Le taux de chômage en France est de 10 % selon les toutes dernières études de l'INSEE. 10 % d'inactifs. Ils pèsent dans le budget du pays. Mais s'ils étaient plus nombreux, beaucoup plus nombreux ? C'est l'idée de départ de l'excellente série télé française 'Trepalium' récemment diffusée sur Arte et sortie dans un coffret trois DVD ou deux blu-ray. Dans un futur proche, il ne reste plus que 20 % d'actifs. Face à l'impossibilité de subvenir aux besoins de 80 % de la population, le gouvernement a imaginé un nouveau système. Au centre, la ville et les actifs. Tout autour, derrière un mur infranchissable, les inactifs, devenus depuis les zonards. Autant la vie est facile chez les privilégiés, autant elle est compliquée dans la zone.
Pour raconter cette dystopie (l'inverse de l'utopie), les créateurs de la série suivent les trajectoires de Ruben (Pierre Deladonchamps), ambitieux cadre de la ville et Izia (Léonie Simaga), zonarde qui élève seule son fils de 15 ans. Ce système très déséquilibré provoque des tensions. Des activistes, dans la zone et la ville, veulent abattre ce mur de la honte. Mais le pouvoir politique et économique est inflexible. Seule concession accordée par la Première ministre (Ronit Elkabetz) : quelques zonards vont retrouver un emploi solidaire chez des actifs. Ils franchiront le mur tous les jours pour se mettre au service de familles désignées. Izia servira donc de servante à Ruben. Mais quand sa femme disparaît, il remarque leur ressemblance physique et demande à Izia de la remplacer au pied levé pour servir ses ambitions.
L'eau, une arme...
L'arc narratif de la série est à plusieurs niveaux. En découvrant les vies de Ruben et d'Izia, c'est toute la société de Trepalium qui est décortiquée. La débrouille et l'entraide d'un côté, l'individualisme et l'opulence de l'autre. Deux mondes proches mais qui ne peuvent exister qu'en opposition. En filigrane, les scénaristes font le procès des liaisons dangereuses entre pouvoir et entreprises. Le 'méchant' de Trepalium n'est pas incarné par un homme ou une femme mais une société, Aquaville, chargée de la gestion de l'eau potable.
Tournée dans de véritables décors, Trepalium est une belle réussite visuelle. Sans moyens énormes, on est complètement dépaysé, plongé dans un monde oppressant mais totalement réaliste. On reconnaît au passage l'architecture et les salles du siège du Parti communiste français ou de la Bibliothèque Nationale de France. Le coffret offre en bonus un long entretien avec le réalisateur, Vincent Lannoo et 'Journal d'un inutile', une websérie racontant comment le mur a été pensé, conçu et construit. 'Trepalium', Arte éditions, 29,99 euros le coffret DVD, 34,99 euros le coffret blu-ray.
Dessinateur de la majorité des albums de la série "Alter Ego" avec Lapière et Renders au scénario, Mathieu Reynès décide pour la première fois de sa carrière de se lancer en solo dans une série ambitieuse. Harmony est le nom de la nouvelle héroïne. Cette jeune femme, à peine sortie de l'adolescence, filiforme et blonde, semble très fragile. Prisonnière d'un grand costaud, barbu et peu loquace, elle se réveille totalement amnésique dans une cave. Durant son sommeil elle entend des voix et se découvre des pouvoirs. Notamment de déplacer des objets par sa seule pensée. Une capacité de plus en plus grande, qu'elle ne maîtrise pas toujours. Prévue en trois tomes, cette série, entre SF, fantastique avec un gros zeste de thriller, débute sous de très bons auspices. Mathieu Reynès prend le temps durant ces plus de 50 pages d'explorer longuement les doutes de son héroïne. Elle est touchante quand elle s'interroge sur ce passé envolé, mais devient très inquiétante quand elle décide de se défendre. De son geôlier dans un premier temps, puis de militaires lancés à sa recherche. De l'action et du mystère, le tout dessiné dans ce style si efficace de Reynès, proche du réalisme mais avec une bonne dose de fantaisie. "Harmony" (tome 1), Dupuis, 12 euros
Plus le pape François redouble d'efforts en faveur de la transparence de l'Eglise, plus certains scandales prennent de l'ampleur. Le revers de la médaille de la démarche courageuse d'un pontife obligé de constater les erreurs de son clergé, comme pour mieux changer les choses. Après l'Oscar du meilleur film décerné à Spotlight, le Vatican admet que ce long-métrage américain n'est pas "anticatholique". A une autre époque, il en aurait été tout autrement. Dénoncer des scandales de pédophilie étouffés par les évêques paraît normal au pape François, il reconnaît la réalité des faits incriminés et les regrette. Le chemin est encore long avant de laver l'honneur de l'église catholique, mais c'est un bon début. La reconnaissance marque le premier pas avant la condamnation par la justice. Un scandale d'un autre genre secoue l'église en Irlande du Nord. Father Stephen Crossan, 37 ans, a été filmé en train de sniffer un rail de cocaïne. Il a reconnu les faits et précisé que cet unique dérapage (selon lui) s'expliquait par sa profonde dépression. Depuis, il est en congé maladie. Peut-être va-t-il rejoindre l'île de Craggy Island. Les amateurs d'humour anglais reconnaîtront le lieu de villégiature de Father Ted, série télé anglaise des années 90. Le héros, un curé, y est envoyé après avoir détourné l'argent destiné à un voyage à Lourdes pour aller faire la fiesta à Las Vegas. Il vit en compagnie de Father Jack, vieux, sale, alcoolique et obsédé sexuel et Father Dougal, attardé mental. Father Stephen et sa coke complèteraient parfaitement le trio.
