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dimanche 10 septembre 2023

Cinéma - “Club Zéro”, allégorie sur la faim des jeunes

Film angoissant sur la manipulation des jeunes par une prof extrémiste, "Club Zéro" de Jessica Hausner était en compétition au dernier festival de Cannes.

Certains films, sans la moindre goutte de sang, de monstre avide de chair humaine ou de tueur en série machiavélique, font encore plus peur au spectateur que ces productions formatées pour effrayer. C’est exactement ce qui se passe quand on voit Club Zéro, film de Jessica Hausner.

Une histoire toute simple entre une prof et une poignée de ses élèves. Un problème de manipulation et d’influence sur fond de mysticisme et de trouble alimentaire. Recrutée pour enseigner la diététique, Miss Novak (Mia Wasikowska), fascine certains élèves d’une très réputée (et coûteuse) école privée. Un petit groupe sensible à ses cours expliquant qu’il faut manger en pleine conscience. Pour moins manger, ne plus avoir faim, retrouver la forme.

Les jeunes l’écoutent comme un gourou, tentant sans cesse d’aller plus loin que ce qu’elle leur demande. Ne plus ressentir la faim, comme pour se réapproprier son corps, ses sensations, sa vie. Le film décortique le travail de sape de l’enseignante, entraînant le groupe dans une dérive nihiliste jusqu’à le persuader que l’avenir appartient à ceux qui intègrent le Club Zéro, celui des « élus » qui cessent complètement de s’alimenter. Une folie qui n’alerte pas la chef d’établissement (Sidse Babett Knudsen) ni certains parents (Elsa Zylberstein).

C’est à partir de ce moment, quand le retour en arrière semble impossible, que le film devient effrayant. Car des potentiels membres d’un Club Zéro, on en connaît tous, dans notre entourage proche, jeunes et moins jeunes. Un film brillamment intelligent sur les risques de la manipulation d’esprits influençables.

Film de Jessica Hausner avec Mia Wasikowska, Sidse Babett Knudsen, Elsa Zylberstein

 

samedi 26 mars 2022

Thriller - La secte danoise

Nombre d’horreurs sont commises au nom de Dieu. La preuve une nouvelle fois dans ce thriller nordique de Michael Katz Krefeld. L’auteur danois propose un 3e roman autour de son personnage récurant de flic déchu. Ravn a basculé dans la presque folie quand un cambriolage a mal tourné. Sa compagne a été tuée. Depuis il a quitté la police de Copenhague et vivote sur son bateau à mener de petites enquêtes pour un ami avocat. 

Quand un grand patron le contacte pour qu’il retrouve son fils, il voudrait décliner mais les problèmes financiers le poussent à accepter. Il va se retrouver plongé dans un monde abominable. Car le fils du millionnaire est devenu grand maître d’une secte particulièrement sordide.

« La secte » de Michael Katz Krefeld, Actes Sud, 23 €

jeudi 16 avril 2020

VOD - « Les éblouis », famille à la dérive



Normalement, le film « Les éblouis » de Sarah Suco devait sortir en DVD la semaine dernière. Corinavirus oblige, on devra se contenter de la version numérique accessible sur l’ensemble des services de VOD. Dommage car le DVD de chez Pyramide devait regorger de bonus dont le court-métrage « Nos enfants » de la jeune réalisatrice. 
Film militant contre l’emprise des sectes sur les familles trop croyantes (ou crédules), « Les éblouis » se garde pourtant de juger ces moutons égarés. Par contre les bergers sont clairement dénoncés. Endoctrinée par le Berger (Jean-Pierre Darroussin) de cette communauté, toute la famille de Camille (Céleste Brunnquell) va se couper du monde pour tout donner au Saint-Esprit. La mère, dépressive (Camille Cottin), comptable sans emploi, se sentant inutile en dehors de son rôle de maman de quatre enfants, va être la première à chercher du réconfort auprès de cette congrégation, mélange de prêtres, de sœurs et de familles.
En novembre dernier, lors de sa sortie en salles, nous avions écrit : « Le film est plus qu’une charge contre ces sectes agissant presque à visage découvert. Il nous permet de comprendre comment ces experts en manipulation parviennent non seulement à s’approprier l’âme de ces hommes et femmes, mais aussi de tous leurs biens matériels. Car à la base, ce ne sont que des escrocs pour qui le bien de leurs disciples compte peu face à leur désir de domination et d’appropriation. » Vous voilà averti.

