits matins humides à s'enfoncer en famille dans des sous-bois encore obscurs font partie des plus beaux souvenirs de mon enfance rurale. Enthousiaste, sûr de moi, armé de mon bâton fétiche, je fouillais talus, ronciers et autres clairières. Au pied des chênes majestueux ou des châtaigniers touffus, je passais au crible chaque centimètre carré. En vain.
Rapidement, après avoir confondu plus d'une vingtaine de fois feuilles mortes ou branches pourries avec des cèpes, mon entrain baissait d'un cran. Je repérais bien quelques spécimens, généralement les plus colorés. Les plus toxiques aussi. Le coup de grâce venait souvent de ma famille. Mon frère et ma mère me suivaient à dix mètres et ramassaient tous les traîtres qui m'avaient échappé. Quand je les devinais se baisser pour cueillir ce bolet qui, une minute auparavant, aurait dû me sauter aux yeux, j'enrageais. À croire que ces satanés végétaux, si succulents une fois poêlés, avaient le don de se rendre invisibles à mon approche.
Alors je me faisais une raison et me contentais de ramasser des châtaignes, excellentes aussi, grillées au feu de bois.
Les champignons poussent actuellement, paraît-il. Mesdames les châtaignes, prenez garde, j'arrive.

lundi 14 septembre 2015

BD : Rentrée résolument "comics"

Si la BD Franco-belge a encore de beaux jours devant elle, le comics américain a de plus en plus d’adeptes. Et il n’est plus spécifiquement réalisé par des auteurs outre-atlantique.

comics, orphelins, recchioni, mammucari, gaiman, russell, glénat, delcourt"Orphelins” des Italiens Robert Recchioni (scénario) et Emiliano Mammucari (dessin) ont sans doute beaucoup aimé le film “Starship Troopers” de Paul Verhoeven. Comme dans le long-métrage, la terre est attaquée par des aliens et des commandos de jeunes terriens sont envoyés sur des planètes hostiles pour “botter le cul à ces monstres”. À la différence que les auteurs ont apporté beaucoup plus de soin aux personnalités composant le groupe de combattants. Tout débute par un flash. Une grande lumière blanche qui rend aveugle et sourd des millions d’Humains. L’attaque, un rayon, vient du fin fond de l’espace. Les différents pays s’unissent pour répliquer. Et profitent de la recrudescence d’orphelins pour les enrôler de force, malgré leur jeune âge, dans des bataillons d’élite. La première partie montre ces enfants originaires d’Espagne (Madrid et Barcelone), paumés, seuls, largués en pleine nature, obligés de tuer pour survivre. D’apprendre la solidarité aussi. Quelques années plus tard, les rares survivants forment un commando redoutable. Ils seront en première ligne pour se battre contre les extraterrestres, sortes d’ours en cristal, furtifs et puissants. 200 pages au rythme soutenu (format comic oblige), avec quelques superbes inventions sur la planète ennemie, notamment une réplique de la Sagrada familia de Barcelone tout en cristal.
comics, orphelins, recchioni, mammucari, gaiman, russell, glénat, delcourtL’étrange vie de Nobody Owens” est l’adaptation en BD du roman de Neil Gaiman paru chez Albin Michel. L’auteur s’est logiquement chargé de la transposition, déjà connu pour les séries “Sandman” et “Coraline”. Craig Russell a dessiné une aventure et la bible de cet univers, laissant plusieurs autres auteurs jouer avec Nob’. Une nuit, un tueur assassine toute une famille. Le père, la mère, la fille. Mais arrivé dans la chambre du petit dernier, le lit est vide. Il s’est réfugié dans un cimetière. Là, un couple de défunt décide de la protéger et de l’adopter. L’enfant devient Nobody Owens et va grandir entre tombes et chapelles, avec pour seuls compagnons des spectres et Silas, inquiétant homme en noir qui ne sort que la nuit. Entre récit fantastique et conte gothique, des histoires courtes permettent de comprendre comment le petit garçon va se forger une personnalité. Il descendra au plus profond des entrailles du cimetière pour un face-à-face avec une vouivre. Au pays des goules, il manquera mourir sans l’intervention d’un loup-garou (une louve en l’occurrence). Il parvient même à se faire une amie, une petite fille téméraire, prête à croire tout ce que raconte Nob’. Car s’il voit les spectres, pour elle ils restent invisibles. Reste le fil rouge de l’album : le tueur du début qui est toujours sur les traces de l’enfant. Mais ce sera pour le second tome annoncé début 2016...