Deux agriculteurs, le père et le fils, traversent la France en taxi à la découverte du vignoble français. 'Saint-Amour', désopilant et poétique, met en vedette Poelvoorde et Depardieu. Un film sur le vin, avec Benoît Poelvoorde et Gérard Depardieu en vedette : il n'y a que le duo Delépine/Kervern pour oser relever le défi. Les deux acteurs ne sont pas réputés pour leur tempérance quand il s'agit de profiter de la vie. Mais comme les réalisateurs ne crachent pas non plus sur un bon millésime, l'entente a visiblement été très facile à trouver entre les différents ego.
Forcément le tournage a dû parfois en être un peu affecté, mais qu'importent les aléas puisqu'il y a l'ivresse ? Le début du film se déroule en plein salon de l'agriculture. Jean (Gérard Depardieu), éleveur presque à la retraite, vient tenter une ultime fois sa chance au concours du plus beau taureau. Il voudrait que son fils Bruno (Benoît Poelvoorde) reprenne l'exploitation. Ce dernier, grand dépressif devant l'éternel, ne veut pas finir ses jours entre des vaches. Il veut profiter de la vie, trouver une femme. Son rêve ultime : être vendeur dans un magasin de jardinage.
Avec les cochons
Pour l'heure, il considère sa venue au Salon de l'agriculture comme des vacances. Sa seule et unique semaine de vacances durant toute l'année. Il va ainsi faire la route des vins avec son oncle (Gustave Kervern), sans quitter l'enceinte du Parc des expositions parisien. Cela donne une ouverture mémorable, où les deux paysans en goguette, s'enfilent quantité de verres, au point de finir à quatre pattes en compagnie de gentils porcelets, sous l'œil atterré des visiteurs parisiens.
Jean récupère son fils dans un état lamentable et comme pour lui pardonner cette vie d'abnégation, lui accorde de faire véritablement la route des vins. Les voilà partis en taxi, avec Vincent Lacoste au volant. Un trio, trois générations, la France, du vin : les ingrédients permettent de multiplier les situations cocasses et délirantes. Au bout du chemin, ils rencontrent Vénus (Céline Sallette), une jeune femme idéaliste qui vit dans des cabanes perchées sur des arbres. Elle comprendra ces trois hommes au parcours si différent et les aimera, chacun à sa façon. Le film, de road-movie excentrique, bascule dans la poésie la plus complète, avec quasiment un brin de référence divine (la sainte trinité, la vierge et l'enfant). Mais quoi de plus normal : le vin n'est-il pas le sang du Christ ? Forcément inégal, ce long-métrage de Delépine et Kervern est cependant plus abouti que le précédent, entièrement centré sur la dérive d'un employé modèle interprété par le génial Michel Houellebecq (lire ci-dessous). On retrouve l'écrivain dans ce film. Il n'a pas beaucoup de scène avec Depardieu. Dommage. On imagine la confrontation entre le frêle intellectuel, aux sentiments intériorisés et le massif acteur, au verbe haut et tonitruant. Cela devrait faire de sacrées étincelles. Pour un prochain film peut-être... _________________________ Brillantes apparitions Road movie déjanté, 'Saint-Amour' offre son lot de rencontres improbables. Les deux réalisateurs ont particulièrement soigné le casting de ces seconds rôles savoureux. A tout seigneur tout honneur, Michel Houellebecq, fidèle du duo, interprète un incroyable propriétaire de chambres d'hôtes. Lent et atone, il est irrésistible au cours de ces quelques minutes hors du temps. Bruno, potentiel candidat à 'L'amour est dans le pré', cherche l'âme sœur. Mais ne crache pas sur un coup en passant. Il croise la route d'une agent immobilière très professionnelle. Ovidie, ancienne star du porno, lui offre un peu de rêve. Juste par vengeance. Mais cela reste toujours du bon temps agréable à prendre.
