Les épouses sont souvent les grandes oubliées de certains destins exceptionnels. Le cas d’Emilie Schindler est exemplaire. La femme d’Oskar, rendu célèbre après la publication d’un roman et la sortie du film sur son activisme pour sauver des centaines de Juifs en pleine seconde guerre mondiale, a toujours été près de son mari quand il jonglait avec les nazis pour permettre à ses ouvriers d’échapper à la solution finale. Ce n’est pas “La liste de Schindler” dont il faudrait parler mais de “La liste des Schindler”. Cet album écrit par Jean-Yves le Naour et dessiné par Christelle Galland replace Emilie Schindler dans ce récit ayant permis à Oskar de devenir Juste en 1963 alors qu’elle a dû attendre 1994. Emilie une femme doublement aigrie. En raison de l’oubli historique mais aussi des tromperies nombreuses du mari volage.
C’est en 1999 que la trace d’Emilie Schindler est retrouvée par des journalistes allemands. La vieille dame vit seule dans une petite maison dans la banlieue de Buenos Aires en Argentine. Elle accepte de raconter son histoire, dévoilant au passage quelques vérités sur Oskar Schindler. Ce dernier n’a jamais été un mari parfait. Rapidement Emilie, pourtant follement amoureuse du début à la fin, comprend que cet homme, toujours en avance, bouillonnant de projets, aime les femmes, la fête et sait dépenser en une nuit tout l’argent gagné en un mois. Pour satisfaire ses besoins financiers, il accepte toutes les compromissions. Membre du parti nazi, espion pour les SS, il va reprendre une usine de fabrication d’ustensiles de vaisselle à des Juifs dépossédés de leurs biens. Et pour augmenter les bénéfices, vendra ses casseroles à l’armée du Reich et surtout n'emploie que des Juifs payés deux fois moins que le reste des travailleurs. Oskar, raciste, exploiteur, infidèle… Loin du héros. Pourtant Emilie expliquera qu’il a changé quand il apprend l’existence des camps de concentration et surtout de l’extermination de masse des prisonniers. Il fera alors tout pour sauver ses employés. Aidé par son épouse, il trompe les nazis, se rachète d’un passé peu glorieux. Mais une fois la guerre terminée et le couple installé en Argentine, Oskar retombe dans ses travers. Fêtes, maîtresses et finalement abandon d’Emilie pour refaire sa vie en Allemagne.
Cette BD, en plus de raconter un pan de l’Histoire du XXe siècle, montre l’abnégation de cette femme, son courage, sa fidélité et son engagement malgré les dangers. Elle aussi méritait d’être parmi ces Justes qui ont désormais leur propre collection de BD. L'autre titre paru en cette rentrée 2025 concerne Carl Lutz et est dessiné par Brice Goepfert.
“Les Justes - Emilie et Oskar Schindler”, Bamboo - Grand Angle, 64 pages, 15,90 €







À 50 ans, Yvan Attal a enfin décidé de faire le film qui lui trotte depuis des années dans la tête. Il y a eu l'affaire Ilan Halimi, puis les massacres de Merah. "Entre le moment où j'ai écrit ce film, où je l'ai donné à lire et aujourd'hui, il s'est quand même passé des choses, se souvient Yvan Attal. L'antisémitisme est un tel sujet, c'est devenu tellement tendu, que pour certains il est très difficile d'en rire." Entre comédie et tragédie, il veut surprendre le spectateur, comme s'il jouait avec la température de l'eau, passant du chaud au froid sans prévenir. L'effet est saisissant. Et salvateur parfois. Car rire c'est salutaire, mais trop souvent cela ne sert qu'à cacher larmes et douleurs. Et Yvans Attal d'enfoncer le clou en déclarant : "C'est un film sur l'antisémitisme ! Qui existe depuis des millénaires, qui se transforme pour exister différemment aujourd'hui et qui malheureusement, je le crains n'est pas terminé." Une fiction rattrapée par la réalité. Son passage la semaine dernière dans l'émission de Laurent Ruquier sur France 2 a provoqué une vague de message antisémites sur Twitter et autres réseaux sociaux. Comme pour lui donner doublement raison...