mardi 20 mai 2008

BD - Sœur chantante et déjantée


Le Commando Torquemada est un peu le descendant des Innommables : un humour sans tabou brocardant plus spécialement la religion. Il y a quelques siècles, Lemmens et Nihoul, les auteurs, auraient été brûlés vifs en place publique. Aujourd'hui il font rire tous ceux qui savent faire la part des choses. Le pape est inquiet de la dérive de Sœur Dominique, star de la chanson religieuse. Cette dernière veut se mettre au hard rock et changer de sexe. 

Le Commando Torquemada est appelé à la rescousse. Mission : désintoxiquer la chanteuse et la persuader de faire un dernier gala de solidarité. Dessin nerveux, gags à foison : le commando frappe fort.

« Commando Torquemada » (tome 2), Fluide Glacial, 11,95 euros 

lundi 19 mai 2008

BD - Dérive au féminin avec « La femme accident » de Lapière et Grenson


Cet album de Lapière (scénario) et Grenson (dessin) raconte la vie d'une femme et de sa région. Julie, belle et sauvage. La région de Charleroi, pauvre et sale. Cette femme est en prison. Elle attend le verdict de son procès. Accusée de meurtre. Une attente que le auteurs transforment en long retour dans le passé. 

On découvre une fillette effrontée, une jeune adolescente torturée, une femme amoureuse et entière. Elle vit ses premiers émois dans ce décor industriel et triste qui donne cette ambiance lourde et poisseuse à un album marquant les débuts de Grenson (Niklos Koda au Lombard) dans le difficile exercice de la couleur directe. Une édition spéciale avec un cahier supplémentaire permet de mieux apprécier son travail.

« La femme accident » (tome 1), Dupuis, 14 euros 

dimanche 18 mai 2008

BD - "Les dieux noirs", second tome de la série Le grand jeu


Et si la France et l'Angleterre avaient gagné la guerre dès 1941 ? Ce postulat de départ, Pécau, le scénariste du « Grand jeu », l'utilise à merveille dans cette série fantastico-historique. L'Allemagne nazie, moins menaçante, ne sert plus qu'à faire barrage à l'hégémonie soviétique. 

C'est dans ce contexte que le journaliste Nestor Serge se rend au dessus de l'Arctique tenter de retrouver des survivants au crash du dirigeable Charles-de-Gaulle. Sur place, en compagnie de l'armée anglaise, il sera mis dans le secret le mieux gardé : des extraterrestres sont cantonnés dans cette partie du monde. 

Pilipovic et son dessin réaliste donne toute sa crédibilité à ce récit débridé étonnant.

« Le grand jeu » (tome 2), Delcourt, 12,90 euros 

samedi 17 mai 2008

BD - Sorcière volante


Dessinée par Christophe Dubois, cette série imaginée par Nicolas Pona est un étrange mélange de fantastique (dragon), de révolution (le pays est à feu et à sang), d'amazones (les héroïnes sont de redoutables guerrières) et de récit à la Jules Verne (le plus gros de ce second album se passe dans un ballon dirigeable). 

Sur les immensités gelées de ce qui ressemble à la Sibérie, Ajjer, la guerrière rouge qui vient de tuer le roi-dragon et lui dérober son dernier œuf est capturée par Frimas, guerrier chamane à la tête d'une bande de révolutionnaires. Elle est emmenée dans un vaisseau des airs baptisé Héria. 

Ce dirigeable est le véritable héros de cet album. Héroïne exactement puisque c'est sa figure de proue en bois, dotée de conscience, qui lui permet de s'élever dans les airs. Héria qui convoie malgré elle ces révolutionnaires, alors qu'elle vient de dérober un trésor avec l'aide de son capitaine. Son rêve c'est de se retirer sur une île chaude et y édifier un temple pour la vénérer. 

Ce vaisseau sorcière a en effet la fâcheuse tendance à se prendre pour une déesse. Une multiplication des personnages pour une série qui, en s'éloignant de son propos initial, gagne en originalité. Il reste quand même en fond les querelles de pouvoir, mais l'épopée d'Héria permet une parenthèse étonnante dans le cycle principal.

« Le cycle d'Ostruce » (tome 2), Le Lombard, 13 €

vendredi 16 mai 2008

BD - Les malheurs d'un croquemitaine


Chaque nuit, Humphrey Dumbar le croquemitaine, quitte son pays magique pour aller faire peur aux petits enfants. Alors qu'ils dorment, il les tourmente, leur tirant les cheveux, provoquant cauchemars et terreurs avec son ombre ou en les mordillant. 

Il prend un réel plaisir à effrayer ces petits innocents. Mais un soir, dans un dortoir, un enfant ne dort pas. Jimmy parvient à se cacher, observe le manège d'Humphrey et, décidant de l'empêcher de nuire, saute dans son sac et repart avec lui dans la nuit glacée. Après une longue halte dans un bar, Humphrey rejoint son pays magique. 

Jimmy se retrouve alors prisonnier de ce lieu où les petits enfants n'ont pas le droit de pénétrer. Cela ne l'empêchera pas de tenter de mener son plan à bien. Caché, il se fait passer pour la conscience du croquemitaine et lui promet mille tourments s'il ne cesse de tyranniser les enfants. 