On notera également la présence au stand des vins d'Alsace de Blutch, par ailleurs dessinateur de BD et habitué des apparitions chez les copains ('Jacky' de Riad Sattouf). Andréa Ferréol est de l'étape carcassonnaise du trio. Elle petit-déjeune avec Depardieu puis prolonge la rencontre dans sa chambre. Le vieux paysan bougon a beaucoup de chance avec les femmes. C'est lui aussi qui raccompagne une jeune serveuse interprétée par Solène Rigot, terrorisée à l'idée de la dette à rembourser. Sans oublier Ana Girardot (en jumelles) ou Izia Higelin (en paraplégique). Comme des sketches de Groland, mais avec des acteurs professionnels et connus.
La recherche mondiale vient d'accomplir un grand pas pour l'avenir de l'Humanité. Nouvelle source d'énergie ? Moteur propre ? Éradication de la famine ? Non, plus prosaïquement, des chercheurs de l'University College of London, ont découvert la cause de l'apparition de nos cheveux blancs. Une vaste étude sur l'ADN de plus de 6 000 volontaires met en lumière le rôle du gène IRF4 dans le vieillissement des cheveux. Si votre corps contient ce fameux gène, votre toison blanchira rapidement au fil des ans. L'étude permet également de déterminer l'âge du début de la fin : premiers cheveux blancs vers 35 ans pour les Caucasiens, 39 chez les Asiatiques et seulement 45 pour des Africains chanceux. Chanceux car tout homme normalement constitué ne supporte pas de voir sa chevelure blanchir. Malgré les déclarations multiples et variées de femmes avouant craquer pour les "poivre et sel", on se sent totalement démuni lorsqu'on commence à remarquer les premiers signes du temps. La découverte des savants anglais s'avère néanmoins rassurante : il est théoriquement possible de modifier ce gène IRF4 pour stopper le vieillissement. En théorie seulement, car on aborde le délicat sujet de la manipulation génétique et les questions éthiques inhérentes. Mais franchement, la majorité des hommes donnerait cher pour se faire trafiquer l'IRF4. Hélas, la potion anti-calvitie n'est pas encore d'actualité (même si des escrocs du net vous affirment le contraire). Car avoir des cheveux blancs n'est pas réjouissant, mais ne plus en avoir du tout...
Après "Alabama Monroe", film au destin exceptionnel (césar de la meilleure réalisation étrangère et nommé aux Oscars), Félix Van Groeningen, cinéaste belge, s'est attelé à un projet qu'il mûrissait depuis une bonne décennie : raconter l'histoire du Charlatan, le bar musical de son père à Gand, bouillon de culture ouvert et joyeux.
L'évolution de ce café-concert "est la métaphore d'une société, d'un pays, la Belgique." confie le réalisateur. Très ouvert, sans limite ni restriction à ses débuts, il s'est petit à petit refermé sur lui, sélectionnant sa clientèle au point de devenir un endroit branché, chic et élitiste. Mais le film est avant tout le récit de la relation entre deux frères Jo (Stef Aerts) et Frank (Tom Vermeir), que normalement tout oppose. Jo, le plus jeune, a repris la gérance d'un petit café de quartier. Célibataire, il sert des litres de bières essentiellement à des jeunes du coin. Dans un coin de la salle, quelques musiciens amateurs jouent des morceaux de rock énergique ou passent les tubes du moment. Frank, l'aîné, marié à Isabelle, a un bébé. Il vivote comme associé dans une société de revente de voitures d'occasion. Après des années d'éloignement et de brouille, les deux frères se retrouvent. Frank devine le potentiel du lieu et persuade son petit frère de voir plus grand. Il investit toutes ses économies dans des travaux d'agrandissements, embauche les potes au bar ou à la sécurité, et transforme le triste bar sombre en lieu incontournable de la nuit gantoise.
