lundi 26 juin 2006

BD - Un trou perdu comme un aven


Quel est ce secret qui rend l’atmosphère du petit village de Saint-Jean-en-Aven totalement irrespirable ? Au point que les suicides du haut pont dominant la commune se multiplient ? Léo Walec, jeune inspecteur de police, est envoyé sur place en ce mois d’août 69 pour tenter de faire toute la lumière sur ces péripéties faisant de plus en plus désordre. Mais ce n’est pas facile de délier les langues. L’autochtone est taciturne et peu causant. Heureusement, du côté du maire, il y a un peu plus de collaboration. Mais ce n’est pas pour cela que l’enquête progresse. Léo devra faire croire qu’il classe l’affaire pour enfin découvrir quelques pistes. Notamment celle des quatre conscrits qui à la veille de 39/45, ont fêté leur départ sous les drapeaux. Des quatre, il n’en reste plus qu’un : le maire, patron tout puissant de l’usine d’embouteillage de l’eau minérale jaillissant dans la commune. Et Léo, tout en surveillant son petit monde, tente de séduire la belle Chloé. Un petit bijou d’album, qui ne paye pas de mine, du au talent de Stephan (scénario) et Laurent Astier (dessin). (Vents d’Ouest, 9,40 €)

dimanche 25 juin 2006

BD - Rafales futuristes


Seb Christie, un photographe de presse, se retrouve bien malgré lui au centre d’un vaste complot mondial mené par une petite communauté d’hommes et de femmes radicalement différents. Ils seraient le résultat de l’évolution ultime des humains. Stephen Desberg, le scénariste, développe dans cette série entre science-fiction et thriller, une théorie qui tout en étant très originale n’a rien de farfelue. L’homme est le résultat d’une longue évolution. Mais elle n’est pas terminée. Et elle pourrait prendre deux directions. D’un côté des purs cérébraux, rejetant violence et ambition personnelle, de l’autre des instinctifs, bien décidés à prendre la place des humains classiques, simplement en les poussant à s’autodétruire. Résultat Seb assiste impuissant à l’explosion d’une usine chimique en Egypte, mais parvient à déjouer un attentat à Rome. Le dessin de Vallès, classique et rigoureux, crédibilise beaucoup ce récit futuriste. (Le Lombard, 9,80 euros)

samedi 24 juin 2006

Roman - Patrick Cauvin et la belle rencontre de "Belange"

Ce roman sans prétention de Patrick Cauvin a l’immense avantage, dans une époque très noire, de nous faire rêver quelques heures

Adrien Beaurecourt, éditeur parisien, est réglé comme du papier à musique. Chaque vendredi à 17 heures, après une semaine de travail, il prend sa voiture et se rend dans la maison familiale de Belange à 300 kilomètres de la capitale. Une résidence secondaire de luxe, gardant encore les traces de sa mère, autoritaire militaire qui s’obstinait à appeler son fils Eliane… Contre son avis, il n’est pas devenu général, mais a fait ce qu’il aimait le plus : lire. Du flair et de la chance dès ses débuts ont rapidement transformé sa maison d’édition en une affaire très rentable. A l’abri du besoin, il vivote entre ses livres et ses week-ends au calme. Parfois il passe les deux jours à Belange en compagnie d’une de ses conquêtes. Des maîtresses qu’il ne garde jamais bien longtemps. Trop casanier certainement. 

