Affichage des articles dont le libellé est lacoste. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est lacoste. Afficher tous les articles

vendredi 4 mars 2016

Cinéma : La route de l'amour passe par le vin

saint-amour, delépinbe, kervern, Poelvoorde, depardieu, lacoste,
Deux agriculteurs, le père et le fils, traversent la France en taxi à la découverte du vignoble français. 'Saint-Amour', désopilant et poétique, met en vedette Poelvoorde et Depardieu.
Un film sur le vin, avec Benoît Poelvoorde et Gérard Depardieu en vedette : il n'y a que le duo Delépine/Kervern pour oser relever le défi. Les deux acteurs ne sont pas réputés pour leur tempérance quand il s'agit de profiter de la vie. Mais comme les réalisateurs ne crachent pas non plus sur un bon millésime, l'entente a visiblement été très facile à trouver entre les différents ego.

Forcément le tournage a dû parfois en être un peu affecté, mais qu'importent les aléas puisqu'il y a l'ivresse ? Le début du film se déroule en plein salon de l'agriculture. Jean (Gérard Depardieu), éleveur presque à la retraite, vient tenter une ultime fois sa chance au concours du plus beau taureau. Il voudrait que son fils Bruno (Benoît Poelvoorde) reprenne l'exploitation. Ce dernier, grand dépressif devant l'éternel, ne veut pas finir ses jours entre des vaches. Il veut profiter de la vie, trouver une femme. Son rêve ultime : être vendeur dans un magasin de jardinage.
Avec les cochons
Pour l'heure, il considère sa venue au Salon de l'agriculture comme des vacances. Sa seule et unique semaine de vacances durant toute l'année. Il va ainsi faire la route des vins avec son oncle (Gustave Kervern), sans quitter l'enceinte du Parc des expositions parisien. Cela donne une ouverture mémorable, où les deux paysans en goguette, s'enfilent quantité de verres, au point de finir à quatre pattes en compagnie de gentils porcelets, sous l'œil atterré des visiteurs parisiens.

Jean récupère son fils dans un état lamentable et comme pour lui pardonner cette vie d'abnégation, lui accorde de faire véritablement la route des vins. Les voilà partis en taxi, avec Vincent Lacoste au volant. Un trio, trois générations, la France, du vin : les ingrédients permettent de multiplier les situations cocasses et délirantes.
Au bout du chemin, ils rencontrent Vénus (Céline Sallette), une jeune femme idéaliste qui vit dans des cabanes perchées sur des arbres. Elle comprendra ces trois hommes au parcours si différent et les aimera, chacun à sa façon. Le film, de road-movie excentrique, bascule dans la poésie la plus complète, avec quasiment un brin de référence divine (la sainte trinité, la vierge et l'enfant). Mais quoi de plus normal : le vin n'est-il pas le sang du Christ ?
Forcément inégal, ce long-métrage de Delépine et Kervern est cependant plus abouti que le précédent, entièrement centré sur la dérive d'un employé modèle interprété par le génial Michel Houellebecq (lire ci-dessous).
On retrouve l'écrivain dans ce film. Il n'a pas beaucoup de scène avec Depardieu. Dommage. On imagine la confrontation entre le frêle intellectuel, aux sentiments intériorisés et le massif acteur, au verbe haut et tonitruant. Cela devrait faire de sacrées étincelles. Pour un prochain film peut-être...
_________________________
Brillantes apparitions
Road movie déjanté, 'Saint-Amour' offre son lot de rencontres improbables. Les deux réalisateurs ont particulièrement soigné le casting de ces seconds rôles savoureux. A tout seigneur tout honneur, Michel Houellebecq, fidèle du duo, interprète un incroyable propriétaire de chambres d'hôtes. Lent et atone, il est irrésistible au cours de ces quelques minutes hors du temps. Bruno, potentiel candidat à 'L'amour est dans le pré', cherche l'âme sœur. Mais ne crache pas sur un coup en passant. Il croise la route d'une agent immobilière très professionnelle. Ovidie, ancienne star du porno, lui offre un peu de rêve. Juste par vengeance. Mais cela reste toujours du bon temps agréable à prendre.
saint-amour, delépinbe, kervern, Poelvoorde, depardieu, lacoste,
On notera également la présence au stand des vins d'Alsace de Blutch, par ailleurs dessinateur de BD et habitué des apparitions chez les copains ('Jacky' de Riad Sattouf). Andréa Ferréol est de l'étape carcassonnaise du trio. Elle petit-déjeune avec Depardieu puis prolonge la rencontre dans sa chambre. Le vieux paysan bougon a beaucoup de chance avec les femmes.
C'est lui aussi qui raccompagne une jeune serveuse interprétée par Solène Rigot, terrorisée à l'idée de la dette à rembourser. Sans oublier Ana Girardot (en jumelles) ou Izia Higelin (en paraplégique). Comme des sketches de Groland, mais avec des acteurs professionnels et connus.