Gloire et déchéance
Dans ce film de plus de deux heures, les scènes et ambiances s'enchaînent parfaitement. En quelques mois on voit l'évolution du Belgica, la période des travaux, où tous les rêves sont permis, l'inauguration, soirée de légende qui n'en finit plus, les premiers succès. Les premières dérives aussi. Alcool, drogue, violence : seuls les plus forts résistent à ce cocktail typique de la nuit. Frank a l'air d'être un dur. Mais il est tiraillé par son insatisfaction permanente. Il aime sa femme mais ne sait pas résister aux jolies filles qui prennent du bon temps chaque nuit au Belgica. Jo, chétif, handicapé (il a perdu un œil enfant), est au contraire un roc. Il tient la barre avec fermeté, sorte de gardien de l'esprit originel. Amoureux fou de Marieke, il admire son frère. Rêve de fonder une famille comme lui. Leur réussite est directement liée à leur complicité. Quand ils s'embrouillent, tout s'écroule. Autant drame psychologique qu'ode à la fête, "Belgica" est aussi un film musical. La bande-son est l'œuvre de Soulwax, un duo formé de deux frères très connus outre-Quiévrain. Ils ont composé les morceaux, mais également imaginé tous les groupes (fictifs), qui passent sur la petite scène du bar. Comme pour "Alabama Monroe", la musique est omniprésente dans "Belgica". Avec la fête en plus. Au point qu'à la fin du tournage de l'inauguration, malgré les "coupez" lancé par Félix Van Groeningen, les acteurs et figurants ont continué durant de longues minutes, malgré l'épuisement, à danser et faire la fête. "Quand cela devient magique à ce point, ce n'est que cadeau" avoue, des étoiles dans les yeux, le réalisateur qui devrait s'envoler dans quelques jours aux USA pour finaliser un projet américain.
Tout le monde avait peur du bug de l'an 2000. Finalement tout s'est bien passé le 1er janvier. Mais les informaticiens ne sont pas infaillibles et parfois même un peu tête en l'air. Prenez les programmateurs du système informatique des transports en commun du Mans. Ils ont totalement zappé le fait que tous les quatre ans, après le 28 février, il faut prévoir un 29 avant de passer au mois de mars. 2016, année bissextile, ne permettra pas à la Setram d'augmenter ses recettes. Lundi, 29 février donc, tous les "valideurs", ces petits boîtiers électroniques où l'on présente son ticket, affichaient deux lettres : HS comme "hors service". Conséquence, les milliers d'utilisateurs des trams et bus du Mans ont voyagé à l'œil durant ces 24 heures "perdues" dans le cloud informatique. Pour une fois, au Mans en tout cas, le mois de février aura présenté un avantage. Sans le moindre jour férié, au cœur de l'hiver, sa seule qualité est de passer plus vite que ses onze confrères. Il me tarde toujours d'entrer en mars. Dans l'hémisphère Nord, cette période symbolise la renaissance. Le printemps, mais surtout depuis quelques décennies, le passage à l'heure d'été. Dans 25 jours, contrairement à la majorité des Français qui se plaignent de dormir une heure de moins, je me réjouis à l'avance d'avancer les aiguilles de toutes mes horloges. 25 jours encore à tenir et à pester contre la nuit qui tombe trop tôt. Et puis du jour au lendemain, on bascule dans une autre saison, presque une autre dimension.
Super production américano-chinoise, "Dragon Blade" ne lésine pas sur les moyens pour en mettre plein la vue aux spectateurs. Des milliers de figurants, des décors gigantesques, une distribution avec des têtes d'affiche internationales : ce film historique prouve une nouvelle fois que la Chine a définitivement abandonné son repli sur soi et que le pays est prêt à conquérir le monde. Avec un bémol, les scènes de combats dont les locaux sont si friands, sont un peu longuettes pour le public occidental. De même, les raccourcis scénaristiques et le jeu appuyé des acteurs donnent une impression étrange. John Cusack, en général romain est assez crédible. Adrien Brody, méchant de service, en fait des tonnes. Il parvient à allier regard qui tue et bouclettes au vent. Il est toujours parfait même quand s'agit de surjouer : n'oublions pas qu'il a remporté un Oscar. Et bien avant Leonardo DiCaprio...