Ce petit conte imaginé par Manu Civiello lui permet de mettre en images tout ce qu'il aime : les monstres et farfadets, les ambiances nocturnes des villes sombres du 19e siècle et les enfants. Une histoire à raconter aux plus jeunes avant de s'endormir. Mais à condition d'aller jusqu'à la fin au risque de provoquer cauchemar sur cauchemar.

« Humphrey Dumbar, le croquemitaine », Delcourt, 9,80 € 

jeudi 15 mai 2008

BD - A propos d'immunité présidentielle


Débutée en mars 2007, cette série plonge le lecteur dans les arcanes de la politique française. Rémy Le Gall, le scénariste, a utilisé toute son expérience d'homme de l'ombre des hommes politiques chargé de les préparer à affronter les médias. Il décrit ainsi les tentatives de prise de pouvoir au sein d'un parti politique d'opposition. 

Lancée en pleine campagne des présidentielles, cette série revient pour un second tome une année après l'élection de Nicolas Sarkozy. Et dans le scénario on trouvera quelques références à la réalité avec un président en perte de vitesse dans les sondages, en prise avec une forte contestation dans la rue et qui pour reprendre la main envisage d'être à nouveau omniprésent dans les médias et traiter tous les problèmes à l'affectif. 

Mais ce n'est que la toile de fond de cette BD qui raconte les aventures de Constant Kérel, opposant, bien décidé à faire tomber ce président qui en plus a du sang sur les mains. Mais comment traduire devant la justice un homme qui bénéficie d'une immunité présidentielle à toute épreuve, même en prouvant qu'il est un assassin ? Frisco, le dessinateur, illustre sans fioritures cette série sérieuse et réaliste.

« Elysée République » (tome 2), Casterman, 9,80 € 

mercredi 14 mai 2008

BD - Guerre de religieux


En Allemagne, en 1933, alors que Hitler commence à dévoiler ses plans et que la propagande antijuive prend de plus en plus d'essor, d'autres combats se déroulent en coulisse. Eva, jeune étudiante se retrouve malgré elle au centre d'une guerre secrète qui dure depuis des millénaires. Tout commence pour elle quand un chercheur est abattu dans sa rue. Banal meurtre contre un intellectuel juif ou élimination déguisée ? 

Eva retrouve dans sa boite aux lettres une enveloppe lui donnant quelques clés, virtuelles et réelles. La réelle serait la clé du paradis. Un paradis en opposition à l'enfer qui serait le refuge et l'inspiration de la politique nazie. Dans ce paradis dont elle trouvera le chemin après bien des embûches, une lance divine va lui donner une arme lui permettant de se battre avec des forces occultes très puissantes. 

Jean-Luc Istin, dans la collection « Secrets du Vatican » mélange avec bonheur deux influences majeures. D'un côté la description de cette Allemagne de plus en plus fanatique, acculant les Juifs à la fuite et de l'autre une intrigue fantastico-religieuse subtile et originale. Denis Rodier, au dessin, à côté d'une reconstitution historique rigoureuse, se lâche dans les décors grandioses du monde caché.

« L'ordre des dragons », Soleil, 12,90 € 

mardi 13 mai 2008

Roman - Couples et déchirures

Roman intense et fusionnel, "Indésirable" de Valerie Martin nous plonge dans l'intimité de couples anciens et nouveaux.


Réflexion sur la vie à deux, l'amour, l'habitude et la famille, ce roman de Valerie Martin débute comme une comédie bourgeoise contemporaine, dans les milieux aisés et intellectuels de New York et sa région, pour se prolonger dans une ambiance plus lourde des séquelles de la guerre des Balkans. Brendan et Chloé sont le prototype de ces Américains de gauche, intellectuels, aisés mais un peu trop conformistes. Brendan, professeur à l'université, se consacre actuellement à la rédaction d'un livre sur les croisades. Dans son bureau, loin de l'agitation du monde actuel, il essaie de comprendre les motivations réelles de la croisade de "Frédéric de Hohenstaufen, l'empereur du XIIIe siècle dont la puissance et la ruse ont surpris ses contemporains au point de lui valoir le surnom de Stupor Mondi, la merveille du monde". Chloé, illustratrice de livres pour enfants, travaille dans son atelier installé dans un bois à quelques dizaines de mètres de leur résidence. Leur fils, Toby, est étudiant en sciences politiques. Il vient de rencontrer Salomé, étudiante elle aussi. Un coup de foudre immédiat et réciproque.

Réfugiée croate

La première scène raconte, dans un grand restaurant, la première rencontre des parents de Toby avec la nouvelle petite amie de leur fils. Après une blonde évaporé et une Japonaise hypocondriaque, le choix de Toby est radicalement différent. Salomé est une réfugiée de guerre croate arrivée en Louisiane à 10 ans. Son père est pêcheur, sa mère est morte dans le conflit. Brillante, secrète, très belle, elle n'est pas du goût de Chloé. Pour la simple et bonne raison qu'elle est étrangère et que son fils semble beaucoup plus amoureux que les fois précédentes.