  

vendredi 10 avril 2015

DE CHOSES ET D'AUTRES - Les aliens aiment le luxe

21 chambres, une piscine, un parc de 4 km² dans un pays plaisant et chaud. Les caractéristiques de ce bâtiment de 132 mètres de long sur 49 de large ressemblent à celles d'une villa commandée par l'un de ces milliardaires qui ne savent plus quoi faire de leur argent. Un détail cependant les différencie : le cahier des charges spécifie que "le toit de la résidence doit avoir une terrasse sur laquelle une soucoupe de douze mètres de diamètre peut atterrir." Soucoupe volante bien évidemment puisqu'il s'agit de la description de ce qui deviendra dans quelques années "l'ambassade terrestre de nos créateurs de l'espace".

Derrière ce projet pharaonique estimé à 37 millions de dollars, on retrouve Claude Vorilhon né fin septembre 1946 à Vichy, plus connu sous le nom de Raël depuis 1973. Cet ancien journaliste sportif affirme avoir été contacté par les extraterrestres Elohim. Depuis, il porte leur message partout dans le monde et développe sa philosophie raélienne, assimilée à une secte. Raël tente donc de bâtir cette ambassade et a lancé plusieurs souscriptions pour récolter les fonds.
Si le choix du terrain n'est pas encore effectué (il attend les propositions des pays intéressés), le désir de tranquillité est impératif. Il est clairement notifié que le bâtiment "doit être construit au milieu d'un parc assurant ainsi le respect de la vie privée tant dans la résidence qu'à la piscine." Les visiteurs aliens sont certainement pudiques. À moins que Raël ne veuille pas être surpris en compagnie de jeunes et jolies disciples par les paparazzis en pleine séance de bronzage intégral...

dimanche 16 décembre 2012

Thriller - Enfant à sauver dans "infiltrée" de Taylor Stevens

Une fillette, prisonnière dans une secte, est l'enjeu de ce thriller d'action de Taylor Stevens, le second dont Vanessa Michal Munroe est l'héroïne

La secte des Elus de Dieu, au centre de ce roman, n'existe pas véritablement. Mais c'est une copie presque conforme de la secte des Enfants de Dieu qui elle sévit toujours. Taylor Stevens, l'auteur, connaît parfaitement cette structure religieuse pour y avoir passé toute son enfance. Elle a réussi à s'en échapper et a certainement beaucoup mis de sa propre histoire dans ce roman saisissant.
Les premières pages d'« Infiltrée » se déroulent au Maroc. Logan, ancien soldat de fortune, va à la rencontre de Munroe, son amie d'armes. Vanessa Munroe, mais elle préfère se faire appeler Michal, file le parfait amour avec un Américain dans un grand appartement à Tanger. Filait plus exactement. De sombres cauchemars agitent ses nuits. Munroe, experte du maniement des poignards, revit ses multiples combats. Efficace, elle tranche les gorges, éventre et tue ses adversaires. Mais si les lieux et les circonstances sont identiques à ses souvenirs, les personnes changent. Ce ne sont plus des « méchants » qu'elle élimine, mais des amis. Des rêves si puissants qu'elle en devient somnambule. Quand elle se réveille, c'est les armes à la main. Au risque de trucider son compagnon...

Libérer Hannah
La venue de Logan pourrait être une solution à son problème. Il lui propose un contrat totalement différent. Il ne pourra pas la payer comme ses riches commanditaires habituels, mais lui demande ce service car il estime qu'elle seule peut remplir la mission. Logan, avant d'être mercenaire, a passé son enfance dans la secte des Elus de Dieu. Une communauté repliée sur elle-même dans différents sanctuaires disséminés un peu partout sur la planète. A sa majorité, il a fait le choix de la fuite. Un retour dans le monde mal vu par les Elus. Ces traîtres sont diabolisés. Et s'ils ont des enfants, ces derniers sont enlevés et cachés dans les communautés.
Hannah, la fille de Logan, a disparu il y a une dizaine d'années. Aujourd'hui elle est presque une adolescente et Logan, à force de recherches, est persuadé qu'elle est en Argentine. Il demande à Munroe de la retrouver, d'infiltrer la secte et d'en extraire Hannah. Une mission quasi humanitaire pour la jeune femme, presque une rédemption. Elle accepte. Bonne occasion pour quitter Tanger, son Américain et les cauchemars...