Reste la vedette ultime, celle qui fait le lien entre les deux mondes. Jackie Chan multiplie les tournages. A Hollywood et en Chine. Cette histoire est taillée pour lui. Il interprète un général chinois qui n'a qu'un mot à la boucher : paix. Avec ses hommes, il fait la police le long de la route de la soie. Il sépare tribus nomades, troupes chinoises et hordes Huns, dénouant les tensions grâce à son sabre, son bouclier et surtout son éloquence. Tombé dans un piège (sa philosophie pacifique ne lui occasionne pas que des amis), il est condamné aux travaux forcés. Il doit reconstruire une cité fortifiée. Cité attaquée par les légionnaires romains de Lucius (John Cusack). Cela donnera un premier combat sans effusion de sang. Les deux soldats vont se mesurer, se comprendre, s'apprécier, s'entraider. Le discours sous-jacent est expliqué à plusieurs reprises : "transforme tes ennemis en amis". Généralement cela marche, sauf quand on, tombe sur un super-méchant comme Tiberius (Adrien Brody). Cette fois, le combat sera sans issue. Dans le DVD comme le blu-ray, un making-of de 20 minutes raconte les conditions dantesques du tournage (plus de 120 jours dans le désert), les longues préparations pour fabriquer armures et accessoires et comment est venue l'idée à Daniel Lee de raconter cette histoire de la rencontre entre l'aigle romain et le dragon chinois, en 45 avant Jésus-Christ. "Dragon Blade", Studiocanal, 14,99 euros.
Certains comédiens n'exercent ce métier que pour briller. Ils rêvent du haut de l'affiche, de leur nom en lettres gigantesques, de récompenses suprêmes, de fans en délire. Malheureusement, pour l'immense majorité d'entre eux, leur égo démesuré ne va pas forcément de pair avec une notoriété planétaire. Leonardo DiCaprio est talentueux. Personne n'en doute. Mais il n'avait jamais obtenu la petite statuette américaine. Comme pour conjurer le sort, il accepte le rôle principal particulièrement physique de « The Revenant ». Il enchaîne les rencontres avec la presse du monde entier avec deux anecdotes répétées inlassablement : j'ai dormi dans la carcasse d'un cheval mort et mangé du foie de bison cru. A l'écran ses péripéties paraissent longuettes, mais marchent à la perfection. Pourtant Matt Damon dans « Seul sur Mars » ou Eddie Redmayne et son extraordinaire transformation dans « The Danish Girl » auraient largement mérité eux aussi de monter sur scène dans la nuit de dimanche à lundi. Deux soirs avant, Catherine Frot reçoit enfin le césar. Toujours nommée, jamais récompensée, l'actrice n'a jamais désespéré de l'emporter. Pourtant elle aurait pu elle aussi rater la marche supérieure face aux performances de Cécile de France dans « La belle saison » ou de Loubna Abidar dans « Much loved ». Deux films plus politiques (libération des femmes et prostitution au Maroc) que la comédie de Xavier Giannoli sur cette Castafiore (« Margueritte ») à la voix de casserole. Finalement, Frot et DiCaprio, même combat, même victoire.
Dans la catégorie 'film social', il y a les réalisations optimistes (majoritaires) et puis d'autres qui ne font aucunes concessions avec la dure réalité. 'Je ne suis pas un salaud' d'Emmanuel Finkiel est le prototype de cette seconde catégorie. Le monde décrit durant ces 1 h 50 est sans espoir. Le personnage principal, Eddie (Nicolas Duvauchelle), chômeur, alcoolique, violent, imbu de sa personne et colérique atout contre lui. Sa belle gueule est ses jolis tatouages ne suffisent pas à le sauver d'une société de plus en plus sans pitié pour les ratés. Ce qui pourrait le auver, c'est ce qui reste de sa famille : un fils et la mère de cette dernière qui n'a pas complètement abdiqué malgré tous les coups (parois au sens premiers) vaches qu'il lui a infligé.
Faux témoignage
Un soir, très aviné, il est pris à partie par un groupe de jeunes. L'alcool aidant, il les provoque. Bagarre, coup de tournevis dans le dos... Réveil aux urgences. Eddie devient presque un héros. Pour la première fois il est du côté des victimes. Quand on lui présente plusieurs supsects potentiels, il reconnait Ahmed. Ce n'est pas lui, il le sait parfaitement, mais il persiste dans ses déclarations. Le réalisateur, dans ce film d'une noirceur absolue, focalise l'attention du spectateur sur Eddie. Plus le temps passe moins il ne trouve grâce aux yeux du public. Et de prouver sans cesse l'inexactitude du titre. Le film déroute par le point de vue très noir d'Eddie. Cela en devient parfois insupportable. Preuve que Nicolas Duvauchelle, dans le rôle principal, a plus que donné vie à cet homme dont le seul problème reste sa propension à essayer d'être parfait.