Orphelins” (tome 1), Glénat, 14,95 euros

L’étrange vie de Nobody Owens” (tome 1), Delcourt, 19,99 euros.

dimanche 13 septembre 2015

DE CHOSES ET D'AUTRES : So British

rugby, angleterre, france, bleus, coupe du monde
Depuis toujours, ils représentent à mes yeux les ennemis absolus, la personnification de la détestation. La faute aux retransmissions, les samedis après-midi, des matches du Tournoi des V Nations. Les méchants, ce sont les Anglais, ces brutes en blanc qui jouent pour une reine alors que mes Français combattent pour la liberté. À une semaine du lancement de la coupe du monde, peu rassuré par les performances des Bleus, je suis quand même serein.
Perdre face aux Blacks ou aux Wallabies m'indiffère. À la limite ma fibre nationale disparaît face à la beauté du jeu de l'hémisphère Sud. Par contre, face aux Anglais, je tremble et ne peux m'empêcher de chercher des excuses ailleurs. Formaté par les commentaires de Roger Couderc et Pierre Albaladejo, tels des sermons venus de Dieu le père en personne, je perds toute objectivité lorsque les British envahissent le terrain. Je ne vois plus des sportifs vaillants et rudes au combat mais des "dopés, méchants, violents, vicieux et tricheurs." Assertions totalement fausses, injustes et mensongères.
À vrai dire j'ai même l'impression que les rugbymen d'outre-manche sont plus forts que la moyenne. Comme dans ce dessin animé à leur gloire où les joueurs grandissent pour finalement se transformer en géants surpuissants impossibles à arrêter.
Par chance, le tableau de la coupe du monde est bien ficelé. Pas de France-Angleterre en vue avant les demi-finales. D'ici là je me régalerai de matches ouverts et spectaculaires. Car le rugby à XV, quand il est joué par des artistes, devient le sport le plus télégénique qui soit.
En bonus, le fameux dessin animé des géants anglais...

samedi 12 septembre 2015

Livre : Le va-et-vient des couples

L'alchimie de l'amour étudiée au microscope dans ce premier roman signé Nathalie Côte. Mais gare au retour de bâton.

cote, nathalie, flammarion, poles, couplesSi vous êtes encore en vacances au bord de la mer ou dans un camping de la région, ne vous précipitez pas trop vite sur ce roman. Surtout si vous vivez en couple depuis quelques années. Vous verrez que la vie à deux , si elles présente quelques inconvénients, au final, quand on est « casé » il vaut mieux tout faire pour assurer cette position sociale si fragile.
C'est l'été. Deux couples avec enfants sont sur le départ. Cap au sud, dans un appartement réservé dans une résidence avec piscine. Les Bourdon et les Laforêt vont devenir voisins durant quelques jours. Ils pourraient devenir amis. Voire amants. Mais ce roman subtil et acide de Nathalie Côte nous mène encore plus loin.
Arnaud et Claire, Vincent et Virginie. Le premier est un mari modèle mais sa femme ne l'aime plus. Le second voudrait devenir riche vite et facilement. Il joue toutes les économies de la famille en bourse sur le net alors que sa femme, complexée par ses rondeurs, est d'une jalousie maladive. Les vacances ressemblent à une compétition bien glauque, celui qui mentira le plus à l'autre.