Un couple installé, avec des habitudes, des certitudes et bon nombre de renoncement, se retrouve face à un jeune couple, en pleine période de découverte et de folle passion. Brendan, en observant Toby, retrouve ses jeunes années, Chloé ne voit dans cette belle histoire d'amour que la perte de son fils, victime d'une femme qu'elle suspecte de tous les maux (intérêts financier et administratif).

Toby admet qu'il connaît peu de choses de Salomé et quand il va passer les fêtes de Thanksgiving chez son père, il découvre un monde qu'il ne soupçonnait pas. Salomé est épanouie, plus joviale et nature, dansant de longues heures avec des cajuns. Le père, malgré les tracas que lui cause son bateau de pêche, croque la vie par les deux bouts.

Une nouvelle famille

Quelques semaines plus tard, alors que Toby et Salomé vont emménager ensemble, le jeune Américain apprend que sa petite amie croate (et fervente catholique) est enceinte. Une remise en cause complète de leur vie d'étudiants insouciants. Succombant à la paranoïa de sa mère, Toby se sent piégé. Mais l'amour est le plus fort. Ils décident de se marier. En quelques jours. Une formalité administrative réglée rapidement, sans avertir leurs parents respectifs. Le lendemain, en rentrant des cours, Toby trouve l'appartement vide. Salomé est partie. Il découvre un message sur sa boite email : "Chéri, pardonne-moi. Il faut que je fasse ce voyage. Je ne peux pas te dire où je vais ni pourquoi, et mieux vaut que tu n'en saches rien. Je vais revenir. Je t'aime mon chéri."

Après avoir longuement observé la routine de la vie de ses personnages, Valerie Martin bouscule l'intrigue, la conduisant sur d'autres rives, celles de la Méditerranée, encore blessée de cette guerre qui a vu la Yougoslavie se disloquer au gré des guerres civiles. Toby tentera de retrouver sa femme. Brendan le suivra. Chloé, restée à la maison, devra affronter ses peurs, notamment ce braconnier qui chasse si près de sa maison. Et au fil des chapitres un nouveau personnage, grâce à des flashbacks, s'imposera : la mère de Salomé, absente et obsédante.

« Indésirable », Valerie Martin, Albin Michel, 20 € 

lundi 12 mai 2008

BD - Trio d'aventuriers


Jean-Charles Gaudin, avec Arleston, mais dans un registre plus sérieux, fait partie des scénaristes vedettes des éditions Soleil. Après le succès de Marlysa (déjà 8 tomes) et du Feul (seulement 2 tomes...), il se lance dans une nouvelle histoire de fantasy initiatique. Avec au dessin un jeune (25 ans) débutant, Dimitri Armand, affichant une aisance et une virtuosité que nombre de « vieux de la vieille » espèrent toujours atteindre malgré leurs piles d'albums. 

Reste à connaître le rythme de production d'Armand, car être talentueux ne suffit pas si on est trop lent. Paradoxe d'un système demandant toujours plus à des auteurs en plein apprentissage. Gaudin a imaginé une histoire de double personnalité. Talkinn et Evrane, deux jeunes adultes, et Lorky, encore adolescent, rêvent d'une vie trépidante, les armes à la main et la liberté comme seule récompense. Ils vont devoir batailler pour échapper à leur destin de paysan ou de femme au foyer. En découvrant une amulette magique, ils vont changer leur destin. Et leur âge puisqu'ils pourront par magie passer de leur âge réel à un autre, un peu plus mature.

« Angor » (tome 1), Soleil, 12,90 €

dimanche 11 mai 2008

BD - Saint à travers les âges


Dans la thématique des mensonges de l'Eglise, je demande le Saint immortel. Au sein de la collection Loge Noire, Laurent Bidot signe un très prometteur premier tome de « L'éternel ». Dans la lignée de sa précédente série, « Le Linceul », il surfe sur la mode des secrets du catholicisme. Thomas Landon est un historien peu banal. Il travaille pour le Vatican, chargé d'enquêter sur la réalité de certains miracles imputés à des religieux en voie de canonisation. Sur une route de montagne, en rejoignant un chalet en compagnie de son amie, il recueille un homme, muet, sale, barbu et épuisé. 

Après une nuit de repos, l'inconnu s'enfuit de nouveau. Thomas ne sait pas encore qu'il vient de croiser la route de Saint Scutaire dont on dit qu'il serait immortel. Quelques jours plus tard, Thomas est contacté par un riche écrivain de best sellers pour tenter de percer le mystère de ce saint « oublié » dans les riches heures de l'Eglise. L'histoire se déroule sur deux plans. 

D'un côté Thomas, sceptique, peu enclin à croire à ces sornettes, de l'autre l'errance de l'homme barbu, poursuivi par des tueurs sans pitié mais qui y laissent quelques plumes. Une mise en bouche parfaite avant l'apothéose finale, la série ne devant compter que deux tomes.

« L'éternel » (tome 1), Glénat, 12,50 €