Odeur de cassoulet
Ce vendredi soir, en ouvrant les portes de la grande maison solitaire, il est interloqué car son odorat est agressé par une odeur de cassoulet. Rapidement il constate que quelqu’un, un squatteur, a profité de la cuisine et des réserves de Belange. Des piles de vaisselle sale dans l’évier, des boîtes de conserves vides et abandonnées, et, sacrilège absolu, le lit de sa chambre est défait, visiblement utilisé par le vagabond. Sur ses gardes, Adrien vérifie tout d’abord que l’intrus n’est plus dans les murs. Il passe ensuite son week-end à remettre de l’ordre et au moment de partir, pris d’une subite idée, il écrit au marqueur sur une feuille A4 : « Si vous revenez, continuez à ne rien casser, vous pouvez finir ce qui reste dans le frigo, mais par pitié, faites la vaisselle ». Première étape d’une correspondance qui va être au centre de ce roman racontant la rencontre entre deux êtres que tout oppose à priori. 
Adrien rentre donc à Paris, laissant Belange à son squatteur. 
Repas d’affaires, comité de lecture, rencontre avec des auteurs, ses journées de travail sont bien remplies mais il ne peut s’empêcher de penser à l’inconnu et ce qu’il peut bien faire dans les murs familiaux. Une obsession telle qu’il part même un jeudi pour le surprendre. Mais il fait chou blanc. Finalement, l’échange de lettres se passant de mieux en mieux, Adrien propose à son mystérieux visiteur de le rencontrer la semaine suivante. Après des journées de doute et d’angoisse il accepte et l’éditeur va enfin rencontrer de visu son squatteur… On n’en dira pas plus sur cette rencontre qui changera totalement l’existence d’Adrien. Patrick Cauvin a pris un malin plaisir à décortiquer la lente maturation du propriétaire face au locataire non voulu. 
Le romancier profite également de ce roman pour dresser quelques portraits irrésistibles de personnages évoluant dans le milieu de l’édition tel ce « nègre » pouvant pondre 300 pages sur une patineuse artistique anorexique ou cette femme tourmentée racontant avec le plus grand sérieux « l’histoire d’une fille laide et toujours lugubre qui tombait amoureuse d’un employé des postes tuberculeux et prématurément veuf. (…) L’auteur prétendait que l’intérêt du roman résidait dans le fait que Blême (c’était le surnom de l’héroïne) et son postier d’amour n’échangeaient pas une seule parole ». On retrouve dans ces passages le Patrick Cauvin incisif, caricaturiste inspiré d’un milieu qu’il connaît parfaitement.

« Belange », Patrick Cauvin, Albin Michel, 17 euros

vendredi 23 juin 2006

BD - John Lord et l'attaque sauvage


A New York, au début du siècle dernier, les titres des journaux délaissent la Grande Guerre pour une série de meurtres aussi sauvages qu’inexpliqués. John Lord et Clara Summers vont enquêter sur ces faits divers car parmi les victimes il y a le professeur Winkley dont ils étaient très proches. Ils vont trouver un embryon de piste en découvrant qu’en Louisiane, il y a quelques années, plusieurs meurtres ont été commis de la même façon dans une grande propriété bourgeoise. Les corps ont été lacérés à coup de griffe et pour certains éventrés. Le second tome écrit par Denis-Pierre Filippi fait alterner scènes muettes du passé et enquête actuelle des deux héros. Si ces derniers sont très bavards (trop parfois…), toute la force de la série se retrouve dans les dessins de Patrick Laumond, illustrateur venu du jeu vidéo, maîtrisant à la perfection l’anatomie féminine. Les scènes de chasse dans la jungle, ou de déchaînement bestial devraient rester longtemps imprégnées au fond de vos pupilles. (Les Humanoïdes Associés, 12,90 €)

jeudi 22 juin 2006

BD - La blondeur sauce Viking


Aëla est blonde. Aëla a les yeux bleus. Aëla est jolie. Mais ne vous avisez pas de vous moquer d’Aëla car cette nouvelle héroïne imaginée par Stéphane Duval (dessin) et Pascal Bertho (scénario) est avant tout une princesse viking. Et quand il y a de la castagne, la belle a du répondant. Pour preuve, fille aînée du roi Gudruun régnant sur le Helluland, quand ce dernier organise un tournoi de chevaliers pour désigner son successeur (aucune femme n’a régné sur ce royaume scandinave), elle y participe masquée et gagne haut la main. Ce n’est pas du goût des autres nobles qui considèrent ce fait d’armes comme une insulte aux dieux. Et dans la foulée, le pays est attaqué… Aëla, pour regagner la confiance de son peuple devra retrouver un frère caché, récemment enlevé par une horde de mongols. Un premier tome exemplaire avec ce qu’il faut de combats, de coups de théâtre, d’humour et de suspense. Ces deux jeunes auteurs maîtrisent parfaitement leur sujet. La suite s’annonce grandiose avec en toile de fond la chevauchée d’Aëla vers l’Est. (Dupuis, 9,80 €)

mercredi 21 juin 2006

BD - Lucie, à suivre...