Le sourire sincère
Arnaud souffre d'une addiction aux sites pornos. En total décalage avec son image de père parfait et de passionné de macro-photographie de plantes rares. Claire a décidé de divorcer. Elle veut l'annoncer durant leurs vacances. D'autant qu'elle vient de rencontrer un riche industriel qui lui fait miroiter une vie de luxe et de plaisirs. Pourtant elle hésite : « Combien de femmes rêveraient d'un mari comme lui ? D'accord, mais il se repose sur elle pour toutes les choses importantes, il est marié avec son appareil photo et ne sait rien faire dans un lit. Quoi qu'elle dise, elle aura tort. Malgré la culpabilité et l'ennui, elle n'arrive pas à prendre cette décision que l'évidence impose. » Dans l'autre appartement, les mensonges foisonnent aussi. Vincent, victime d'une belle escroquerie comme il y en a tant sur la toile, perd en trois jours l'argent économisé pour acheter le 4X4 promis à Virginie. L'orage gronde dans le couple. Le directeur de la résidence est obligé d'intervenir et de mettre en pratique sa formation sur le sourire et les découvertes du neurologue Guillaume-Benjamin Duchenne : « grâce à des réophores placés sur le visage d'un cobaye et traversés par un courant alternatif, il a pu démontrer qu'un sourire sincère impliquait obligatoirement le mouvement du grand zygomatique en même temps que la contraction du muscle orbitaire de l'œil, muscle qui échappe à notre contrôle. Ce sourire infalsifiable est appelé en hommage à son découvreur le sourire de Duchenne. » Des sourires, il y a en beaucoup au fil des pages enlevées. Jaunes parfois tant les protagonistes sont ridicules dans leurs grandes décisions définitives ou leurs renoncements pathétiques.
Comme le courant alternatif de l'expérience, la vie d'un couple passe par des hauts et des bas, un incessant va-et-vient entre bonheur et désespoir, envie de continuer ou de tout plaquer. Cet examen clinique sans concession tient de l'expérience ultime. Pourtant, au final, rien ne change. Notre société est ainsi faite : pour la majorité, le couple reste pour longtemps le socle de l'harmonie familiale, au détriment de l'épanouissement personnel. En avoir conscience adoucit un peu la peine...

« Le renversement des pôles », Nathalie Côte, Flammarion, 16 €

DE CHOSES ET D'AUTRES : Remède radical

Les médecines alternatives séduisent de plus en plus. Certaines sont vieilles comme le monde et souvent efficaces. D'autres plus expérimentales affichent des résultats moins convaincants. En Allemagne, le week-end dernier, quelques dizaines de personnes participent à un congrès sur ces nouvelles techniques de soin. Normalement, l'homéopathie figure au programme. Mais il semble que les congressistes aient forcé sur les doses pas vraiment issues de plantes.
Des voisins alertent les pompiers car il se passe quelque chose de bizarre dans le parc de la résidence où se déroule le congrès. Arrivés sur place les secours tombent sur 29 personnes "titubantes, se roulant dans l'herbe, racontant n'importe quoi et souffrant de crampes sévères" selon le reportage d'une radio locale. Pas moins de 150 secouristes sont mobilisés pour venir en aide aux malades. Après avoir suspecté une intoxication alimentaire, puis l'ingestion de champignons hallucinogènes, les premiers à recouvrer leurs esprits expliquent qu'ils ont simplement testé une nouvelle drogue aux effets comparables à ceux de l'ecstasy et du LSD...
On sait que le cannabis est parfois utilisé à des fins thérapeutiques comme antalgique. La morphine aussi (dérivé d'opium, donc du pavot) est d'une rare efficacité. Par contre le LSD et autres produits chimiques n'ont jamais démontré leurs bienfaits sur la santé. Ils provoquent plutôt des effets secondaires dévastateurs pour les cellules grises. Mais parfois les médecines alternatives ont bon dos. Visiblement elles ont servi de couverture à ces Allemands qui semblent véritablement avoir besoin d'être soignés. Dans un centre de désintoxication.

vendredi 11 septembre 2015

Cinéma : Vieillir, la belle affaire des personnages de "Youth"

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Dans un palace médicalisé, 'Youth' de Paolo Sorrentino suit deux vieux artistes en fin de carrière, tentant de se remémorer leurs succès et déceptions.