vendredi 5 septembre 2014

Cinéma - "Hippocrate" ou comment soigner à s'en rendre malade

Médecin et cinéaste, Thomas Lilti a puisé dans sa propre expérience hospitalière pour écrire et réaliser « Hippocrate », film sur les débuts d'un interne.


De nos jours, quasiment tout le monde a déjà franchi les portes d'un hôpital. Pour s'y faire soigner ou rendre visite à un proche. On connait donc tous ces longs couloirs où des dizaines de personnes en blouses blanches s'activent, telles des fourmis travailleuses. Mais le personnel hospitalier n'a rien de l'insecte dénué de personnalité, de jugement, d'empathie et de problème. Au contraire ce sont des hommes et des femmes qui ont simplement la chance de se retrouver de l'autre côté de la barrière. Temporairement. « Hippocrate » de Thomas Lilti est un film hommage sur l'abnégation de ces hommes et femmes qui passent souvent plus de la moitié de leur journée à soigner. Et le réalisateur sait de quoi il parle puisqu'il est lui-même médecin et que c'est dans l'établissement où il officie qu'il planté ses caméras.

Film vérité, à fort contenu social, « Hippocrate » est l'antithèse des séries médicales multidiffusées sur les chaînes de télévision.
Pour plonger dans ce microcosme si particulier, le spectateur suit les débuts de Benjamin (Vincent Lacoste), interne nouvellement nommé dans ce service. Encore très jeune, il semble emprunté et peu sûr de lui. Il n'a certes pas d'expérience mais surtout il est dans le service de son père. Si les premières minutes ont presque l'air d'une comédie, rapidement le ton change. Notamment quand Benjamin reçoit le renfort d'un autre interne, Abdel (Reda Kateb). De 15 ans son aîné, il est médecin dans son pays, l'Algérie. Mais pour obtenir l'équivalence de son diplôme en France, il doit lui aussi passer par l'internat. Il arbore sur sa blouse ces trois lettres que les malades remarquent rarement : FFI, faisant fonction d'interne.

L'exploitation des médecins étrangers
Entre Benjamin et Abdel, le courant a du mal à passer. Le premier, encore dans l'esprit étudiant et carabin, est parfois insouciant. Il se la raconte aussi quand il se regarde dans la glace et explique à un interlocuteur imaginaire « Oui je suis médecin. J'ai sauvé des vies... » Pour Abdel cette étape est loin derrière lui. Il doit être irréprochable pour espérer obtenir son diplôme. Alors avec ses collègues venus comme lui d'Afrique ou d'Amérique latine, il enchaîne les gardes, vit dans une petite chambre dans l'hôpital, s'investit corps et âme. Mais c'est aussi cette expérience qui l'empêche de tout accepter. Notamment la douleur des patients et l'acharnement thérapeutique. Le film glisse alors vers une critique du système où certains chefs de service, loin de leur engagement premier, cherchent avant tout à rentabiliser les lits. Un film porté par les deux acteurs principaux. Vincent Lacoste, en fils à papa parfois dépassé est étonnant, l'acteur ayant surtout joué dans des comédies (Les Beaux gosses). Reda Kateb porte pour sa part une humanité contagieuse. Si tous les médecins avaient sa compétence et sa gentillesse, le monde de la santé en France se porterait certainement mieux...