De toutes les séries lancées dans la nouvelle collection 32 de Futuropolis c’est peut-être la plus ambitieuse. Certainement la plus longue puisque pas moins de 18 épisodes de 32 pages seront nécessaires à Kris, le scénariste, pour raconter le « Monde de Lucie ». Dans un futur proche, à la veille de Noël, une famille va à la nocturne d’un grand magasin. Malgré des consignes de sécurité très strictes, une bombe explose faisant des dizaines de morts. Des gosses des rues sont soupçonnés, mais le duo de flics va finalement s’orienter vers une autre piste avec le témoignage d’une fillette retrouvée indemne dans les décombres. Plongée dans une sorte de coma, elle revit l’explosion grâce à une technique d’hypnose télépathique. Le récit s’annonce dense, bourré de rebondissements et de trouvailles. De quoi permettre à Guillaume Martinez, le dessinateur, de faire l’étalage de son talent, tant en dessin pur qu’en mise en page. Le second épisode est annoncé pour fin août. (Futuropolis, 4,90 €)

BD - Ecorché talentueux


Ruben Pellejero, talentueux dessinateur espagnol, semble attirer les scénarios d’exception. Après « Un peu de fumée bleue » ou « Le tour de valse », il illustre la première partie de l’Ecorché sur un scénario de Giroud et Germaine. Et comme cette longue histoire de 64 pages se passe essentiellement dans le milieu de la peinture au début du XXe siècle, il en profite pour signer des planches d’une rare beauté. Tristan, fils adoptif d’un couple de bouchers, souffre d’une grave malformation du visage. Muet, c’est derrière un masque qu’il se montre en public. Un handicap qui ne l’empêche pas de trouver sa voie : il sera peintre. Mais un peintre maudit qui vivote dans une chambre de bonne, obligé de travailler aux abattoirs pour se payer ses couleurs, essentiellement du rouge… Et puis un jour une belle galiériste remarque son travail et décide de l’exposer. En filigrane, le lecteur est tenu en haleine par un chantage sur les véritables origines de Tristan. Passion, talent, secret : un triptyque gagnant pour un album qui deviendra vite un incontournable. (Dupuis, 13,50 euros)

mardi 20 juin 2006

BD - Secrets américains de la Branche Lincoln


Toutes les fortunes ne sont pas le fait d’un travail honnête et persévérant. Trop souvent, une ascension sociale est due à une opportunité peu flatteuse. C’est le cas de la famille Voss. Parti de rien, au début du XXe siècle aux USA, Charles Voss a su construire un véritable empire. Aujourd’hui, c’est Ted, le dernier représentant de la famille, qui en hérite. Et en réglant les derniers papiers administratifs, il découvre des carnets secrets ayant appartenu à son grand-père. Des rapports codés datant des années 40. Il ne comprend rien si ce n’est que cela parle de Cerbère et d’une certaine « Branche Lincoln ». Avec un ancien professeur de mathématiques et une amie journaliste, il va tenter de décrypter ces mystérieux carnets. Il ne se doute pas qu’avec ces recherches, il va s’attirer des milliards d’ennuis… Nouvelle série réaliste dans la veine de XIII écrite par une jeune scénariste, Emmanuel Herzet et dessinée par un nouveau surdoué polonais abreuvé de Rosinski dans son enfance, Piotr Kowalski. (Le Lombard, 13 €)

lundi 19 juin 2006

Littérature jeunesse - Un livre héros

Comment faire aimer la lecture aux plus jeunes ? En transformant les livres en véritables héros, telle est la solution de Matthew Skelton.