« Au nom de la justice »
Taylor Stevens dans ce thriller typiquement américain (donc forcément un peu trop manichéen) creuse un peu plus la personnalité de son héroïne. Munroe se reconnaît dans le parcours de ces enfants endoctrinés. En sauver une, c'est un peu se sauver. Longtemps victime de violences, elle s'érige en justicière. Ainsi, quand elle rencontre des amis de Logan à New York pour mettre en place l'opération argentine, une nuit, elle tombe sur une scène de crime. Deux voyous violentent une jeune femme. Incapable de résister, elle intervient. Violemment. « Elle n'était pas surprise que le mal l'attire une fois de plus dans ses bras. Elle éprouvait seulement une rage qui la consumait de l'intérieur, une colère sans bornes face au viol de l'innocence, une poussée sanguinaire qui étouffait les rires et la musique. Les sons ambiants n'existaient plus, seuls comptaient le tambourinement intérieur, l'appel au meurtre, la soif qui ne serait étanchée que quand le sang aurait coulé au nom de la justice. » Ce passage donne l'ambiance générale du roman. Munroe reste une arme de destruction massive. Elle ne fait qu'une bouchée de dix soldats entraînés. Pour elle, tuer est une évidence.
Les scènes d'action sont relatées avec maestria, mais ce roman marque surtout le lecteur par les descriptions du fonctionnement de la secte. Comment un endoctrinement religieux peut modifier des enfants, les transformer en marchandise ou main d’œuvre. Le vrai cauchemar, il est là.
« Infiltrée », Taylor Stevens, Presses de la Cité, 20 €

lundi 24 septembre 2012

Roman - Jim Harrison lance un flic retraité sur les traces d'un gourou

Un policier à la retraite prolonge sa dernière enquête : mettre hors d'état de nuire le gourou d'une secte. Roman américain typique de Jim Harrison.

Une nouvelle fois, Jim Harrison met la vieillesse au cœur d'un roman. Le personnage principal, l'inspecteur Sunderson, vient de prendre sa retraite. Un flic de 65 ans, tenace et opiniâtre. Pourtant « Grand Maître » n'est pas un polar. Au contraire, Jim Harrison a tenu à préciser que c'était un « faux roman policier ».
Cela commence pourtant un peu comme un de ces textes sur l'Amérique profonde et ses dérives. Un gourou a installé une secte aux abords de Marquette dans le Michigan. Comme c'est le secteur de Sunderson, il prend en grippe ce fameux Grand Maître. Mais au moment de le coffrer pour pédophilie, il parvient à s'enfuir. Sunderson, bien qu'il soit à la retraite depuis quelques jours, décide de le retrouver et de l'arrêter. Il n'est pas complètement dupe et sait parfaitement que cette décision est surtout la conséquence de sa peur de l'inaction.

Mona, le matin
Et avec douceur on entre dans la partie psychologique du roman. C'est du Jim Harrison. C'est donc un peu égrillard. On découvre le petit plaisir de Sunderson du matin. Plaisir et culpabilité. La fenêtre de son salon donne directement sur la chambre de sa jeune voisine, Mona, 16 ans. Le matin, en petite culotte, elle fait ses exercices de yoga. Sunderson n'en perd pas une miette. Et se le reproche, encore et encore. « La sexualité ressemblait parfois à un sac à dos bourré de bouse de vache qu'on devait trimbaler toute la journée, surtout pour un senior qui s'accrochait désespérément à ses pulsions déclinantes. » Mona, parfaitement au courant de son petit manège, ne lui en veut pas. Au contraire, elle prend elle aussi beaucoup de plaisir. Normal, l'adolescente est quasiment seule chez elle (mère représentante de commerce) et Sunderson fait un peu office de père de substitution.
Grâce à Mona et sa science de l'informatique (du piratage informatique exactement...) il retrouve la trace du gourou au Nevada. Il décide sur un coup de tête de plaquer le climat rude du Michigan pour la canicule du désert. Cela tombe bien, sa mère s'y est installée pour passer une retraite au chaud. Il retrouve la nouvelle base de la secte. Mais n'est pas très bien accueilli. Caillassé, laissé pour mort, il est sauvé in extremis. Ce n'est que partie remise. Sunderson est vraiment tenace.

Le chant des oiseaux
Durant sa convalescence, il campe plusieurs fois au cœur du désert. C'est une autre constante des romans de Jim Harrison : un rapport quasi charnel avec les éléments. Ainsi, ce réveil au petit matin : « Une profusion de chants d'oiseaux faisait vibrer l'air liquide de l'aube et il eut l'illusion de pouvoir comprendre ce dont ces oiseaux parlaient à travers leurs chants. Les paroles, d'une grande banalité, évoquaient la nourriture, le foyer, les arbres, l'eau, le guet des corbeaux ou des faucons. Il n'y avait là rien d'extraordinaire, et il continua de comprendre les oiseaux jusqu'à ce qu'il tisonne les braises et prépare son café. » D'autres descriptions, tout aussi poétiques, racontent la neige et le blizzard sur les rives du Lac Supérieur.
Alors c'est vrai qu'on est loin du roman policier pur et dur. Certes l'enquête reste en fil rouge mais, à choisir, les rapports compliqués entre Sunderson, son ex-femme et Mona sont beaucoup plus passionnants que cette chasse au gourou.

« Grand Maître » de Jim Harrison, Flammarion, 21 € (Disponible en format poche chez J'ai Lu. Vient de paraître également un recueil de poèmes inédits, « Une heure de jour en moins », Flammarion, 19 €)