_______________________


Même si la promotion du film est essentiellement portée par Vincent Lacoste, acteur comique qui change de registre, le véritable personnage principal d'« Hippocrate » est Abdel Rezzak, le médecin algérien interprété par Reda Kateb. Ce rôle fort donne une nouvelle occasion à ce comédien passé par le théâtre d’imposer son talent.
Il est lumineux dans sa composition d’un homme habitué à prendre des décisions dans son pays, rabaissé au simple exécutant dans l’hôpital français qui l’exploite de façon éhontée. On sent sa force contenue, sa rage éteinte sous la contrainte sociale. Jusqu’à la rupture. Benjamin, carrément hostile au début, va finalement comprendre quel est le vrai but de cette profession. Et quand il doute et explique à Abdel que peut-être il n’est pas fait pour ce métier, le « faisant fonction d’interne » a cette réplique définitive : « Mais médecin ce n’est pas un métier. C’est une malédiction. »
Si certains des infirmiers intervenant dans le film le sont véritablement danse la vie active, ce n’est pas le cas de Philippe Rebbot, excellent second rôle récurrent du cinéma français actuel.

vendredi 13 juin 2014

DVD - Jacky, l'idole des dames

Le dernier film de Riad Sattouf, drôle et caustique, épingle misogynie, intégrisme et féminisme.

Qui ose encore se plaindre du manque d'originalité du cinéma français ? Dans exception culturelle, il y a « exception ». Loin des comédies formatées ou des drames insipides, « Jacky au royaume des filles » est de ces films qui ne peuvent voir le jour qu'en France. Grâce à des producteurs qui font confiance à des créateurs comme Riad Sattouf. Si le film n'a pas marché très fort en salles, sa sortie en DVD chez Pathé doit rendre sa juste place à cette pépite d'originalité.

Il y a un peu du Mocky dans ce film. Le Mocky de la grande époque, quand il foisonnait d'idées et dynamitait allègrement les règles du genre. En imaginant la dictature de Bubunne, Sattouf invite le spectateur dans un voyage incongru et étonnant. Dans ce pays imaginaire (ressemblant à une ancienne république socialiste mâtinée d'intégrisme religieux), les femmes règnent en maîtres absolus. Pas de lutte des classes, juste une domination d'un sexe sur l'autre. La générale (Anémone) règne sur ce pays replié sur lui-même. Les femmes dirigent et font la guerre, les hommes se contentent de tenir leur foyer, bien cachés derrière leurs tuniques les couvrant des pieds à la tête. Sur la télévision de propagande, les mâles célibataires apprennent que la fille de la Générale, la Colonelle (Charlotte Gainsbourg) cherche son « grand couillon ». Jacky (Vincent Lacoste), en a des vapeurs. Il rêve d'être choisit et de donner plein de petites filles à la future dirigeante de la Bubunne.
Cendrillon inversé
Dans le making-of en bonus du DVD, Riad Sattouf qu'il a simplement voulu inverser le conte de Cendrillon. Mais il va beaucoup plus loin dans la satire sociale. Un pari réussi grâce à des acteurs littéralement habités. 


Vincent Lacoste, en jeune enamouré d'une glaciale Charlotte Gainsbourg, prouve qu'il est un véritable acteur en pas un miroir des jeunes d'aujourd'hui. L'ensemble fonctionne aussi en raison des rôles secondaires minutieusement choisis par le réalisateur. Didier Bourdon, en père cupide est génial, Valérie Bonneton, autoritaire et violente, rend totalement crédible la tyrannie de la dictature, William Legbhil, le rival de Jacky est horripilant de suffisance. Sattouf, qui a débuté dans la bande dessinée, a même puisé dans le monde du 9e art pour offrir deux petits rôles à Fred Neidhart et Blutch.
Mais la palme revient à Noémie Lvovsky. Femme autoritaire de Didier Bourdon, elle a cependant une certaine considération pour Jacky, le petit malheureux martyrisé par ses cousins. Malgré l'uniforme et son aspect « hommasse » elle parvient à insuffler une réelle tendresse au personnage. Déjà remarquée dans le rôle de la mère du héros des « Beaux Gosses », premier film de Riad Sattouf, elle s'impose au fil des films comme une « gueule » féminine du cinéma français. Dernier exemple en date son apparition dans « Tristesse Club » de Vincent Mariette toujours en salles.
C'est cette richesse et cette diversité qui fait de « Jacky au royaume des filles » un long-métrage hors normes, de ces OVNI devenus malheureusement en peu trop rares dans un cinéma français souvent convenu.

« Jacky au royaume des filles », Pathé, 19,99 €