Présenté au festival de Cannes en sélection officielle, 'Youth' de Paolo Sorrentino est reparti bredouille. Encore une de ces injustices qui offusque sur le moment, mais s'oublie vite. Incompréhensible que Michael Caine n'ait pas remporté le prix d'interprétation. Mais le jury présidé par les frères Coen a été plus sensible aux accents de vérité de Vincent Lindon qu'au personnage de Fred Ballinger, ancien chef d'orchestre interprété par l'acteur britannique octogénaire. Le film aurait pu aussi remporter la palme de la meilleure musique... si cette catégorie existait.
Consolons-nous en profitant de cette fable très poétique sur la difficulté de durer quand on est un créateur. Au cœur des alpages suisses, protégé de la foule et du peuple, quelques privilégiés profitent des installations pour se reposer. Fred Ballanger, ancien maestro, compositeur de renom, a cessé de se produire. Il se repose, tentant de soigner son apathie sur les conseils de sa fille (Rachel Weisz), son agent. Il côtoie Mick Boyle (Harvey Keitel), un ami d'enfance, réalisateur toujours en activité, entouré de jeunes pousses du scénario pour mettre le point final à son prochain film, son testament.
Miss Univers et Maradona
Sur les transats il y a également une ancienne star du foot (portrait touchant d'un Maradona humble et nostalgique), la toute récente miss Univers et Jimmy Tree (Paul Dano), star planétaire mondialement connue pour son rôle de super-héros. Jimmy, qui observe les résidents pour composer son prochain personnage, aime à bavarder avec Fred. Il comprend cet artiste, à la tête d'une œuvre considérable, mais qui n'est connu que pour un 'tube'. Jimmy clairvoyant reconnaît que sa seule erreur est d'avoir cédé, une fois, à la légèreté. Et Fred de renchérir : "La légèreté est une perversion."
Le film est d'une beauté à couper le souffle. Les décors d'abord, tout à été tourné dans les Alpes suisses, entre sombres forêts, prairies fleuries, rocailles arides et bâtisses de luxe. Les acteurs ensuite. Les jeunes de Miss Univers (Madalina Diana Ghenea, ancien mannequin à la plastique parfaite) à la jeune masseuse (Luna Zimic Mijovic), jouant avec son corps avec une grâce époustouflante. La musique aussi, signée David Lang. Même les 'vieux' sont attachants.
On ne sort pas indemne du film. Sous couvert de légèreté, le réalisateur italien pose les bonnes questions sur la vieillesse, le temps qui passe et ces regrets qui nous obsèdent.
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Michael Caine, maestro du 7e art
caine, keitel, youth, sorrentinoThème récurrent du film de Paolo Sorrentino, la vieillesse et la fin de carrière ne semblent pas toucher directement l'immense acteur qu'est Michael Caine. À plus de 80 ans, il donne corps à ce musicien retiré du monde, au point qu'il refuse obstinément de reprendre la baguette, même pour un ultime récital devant la reine d'Angleterre. Juste pour des 'raisons personnelles' qu'il refuse d'expliciter au chef du protocole ébahi de ce refus inhabituel.
Michael Caine, vieux monsieur aux cheveux blancs, mondialement connu pour son rôle de majordome de Batman, a des dizaines de films à son actif. Il a déjà remporté deux oscars (meilleurs seconds rôles) mais est toujours passé à côté d'une récompense majeure. Comme cette année à Cannes. Dans 'Youth', il partage la vedette avec Harvey Keitel et une autre légende du cinéma : Jane Fonda. Elle aussi, malgré le poids des ans, dure dans un monde avide de jeunesse, de nouveauté. La faute à leur talent, éternel lui.

DE CHOSES ET D'AUTRES : Je ne suis pas Petra

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Les crises font tomber les masques. L'afflux de réfugiés aux portes de l'Europe en provenance du Proche-Orient dévasté par la guerre nous oblige à un examen de conscience. Certains ouvrent leur cœur voire leur maison à ces gens en détresse. D'autres ont des réactions moins charitables. Passons sur les quelques maires qui ne veulent que des réfugiés chrétiens. Non seulement ils tombent dans l'illégalité mais aussi dans une rare bêtise quand l'argument consiste à dire que les Chrétiens, eux, ne décapitent pas leurs ennemis. Vrai : il y a peu, ils se contentaient de les brûler vifs. Et puis il y a ceux et celles qui ne peuvent s'empêcher de dévoiler leur vrai visage. Comme Petra Laszlo. Journaliste d'une télévision hongroise, elle est envoyée dans le sud du pays pour filmer les réfugiés. La police contient des centaines de personnes qui parviennent finalement à franchir le cordon de sécurité. Petra filme. Mais quand une fillette passe à côté d'elle, elle ne peut s'empêcher de lui donner un coup de pied. Plus fort : un homme, un enfant dans les bras, arrive à s'extirper des griffes d'un policier. Il a la mauvaise idée de passer près de Petra. La « journaliste » quitte son rôle d'observateur impartial, tend la jambe et le fait chuter lourdement. Pas de chance pour Petra, des collègues enregistrent la scène et la diffusent. Émoi sur les réseaux sociaux. La direction de la chaîne a immédiatement mis fin au contrat de Petra Laszlo. Mais ne nous faisons pas de mouron pour elle, elle peut toujours postuler au service communication de la police hongroise.    