Roman sur l’apprentissage de la lecture, l’histoire de l’imprimerie et de l’utilité des bibliothèques, « Le secret d’Endymion Spring » de Matthew Skelton s’adresse plus particulièrement aux adolescents mais ravira tout autant les adultes passionnés par cette formidable invention que sont les livres. Endymion Spring est un jeune apprenti allemand En cette année 1452 à Mayence, il aide son maître à finaliser une invention qui changera la face du monde et surtout sa compréhension. Gutenberg vient d’inventer l’imprimerie et est bien décidé de démontrer la suprématie de sa technique en publiant plusieurs dizaines de bibles en un temps record. Les moines copistes vont vite rejoindre le cimetière des professions inutiles. Endymion, muet et naïf, ne se doute pas qu’il va être choisi par un livre magique fabriqué en peau de dragon pour détenir la somme de toutes les connaissances. Un lourd fardeau pour le jeune homme obligé de fuir l’Allemagne et un certain Fust, prêt à tout pour entrer en possession de cet objet suprême. 

Dans le silence d’Oxford
Le roman se passe donc en 1452, mais également de nos jours dans l’enceinte de la prestigieuse bibliothèque d’Oxford. C’est dans ces salles silencieuses et studieuses que Blake Somers, s’ennuie désespérément. Ce jeune Américain a suivi sa mère, brillante universitaire ayant décroché une autorisation temporaire pour faire des recherches dans les archives de ce temple européen de la culture. Mais lui, les livres, ce n’est pas sa tasse de thé. Au contraire de sa sœur Duck, plus jeune mais passionnée par tout ce qui est écrit, comme sa mère, il ne trouve aucun intérêt à feuilleter un ouvrage, quel qu’il soit. Jusqu’à ce qu’il découvre un vieux volume égaré dans les rayonnages. Il a littéralement été agressé par deux petits bouts de fer en forme de crochet de serpent, servant à tenir le livre fermé. Pas de référence visibles et surtout, toutes les pages sont blanches. Enfin pas toujours, car en y regardant bien, il déchiffre des phrases énigmatiques. Et là où cela se corse, c’est quand il constate que ces inscriptions, il n’y a que lui qui parvient à les voir… 

Un livre « vivant »
Ce bouquin très différent commence à obséder Blake, il s’interroge : « Les livres n’agressent pas. Ils ennuient, ils échappent à la compréhension, ils se couvrent de poussière… Ils n’agressent pas. Ce sont des objets. Pas des êtres vivants ! » Un rapport très particulier va s’instaurer entre Blake et ce livre magique. Une union, presque une fusion, qui va conduire l’adolescent sur des chemins périlleux car même de nos jours, alors que le multimédia règne en maître, des hommes sont capables des pires extrémités pour posséder ces quelques pages reliées par une couverture de cuir.
Matthew Skelton parvient à rendre passionnantes, parfois inquiétantes, les péripéties de Blake dans les sous-sols d’Oxford et la fuite d’Endymion, sur fond de carnaval à Mayence. Et tous ceux qui aiment lire, ne peuvent s’empêcher de rêver, un jour, d’avoir la possibilité de feuilleter ce livre magique, véritable héros du roman. 
« Le secret d’Endymion Spring », Matthew Skelton, Pocket Jeunesse, 19 €

dimanche 18 juin 2006

BD - Nouveau départ pour le Choucas


Le Choucas prend ses aises. Le détective privé imaginé par Lax quitte un format trop étriqué pour ses aventures et déploie ses ailes dans un grand format du plus bel effet. Nouveau format, nouveau rythme et nouvelle destination pour ce licencié économique, ayant rebondit après avoir beaucoup lu de romans policiers, essentiellement des Série Noire ayant pour héros des détectives privés. Cette fois il est contacté par des assurances. Elles rechignent à payer une grosse prime à la femme d'un avocat sulfureux retrouvé mort dans son lit. Un avocat qui après avoir défendu les pires escrocs et hommes politiques corrompus, a tout plaqué pour ouvrir un petit restaurant au Népal. C'est là qu'il a trouvé la mort. C'est également là que le Choucas se rend pour tenter de prouver que cette mort n'a rien de naturelle. Pour s'entraîner aux pentes abruptes, notre héros enchaîne plusieurs ascensions de Montmartre et finit par la tour Eiffel. Arrivé sur place, sa condition physique reviendra lentement, mais sûrement. Il rencontrera en chemin quelques maoistes, une Française nymphomane, un statisticien et même une ancienne gloire de la télévision reconvertie en moine. Humour et dépaysement assurés. (Dupuis, 13 €)