jeudi 10 septembre 2015

DE CHOSES ET D'AUTRES : Ni Claire ni PPD

Drame dans les chaumières françaises. Claire Chazal ne présentera plus les journaux du week-end sur TF1. La blonde journaliste (ou l'inverse) de 58 ans vient d'être proprement éjectée du fauteuil qu'elle occupait depuis 24 ans. Près d'un quart de siècle à s'adresser, les yeux dans les yeux, à des millions de Français. Un bail rompu par une simple phrase dans un communiqué de la direction. Ironie supplémentaire, l'annonce choc intervient le jour de la rentrée du Grand Journal de Canal +, sans les Guignols présentés par PPD, double en latex de Patrick Poivre-d'Arvor, l'autre pilier du 20 heures durant des décennies.
Claire et Patrick ont longtemps représenté la quintessence du journaliste pour la majorité des Français. Un couple idéal pour faire passer les mauvaises nouvelles. Ils ont même eu une aventure, restée longtemps secrète. Elle n'a pas duré. Normal, l'un travaillant en début semaine, l'autre le remplaçant sur les trois derniers jours, ils n'avaient jamais un week-end à eux. Et c'est bien connu, une vie de famille sans congé de fin de semaine ensemble est vouée à l'échec.
Aujourd'hui, s'ils le voulaient, ils pourraient tenter de recoller les morceaux, de profiter de ces jours sans la moindre contrainte. Je crains malheureusement qu'ils n'aient trop besoin de cette exposition médiatique pour se sentir vivre. En grande habituée des pages people des magazines, Claire Chazal va vouloir rebondir, chercher à "exister", encore et toujours. Telle est la télé.

mercredi 9 septembre 2015

DVD : "Invasion Los Angeles", culte et prémonitoire

John Carpenter raconte dans 'Invasion Los Angeles' le B.A.BA de la résistance.


Certains tenants de la théorie du complot vénèrent toujours ce film de John Carpenter. 'Invasion Los Angeles ', sorti en 1988, sous couvert d'une histoire sur l'invasion de la terre par des extraterrestres dissimulés dans la population, faisait en réalité le procès des 'grands' de ce monde, prêts à tout pour s'enrichir et laisser les masses laborieuses dans la misère et l'ignorance.
carpenter, invasion, aliens, révolte, studiocanalUn procès en creux des années Reagan. Mais ce film est plus subtil. Largement inspirée de l'univers de Philip K. Dick, la ville décrite par John Carpenter est un mélange entre un bidonville du tiers-monde et ces quartiers aseptisés où le commerce est roi. Ce long-métrage devenu culte au fil des décennies, vient de ressortir en version restaurée et agrémentée de bonus rares.
Le film à sa sortie n'a connu qu'un petit succès. Il a certainement été victime du discours politique assez radical et d'un choix d'acteurs handicapant. Le héros, notamment, interprété par Rody Piepper, un catcheur professionnel, est assez peu crédible. Américain de base dans les premières scènes (il a perdu son emploi, va de ville en ville persuadé que cela ira mieux plus tard...), il se retrouve presque à la tête de la rébellion au final.
Des muscles et de grosses armes n'ont jamais permis de changer le monde. En plus le film souffre de longueurs comme ce combat à mains nues entre les deux 'bons', qui paraît encore plus long qu'un film français intimiste, c'est dire... Alors on ne retiendra d'Invasion Los Angeles que la technique des aliens pour faire passer des messages subliminaux par la télévision et les publicités. En 1988 ce n'était que de la science-fiction, aujourd'hui ils font encore plus fort, après avoir inventé internet, ils viennent chez vous, à votre invitation...
'Invasion Los Angeles', Studiocanal, 9,99 euros le DVD, 14,99 euros le blu-ray